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Commentaire de Louis

sur Sur « Si c'est un juif » d'Adrien Barrot


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Louis 4 mars 2007 23:17

Je voudrais laisser un tout dernier message car je n’ai plus de temps à consacrer à cette recension. Je retiendrai, je crois, une objection de l’ensemble des remarques qui ont été faites ici. L’objection serait à peu près la suivante : pourquoi mettre l’accent sur le meurtre d’un juif quand tant d’autres crimes racistes ont lieu de nos jours ? Pourquoi laisser entendre que le meurtre d’un juif serait en quelque sorte plus important ou plus signifiant ? Ces questions entraînent le reproche suivant : est-ce qu’en écrivant un livre sur le meurtre d’un juif, on ne tombe pas dans le jeu de la surenchère médiatique, n’accorde-t-on pas de l’importance à un fait parce que ce fait a été surexposé par les médias dans un pathos insupportable se rapportant systématiquement à la seconde guerre mondiale, alors que de nombreux autres faits ont lieu couramment qui sont tout aussi graves. Evidemment, n’étant pas l’auteur du livre, je ne suis pas en mesure de répondre à ces questions et à ce reproche qui peuvent être posés à bon droit et méritent assurément réflexion. Mais je puis essayer d’éviter les confusions, notamment en disant que la surenchère médiatique, l’industrie qui s’est emparée de la Shoah ne doivent en aucun cas nous détourner des problèmes qui eux, je crois, sont réels. Il est dur de garder la tête froide quand nous sommes aussi soumis à cette « industrie de la mémoire » qui, selon Adrien Barrot, devient précisément « une industrie de l’oubli ». Cette industrie est mise en question par l’auteur, comme je l’ai indiquée dans ma recension. Je pense qu’il ne faut pas réagir démesurément à la démesure, et qu’il faut tenter de comprendre, par la mobilisation d’une connaissance instruite précisément par autre chose que les médias, comment sont arrivées les choses horribles de notre passé. Ensuite, il est certain qu’il est tout aussi important de comprendre d’autres faits que le problème juif. Mais je pense qu’il serait injuste de rejeter ce dernier sous prétexte que les médias insistent là-dessus, surtout si ces médias ne font que provoquer fatigue et dégoût. En d’autres termes : ne restons-nous pas dépendant de l’industrie quand nous ne réagissons que par rapport à cette industrie inconséquente, et rarement sur les problèmes en eux-mêmes ? Il est certain qu’Adrien Barrot ne peut pas réagir contre cette industrie sans écrire un livre sur la question, et que par conséquent, ce livre sera lui-même sur les étalages de la FNAC, comme cela a été dit. Insinuer que c’est là profiter de l’industrie ne me semble guère sensé et dégradant pour son auteur. Car enfin, cela veut-il dire qu’il faut en finir avec la question juive ? Faut-il laisser dire que les juifs se victimisent pour culpabiliser l’occident et envahir le monde, comme cela a été dit aussi en toute tranquillité ? Je crois que si un livre intelligent tire une sonnette d’alarme sur les confusions qui ont lieu partout dans l’espace public, il mérite toute notre attention. Il faut essayer de critiquer les médias et le commerce de masse non seulement à cause de leur surenchère, mais aussi pour leur conséquence sur nos pensées. Parmi ces conséquences, l’une des plus lourdes me semble être qu’ils nous détournent et nous font oublier ce qui essentiel dans l’ordre des choses humaines.

Bien à vous, en vous remerciant pour l’ensemble de vos commentaires.

A.Louis


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