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Commentaire de viking

sur Playlist de quelques poèmes chantés


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viking 12 juin 2009 02:34

Ballade des Dames du temps jadis de François Villon.
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J’interviens rarement sur tes files mais aujourd’hui je veux en faire une exception non pas pour t’accabler à la manière des Renève et consorts mais parce que j’ai trouvé ton choix avec James Ollivier un peu cucu la praline. 

En effet je trouve qu’il chante mal les textes de François Villon, d’abord avec sa voix artificiellement et volontairement doucereuse ce qui ne sied pas avec un Villon plus forban que poète de basse-cour car même quand il était amoureux, il devait prendre parfois la poudre d’escampette pour ne pas être jeté en prison ou pendu au gibet. Il ne survivait qu’en fréquentant les voyous et qu’en effectuant de petits larcins pour se nourrir. A l’occasion, il donnait le coup de poing. Il avait blessé un de ses camarades de classe comme lui clerc, ce fut un fait pour lequel il fut condamné… il était donc costaud. 

Il ne pouvait donc parler d’amour qu’avec nostalgie ce qui n’apparaît pas dans l’interprétation de James… dés la première strophe le tempo est donné.

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Dites-moi où, n’en quel pays,
Est Flora la belle Romaine,
Archipiades, ne Thaïs,
Qui fut sa cousine germaine,
Echo, parlant quant bruit on mène
Dessus rivière ou sur étang,
Qui beauté eut trop plus qu’humaine ?
Mais où sont les neiges d’antan ?
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Au moyen age la négation pouvait s’écrire seulement qu’avec le « ne » ce que nous pouvons traduire par un « ni » comme ainsi :

Dites-moi où, ni en quel pays,
Est Flora la belle Romaine,
Archipiades, ni Thaïs,

Quant à Archibiades ( prononcer le S) au moyen age on le prenait pour une femme, de toutes façons, il lui invente une parenté avec Thaïs qui était le nom d’une femme symbolisant la petite vertu. Il y a donc une connotation érotique là-dedans. Nous sommes toujours dans l’évocation du rêve avec cette formulation « Echo, parlant quand bruit on mène » Très fort ici, le petit Villon. Chacun sait que l’écho n’est que le bruit que nous faisons et qui nous revient peu après. Autrement dit, je m’invente une image et je la contemple comme si elle était réelle…. Et le rêve se termine par un coup de conscience « Mais où sont les neiges d’antan » C’est vrai la neige est toujours plus belle quand nous ne souffrons plus du froid. Nous sommes dans la nostalgie et la tristesse des jours heureux que nous perdons en vieillissant.

La tragédie va apparaître à la deuxième strophe.

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Où est la très sage Héloïs,
Pour qui fut châtré et puis moine
Pierre Esbaillart à Saint-Denis ?
Pour son amour eut cette essoine.
Semblablement, où est la roine
Qui commanda que Buridan
Fût jeté en un sac en Seine ?
Mais où sont les neiges d’antan ?
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La nostalgie est à nouveau introduite par la question « où est… » qui évoque quelque chose qu’on a connue et là-dessus, il introduit l’idée de la sagesse. T’as vu, la Taverne, comment la poésie apparaît en quelques mots seulement. Et il insiste avec des idées de sacrifice en parlant d’un type qui fut châtré pour elle en se faisant moine. Nous sommes donc dans le tragique.

Toutes nos émotions ont un degré de sensation qui peut augmenter ou descendre selon nos humeurs. Dans la troisième strophe, il y met un degré de plus en évoquant une grandeur royale avec Berthes au grand pied qui était la femme de Charlemagne et la reine Blanche… allusion aux chansons de geste normandes et bretonnes ? Hé oui, la taverne le Roi Arthur, ce n’est pas entièrement breton, c’est aussi normand ou du moins, parce que mis à la mode par eux pour opposer les bretons aux anglo-saxons. Ensuite il évoque aussi le supplice de Jeanne d’Arc ce qui nous ramène à une idée de grandeur d’âme et de respect.


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La roine Blanche comme un lis
Qui chantait à voix de sirène,
Berthe au grand pied, Bietrix, Aliz,
Haramburgis qui tint le Maine,
Et Jeanne, la bonne Lorraine
Qu’Anglais brûlèrent à Rouen ;
Où sont-ils, où, Vierge souveraine ?
Mais où sont les neiges d’antan ?
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Ce poème n’est donc pas romantique. C’est une tragédie. L’interprétation de James ne vaut donc rien. 

Cet interprète fut un mauvais choix. En voici un meilleur avec une très belle interprétation et une musique si digne qu’un François Villon ne l’aurait pas reniée.

La ballade des pendus par Serges Reggiani.



Encore un dernier mot la Taverne pour te montrer la malice de François Villon. Après avoir évoqué le nom d’une femme symbolisant l’érotisme, il achève son poème en regrettant les Vierges souveraines. Après avoir parlé de Jeanne d’Arc, il faut quand même être audacieux. Il n’a quand même pas osé y mettre la Sainte Vierge.



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