Quand au NPA nulle difficulté à s’en expliquer comme le fait ici Philippe Poutou, présent à Quimper avec le NPA Bretagne :
Fallait-il être le samedi 2 novembre à Quimper avec les 30 000
« nigauds » et « esclaves » soumis à leurs patrons, ou à Carhaix avec la
gauche qui pense comme il faut ? C’est de cette façon caricaturale que
le problème a été posé par toute une partie de la gauche. La situation
est évidemment beaucoup plus complexe. Nombreuses ont été les
réactions contre la manifestation de Quimper, souvent agressives voire
insultantes.
On l’a vu, Jean-Luc Mélenchon n’aime pas les « Bonnets
rouges », et il n’a pas fait dans la dentelle en affichant son mépris
pour le peuple opprimé. Une position bien relayée par des responsables
du PG, des élus PS, des dirigeants d’EELV, par la CGT qui a déclaré que
cette manifestation ne défendait pas les salariés, et enfin par la
presse militante de gauche, l’Humanité et Politis : « Poutou (NPA)
manifestera à Quimper avec le patronat, le FN et les identitaires »...
Quelle finesse d’analyse !
Avec la colère sociale, contre les responsables de la crise
Le
NPA était bien à Quimper, et ses militants « bretons » ont manifesté
avec leurs camarades de lutte, leur camp social… les salariés de Marine
Harvest, de Gad ou de Tilly-Sabco. Le NPA était à sa place parmi les
révoltés, dans un mouvement de profonde colère sociale contre l’écotaxe
mais surtout contre l’austérité, les licenciements, et la souffrance au
quotidien.
Certes, il y a de la confusion dans la
diversité des manifestants : des salariés, des paysans, des petits
patrons, des artisans, des commerçants... La présence d’organisations
patronales, d’élus UMP, de militants identitaires en a rajouté sur la
complexité. De plus, la population en colère a trouvé sa force dans un
sentiment régionaliste, « vivre, travailler, décider en Bretagne », un
terrain particulier qui laisse la place à des courants politiques
hostiles au mouvement ouvrier.
Mais cela ne justifie
aucunement les accusations d’une partie de la gauche syndicale et
politique. En organisant une contre-manifestation à Carhaix, la CGT
comme le Front de gauche ont fait pire que de se désolidariser d’une
mobilisation populaire. En divisant, elles désertent un lieu de bataille
politique, contribuant à laisser la main à la droite patronale. Déjà
incapables de prendre des initiatives locales ou centrales contre les
licenciements qui rompraient avec un climat général de résignation,
voilà que ces « dirigeants ouvriers » tournent le dos quand le
ras-le-bol s’exprime.
Cette colère populaire ne serait
pas comme il faut, alors il faudrait s’en tenir éloigné. Et on le sait,
pour ces partis politiques, la révolution se fera dans les urnes, pas
dans la rue. Leur réponse à la mobilisation bretonne en est une
nouvelle illustration.
Pour une issue progressiste
Face au danger
réel de récupération et de dévoiement de la colère des opprimés, il y a
une bataille politique à mener, qui consiste à défendre dans le
mouvement une perspective politique « à gauche », progressiste, contre
les politiques libérales, pour le partage des richesses, pour que la
population prenne ses luttes et ses affaires en main. Une politique qui a
de façon spectaculaire été refusée par le Front de gauche et la CGT.
Le
NPA a milité dans le cortège pour faire entendre une voix
anticapitaliste. Avec des organisations comme Attac, l’Union
démocratique bretonne (gauche bretonne), les Alternatifs et
Breizhistance, nous avons agi pour la constitution d’un « pôle de
gauche » posant clairement des revendications sociales. Il ne fallait
pas laisser le terrain aux droites, aux réacs de toute espèce, au
patronat qui veulent contrôler ce mouvement et en détourner la colère
afin d’éviter qu’elle ne vise les possédants, les vrais responsables de
la crise.
La lutte de classe se mène à partir des
mobilisations existantes, avec les gens qui se révoltent, au jour le
jour. La révolte bretonne montre concrètement la nécessaire et urgente
construction d’une opposition de gauche à ce gouvernement et à ses
alliés. Pour la suite, nous militons pour que les organisations
syndicales, associatives, politiques de la gauche radicale pèsent
ensemble de tout leur poids dans le mouvement social pour la perspective
d’une riposte unitaire, d’une mobilisation générale du camp des
exploités.
Philippe Poutou