Vendredi 30 novembre 2012 :
Le temps est compté pour Kiribati, piégé par la montée des eaux.
Le temps est compté pour les îles Kiribati, un archipel du Pacifique
menacé par la montée des eaux, estime son dirigeant, qui réfléchit à un
déplacement de sa population et ne se fait guère d’illusion sur l’issue de la
grande conférence climat de l’ONU à Doha.
“Des zones entières de l’archipel, qui compte une trentaine d’atolls
coraliens dont la plupart dépassent à peine le niveau de l’eau, ont déjà été
envahies par l’océan”, déclare le président de Kiribati, Anote Tong.
“Nous avons déjà des communautés qui ont dû être déplacées car leurs
villages étaient submergés”, raconte-t-il à l’AFP dans un entretien
téléphonique depuis la capitale, Tarawa.
“Il y a eu une grande marée début octobre et des communautés ont été
envahies par les eaux. C’est de plus en plus fréquent. Le temps nous est
compté”, dit-il.
Kiribati fait partie des nations îliennes, avec les Maldives, Tuvalu et
Tokelau, qui pourraient devenir sans terre à cause du réchauffement climatique,
selon la Commission des droits de l’Homme de l’ONU.
L’érosion grignote les rivages et les récoltes s’appauvrissent en raison
de l’infiltration d’eau salée dans les réserves d’eau douce. Anote Tong
réfléchit au déplacement de population vers les Fidji et le Timor oriental, des
terres relativement proches.
Il ne se fait guère d’illusion sur l’issue des négociations de la grande
conférence climat de l’ONU à Doha, ouverte cette semaine.
“La réalité, c’est que nous sommes d’ores et déjà confrontés aux
problèmes causés par le réchauffement climatique. Est-ce que les négociations
s’en préoccupent ? Je ne crois pas. Beaucoup des négociateurs en font un simple
jeu, ils ne se penchent pas vraiment sur ce qui se passe déjà dans les pays les
plus vulnérables. A Kiribati, nous ne parlons pas de croissance économique ou
de niveau de vie. Nous parlons de notre survie”, ajoute le président de
l’archipel.
Plutôt que d’attendre une hypothétique action extérieure, Kiribati examine
les options à sa disposition, dont le déplacement d’une partie de ses 103.000
habitants.
Sont également envisagés la construction de digues et la plantation de
mangroves. Mais une poursuite de la vie sur l’archipel semblable à celle des
siècles derniers parait peu probable, selon Anote Tong.
“Nous devons accepter la possibilité, la réalité, d’un déplacement d’une
partie de notre population. Nous ne voulons pas que la nation de Kiribati
disparaisse et nous devons travailler pour éviter cela. Le gouvernement
s’apprête à acheter 2.000 hectares de terre aux Fidji, qui servira à fournir
des aliments aux habitants de Kiribati, voire de terre d’accueil. Le Timor
oriental a lui aussi des terres à vendre”, a ajouté le président.
La construction d’îles artificielles est une autre option, mais très
coûteuse.
Un rapport détaillant toutes les possibilités, leurs coûts et leurs
faisabilités, doit être finalisé l’an prochain, afin d’être présenté aux
donnateurs éventuels.
Il n’y a pas d’échéance fixe pour une éventuelle relocalisation et il
faut laisser le choix aux habitants. Mais attendre jusqu’au dernier moment,
avec pas d’autres options que sauter à la mer ou partir ailleurs n’est pas
raisonnable.
Tong n’assistera pas aux négociations à Doha.
“Que dire de plus pour galvaniser la communauté internationale et la
pousser à agir ? Il y a parfois un sentiment de profonde frustration, et
parfois de futilité”, déclare-t-il.
Il continue cependant de penser que le monde peut aider les nations
comme Kiribati, qui ne sont pas la cause du réchauffement climatique mais qui
en payent le prix.
“Les citoyens ont une conscience, mais ils ne sont pas ceux qui prennent
les décisions. Ce sont les gouvernements, ajoute-t-il. Nous devons parler aux
gens et nous ne pouvons pas perdre notre foi dans l’humanité. Je refuse
d’abandonner.”
http://www.romandie.com/news/n/_Le_temps_est_compte_pour_Kiribati_piege_par _la_montee_des_eaux_193011