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Commentaire de rami

sur L'espoir horizontal, alternative de société concrète et évolutive


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rami rami 8 octobre 2013 20:19

Bonjour,

Le lieu semble peu adapté à discuter de façon constructive, toutefois je vais tâcher de répondre ici sans pour autant promettre d’être clair sur des sujets qui réclament une analyse plus poussée.

Pour mieux nous comprendre, il faut distinguer ces deux choses :

  • d’une part un « théorème du jury » qui laisse espérer que cette vérité théorique corrobore l’intuition de pouvoir approcher – par une technique de consultation des citoyens - la révélation de la plus pertinente des propositions présentées.
  • d’autre part une technique de « cahiers de doléances » qui a justement pour but de faire accéder chacun des citoyens au « processus d’élaboration de la proposition elle même »

 Je serais assez circonspect face à l’idée d’une " démocratie délibérative"
Le pari démocratique relève certainement plus de la foi en la capacité de chacun à participer à la révélation des propositions les plus pertinentes … qu’en l’idée d’un accompagnement (ou pire d’un guidage) des consciences, savoirs, compétences ou visées prospectives ...

("La démocratie est fondée sur l’idée d’une compétence égale de tous.«  - Jacques Rancière)

Les deux aspects mentionnés : d’un côté la vision classique du consensus qui s’oppose à la notion de consentement (ou de consensus apparent), et de l’autre, le principe de pouvoir participer au processus d’élaboration de la proposition.

Remarquons que dans le cas du consentement, nous n’avons pas le choix : il faut participer au processus d’élaboration de la proposition pour pouvoir réellement obtenir le consentement à large échelle. Ce qui fait que tout de même, les deux points sont bel et bien liés, au moins dans le cas du consentement.

Et d’ailleurs Urfalino énonce :  »Le souci d’une participation plus égalitaire à la délibération heurte frontalement la conception de l’égalité politique qui a jusqu’ici prévalu dans les démocraties« 

La démocratie grecque est effectivement basée sur cette conception d’une égalité entre tous. Mais il semble que c’est une erreur de penser que nous sommes égaux sur tous les sujets. Et également les origines non occidentales de la démocratie sont une fois de plus tout à fait ignorées ainsi que toutes les autres conception qui entrent dans ce cadre d’un pouvoir populaire.

Nous sommes conditionnés à voir la notion de pouvoir populaire comme incarnée par une égalité de vote entre tous, alors qu’il y a d’autres conceptions qui parlent d’équité décisionnelle.

Le consensus » à la grecque " fait peser un choix quelconque sans considération de valeur, qu’il s’agisse d’une simple préférence pour une quelconque option même si elle ne se base sur rien, ou même un choix totalement aléatoire aura la même valeur que tout autre votant.
Il n’y a en réalité aucun besoin d’argumenter dans le consensus puisque le simple fait de choisir octroie immédiatement une égale valeur face à tout autre point de vue.

L’évolution dans le cadre d’un principe d’égalité de vote est allée de l’espérance de la découverte d’une bonne règle d’agrégration pour prendre une bonne décision (l’espoir de Condorcet d’obtenir une « décision vraie ») à la recherche moins ambitieuse des règles dont le résultat représente la distribution des préférences individuelles de la moins mauvaise manière possible (Black ,Arrow, Guilbaud..)

En parallèle, il semble y avoir de plus en plus consensus

des avis sur la qualité d’un accord final dans la pratique d’un « consentement de tous », comme étant le moyen le plus efficace d’obtenir la meilleure décision possible pour la collectivité. Et c’est le consentement que l’on pratique naturellement ;

3 amis décident d’acheter un pot de glace et il y a deux choix : fraise, ou vanille. Deux préfèrent la fraise, mais ils aiment bien la vanille. Le troisième est allergique à la fraise, il ne peut manger que la vanille. Dans un consensus majoritaire classique, les trois amis achètent le pot de fraise (2 contre 1) et l’un ne mange pas. Dans une pratique de consentement ils achètent le pot de vanille puisque la préférence a moins de valeur que l’objection.
C’est une pratique d’ailleurs très répandue aussi dans des regroupement d’experts comme la cour constitutionnelle en Italie et de multiples exemples.
C’est un large sujet de façon générale, et la lecture du livre apporte quelques réponses.

Quand au point concernant le principe de participer à l’élaboration de la proposition. Là encore, il faut s’intéresser au champ de l’intelligence collective pour comprendre l’intérêt considérable et les liens qu’il peu y avoir à s’intéresser à « ce qui est essentiel » davantage que de s’intéresser à « Tout l’agrégat de points de vues et de préférences ».
L’intelligence collective rappelons précise les paramètres qui peuvent moduler la synergie. La synergie est par définition plus efficace ! C’est un principe simple 1+1=3.
Une synergie négative est moins performante qu’une synergie positive. Plus l’intelligence collective est déployée, et plus nous sommes efficaces.

Et il y a là encore unanimité ou presque pour énoncer que nous sommes plus efficaces en prenant en compte l’essentiel et en faisant primer l’équité et l’adaptation à ce que nous sommes en train de faire : le leadership statique n’est pas le plus optimal (bien que jusqu’à aujourd’hui il s’imposait dans de large groupes en raison de l’absence d’holoptisme), et la meilleure décision émerge du consentement, c’est à dire là encore, en sachant prendre en compte l’intensité du point de vue.

La problématique majeure est que le concept d’équité est dangereux : dans le cadre d’une équité décisionnelle, on va vite craindre les abus en disant que quelqu’un va bloquer une bonne décision avec une fausse objection argumentée par exemple. Mais là encore, il existe des réponses à ces limites bien réelles et il faut les étudier pour pouvoir prétendre qu’elles représentent un réel blocage.

Enfin, je ne cherche absolument à convaincre de mon côté de la pertinence de profiter d’un maximum d’intelligence collective, ou du comment, considérant que les problématiques majeures d’aujourd’hui nous obligent à nous rassembler et à nous entendre, et que le temps prouvera l’obligation de remettre en cause nos méthodes et à expérimenter de nouvelles.
Hors tous ceux qui ont vécu en petits groupes des méthodes de participation qui impliquent de pouvoir changer la proposition et profiter d’un consentement de tous sont unanimes sur le fait qu’ils ont trouvé ainsi les meilleures décisions.

Toutefois, les mécanismes de ces processus sont totalement incompris, voire inconnus, et ne sont pas encore exploités de façon optimale à large échelle. C’est une énorme continent inexploré qui est lié à la fois à la conscience, l’attention, la synergie, l’intelligence collective, etc, avec ses propres limites et spécificités.

J’espère avoir pu partager un avis suffisamment clair ce n’est pas évident dans ce cadre.


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