« …des esclaves rachetés à leurs maîtres locaux… »
Ceci
suggère que l’esclavage était un phénomène local, un phénomène traditionnel
interne aux sociétés africaines précoloniales. Cela est totalement faux.
L’esclavage a été introduit et imposé en Afrique noire aux sociétés africaines par
les européens et les arabes. L’esclavage est un phénomène d’origine strictement
européenne (indo-européen, peuples de la mer, juifs et arabes). L’esclavage a
été exporté en Afrique par l’Europe et le monde mahométan.
« … et même des volontaires ayant une grande diversité
d’origines. »
Des « volontaires » préalablement dressés malgré
eux à l’idéologie et à la culture coloniales, très certainement. Mais des « volontaires » par eux-mêmes, par leur
propre culture, certainement pas.
« Les sous-officiers proviennent généralement de l’aristocratie
locale. »
Là
aussi, il y un abus de langage. En effet, les razzias et les traites
esclavagistes européennes et arabes ayant ravagé le Continent noir pendant des
siècles ont complètement bouleversé les structures administratives
traditionnelles des sociétés africaines. Les « aristocraties locales » n’avaient plus de « local » que l’apparence physique raciale. En fait, ces « aristocraties locales » étaient montées
et chapeautées par les administrations coloniales.
En
réalité, voici un petit aperçu des méthodes d’engagement des « Tirailleurs Sénégalais » :
« « Le recrutement est fondé
sur le décret du 7 février 1912 qui institue le recrutement par voie d’appel « des
indigènes de race noir du groupe de l’Afrique-Occidentale française »,
prévoit qu’ils « peuvent en toutes circonstances être désignés pour
continuer leur service en dehors du territoire de la colonie » et précise
que « la durée du service actif est de quatre ans »
Si les proconsuls représentant la France en Afrique ont
rapidement proposé plusieurs milliers d’hommes volontaires ou recrutés avec des
méthodes proches de celles des siècles précédents (à savoir les rapts comme au
temps de la traite négrière) des
stratégies d’évitement (envoi de malades, d’estropiés, certaines commissions de
recrutement ayant jusqu’à 80 % d’inaptes) puis des révoltes contre
l’enrôlement ont éclaté loin des grandes villes d’Afrique, dont la première
chez les Bambara du Mali, près de Bamako, qui a duré environ 6 mois, du
printemps à novembre 1915, annonçant d’autres révoltes plus importantes.
Certaines sont très durement réprimées en juin 1916 par la France, qui fait tirer à
l’artillerie sur une dizaine de villages « récalcitrants », tuant
plusieurs milliers de civils.
Comme de nombreuses mutineries plus tardives, ces révoltes
ont été cachées pour ne pas apporter d’arguments supplémentaires à la
propagande allemande, qui dénonçait sans cesse le comportement de la France en Afrique. La
propagande allemande de l’époque décrivait les tirailleurs comme étant des
« barbares »
d’Afrique venus pour combattre sur les fronts européens. » » (1).
Il n’y a donc là rien de « volontaire »
ni de « local » au sens des traditions
africaines. Au contraire, cela témoigne bien de la grande résistance du Continent
noir aux intrusions esclavagistes arabo-européennes, résistance continentale dont on ne parle jamais. Rappelons toutefois que l’origine des « Tirailleurs Sénégalais », du côté de la France, remonte au moins à
celle des « Troupes coloniales Françaises
créées en
1622 par le cardinal Richelieu sous le nom de « Compagnies ordinaires
de la mer »
(2).