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Commentaire de Thorendal

sur Le scandale du Musée des Confluences de Lyon


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Thorendal 10 juin 2010 19:52

Le canard se déchaîne

 

Comme souvent dans ce type d’article, l’auteur s’appuie à la fois sur des chiffres qui, certes, sont la plupart du temps justes, tout en manquant de la rigueur requise dans les propos qui les accompagnent, voire fait parfois des amalgames regrettables pour ne pas dire douteux.

Par exemple en disant qu’on rajoute 178 m d’€ à la facture. Si le chiffre est exact, l’information est fausse. 178 m d’€ est en fait le chiffre actuel de la facture du projet pour le Département du Rhône mais comprend plusieurs m d’€ déjà dépensés et surtout des budget connexes (aménagements des abords, parking, parc, etc.) qui n’ont rien à voir directement avec le bâtiment. Or le coût de départ annoncé n’a toujours concerné que le bâtiment pour la bonne est simple raison, qu’à l’époque le Département négociait avec les autres collectivités les aménagements connexes. 

Parfois certains journalistes rajoutent même dans le giron du Département le coût de la ligne de tramway qui passera devant le musée alors que c’est une dépense du Grand Lyon et non du Département.

 

Ensuite, l’information est lacunaire, ce qui permet toutes les interprétations et surtout d’induire le lecteur en erreur. Prenons par exemple, le prix de l’acier qui a flambé et qui au final rallonge la facture. Je rappellerais que cette flambée des prix ne touche pas seulement ce projet et le Département du Rhône… Tous les chantiers du Monde ont été obligés de faire avec.

 

Puis quand on compare le coût de ce genre de construction, pour des projets de musées similaires, et bien on se rend compte que le prix n’a rien d’exorbitant. 150 m d’€ par exemple pour le Louvre Lens dont la construction commence tout juste et ne concerne aujourd’hui et sur le papier que le coût de construction du contenant. C’est-à-dire qu’il faudra y rajouter le coût du contenu tous les coûts annexes des architectes des expositions, des aménagements techniques, etc.

Au final, le Louvre Lens devrait coûter autant que le Musée des Confluences, si ne n’est pas plus. Le Département du Rhône, à la différence, lui, ne cache pas une partie des budgets.

 

Prétendre que l’on a dépensé 61 m d’€ pour un terrain vague est plus que tendancieux. C’est d’une part mentir, et cela, même si on se s’intéresserait qu’à la construction. Car ce chiffre comprend la réhabilitation du site, aménagements, dépollution, émoluments de la S.E.M., bureaux d’études, architectes, etc., etc. etc. Ce prix comprend surtout la construction, qui elle n’est pas virtuelle, de ce que le journaliste ne peut pas voir sur le terrain : les fondations : 318 pieux de 12 m à 32 m de profondeur…

Enfin, si on s’intéresse à l’ensemble du projet, car un musée ce n’est pas qu’un unique bâtiment, c’est aussi un projet culturel et en l’occurrence + de 6000 m² d’expositions, les 61 m d’€ comprennent aussi, par exemple, la prestation sur plusieurs années d’équipes d’architectes (pas ceux du bâtiment, d’autres) qui travaillent sur les expositions, des Assistants à la Maîtrise d’œuvre, etc.

 

De plus, en donnant un chiffre HT (chiffre de 85 m d’€) l’auteur insinue insidieusement que la facture TTC serait plus élevée. Cela est de la pure manipulation car les collectivités publiques récupèrent la TVA et ça tout le monde le sait…

 

Enfin, l’article ne dit pas que l’investissement dans ce bâtiment n’est pas payé par l’impôt mais en totalité par la vente d’actifs (pour 137,12 m d’€ ) dont des actions de la C.N.R. que le Département détenait et a vendu pour se mettre en conformité avec la réglementation européenne, et par la vente d’une partie de son Patrimoine immobilier dont elle ne se sert pas (terrains à Corbas, Ternay ou La Part-Dieu, des villas à Saint-Cyr, une grande propriété à Ecully , plusieurs dizaines d’hectares à Saint-Hilaire du Touvet : le complément est évalué à 38 M €, soit au total 175,12 m d’€).

 

Le Département vend donc de l’immobilier qui ne lui sert à rien ou de l’actif qu’il n’a plus le droit de détenir pour investir dans de l’immobilier qui permet de préserver et présenter aux publics des collections patrimoniales. Les présenter et les préserver et pas seulement pour les habitants du Rhône…

 

Enfin, pour ceux qui prétendent qu’il aurait mieux value investir dans l’ancien bâtiment : une pour toute : IL N’APPARTIENT PAS AU DEPARTEMENT mais à la ville de Lyon, c’est donc impossible.

 

De plus, si le Département avait décidé de stopper le projet, pourquoi personne n’explique qu’alors il lui aurait fallu dénoncer tous les contrats passés et dédommager tous le monde. Ce qui, au final, aurait coûté presque autant et pour rien ! Cela n’a aucun sens.

 

Je trouve quelque part triste qu’on ne parle que du bâtiment et jamais du contenu, projet culturel et collections (plus de 300.000 objets).

 

Pour ceux qui avancent le coût soit disant exorbitant. Est-il si scandaleux qu’une collectivité investisse des fonds publics dans un musée dont le rôle est de montrer des collections patrimoniales, de diffuser des connaissances, et de conserver des objets rares pour les générations futures ? Est-ce si scandaleux pour une collectivité dont la part du budget alloué à la culture ne représente même pas 4 % du budget général (et dans la culture il n’y a pas que le Musée des Confluences, il y en a 2 autres, il y a les nuits de Fourvière, la bibliothèque départementale, une partie du financement de la biennale de la danse, etc.) ?

En d’autres termes, pour une collectivité comme le Département du Rhône ce n’est pas aussi important que le chiffre, seul, isolé de tout contexte, ne laisse paraître.

Et ça, c’est peut-être difficile à comprendre sans avoir un certain recul.

Mais au-delà de ce constat, je mettrais en parallèle, une troisième et dernière question : ces mêmes personnes ne trouvent pas plus scandaleux le financement public d’un grand stade de foot à Décines à hauteur de 300 m d’€ pour un club de foot privé, que d’investir dans la pérennité de notre patrimoine culturel, patrimoine qui, au passage, appartient à toute l’humanité et pas seulement aux rhodaniens.

Et tout cela, pour que des spectateurs aillent voir des joueurs, qui gagnent en un mois ce qu’eux ne gagneront pas en une vie, taper dans un ballon ! 

 

Pour ma part, je préfère que mes impôts financent un musée qu’une entreprise privée du foot.

 

Enfin, nous sommes en démocratie. Et si nous ne sommes pas content des choix de nos élus, alors exprimons-nous dans les urnes. Car le Département n’a pris aucun électeur en traître, le projet était annoncé et faisait parti du programme électoral de son président.

 

Pour finir, je m’étonne du discours qui consiste à la fois à prôner la suppression de l’impôt, et à trouver, dans le même temps scandaleux de dépenser de l’argent pour un musée. N’est-il pas démagogique de feindre de ne pas comprendre que l’un ne va pas sans l’autre. On est bien évidemment libre de penser qu’une collectivité n’a pas à dépenser nos impôts dans un musée. Mais devrions-nous rêver alors que le Musée des Confluences aurait put être financé par Monsieur Aulas ? J’en doute.


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