Dernier essai d’introduction des
nécessaires alinéas !
Ma réponse forcément synthétique
s’adresse également àaberlainnard, à Jr Bupp et à quelques autres dont je sais qu’ils en feront
un réel profit. En tout cas, ils méritent que je prenne la peine de m’efforcer
de les éclairer.
Il y a la raison structurelle que
je développe plus loin et une raison empirique à la limitation de 30 %. Cette
dernière raison n’est autre qu’une modélisation dont j’ai eu connaissance,
exécutée in situ par des spécialistes sur l’ile de Crète… ou de Malte, je ne me
souviens plus très bien. J’attire au passage votre attention sur le fait que le
Japon annonce sa sortie totale du nucléaire pour 2030, en prévoyant un mix
énergétique national, à cette échéance, dans lequel les renouvelables
n’entreront, comme par hasard, que pour 30 % ; tout le reste étant
naturellement assuré par le fossile. Par ailleurs, outre que je suis prêt à
prendre les paris sur la non exécution intégrale de cette résolution… et donne
RV à tout le monde en 2030 ( !), vous n’aurez pas manqué de noter que la
deuxième puissance économique et technologique du monde ne sait pas programmer
sa sortie totale du nucléaire en moins de 20 ans. Et Belges, Suisses, Français
et autres Allemands prétendraient, eux, à une sortie quasi immédiate ?
Présomptueux et grotesque ! Au demeurant, grotesques les Allemands le sont
déjà dans les faits sous les yeux du monde.
Mais, revenons aux différents
volets de la raison structurelle à cette limitation.
Tout d’abord, la réserve primaire
de puissance destinée à maîtriser la fréquence. Dans notre pays, elle doit être
constamment d’au moins 3 à 4 % de la puissance totale en service. Par ailleurs,
du fait que les forces électromagnétiques rendent physiquement solidaires tous les
groupes débitant sur un même réseau, chacun apporte sa contribution
permanente à ce réglage primaire, dans
la limite d’une capacité dimensionnelle s’exprimant en MW/Hz. Celle d’un groupe
nucléaire de 900 MW est par exemple de 450 MW/Hz et celle de l’ensemble du parc
français peut dépasser 10000 à 15000 MW/Hz. Où l’on voit que la
disparition de Fessenheim nous prive d’une participation au réglage primaire de
900 MW/Hz.
Derrière ce réglage primaire, vient l’indispensable et stabilisateur
réglage secondaire, fourni par les groupes thermiques (y compris nucléaires) à
raison de 5 % à 10 % de leur puissance nominale unitaire et jusqu’à 25 % de
cette même puissance pour les groupes hydrauliques. Lors de certaines pointes
d’hiver, la demande nationale d’un tel réglage peut atteindre 3 à 4 GW. Il ne vous surprendra pas que la perte
des 90 MW de réglage secondaire de Fessenheim sera
intégralement compensée par de la production fossile.
Enfin, dans des situations hivernales tendues, les deux
réglages précédents peuvent ne pas parvenir à résorber totalement les écarts de
transit de puissance d’interconnexion, ainsi que les écarts de fréquence : la réserve secondaire est épuisée, la réserve primaire devient dangereusement insuffisante. Pour
reconstituer au mieux des réserves indispensables à la sécurité du système, une provision supplémentaire de
puissance est alors mobilisée, apte à entrer en action en moins de 20 minutes,
bien entendu, à moindre coût : c’est la réserve tertiaire ou réserve
tournante. On y trouve les
moyens de production thermiques classiques, notamment les turbines à combustion
(TAC) et à gaz (TAG), ainsi que les groupes hydrauliques.
On appelle marge
d’exploitation la somme de cette réserve
tertiaire et de la capacité
secondaire totale. Actuellement, cette marge du parc de
production français peut dépasser 7 GW.
Je vous laisse donc imaginer comment il serait possible
d’assurer sans défaillance trois fonctions aussi vitales pour le système,
consistant à solliciter à discrétion, 24h/24, des réserves de puissance
quelquefois significatives, avec un parc de production dans lequel la puissance
éolienne occuperait en permanence et de façon erratique plus de 30 % de la
puissance distribuée !
Comme le dit si bien Jean-Marc Jancovici dans un article
paru dans Les Échos du 12 octobre, dont je vous recommande vivement la lecture,
« en matière d’énergie il est plus
que temps de sortir de l’amateurisme ! »
Cordialement,
André Pellen