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Commentaire de Anne-Laure Théato

sur L'extraordinaire histoire d'amour entre Dieu et l'humanité


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Anne-Laure Théato 26 août 2010 20:27

Monsieur,

À chaque fois que je lis vos articles, une question s’impose à moi : avez-vous entendu parler de l’analyse ou de l’exégèse historico-critique des textes bibliques, pratiquée aujourd’hui en majorité par les Églises catholique romaine (pas les traditionalistes genre Fraternité Sacerdotale Saint Pie X) et protestantes (il faut cependant en exclure certaines composantes évangéliques partisanes de l’opinion selon laquelle la Bible ne se trompe pas et ne se contredit pas) ?

Cette méthode a donné des résultats, notamment sur la compréhension de l’Ancien Testament. Je m’explique sur les points que vous avez mis en exergue :

- les récits mythologiques de la Genèse. Il est désormais admis par la majorité des biblistes sérieux que ces récits ne reflètent en rien la réalité historique. Bien plus, les influences babyloniennes ont été prouvées (cf. le Nouvel An babylonien avec la légende de Marduk).
- les textes de loi. Ces textes sont inspirés de deux sources : Babylone, encore une fois, et l’Égypte. Si vous reprenez des textes des cultes de Baal et autres (en ougaritique), vous trouverez les mêmes termes extrêmement sanglants et menaçants.

Pourquoi une telle influence babylonienne : parce qu’il est acquis que l’Ancien Testament a été en partie rédigé (puisqu’on distingue pas moins de quatre couches textuelles, quatre modes d’écriture suivant les écoles, si vous préférez) très tardivement, lors de l’exil des royaumes de Juda et d’Israel (l’existence de ces deux royaumes étant prouvée) à Babylone, donc, pour donner une fourchette large, de -700 à l’ère chrétienne. Le canon juif de l’Ancien Testament n’a été clôturé qu’au 2° siècle de notre ère (si on prend l’hypothèse du canon de Jamnia).

Devant l’importance de la méthode historico-critique, qui reste la méthode la plus répandue de l’exégèse moderne, les croyants ont été obligés, par la force des choses, de considérer que la Bible n’était nullement un livre d’histoire, de biologie, de géographie, mais un livre qui pouvait nourrir la foi, donc, pas la science. Quant à ces textes violents dont vous parlez, ils sont aujourd’hui vus comme un témoignage sur la manière dont la violence était capable de s’installer dans la relation qu’une nation tentait d’avoir avec son Dieu (au début, le judaïsme est avant tout une religion nationale, ne l’oublions pas). Il y a des passages violents également dans les psaumes, dans les évangiles. C’est normal : la Bible est écrites par des hommes, et certainement pas par Dieu. La Bible parle de l’humanité, avec tout ce que ça comporte comme comportements honteux (récits de viols, de guerres, d’adultères). La Bible parle aussi d’une vision possible de Dieu, permettant de transcender la vie humaine. Le reste, y croire ou pas, c’est une question purement personnelle et individuelle.

En espérant avoir apporté ma pierre au débat, cordialement,

Anne-Laure Théato

PS : je suis croyante, mais persuadée qu’on peut avoir un discours scientifique sur la Bible et la religion, voire critique, cela ne me dérange pas.


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