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Commentaire de MUSAVULI

sur Guerres Rwanda-Congo : Guerres de diversion pour pérenniser l'impunité


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MUSAVULI MUSAVULI 30 juillet 2012 04:49

Cher Louphi,


Je partage tout à fait votre propos sur l’impérialisme des puissances occidentales et ses répercussions tragiques sur les antagonismes ethniques en Afrique. Je suis toutefois réservé sur la fixation que vous semblez maintenir sur la France. Je ne sais pas ce que la France a exactement fait au Rwanda, autre que les informations de Kigali et de Paris que j’essaie de recouper. Mais dire que Laurent-Désiré Kabila aurait été assassiné par un agent secret français, c’est tellement gros que j’ai du mal à y croire. Laurent Kabila qui venait de se brouiller avec les Rwandais et les Ougandais, demandait justement l’aide de la France alors que Kagamé passait son temps à accabler la France. Les Français étaient trop contents de retrouver enfin quelqu’un qui leur tend la main dans cette région où ils venait de perdre pied. Qu’est-ce qui les aurait motivé à assassiner Laurent Kabila ? Non, mon cher, je crois vraiment que vous devriez vérifier vos sources. J’ai plusieurs versions sur cet assassinat, mais c’est la première fois, depuis 11 ans que j’apprends que la France pourrait figurer parmi les auteurs du crime. 

Quant aux critiques que vous formulez à l’égard de l’ONU, la CPI, les ONG, je crois rêver. Les autorités rwandaises se sont toujours appuyées sur ces organismes internationaux pour légitimer leurs actions. Le Rwanda serait-il à présent en conflit avec l’ONU, les ONG, la CPI ? Eh bien, si un gouvernement se met à dos tout ce beau monde, c’est qu’il a quelque chose à se reprocher. Le régime de Kigali devrait commencer sérieusement à s’inquiéter puisqu’on ne devient pas la bête noire de l’ONU, de la CPI et des ONG en se conduisant comme le Dalai Lama.

Vous abordez également la question du possible « double génocide ». C’est un débat délicat mais qui peut être abordé avec sérénité en examinant chaque massacre commis par les troupes du FPR au Congo. Lorsque les victimes ont été choisies en raison de leur origine ou de leur appartenance à un groupe, et que la tuerie a été planifiée, il s’agit bel et bien d’un cas de génocide selon le droit pénal international. Et des cas de massacres comme ça, mon cher Louphi, vous en trouvez partout où l’armée rwandaise est passée au Congo. Il faut juste préciser qu’il ne suffit pas qu’un acte réunisse les critères de génocide. Encore faut-il que l’environnement politique et médiatique soit disposé à l’entendre de cette oreille. Ainsi le génocide des Juifs a été reconnu au Procès de Nuremberg, plusieurs années après leur martyre. Mais les négationnistes sont toujours là pour essayer de remettre en cause cette qualification. Le génocide des Arméniens a été reconnu très longtemps après les évènements dans l’ancienne Anatolie. Même le génocide des Tutsis a eu besoin de la victoire du FPR pour être reconnu. Je peux vous garantir que si l’ancien régime rwandais avait remporté la guerre, personne, malheureusement, ne parlerait du génocide des Tutsis. Aujourd’hui, les Hutus et les Congolais qui ont subi les ravages de l’armée rwandaise au Congo ne bénéficient pas encore d’un environnement politique et médiatique assez favorable, même pour raconter un seul récit. Mais ça viendra, j’en suis certain, puisqu’à l’ère du numérique, tout est là et ne demande qu’à être lu. Les Congolais avec leurs milliers d’ONG ont constitué une énorme banque de données dans laquelle ont été notés avec précision les cas de massacre, les circonstances, les noms des victimes, l’âge, les commandants des opérations. Comme vous le savez, les rapports des ONG sont vérifiés par des partenaires étrangers beaucoup plus professionnalisés et qui financent les ONG locales. Tout est donc là. Vous devriez vous renseigner.

Enfin, vous me parlez des autorités françaises qui devraient être poursuivies par la CPI pour leur possible implication dans le génocide. Pourquoi pas ? Si vous avez des éléments précis à l’encontre de l’une ou l’autre des personnalités françaises, vous pouvez les déposer au bureau du Procureur de la Cour Pénale Internationale. Vous pouvez aussi saisir la justice française.

En tant que militant des droits de l’Homme, je ne peux que souscrire à la démarche. 

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