Présidentielle 2017 : quid de la compétitivité hors-prix de la France ?
Les grands prétendants au trône de France, le 7 mai 2017, nous disent qu'avec eux la France va enfin retrouver de la compétitivité sur les marchés internationaux. Si la compétitivité prix est assez facile à obtenir, notamment par une baisse du coût des facteurs de production et/ou une dépréciation monétaire, celle hors-prix − dite aussi hors-coût − est un enjeu beaucoup plus difficile.
Définition succincte de la compétitivité hors-prix d'une offre : c'est la compétitivité qui n'est pas due au prix de vente d'un bien ou d'un service, sur un marché concurrentiel.
La recherche d'un tel avantage n'est pas nouvelle. Déjà, en 1942, Joseph-Aloïs Schumpeter (1883-1950)1 écrivait : "Les économistes commencent − enfin − à se débarrasser des œillères qui ne leur laissaient pas voir autre chose que la concurrence des prix. Dès que la concurrence des qualités et l'effort de vente sont admis dans l'enceinte sacrée de la théorie, la variable prix cesse d'occuper sa place dominante. [...]. [...]. Ce n'est pas cette modalité de concurrence qui compte, mais bien celle inhérente à l'apparition d'un produit, d'une technique, d'une source de ravitaillement, d'un nouveau type d'organisation [...]. L'action de cette modalité de concurrence dépasse celle de la concurrence des prix [...].".
Cette compétitivité, très particulière, ressort d'efforts structurels de moyen-long terme. Coûteuse au départ, car elle doit s'inscrire dans les gènes de l'entreprise − voire même ceux du pays −, elle s'installe dans : la qualité, le niveau des technologies et des innovations, le design des produits, les labels obtenus, la marque, le logo, la notoriété… la pertinence quant aux besoins des consommateurs.
Mais, elle aussi gratuite, quand il s'agit de mettre en avant le relationnel et la compétence de ses personnels, la performance… l'écoute du service après-vente.
Autant d'éléments qui fondent, à moyen-long terme, une marque, une renommée, une spécificité, une gamme… érigées en autant d'avantages concurrentiels par différenciation qualitative avec les biens et services des concurrents internationaux.
La compétitivité hors-prix se joue généralement du marché des changes, donc du cours de la monnaie, car les acheteurs étrangers achètent non pas un prix, mais une qualité, un savoir-faire, une technologie, une renommée… une marque. Beaucoup de produits "made in Germany" jouent ce type de compétitivité depuis des décennies !
Les principaux prétendants au trône de France n'ont pas bien compris l'importance de la compétitivité hors-prix d'un bien ou d'un service. Aucun n'en parle. Ils vont au plus facile avec une seule compétitivité : celle du prix.
Pour Marine Le Pen, il faut augmenter les salaires et, dans le même temps, sortir de l'Union européenne et de l'euro pour freiner les importations et disposer d'une monnaie dépréciée − c'est tout et son contraire. Cela montre l'amateurisme des économistes du Front national. Avec eux, c'est le chaos assuré !
Pour François Fillon, il faut à tout prix "réduire massivement les charges sociales et fiscales qui pèsent sur les entreprises". C'est la politique de l'offre, chère aux anti-keynésiens. Politique qui signa, notamment, l'échec économique et social de l'administration Reagan, des années 80. Pour Fillon, c'est comme s'il fallait que le futur "made in France" concurrence le "made in China", le "made in Roumanie"... − c'est un combat stupide et, de plus, perdu d'avance.
Enfin, pour Emmanuel Macron, il s'agit principalement de mettre l'impôt société français au même niveau que celui de la moyenne européenne (25%) afin d'attirer les capitaux et de rétablir la compétitivité fiscale de nos entreprises. C'est bien, mais c'est aussi un peu court. En tout cas, moins incohérent, moins brutal et moins dogmatique que les propositions de ses 2 challengers… tous les 2 (lien 1, lien 2), d'ailleurs, poursuivis par la justice. Eh oui ! nous ne pouvons pas, tout de même, nous boucher le nez en permanence, surtout quand il s'agit de l'élection présidentielle.
Le 23 avril 2017, dans quelques jours, notre choix se portera donc clairement sur Macron !
1. Capitalisme, socialisme et démocratie (Édition Payot, 1984, Paris), 2ème partie, Chap. VII : Le processus de destruction créatrice, p. 118.
Crédit photo : pole-hippolia.org (plus les aménagements de l'auteur : ??, 2017 et le "s" à compétitivité)
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