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Theresa May fragilisée par les électeurs britanniques

« C’était un pari et Theresa May l’a perdu. Cela pose la question de sa perspicacité en politique. » (Mike Finn, politologue et professeur à l’Université de Warwick).

Tout le monde, à droite comme à gauche, aurait voulu la voir jeter l’éponge. Peine perdue ! La Premier Ministre Theresa May a annoncé ce vendredi 9 juin 2017 qu’elle allait former un nouveau gouvernement britannique après avoir rencontré la reine Élisabeth II.

Les journaux ont beau parler de "déroute", de "défaite", de "pari perdu", les conservateurs ont quand même gagné les élections législatives avec 42,4% des suffrages exprimés. Certes, ils ont perdu leur majorité absolue (326) de justesse, en obtenant seulement 317 sièges sur 650 (perte de 13 sièges). Petites parenthèses : le Royaume-Uni a plus de députés que la France qui, pourtant, voudrait en réduire le nombre.

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À quelques jours de décalage, le Royaume-Uni et la France votent pour leurs élections législatives. Ce jeudi 8 juin 2017, les élections législatives au Royaume-Uni ont été anticipées par la Premier Ministre Theresa May : annoncée le 18 avril 2017, cette anticipation fut validée le lendemain à la Chambre des Communes par 522 députés contre 13 et la dissolution de cette chambre a eu lieu formellement le 3 mai 2017.

Ces élections ont fait suite aux précédentes datées du 7 mai 2015. L’objectif de ce renouvellement avec trois ans d’avance était d’obtenir une très large majorité en faveur des conservateurs pour avoir les "coudées franches" dans les négociations pour un Brexit "dur". Le démarrage de ces négociations avec l’Union Européenne devait en principe avoir lieu le 19 juin 2017.

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La très mauvaise campagne de Theresa May, particulièrement arrogante, ainsi que l’élan en faveur d’un Parti travailliste très axé à gauche avec son leader Jeremy Corbyn (élu le 12 septembre 2015 à la tête du parti) ont probablement joué en défaveur des conservateurs. Les travaillistes n’ont recueilli cependant que 261 sièges, loin de la majorité (gain de 29 sièges), avec 40,0% des suffrages exprimés.

On a reproché le très faible charisme de la Premier Ministre : « Theresa May a la chaleur, l’humour, l’éloquence et le charme d’un congélateur (…) rempli à ras bord de crêpes Findus en état de décomposition. » selon Rod Liddle, le chroniqueur de l’hebdomadaire politique conservateur "The Spectator". Le député conservateur Nigel Evans n’a pas été tendre avec Theresa May : « Nous avons saboté notre propre campagne (…), nous ne nous sommes pas tiré une balle dans le pied, mais dans la tête ! » (9 juin 2017).

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On a aussi reproché le rétropédalage de Theresa May sur le financement des soins aux personnes âgées, initialement à l’origine d’une nouvelle taxe qui a fait scandale et qui fut finalement abandonnée. La députée conservatrice Ann Soubry (réélue) a bien failli être battue à cause de cela : « Theresa May a raté sa campagne et encore, je suis gentille. Le message véhiculé a été consternant et le revirement sur les soins aux personnes âgées une catastrophe. ».

Il y a eu un front renversé dans les attentes sécuritaires de l’électorat. Les attentats (trois en trois mois) n’ont pas non plus aidé Theresa May alors que les conservateurs auraient dû jouir d’une volonté d’assurer la sécurité dans le pays. Au contraire, pointant du doigt la réduction de 20 000 postes de policiers en six ans pendant que la Premier Ministre était Ministre de l’Intérieur, Jeremy Corbyn a même proposé d’augmenter de 10 000 postes le nombre de policiers alors que les conservateurs ont refusé toute surenchère dans ce domaine.

Les autres partis ont récupéré les miettes du gâteau électoral : le parti nationaliste écossais (SNP) de la Premier Ministre écossaise Nicola Sturgeon s’est effondré de 56 à 35 sièges (3,0% des suffrages exprimés) et les centristes du Parti libéral démocrate ont à peine progressé avec 12 sièges (gain de 4 sièges) et 7,4% des suffrages exprimés. L’UKIP n’a obtenu aucun élu, après s’être démobilisé une fois le Brexit voté l’an dernier. Avant le scrutin, Nicola Sturgeon avait annoncé qu’elle était prête à faire alliance avec les travaillistes pour former une nouvelle majorité.

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Theresa May ne peut pas faire alliance avec les libéraux démocrates (au contraire de David Cameron en 2010) car ces derniers, pro-européens, sont partisans de l’organisation d’un second référendum sur le Brexit. Elle pourra en revanche trouver les alliés indispensables auprès du Parti unioniste démocrate irlandais (DUP) d’Arlene Foster qui a obtenu 10 sièges (0,9% des suffrages exprimés).

La grande affaire reste évidemment les négociations pour le Brexit et tout semble indiquer que le scrutin du 8 juin 2017 ne bouleversera pas la situation, si ce n’est qu’il les rendra plus difficiles car l’accord final devra être ratifié par les députés (selon la décision de la Cour Suprême du Royaume-Uni du 24 janvier 2017).

Contrairement aux deux scrutins précédents (2010 et 2015), il y a eu une rebipolarisation du paysage politique entre conservateurs et travaillistes (en 2010, les libéraux démocrates s’étaient imposés comme troisième parti ; en 2015, les nationalistes écossais, piochant essentiellement dans l’électorat travailliste), et paradoxalement, il n’y a pas eu pour autant de majorité absolue en sièges.

Le scrutin majoritaire à un tour (le candidat placé en première place est élu) a pourtant une logique majoritaire beaucoup plus efficace que le scrutin majoritaire à deux tours pratiqué en France (le scrutin britannique avantagerait de nombreux candidats du FN en France).

La différence entre les deux pays, c’est que le paysage politique évolue en ce moment vers un recentrage des partis, que ce soit de droite (LR évacue la politique du ni-ni et se rapproche du Président Emmanuel Macron) ou de gauche (certains candidats du PS préfèrent évoquer leur proximité avec la majorité présidentielle à assumer leur appartenance socialiste).

Au contraire, les deux grands partis britanniques ont durci leur ton respectif : les conservateurs se sont très éloignés des centristes libéraux démocrates (opposés au Brexit) et les travaillistes, loin des positions de Tony Blair, ont repris des positions très à gauche avec Jeremy Corbyn.

Pour donner quelques comparaisons, Jeremy Corbyn pourrait être assimilé à Bernie Sanders aux États-Unis, voire à Jean-Luc Mélenchon en France, et l’actuel Ministre des Affaires étrangères, conservateur, Boris Johnson, est régulièrement comparé à Donald Trump. Le 9 juin 2017, "The Economist" a constaté : « M. Corbyn a redéfini les paramètres du possible. Il a démontré que le Labour peut réussir en défendant ce à quoi il croit vraiment plutôt que de tendre vers le centre. (…) L’ère Blair est véritablement arrivée à son terme le 8 juin. ».

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Theresa May, qui fut désignée Premier Ministre du Royaume-Uni le 13 juillet 2016 à la suite de l’échec du référendum sur le maintien du pays dans l’Union Européenne organisé le 23 juin 2016 par son prédécesseur David Cameron, a lancé la procédure formelle de Brexit seulement le 29 mars 2017. Le Royaume-Uni et l’Union Européenne n’ont donc que jusqu’au 29 mars 2019 pour faire aboutir les très nombreuses négociations aboutissant au retrait. Le négociateur européen est l’ancien ministre français Michel Barnier, nommé le 27 juillet 2016 "négociateur en chef de l’Union Européenne" et l’ancien Premier Ministre belge Guy Verhofstadt a été désigné par le Parlement Européen comme le négociateur du Brexit pour tout ce qui concerne le Parlement Européen.


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (09 juin 2017)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Les élections législatives britanniques du 8 juin 2017.
L’attentat de Manchester du 22 mai 2017.
Les trente ans du Traité de Rome.
Édouard VIII et George VI.
Churchill et l’Europe.
Theresa May nommé Premier Ministre le 13 juillet 2016.
Peuple et populismes.
Intervention de Bruno Le Maire sur le Brexit le 28 juin 2016.
Le Brexit en débat chez les députés français.
L’Europe n’est pas un marché.
L’Union Européenne, élément majeur de stabilité mondiale.
Terre brûlée ?
Brexitquake.
Boris Johnson.
To Brexit or not to Brexit ?
L’euro.
Le conflit syrien.
Les réfugiés syriens.
La construction européenne.
Jo Cox.
Élisabeth II.
Un règne plus long que celui de Victoria.
Philip Mountbatten.
Vive la République !
David Cameron.
Margaret Thatcher.

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1 réactions à cet article    


  • zygzornifle zygzornifle 10 juin 2017 10:41

    En May fait ce qu’il te plait .....

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