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Commentaire de René Job

sur Buffet, Royal, Voynet, présidentielles de 2007 et verrouillage de la politique française


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René Job (---.---.132.6) 3 décembre 2006 15:57

En réalité aux XVIIème et XVIIIème siècles « être libéral » signifie être ouvert sur les idées progressistes, y compris sur les idées sociales. Celui qui est « libéral » a déjà en lui l’idée forte que l’autre quelque soit sa condition dispose en lui de la capacité créatrice propre à l’humain qui ne demande qu’à s’épanouir. L’idée d’égalité est donc une idée qui repose sur la reconnaissance d’un potentiel humain commun à tous (éduquer, c’est développer-réaliser cette potentialité). Ce qui suppose qu’auparavant, chacun a fait un chemin vers l’autre, vers celui qui n’est pas de sa « caste » : d’où l’idée de « fraternité ». C’est lorsque par l’échange, on a reconnu qu’autrui était aussi bon et/ou intéressant que soi-même, qu’on a reconnu ses potentialités gâchées qu’on fait l’expérience de la « fraternité ». Pour cela, il faut déjà être soi-même éduqué et conscient de ses propres limites. On aperçoit mieux alors ce que l’autre pourrait ou aurait pu si éduquer. On aperçoit mieux aussi les bienfaits potentiels perdus pour la société.

L’égalité et la fraternité naissent dans la fréquentation des autres par delà les différences sociales.

Du coup l’ennemi de tous devient l’ordre social en place, c’est-à-dire l’ordre politique. Si cet ordre se veut figer, la révolution est la seule issue pour établir le nouveau lien social qui existe de fait entre les hommes.

« Etre libéral » au XVIIIème siècle est quelque chose qui équivaut politiquement aujourd’hui à « être de gauche ».

Toutes les doctrines de « gauche » sont nées de la critique de la mise en oeuvre historique du libéralisme classique.

Elles sont des correctifs forts au libéralisme classique. Car le libéralisme classique repose sur un atomisme psychologique. Parfaitement exprimé par des gens comme Rousseau, Hume ou Kant : l’idée-force étant que toutes les raisons sont égales entre elles (biologiquement) : elles fonctionnent de la même façon. Elles sont organisées de la même façon. Seule l’instance de réflexion les différencie en fonction du vécu individuel. C’est d’ailleurs un des principes forts de la science : il faut du commun, du stable dans les structures supposées pour faire de la science sinon c’est impossible.

Dans les faits l’absence de réflexion sociale à l’époque ne permet pas de comprendre clairement et distinctement que les déterminations sociales l’emportent sur les déterminations individuelles. On raisonne toujours à partir d’une conscience individuelle idéalisée ; un peu comme l’élève parfait de Rousseau, Emile qui n’a d’autre existence que l’imaginaire de l’auteur.

Ce qui dans les faits entraîne : un libéralisme concentré et féroce à l’égard de l’humain. Au lieu de libérer, il aliène en affamant. Quelques individus suivant leur « raison » s’approprient toute chose et imposent leurs lois.

Donc pour reprendre l’idée initiale : un libéral aujourd’hui est plus proche d’un courant modéré de gauche que d’un courant de droite. Puisque les libéraux de la place du commerce sont en fait des capitalistes au sens dur. Ils n’ont d’autres buts que de tout s’approprier, y compris les humains. Les conditions de vie de tous sont des objets de puissance : eau, nourriture, énergie, air (bientôt). Ces gens mettent la planète et tout ce qu’elle contient en coupe réglée. Tout en proposant à chacun de participer à sa propre aliénation en lui faisant croire qu’il peut en avoir une fraction.

Le monétarisme est ce courant « libéral » qui poursuit dans la lancée de l’atomisme psychologique. Ça permet de s’appuyer sur les égos. De ne susciter qu’eux en chacun et d’orienter la réflexion vers la raison calculante avec au centre la notion « d’intérêt ». Le monde et les autres deviennent des objets de calculs. Ils sont des choses à exploiter. Et comme tous participent activement de cette même logique : l’erreur commune devient fait culturel, habitude de pensée. Tous nos réseaux conceptuels ordinaires passent par ces noeuds de réflexion. Les solutions envisageables sont donc toujours dans la sphère de l’intérêt de la minorité.

Mon propos ne se veut pas « précis ». C’est juste une esquisse pour indiquer comment on peut être libéral et de gauche.

Le social-libéralisme est un leurre : on est dans la perspective monétariste donc individualiste.

Les socialistes sont :

1/ Le social-démocrate est dans la perspective de réformer progressivement le système à l’avantage de tous sans recourir à la violence. Le point de vue tient compte de la totalité (les déterminismes sociaux) y compris l’existence de groupes sociaux forts qui désirent s’approprier toutes les richesses existantes, produites et à produire. C’est donc un mouvement de composition.

2/ Le socialo-communiste est dans le même point de vue que le social-démocrate mais il ne croit pas à la composition avec les groupes minoritaires qui tiennent les commandes. Il croit donc que la réforme ne conduit à rien d’autre qu’à valider les positions des plus forts. Il croit donc dans la révolution. Il se méfie fortement du social-démocrate car il voit en lui une sorte d’ennemi de l’intérieur.

3/ L’anarchiste croit que c’est l’existence de l’Etat qui générère tous ces problèmes. Il pense que la suppression de l’Etat supprimera l’instance d’oppression suprême. Le reste se réglant entre les individus dans la vie quotidienne. L’anarchiste est donc lui aussi dans une forme d’atomisme psychologique. Mais, c’est conscient. C’est sa façon de se défendre des violences sociales. Nous le sommes tous un peu par la force des choses. Nous compensons le déficit de solidarité ou non par des comportements individuels plus généreux sans calcul politique particulier.

Pardon pour la caricature. Mais, ça aide.


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