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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > C’est un Juif, monsieur le Commissaire

C’est un Juif, monsieur le Commissaire

L’ancien secrétaire et biographe de Jean Moulin, Daniel Cordier, auteur de Alias Caracalla, s’est confié mercredi matin au micro de France-Inter. Il a, entre autres souvenirs de son action et de la mémoire de Jean Moulin, évoqué la Résistance, mais également les nombreuses dénonciations qui ont marqué la période sombre de l’Occupation. Dénonciations de résistants, mais surtout dénonciations de Juifs. Ceci n’est pas un article, mais une nouvelle consacrée à cette page peu glorieuse de notre Histoire...<

Ce matin, j’ai eu du mal à émerger. Je me sentais fatigué. Beaucoup plus fatigué que d’habitude. Il est vrai qu’hier n’a pas été une journée comme les autres : j’ai soufflé neuf bougies sur un énorme gâteau. Neuf grosses bougies de cire, toutes marquées d’un 10, et cinq autres plus petites : quatre-vingt-quinze balais ! J’avais beau fanfaronner, ça m’a fichu un coup. Peut-être à cause de tout ce monde rassemblé autour de moi, comme pour une dernière représentation de l’artiste avant ses adieux définitifs à la scène. La plupart des membres de la famille sont venus fêter l’événement à La Tuilerie, la grande maison près de Rambouillet où m’ont recueilli mon fils Pierre, l’avocat pénaliste, et ma bru Catherine lorsqu’il est devenu trop difficile pour moi de vivre seul dans mon appartement du Faubourg Saint-Antoine. Même les Auvergnats sont montés en nombre malgré les moissons. Ça m’a fait chaud au cœur de voir tout ce monde réuni autour d’un vieux bonhomme comme moi. D’autant plus que je n’avais pas revu certaines têtes depuis des années. Je ne connaissais même pas mes derniers arrière-petits-enfants, l’espiègle Julie par exemple, mignonne à croquer avec ses boucles blondes et le rire cristallin de ses quatre ans, ou le petit Michel, trois ans seulement et déjà l’air d’un Gavroche entêté. Les gosses exceptés, tout le monde a copieusement arrosé l’anniversaire du patriarche. En tant que héros du jour, j’ai naturellement eu droit à une coupe de champagne. Elle m’a été servie par Claire, toute pimpante dans sa robe d’été quelque peu provocante. Je n’ai rien dit à ma petite-fille, mais j’ai bu le vin sans plaisir. Au fil des ans, on perd le goût des choses.

Assis sur un banc de pierre, je me dore au soleil, tel un vieux lézard. Peu à peu, la fatigue s’estompe au profit d’une agréable torpeur. Sous mes paupières closes dansent en un tableau sans cesse recomposé les nuances les plus chaudes du rouge et de l’orange. Je m’évade, hypnotisé par les couleurs. Soudain, des éclats de voix venus du grand salon me ramènent à la réalité : une fois de plus, Catherine se dispute avec sa sœur cadette Nathalie, restée quelques jours à La Tuilerie sur l’invitation de Pierre. Ces deux-là, décidément, ne pourront jamais passer une journée sans se chamailler. Tandis que les frangines se querellent, probablement pour une peccadille, mon regard vagabonde sur les massifs de dahlias, impeccablement entretenus par André, le factotum de La Tuilerie. Cachés parmi les fleurs, quelques restes de la fête, emportés par la brise nocturne, ont échappé ce matin à l’inspection de Catherine : ici, un fragment de serviette en papier ; là, un lambeau d’emballage de chips ; un peu plus loin, un… un… Tiens, on dirait une photo. Intrigué, je me lève avec difficulté du banc de pierre. Il s’agit bien d’une photo. Une de ces photos sépia aux bords dentelés, comme on en conserve dans les albums pour garder l’image des aïeux. Sans doute a-t-elle été chipée puis égarée par l’un des enfants au cours de la fête. À l’aide de ma canne, je la ramène par étapes successives au bord du massif avant de m’en saisir, au prix de douloureux élancements dans les reins. Prudemment, je retourne m’asseoir sur le banc.

Par chance, il n’y a pas eu de rosée durant la nuit. La photo n’en est pas moins abîmée, victime du temps qui passe. Veinée de crevasses, racornie dans les angles, couverte de tavelures brun foncé, on y distingue avec difficulté un homme, une femme et un garçon d’une vingtaine d’années. Tous trois posent avec un air emprunté devant la porte d’un débit de boissons reconnaissable aux inscriptions peintes en lettres blanches sur la vitrine : café, vins, liqueurs d’un côté ; spécialités de vins auvergnats de l’autre. Aucune indication ne figure au dos de la photo. Ce serait d’ailleurs inutile : je sais qui sont ces gens. Quant à la date, elle reste gravée dans ma mémoire : octobre 1942. Peu à peu, les souvenirs remontent à la surface. Une bouffée d’émotion m’envahit...

La jeune femme était vêtue d’un élégant manteau noir bordé de fourrure au col et aux poignets ; ses mains étaient gantées, et sa tête coiffée d’un chapeau gris ceint d’un galon noir. Elle est entrée dans le café un jour de novembre 1947 en fin d’après-midi, à l’heure où les ateliers se vident. Il faisait un temps de chien marqué par de fréquentes averses et des bourrasques de vent à décorner un bœuf. Des ouvriers du voisinage, la musette en bandoulière et le béret vissé sur la tête, buvaient un vin chaud au comptoir en attendant une accalmie pour filer vers le métro. Un groupe d’habitués, tous ébénistes et ferronniers retraités du Faubourg Saint-Antoine, tapait le carton près du vieux poêle en fonte en claquant les atouts sur le tapis de jeu d’un geste ostentatoire mille fois répété. Dans l’arrière salle, une poignée d’étudiants, garçons et filles, comparaient bruyamment les chances respectives de Blum et de Schuman au lendemain de la démission du cabinet Ramadier. Après avoir secoué puis replié son parapluie sur le pas de la porte, l’inconnue a fait quelques pas sur le carrelage avant de s’arrêter, indécise et décontenancée, devant le tablier ensanglanté de Morizot, le tripier, venu descendre une petite côte avec son voisin, le cordonnier Zakarian. Assise sur une banquette, Margot la prostituée sirotait comme chaque jour son Picon bière avant d’aller prendre son service rue de la Roquette. Elle regardait avec une curiosité teintée d’amusement cette bourgeoise égarée dans un monde qui n’était pas le sien. J’étais seul derrière le comptoir, mollement occupé à essuyer des verres, un œil ici, une oreille là, prêt à répondre à la moindre sollicitation, qu’il s’agisse d’une commande ou d’une simple envie de bavardage. Valérie, mon épouse, était à l’étage, dans l’appartement ; elle préparait notre dîner.

 

─ Qu’est-ce que je vous sers, Madame ?

La jeune femme a sursauté, comme prise en faute.

─ Euh, rien… Enfin, si… Un… un café, s’il vous plaît… Je m’assois là.

Elle a pris place sur la banquette, à bonne distance de Margot, sans ôter ni son manteau, ni son chapeau, ni même ses gants. Tout en préparant son café, je l’épiais discrètement dans la glace murale, intrigué tout à la fois par sa présence et par son attitude. La femme pouvait avoir dans les vingt-cinq ans. Elle était très séduisante. Que diable pouvait-elle faire là ? Manifestement ce n’était pas une habituée des débits de boisson, ou alors de ces grandes brasseries chics de Montparnasse ou de l’Opéra. D’ailleurs son regard explorait les lieux avec une sorte d’avidité, s’attardant ici sur le comptoir en zinc, là sur la pompe à bière, ou bien encore sur la pendule murale, comme pour s’imprégner du moindre détail de tous ces objets.

Lorsque je lui ai servi son café – dans une tasse au lieu du simple verre destiné aux clients habituels –, j’ai vu que ses mains tremblaient, malgré ses efforts pour le masquer. Elle m’a adressé un regard chargé de souffrance. Ses lèvres se sont entrouvertes pour parler, mais aucun son n’est sorti de sa gorge nouée. J’allais m’éloigner. Elle m’en a empêché en agrippant mon bras comme on s’accroche à une bouée de secours.

─ S’il vous plaît, monsieur, ne partez pas…

Quelques secondes se sont écoulées. En silence. Sensible à l’émotion de l’inconnue, j’attendais patiemment, de crainte d’ajouter à son désarroi. Elle a fini par s’exprimer d’une voix hésitante :

─ Je… Il faut que je vous parle… de… de Daniel.

─ Daniel ?… Lequel ? J’en connais au moins trois, des Daniel.

─ Daniel Renard… Vous ne l’avez pas oublié, n’est-ce pas ?

Daniel Renard !… Bien sûr que non, je ne l’avais pas oublié. Ça faisait quoi ? Cinq ans ? Six ans ? Et zut ! À quoi bon replonger dans les années noires de l’Occupation ? La page était tournée. Et puis, je l’avais si peu connu, le gars Daniel, malgré toutes ces journées passées côte à côte. Par égard pour la femme en noir, j’ai gardé mes réflexions pour moi.

─ Qu’est-ce qu’il est devenu, Daniel ?

Les yeux de l’inconnue se sont embués.

─ Il… il est mort… Je suis sa sœur.

J’ai fait la connaissance de Daniel en 1940. Valérie et moi avions repris le bistrot un an plus tôt, lorsque mon frère aîné Albert avait été contraint, la mort dans l’âme, de troquer son tire-bouchon contre un fusil de guerre au lendemain de la mobilisation. Le destin avait voulu que je sois disponible : en 38, un accident agricole m’avait coûté deux doigts, l’index et le majeur de la main droite, tranchés net par une lame de faucheuse. Faute de pouvoir presser la détente d’un Lebel pour casser du boche, la République Française m’avait réformé. Mon frère n’est jamais revenu ; il est mort en juin 40, éparpillé par les bombes allemandes dans les dunes de Zuydcoote. Constance, ma belle-sœur, est repartie avec ses deux gosses cicatriser sa détresse dans le Cantal, en nous laissant l’appartement.

Malgré la conjoncture difficile et le départ massif des hommes en âge de se faire casser la pipe, l’affaire marchait plutôt bien. À tel point que j’ai rapidement dû chercher de l’aide. Faute de garçons disponibles – la plupart attendaient l’ennemi de pied ferme aux frontières, engoncés dans leurs lourdes vareuses et leurs bandes molletières désuètes –, j’ai tout d’abord employé une serveuse, recrutée dans les annonces de L’Auvergnat de Paris, l’incontournable auxiliaire des limonadiers de la capitale. Lydie était une belle plante, solide et travailleuse, mais doublée d’une opportuniste : moins de six mois plus tard, elle partait avec un négociant en vins et spiritueux, au compte en banque beaucoup plus séduisant que la physionomie. Nous étions en mai 40, quelques semaines avant l’entrée des troupes allemandes dans Paris. C’est à cette époque que j’ai embauché Daniel, par l’entremise de Maxime, un vieux menuisier du Faubourg au foie rongé par la Suze. Le garçon, en rupture avec les études, avait alors dix-neuf ans. Plutôt grand, le cheveu en bataille et le regard vif, il s’est adapté sans problème à son travail, alliant l’efficacité du geste à la répartie verbale indispensable à qui veut se faire respecter dans ce milieu de prolétaires gouailleurs. Daniel n’était pas un bavard pour autant. Hormis quelques broutilles, jamais je n’ai rien su de sa vie, ni de sa famille, ni de ses idées politiques ou religieuses. Pas même lorsque nos rapports sont devenus plus étroits au fil du temps. Mais après tout, ce n’était pas mon problème, libre à lui de parler ou de se taire, pourvu que son boulot soit bien fait, ce qui était le cas. Ce mutisme persistant m’intriguait pourtant bien un peu. Et je n’étais pas le seul. Aurélie Fontanier, la mercière, avait même son idée : « Si vous voulez mon avis, je ne serais pas surprise d’apprendre que Daniel s’est engagé dans la résistance. Vous allez voir qu’un de ces jours, il va nous lâcher sans préavis » m’avait-elle chuchoté à l’oreille entre deux lampées de Viandox peu après l’exécution de Guy Môquet. J’avais approuvé sans commenter, par manque de conviction.

Un an s’était écoulé depuis l’arrivée de Daniel. Les restrictions étaient devenues beaucoup plus pénibles pour tous, notamment pour les classes populaires, privées des produits du marché noir qui circulaient ici et là sous le manteau. Dans le commerce, la crise était partout. Y compris pour les bistrots, frappés de plein fouet par le couvre-feu et les lois restrictives sur l’alcool. Les mesures anti-juives et le spectacle des uniformes allemands dans les rues de la capitale ajoutaient au malaise ambiant. Les parisiens, moroses, sortaient de moins en moins de chez eux. Naturellement, le chiffre d’affaires du bistrot s’en ressentait chaque mois un peu plus. Dès lors, nous aurions dû, en bons gestionnaires, nous séparer de notre employé. J’ai pourtant décidé, contre l’avis de Valérie, de garder Daniel à notre service, à la fois par sympathie et pour lui éviter le S.T.O. auquel il aurait été dangereusement exposé par un licenciement. Depuis ce moment, Valérie m’accablait chaque semaine un peu plus de récriminations et d’ultimatums. « On n’est pas l’armée du Salut ! » me reprochait-elle un jour. « Plus question d’écorner notre revenu. Ce sera lui ou moi ! » me lançait-elle un autre jour sur un ton provocateur. À sa décharge, il faut reconnaître que notre situation financière s’était sérieusement dégradée. Malgré les exhortations répétées et les menaces de mon épouse, j’ai pourtant tenu bon. Et Valérie était restée.

Un matin, Daniel n’est pas venu travailler. Un jour, deux jours, trois jours se sont écoulés. Toujours pas de Daniel. À ma demande, Valérie est partie s’enquérir de lui, à son domicile de Belleville, rue Ramponneau. En vain : le jeune Renard s’était volatilisé.

─ Je vous l’avais bien dit ! m’a lancé la mercière sur un ton triomphant en apprenant la nouvelle. À l’heure qu’il est, sûr qu’il a rejoint les F.T.P. !

J’ai répondu en grommelant à la vieille dame :

─ C’est bien possible, madame Fontanier. N’empêche que ça nous met dans l’embarras, Valérie et moi, rapport au service. Et puis, c’est pas correct : on prévient quand on s’en va !

La mercière a souri.

─ Allez, ne faites pas le mauvais caractère. Surtout que vous n’aviez plus besoin de lui. D’ailleurs, je suis sûr qu’au fond de vous-même vous êtes plutôt fier du garçon.

Elle avait raison. Malgré sa disparition subite, sans avertissement ni adieux, je ne gardais pas de rancune à Daniel. La preuve : son long corps surmonté d’une tête ébouriffée s’affichait au coin du bar, entre Valérie et moi, sur une photo prise trois semaines plus tôt devant la porte du bistrot par Lucien Fourquet, un chasseur d’images du quartier.

Cette même photo que je tiens aujourd’hui entre mes doigts déformés par l’arthrose.

Nous étions en octobre 1942.

Je n’ai jamais revu Daniel.  

Des morts avant l’âge, on en a tous connu à cette époque. Des soldats. Des civils. Des combattants de l’ombre. Des victimes innocentes. Rien que dans ma famille, il en est tombé trois : mon pauvre frère Albert, bien sûr, mais aussi deux de mes cousins d’Auvergne, écrasés en 1944 avec leurs camarades de lutte dans l’anéantissement des maquis de la Margeride. Jusqu’à Morizet, bêtement tué par une balle perdue lors de la Libération de Paris alors qu’il déployait un drapeau tricolore sur sa vitrine dans l’euphorie du moment. Daniel n’était qu’un mort de plus sur une liste déjà longue. Malgré tout, l’annonce de sa disparition m’avait touché.

─ Il est mort comment, Daniel ?

La jeune femme est restée muette. D’une main tremblante, elle a sorti une enveloppe de son sac à main et l’a posée sur la table. Du bout des doigts, elle l’a poussée vers moi.

─ C’est pour vous, m’a-t-elle dit. Tout est là… Vous la lirez lorsque je serais partie.

Machinalement, j’ai saisi l’enveloppe. Écrite à l’encre bleue, la suscription indiquait simplement Monsieur Martial Freyssinet. Entre temps, l’inconnue avait déposé une pièce de monnaie près de la tasse. Déjà, elle se décalait sur la banquette pour partir. Elle n’avait pas touché à son café. J’ai tenté de la retenir : 

─ Écoutez… c’est trop bête, ne partez pas comme ça… Attendez, j’appelle Valérie…

─ Surtout pas !

La jeune femme a presque crié tandis qu’elle se levait d’un bond tel un pantin à ressorts surgi de sa boîte. Dans le mouvement, sa tasse s’est renversée sur la table. Dans le café les conversations se sont tues. L’instant d’après, la femme en noir disparaissait dans la pénombre de la rue.

Oublié près de la porte, son parapluie continuait de goutter sur le carrelage du bistrot.

─ Bon, c’est pas tout ça, faut que j’aille au turbin.

Margot s’est levée à son tour tandis que j’épongeais la flaque de café sur le sol. L’enveloppe dépassait de la poche de ma chemise. D’un coup de menton, la belle de nuit a désigné le rectangle de papier.

─ Y s’pourrait bien que la guerre soye pas finie pour tout l’monde ! a-t-elle lâché sur un ton sentencieux.

J’ai haussé les épaules sans répondre. Répondre quoi, d’ailleurs ?

J’ai attendu la fermeture du café pour ouvrir l’enveloppe. Elle contenait deux lettres. L’une avait été rédigée par la femme en noir d’une écriture nerveuse. Quant à l’autre, froide et implacable… j’en serre encore les poings de rage et de honte.

L’inconnue était née rue du Roi-de-Sicile, au cœur du quartier juif de Paris. Elle relatait comment sa mère, Yaël, avait rencontré puis épousé en 1920 le maroquinier Jacob Fuchs. Dix ans plus tard, à la suite d’un revers de fortune, le couple émigrait vers la Rhénanie pour s’installer à Mayence, lointain berceau de la famille Fuchs. Le couple avait deux enfants : une fille, Muriel, âgée de neuf ans, et un fils, Élie, de deux ans son cadet. Au début, tout allait pour le mieux : les affaires étaient plutôt bonnes, et les enfants grandissaient sans problème dans la double culture franco-germanique, malgré l’agitation croissante du parti nazi et les mesures anti-juives qui prévalaient sur l’autre rive du Rhin depuis l’arrivée d’Hitler au pouvoir. La situation s’était brusquement dégradée en mars 36 lorsque les troupes allemandes, en violation des accords internationaux, avaient réoccupé la Rhénanie démilitarisée. Dès lors, entre injures et boycott, les choses n’avaient fait qu’empirer pour les juifs sous la pression d’une partie de l’opinion, manipulée par l’immonde Völkischer Beobarter et les agitateurs du parti nazi. Comme beaucoup d’autres, les Fuchs avaient courbé le dos en attendant des jours meilleurs. En 38, au lendemain de l’Anschluss et des violentes réactions antisémites de la population autrichienne, Jacob avait compris que des lendemains tragiques se profilaient pour les juifs d’Allemagne. Durant plus de six mois, le maroquinier avait tenté de vendre son affaire pour retourner en France le plus rapidement possible. En vain : on ne lui proposait que des sommes dérisoires. Alerté par la multiplication des incidents et des arrestations arbitraires, Jacob s’était pourtant résigné à liquider son commerce à vil prix pour fuir avec sa famille. Il n’en eut pas le temps. Dans la nuit du 9 novembre, une vague de haine anti-juive orchestrée par les nazis submergea l’Allemagne. Durant cette nuit d’horreur, la boutique et l’appartement des Fuchs furent incendiés. Les corps de Yaël et Jacob, battus à mort, furent trouvés au petit matin dans une cour voisine. Par chance, Muriel et Élie avaient passé la nuit chez un cousin. Fidèle à la volonté de Jacob, celui-ci renvoya les adolescents vers la France. Toute sortie de Juifs du territoire allemand étant « streng verboten », strictement interdite, il leur avait au préalable fait établir des faux papiers aux identités dénuées de toute consonance juive. C’est ainsi qu’Élie Daniel Fuchs était devenu Daniel François Renard. Un an et demi plus tard, en mars 1940, Muriel épousait un médecin suisse et partait vivre avec lui à Lausanne, non sans avoir longuement insisté pour emmener son frère. Malgré son jeune âge – dix-neuf ans – et les supplications de sa sœur, Élie avait préféré rester à Paris. Sous l’identité de Daniel Renard, il avait pris une chambre en ville et abandonné ses études pour gagner sa vie.

Muriel n’avait plus jamais revu son frère. Dès la libération du territoire français, elle était revenue à plusieurs reprises à Paris pour chercher sa trace, savoir ce qu’il était advenu de lui. Sans succès : toutes les pistes se terminaient en impasse. Trois années s’étaient écoulées. Trois longues années ponctuées d’épisodes dépressifs hantés par l’image du frère disparu. Sur la proposition du docteur Hirsch, le mari de Muriel, un enquêteur spécialisé dans ce type d’affaires avait été engagé. L’homme avait la réputation d’être efficace et habile. Et de fait, un mois plus tard, il livrait à ses clients suisses un rapport détaillé accompagné d’une lettre, volée contre récompense par un fonctionnaire vénal dans les archives de la police parisienne.

Muriel Hirsch concluait par ces mots : « Je voulais connaître la vérité sur mon frère. C’est désormais chose faite, et si ma blessure est profonde, je sais du moins qu’elle pourra cicatriser au fil du temps. Quant à cette lettre que je joins à mon propre courrier, je n’ai pas le cœur d’en parler de vive voix. Faites-en ce que bon vous semble, je n’ai pas de goût pour la vengeance. »

Un frisson glacé m’a parcouru le dos lorsque j’ai déplié la seconde lettre, après avoir reconnu cette écriture si familière…

Monsieur le Commissaire,

Je vous écris pour vous signaler le cas d’un nommé Daniel Renard.

Moi et mon mari, on a repris le café La Truyère en 39. Au début, ça tournait bien. C’est pour ça qu’on a embauché ce Daniel Renard au printemps 40. Il avait 19 ans à cette époque. Depuis, la vie est devenue beaucoup plus dure, rapport à la guerre et aux privations. Normalement, on aurait dû renvoyer notre employé, vu qu’il y avait moins d’ouvrage et vu que sa paye nous étranglait. Par pure charité chrétienne, on l’a pourtant gardé à notre service.

À aucun moment, Daniel Renard n’a proposé de partir. Il voyait bien pourtant qu’il était devenu inutile et qu’on se sacrifiait pour lui. Tout ça pour rien : ni reconnaissance, ni remerciement. Froid et calculateur, voilà comment il est, le Daniel Renard, sous ses airs de pas y toucher. Du jour où j’ai compris que c’était un parasite sans scrupule, je me suis dit qu’il y avait quelque chose de pas clair chez lui. Alors j’ai fouillé son vestiaire des fois que ça soye un terroriste. Dans sa veste, j’ai trouvé une photographie de pique-nique. On y voyait un homme et une femme en chemise, assis sur une couverture au bord d’un fleuve, et un gamin d’une douzaine d’années, debout derrière eux. Le môme, c’était Daniel Renard plus jeune, pas d’erreur possible. Au dos de la photo, y’avait une inscription que je vous livre telle que je l’ai notée : « Bingen – Juin 34 – Élie le lendemain de sa bar mitzvah. ». Vous pensez si j’ai sursauté en lisant ce nom de Élie et ce mot bizarre de bar mitzvah dont on ne peut pas dire qu’il soye très chrétien. Et puis je me suis dit que des Élie, y’en a aussi par chez nous, chez les catholiques d’Auvergne, et plus encore chez les parpaillots des Cévennes. J’ai quand même voulu en avoir le cœur net au sujet de cette bar mitzvah. Renseignement pris, c’est en quelque sorte la communion solennelle des garçons israélites. Contrairement à ce que je pensais, c’est le gamin qui se nommait Élie et pas l’homme comme je l’avais cru au début, vu que le môme était censé s’appeler Daniel !

Voilà, vous savez tout, Monsieur le Commissaire : Daniel Renard est un Juif ! Un Juif qui se terre chez nous sous une fausse identité. Un Juif qui profite sans vergogne de notre naïveté et de notre générosité pour se soustraire aux lois concernant les gens de sa race. Évidemment, il est plus question qu’on le garde à notre service. Pour pas lui donner l’éveil, je continuerai pourtant de faire semblant jusqu’à votre intervention. À ce sujet, je m’en remets à vous pour pas venir au café, rapport à la clientèle et à mon mari qu’est pas au courant, mais directement au domicile du Juif : 23, rue Ramponneau dans le 20e arrondissement.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Commissaire, mes salutations distinguées.

Une citoyenne respectueuse des lois et consciente de ses devoirs,

Valérie Bastide, épouse Freyssinet.

 

Une légère brise agite les dahlias. Quelques notes de piano s’échappent du salon. La voix haut-perchée d’une flûte soprano leur répond. Catherine et Nathalie se sont réconciliées, unies comme toujours par la musique. Je ne prête pas attention à leur duo : dans ma vieille tête les souvenirs continuent de défiler. La scène terrible avec Valérie. Son départ précipité pour l’Auvergne par le Paris-Béziers dès le lendemain de la révélation. Le divorce, facilité – Dieu soit loué ! – par l’absence d’enfant. Puis mon second mariage avec Isabelle ; la naissance de Pierre, celle de sa sœur Jeanne… Et l’oubli, les années passant…

Jusqu’à cette émouvante visite du Mémorial de la Shoah dans le sillage de mes enfants. Jusqu’à ce nom : Élie Fuchs, gravé dans la pierre parmi 76 000 autres, morts à Auschwitz, à Maidanek, à Treblinka ou dans d’autres lieux d’horreur, victimes dans des conditions effroyables de la folie criminelle des barbares nazis, mais aussi de la veulerie et de la bêtise des gens ordinaires…

Terrible, l’oubli ! Il enfonce chaque jour un peu plus les morts dans le néant. Cette histoire, je ne l’ai jamais racontée à quiconque. Par honte. Ni Pierre ni Jeanne n’ont jamais rien su des véritables circonstances de ma rupture avec Valérie. Pas même cette bonne Isabelle lorsqu’elle a été condamnée par le crabe…

Mes mains se crispent sur la photo. Ce soir, je parlerai. En mémoire de la jeune femme en noir, en mémoire de ses parents martyrs, en mémoire surtout de son frère Élie… Pour que le souvenir de Daniel se perpétue.

 


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64 réactions à cet article    


  • eric 24 mai 2013 10:09

    Un joli texte. Cela rappelle le livre de Paola Messana sur les appartements communautaires a Moscou.
    Mais, une page en définitive et en réalité assez glorieuse de notre histoire mais avec un grand non dit.

    Un pays occupée
    Des français juifs nombreux
    Des réfugiés étrangers juifs également nombreux et particulièrement vulnérables.

    Résultat ? Le plus faible taux de déportation hors Danemark dans l’Europe occupée
    Un nombre de « justes » considérables. http://fr.wikipedia.org/wiki/Juste_parmi_les_nations#Les_Justes_en_France
    Seul pays d’Europe occupée a avoir refuse avec succès de livrer les Tziganes a la déportation.

    C’est pas de moi, c’est de Weulers, que j’avais été interviewe lors de la sortie de son livre sur la rafle du vel d’hiv. Il me disait que c’était étonnant a quel point peu de gens avaient été rafles compte tenu de leur précarité. Chez, lui, les flics sont venus le matin pour prévenir ses parents de ne pas être la quand ils reviendraient l’après midi, mais il n’y ont pas cru...

    Il y a eu des abrutis, des salauds, des vindicatifs. Comme partout.

    Mais en ce qui concerne notre pays, il n’y a réellement qu’une question vraiment importante sur le plan politique.
    Avec une fonction publique livrée largement a elle même faute de pouvoir politique démocratique sur le terrain, dotée de larges pouvoirs et de moyens considérables compte tenu des urgences de l’heure, les déportations qui ont eu lieu quand même, (un quart de la population), n’ont effectivement été rendues possible que par la discipline des administrations dans la mise en œuvre.
    Il y a eu très peu de révocations de fonctionnaires sous Vichy pour refus d’obéissance.
    Comme pour tous le monde ? Non !

    Un corps social déjà a l’époque tendanciellement a gauche et sur-syndicalise. En principe mieux équipé que le citoyen de base pour au moins freiner et qui plus est potentiellement protégés par l’anonymat propre a toute administration.
    Certes, le gouvernement de Vichy a anticipe et est allé au delà des exigences de l’occupant en matière d’antisémitisme. Mais la mise en œuvre a dépendu de ce qui était déjà a l’époque le cœur sociologique de la gauche organisée. La ou elle était la plus forte, la plus structurée.
    Quelques aperçus dans http://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=02&rub=pistes&item=6
    L’auteur dit par exemple, je cite"sur les mesures anti-maçonniques appliquées avec moins de zèle que les mesures antijuives pour des raisons difficiles à déterminer".....
    On voit aussi comment a partir de 43, le régime perdant en popularité, les agents publics parviennent a freiner le STO. Comme quoi, quand ils voulaient, ils pouvaient.
    Et il y en a eu. Notre cousin pasteur au Chambon sur lignon était parait il toujours prévenu a l’avance par des policiers quand il y avait une montée au village.

    Coup de bol, je suis trop jeune pour avoir connu tous cela et je suis protestant. C’est a dire que par chance historique, ma famille a été dans le bon camp. Des justes en veux tu en voila, et des juifs allemands caches chez nous pendant la guerre. Je n’y suis pour rien évidemment. Pas plus que les gens qui aujourd’hui donnent des brevets de respectabilité ou d’opprobre. Je n’ai jamais entendu les anciens stigmatiser leur pays ou des partis politiques sur la base de ce qui c’est passe dans ces circonstances exceptionnelles.

    En revanche, l’abondance de biens pensant qui battent la coulpe des autres, en commençant par le pays tout entier, et en détaillant par tous les gens qui ne pensent pas comme eux, ils sont assez bien répertoriés.

    Il est possible que ce ne soit pas entièrement un hasard, si les héritiers de ceux qui ont permis le vichysme concret aient une telle hâte a chercher des responsabilités chez les autres.
    Il est possible également qu’il y ait des enseignements contemporains a tirer de l’expérience d’une fonction publique qui a pu démontrer comment en période de crise, elle pouvait être plus intéressée par ses intérêts corporatiste que par quelque principe que ce soit comme le montre très bien l’État actuel de la recherche historique.


    • Fergus Fergus 24 mai 2013 11:20

      Bonjour, Eric.

      Merci pour ces précisions utiles et pour le volet témoignage concernant notamment l’action collective des habitants du Chambon-sur-Lignon.

      Il est important de se souvenir que le régime de Vichy n’a pu se mettre en place qu’en raison de la grande popularité dont jouissait le maréchal. Dans ma propre famille, mon grand-père, ancien combattant de Verdun, a, de son propre aveu, longtemps été pétainiste, refusant de voir dans le chef de la France occupée autre chose que le militaire estampillé héros de la Grande Guerre.

      Sur le comportement de la fonction publique, il est probable qu’il aurait été le même en d’autres circonstances et probablement d’autres lieux, la caractéristique principale de ces corps d’Etat, foncièrement légalistes, étant l’obéissance au pouvoir exécutif en place.


    • Fergus Fergus 24 mai 2013 13:35

      Bonjour, Julius.

      Cous avez raison, on ne parle pas assez de ces Français qui ont sauvé des personnes de la barbarie nazie.

      Cela dit, évoquer un aspect de notre histoire n’empêche pas d’en évoquer un autre. Si j’ai mis cette nouvelle, ce n’est pas pour rabâcher, mais parce que ce texte était en lien (indirect) avec l’interview de Daniel Cordier mercredi dernier sur France-Inter et la diffusion, samedi et dimanche sur France 2, d’un téléfilm tiré de son autobiographie « Alias Caracalla ».


    • Furax Furax 24 mai 2013 14:03

      Entièrement d’accord avec vous Eric. je suis stupéfait d’entendre actuellement d’entendre LA question stupide revenir en boucle : « Vous auriez été de quel côté, vous, en 1939 ? »
      Comme si le passé n’existait pas et qu’un humanité toute neuve se présentait face à notre tribunal.
      Je suis né à la fin de la guerre. Tout repas familial, durant mon enfance, comportait son chapitre « souvenirs de LA guerre ». LA grande guerre, celle de 14-18 qui avait laissé des traces terrifiantes. Toutes la familles avaient comptaient leurs morts, le village de mes parents avait été rasé, mes deux grand’ pères mis au peloton d’exécution par les allemands. Quand on s’émeut d’un mort au Mali 30 000 morts français en une journée (Verdun). Le traumatisme étai terrible et le « plus jamais cela » n’était pas un vain slogan. Alors, quand Pétain qui était probablement le héros le plus populaire de ce temps (il avait gagné Verdun, et avec pour principe d’épargner les vies, ce qui était une nouveauté ahurissantes à l’époque) a proposé l’armistice à Hitler, le soulagement fut quasi général.
      De Gaulle, dans un premier temps ne fut guère rejoint que par quelque braves gens du peuple, (les pêcheurs bretons),de jeunes d’extrême droite comme Daniel Cordier et quelques juifs lucides qui sentaient venir les choses...


    • Fergus Fergus 24 mai 2013 14:36

      Bonjour, Furax.

      D’accord avec votre commentaire. La question « Vous auriez été de quel côté, vous, en 1939 ? », est en effet totalement stupide, eu égard à l’histoire antérieure de notre pays. Comme indiqué par ailleurs, mon propre grand-père était à ce moment un fervent pétainiste, comme des millions de Français ayant vécu la guerre de 14-18.


    • Fergus Fergus 24 mai 2013 20:04

      Bonsoir, Oncle Archibald.

      Bien d’accord avec vous : nul ne peut dire avec certitude de quelle manière il aurait agi dans des circonstances exceptionnelles, particulièrement lorsqu’il y a confrontation à un danger.

      En écrivant « L’homme se découvre lorsqu’il se mesure à l’obstacle », Saint-Exupéry a parfaitement résumé cela.


    • non667 24 mai 2013 10:52

      donc rien de nouveau sur les rn et lhlpsdnh !
      vous auriez pas une histoire palestinienne à nous raconter ? c’est plus d’actualité et on pourrait peut être encore faire quelques choses !
      au moins voter comme il faut  ! smiley smiley smiley


      • Fergus Fergus 24 mai 2013 11:24

        Bonjour, Non667.

        Une histoire palestinienne, pourquoi pas ? Le sort fait à ce peuple et l’attitude verrouillée du gouvernement israélien conduit par Netanyahou sont en effet insupportables. Et malheureusement la minorité de Juifs israéliens hostiles à cette politique est impuissante à faire évoluer la situation vers la finalité pourtant inéluctable : la création d’un véritable Etat palestinien.


      • Fergus Fergus 24 mai 2013 13:38

        Bonjour, Blacklisted.

        Il se trouve que le problème palestinien, toujours pas résolu, reste, qu’on le veuille ou non, au coeur de l’actualité géopolitique. S’y intéresser de près n’est par conséquent pas aberrant.


      • Sacotin Sacotin 24 mai 2013 12:02

        Daniel Renard me ramène à Robert Desnos et à son très simple texte, mais si explicite, « Couplets de la rue Sain-Martin » (1942).






        • Sacotin Sacotin 24 mai 2013 12:04

          J’ai mis le lien pour « Couplets de la rue Saint-Martin » mais il est invisible ?


          • Fergus Fergus 24 mai 2013 13:40

            Bonjour, Sacotin.

            Merci pour cette référence. Je ne connais pas ce texte. J’en note toutefois le titre pour le rechercher et le lire.


          • Pelletier Jean Pelletier Jean 24 mai 2013 12:31

            @fergus,

             

            J’avais déà lu ce très beau texte en modération, un tèmoignage essentiel et une écriture magnifique.... à quand un livre ?

            Amitiès

             

             

            http://jmpelletier52.over-blog.com/

             


            • Fergus Fergus 24 mai 2013 13:44

              Bonjour, Jean.

              Merci pour ce commentaire bien qu’il porte atteinte à... ma modestie. Un livre, je n’y songe pas. Du moins pas pour le moment, bien que je dispose d’une vingtaine de nouvelles déjà écrites et deux autres en cours d’écriture.

              Cordialement. 


            • alberto alberto 24 mai 2013 13:42

              Bravo Fergus : joliment racontée cette histoire.

              Y aura une suite ?

              Je verrais bien les descendants Freyssinet embarques dans une affaire de fraude fiscale allant se refugier en Israël... 

              Moderne, non ?

              Bien a toi.


              • Fergus Fergus 24 mai 2013 13:49

                Salut, Alberto.

                Merci pour ton commentaire. Toutes les suites sont possibles, la tienne ne manquant évidemment pas de sel.

                Bonne journée.


              • alinea Alinea 24 mai 2013 13:58

                Beau texte, qui me laisse perplexe ! Quelle motivation vous a donc poussé à écrire cela ?


                • Fergus Fergus 24 mai 2013 14:16

                  Bonjour, Alinea.

                  Merci pour le compliment.

                  Quelle motivation ? Une question en forme de colle. Je ne suis en effet pas juif, et il n’y a pas eu de collaborateurs ni de dénonciateurs dans ma famille. Peut-être faut-il chercher du côté de mes origines auvergnates et de ma connaissance des bougnats de la capitale (mon père lui-même a été garçon de café avant de devenir serveur de restaurant). Ce qui ne veut évidemment pas dire que la dénonciation des Juifs ait été plus pratiquée par des personnes appartenant au milieu de la « limonade » que par le reste de la population. Cela dit, ce type de délation (en l’occurence particulièrement odieuse) m’a toujours profondément choqué.


                • alinea Alinea 24 mai 2013 14:24

                  Y a-t-il une ambiance générale qui vous laisse penser que les gens n’ont pas changé ? la mesquinerie, la petitesse d’esprit, l’égoïsme qui, quand le pouvoir en place l’autorise, laissent libre cours à toutes les ignominies ? Être traître à ses proches même, sans le courage de parler ?
                  Vous m’avez plombé le moral Fergus ! Ce n’est pas un reproche, je m’en remettrai !!


                • Fergus Fergus 24 mai 2013 14:40

                  @ Alinea.

                  Désolé de vous avoir plombé le moral. Hélas ! je crains que les mentalités et les comportements n’aient pas fondamentalement changé, les Hommes ayant une fâcheuse tendance à ne pas retenir les leçons de l’Histoire.

                  Bonne journée.


                • volpa volpa 24 mai 2013 15:44

                  L’imagination de FERGUS est extraordinaire.

                  95 années ????? Quelques doutes malgré tout.


                  • Fergus Fergus 24 mai 2013 16:33

                    Bonjour, Volpa.

                    L’imagination n’est là que pour habiller des faits qui se sont trop souvent produits à cette époque.


                  • volpa volpa 24 mai 2013 17:07

                    Bonjour FERGUS,

                    Je me disais, 95 ans. Il a des difficultés pour ramasser une photo mais quelle agilité d’esprit.


                  • Fergus Fergus 24 mai 2013 17:22

                    @ Volpa.

                    De nos jours, nombreuses sont les personnes qui ont gardé d’excellentes facultés intellectuelles à l’approche de leur centenaire. Cela a été le cas de Hessel, mort à 96 ans. Un exemple de moins en moins isolé. Et l’on a presque tous, dans notre entourage, des personnes encore très vives d’esprit, qui ont passé le cap des 90 ans.

                    Bonne fin d’après-midi.


                  • ZEN ZEN 24 mai 2013 15:48

                    Salut Fergus

                    Impresionnant, ton récit.
                    Le sais-tu ? les lettres de dénonciation des juifs sont accessibles

                    Bien à toi


                    • Fergus Fergus 24 mai 2013 16:37

                      Salut, Zen

                      J’ai entendu Cordier sur France-Inter. Pour ce qui est des lettres de dénonciation accessibles, je n’en ai lu aucune. Celle que j’ai écrite dans ce récit est par conséquent totalement imaginaire, mais sans doute proche de la réalité d’un certain nombre de courriers de dénonciation.

                      Bonne journée.


                    • non667 24 mai 2013 17:01

                      à fergus

                      Celle que j’ai écrite dans ce récit est par conséquent totalement imaginaire, 

                      incorrigible naïf ! je l’ai prise pour authentique !
                      pourtant je ne crois pas à la v.o. du 9/11,aux armes de destructions massives ,et crois a un complot juif quadrimillénaire !

                      vous répondez ainsi au doute que j’évoquais plus haut :
                      c’est bien un consciemment in fine un pamphlet anti F.N. à ajouter à la lettre de guy moquet et au journal d’anne frank !


                    • Fergus Fergus 24 mai 2013 17:24

                      @ Non667.

                      J’avoue humblement ne pas comprendre votre commentaire.

                       


                    • 65beve 65beve 24 mai 2013 22:02

                      Blacklisted,

                      Mon père a été fait prisonnier à la Ligne Maginot, puis envoyé en Allemagne.
                      Il s’est évadé.
                      De retour à Paris, il a été dénoncé par un milicien puis cette fois envoyé en Pologne jusqu’à la fin de la guerre.
                      Les pourris qui dénonçaient les juifs dénonçaient aussi les évadés, les communistes et les résistants.

                      cdlt


                    • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:48

                      Bonsoir, 65beve.

                      Il y a eu, hélas ! de véritables spécialistes de la dénonciation. Parfois motivés par un intérêt personnel, parfois de manière totalement gratuite.


                    • cedricx cedricx 24 mai 2013 16:10

                      Le texte et le style sont absolument magnifique !!! Merci Fergus.


                      • Fergus Fergus 24 mai 2013 16:38

                        Bonjour, Cedricx.

                        Un grand merci à vous.


                        • A Fergus, une question Peut-être idiote mais dont la réponse que j’appréhende depuis longtemps ne cesse de me « turlupiner » : à votre connaissance y a-t-il eu dans les déportations de juifs, dénoncés ou pas, des familles parmi les plus puissantes - financièrement bien sûr - de la communauté et dont les noms fleurissent toujours dans le monde fermé des « dominants » ?

                      • Fergus Fergus 24 mai 2013 17:32

                        Bonjour, Henri.

                        La question devrait être posée à un historien. Cela dit, les « très-puissants » ont toujours bénéficié d’informations et d’appuis contre les menaces pouvant peser sur eux. Il est par conséquent très probable que ces familles riches ont pu prendre à temps des dispositions pour se mettre à l’abri, notamment en Suisse et aux Etats-Unis. Il semble en outre qu’il soit resté quelques Juifs fortunés en Allemagne jusqu’à une date relativement avancée avec l’accord tacite des autorités nazies.


                        • A Fergus, merci pour votre réponse identique à celle qui me hante depuis toujours. Ah la puissance du fric qui fait que ce sont toujours ceux den bas qui trinquent et trinqueront encore.

                      • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:44

                        @ Henri Diacono.

                        Une loi malheureusement intemporelle et universelle.

                        Bonne nuit.

                         


                      • chems eddine Chitour 24 mai 2013 16:44

                        @ Monsieur Fergus


                        Merci pour ce beau texte poignant que j’ai lu d’un seul trait. Le sort qui est fait aux Juifs a été scandaleux. On peut comprendre qu’ils en soient traumatisés à vie et que pour eux comme pour les autres « Plus jamais çà »
                        Les Israéliens devraient plus que les autres aux douleurs des Palestiniens qui n’en finissent pas de souffrir et la solution leur incombe. Celle de l’égale dignité sur une Terre qui appartient aussi aux Palestiniens qui sont comme eux des cananéens .
                        Ceci me rappelle que les Allemands venus demander à Mohamed V Roi du Maroc de lui donner la liste des Juifs du Maroc s’est vu opposer une fin de non recevoir avec même une demande : « 140 étoiles pour la famille royale » *
                        Mieux encore des algériens au plus fort de l’occupation à Paris éditèrent un texte en kabyle où ils ordonnèrent à tous les Algériens d’abriter des enfants juifs pour les sauver de la rafle du Veld’hiv...les Algériens du FTP sauvèrent beaucoup de Juifs
                        Pour terminer chacun sait le rôle jouée par la Mosquée de Paris dans le sauvetage d’une mort certaine de 1600 juifs 
                        C’est dire si tout le monde s’était senti concerné à l’époque.

                        Encore une fois merci pour ce texte élégant.

                        Pr.C.E.C..

                          • Désolé, Chems, excusez moi, mais j’ignorais que le Maroc avait subi l’occupation allemande pendant la deuxième guerre mondiale. Par contre, je sais pour l’avoir vécu, qu’en Tunisie, Moncef Bey s’était opposé à l’occupant qui voulait identifier les citoyens tunisiens de confession juive pour les déporter. Il en a résulté nulle déportation, pas de croix de David et juste quelques heures de travail obligatoire de petits groupes de juifs séfarades. En récompense, sitôt le pays libéré, Moncef Bey qui avait également refusé de Rommel « l’indépendance » de la Tunisie, s’est vu destitué et exilé en résidence surveilée par...la France.

                        • Fergus Fergus 24 mai 2013 17:43

                          Bonjour, Pr C.E.C.

                          Merci à vous pour ce commentaire et surtout pour ce rappel de l’attitude souvent exemplaire de personnalités et inconnus musulmans en vue de protéger des Juifs de la persécution nazie.

                          Soutenue par les franges les plus réactionnaires et intégristes de la population d’Israel, l’attitude du pouvoir en place à l’égard de la souffrance des Palestiniens n’en est que plus choquante. Choquante et stupide car il ne peut rien sortir de positif de la voie choisie.


                        • cedricx cedricx 24 mai 2013 21:34

                          Un ambassadeur américain à Alger rapporte ce témoignage :  " Durant la seconde guerre mondiale, les fascistes ont essayé de déposséder les juifs en Algérie de leurs biens. Ils ont offerts aux musulmans algériens des récompenses séduisantes s’ils les aidaient. Partageant les idéaux de Abdelhamid Ben Badis, Sheikh Taieb el-Okbi a mobilisé la communauté pour défendre ses voisins juifs, bravant ainsi un grand risque. Les imams à travers le pays ont lancé des fatwas contre le profit occasionné par les souffrances infligées aux autres. En dépit de leur dénuement, aucune personne n’a accepté l’offre des fascistes. Des algériens ordinaires ont fait face à un danger extraordinaire au nom de l’honneur de l’humanité. En saluant ces algériens, le résistant José Aboulker s’est demandé après la guerre, « Connaissez vous d’autres exemples d’une aussi admirable dignité collective ? »


                        • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:03

                          @ Cedricx.

                          Très belle histoire par trop méconnue, et c’est vraiment dommage car la connaissance de faits de ce genre permettrait sans doute d’éviter à nombre de nos compatriotes de prêter l’oreille à des amalgames aussi manipulateurs que dangereux.

                          Bonne nuit.


                        • berry 24 mai 2013 17:37

                          Joli texte Fergus. Bien imaginé

                          je vous encourage à nous faire passer des nouvelles semblables sur :

                          - les victimes palestiniennes depuis 1948
                          - les victimes des esclavagistes dans les amériques
                          - les victimes des goulags
                          - les victimes de la famine organisée en Ukraine dans les années 30
                          - les victimes du terrorisme sous faux drapeau (USS Liberty, hôtel King David par exemple)
                          - et tellement d’autres, la liste est interminable.

                          enfin, si vous avez le temps... sinon, c’est pas grave, hein ?


                          • Fergus Fergus 24 mai 2013 19:33

                            Bonjour, Berry.

                            Il y a déjà eu, plus haut, un commentaire allant dans le même sens. Vous avez raison, tous ces sujets mériteraient d’être abordés. Par moi ou par d’autres.

                            En ce qui me concerne, j’écris ce qui m’inspire à un moment donné, sans esprit militant. Et mes fictions, souvent noires, portent sur des thèmes très différents et rarement politiques. Quelques exemples : La jeune fille au scarabée, La mort au coin de la rue, L’orchidée et l’artichaut, Sharon la flamboyante, Le motard, Les pleurs d’Amélie Poulain.



                            • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:12

                              Bonsoir, Brieli.

                              Merci pour ces liens passionnants, notamment sur l’odyssée du Saint-Louis. Une aventure humaine et politique largement oubliée de nos jours.


                            • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:28

                              Bonsoir, DLSL.

                              Un peu caricatural, non ? Par exemple, en quoi Ch se réjouit de voir massacrer Cb par H ?

                              Vous écrivez « l’histoire m’indique assez de me méfier des larmes de crocodiles s’agissant de cas particuliers : en prenant un peu de recul, on a une vision plus globale du système qui fonctionne quelle que soit C ». N’est-ce pas là une effrayante attitude qui nie les individus pour ne plus considérer qu’une masse communautaire déshumanisée ?


                            • cassandre4 cassandre4 24 mai 2013 22:59

                               Cb ien dit, et Ch ment réel !


                              • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:30

                                Bonsoir, Cassandre.

                                Méfions-nous quand même de la mise d’évènements complexes en équations par trop simples, pour ne pas dire simplistes.


                              • titi titi 24 mai 2013 23:13

                                @Fergus

                                Cette période est une période éminemment complexe.

                                Daniel Cordier était d’ailleurs un militant anti sémite notoire... qui se retrouve au final avec Jean Moulin.
                                Et dans le même temps, Pierre Laval, qui dans les années 30 nomma le premier ministre noir de l’histoire de France (Blaise Diagne) se retrouve a gouverner en compagnie des tenants de la supériorité raciale.

                                Etrange époque. Tragique époque.


                                • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:34

                                  Bonsoir, Titi.

                                  Effectivement, Cordier a été antisémite lorsqu’il était membre des Camelots du Roi. Mais il n’est pas le seul à avoir évolué en s’engageant dans la lutte contre les forces d’Occupation. Aujourd’hui, il admet sans difficulté ce passé d’extrême-droite.


                                • titi titi 24 mai 2013 23:15

                                  Daniel Cordier insiste de façon régulière sur l’indigence des effectifs de la résistance et de la France Libre.
                                  Il nous rappelle ainsi que la France de 39-45 est archi-majoritairement une France « vaincue ».


                                  • Fergus Fergus 24 mai 2013 23:42

                                    @ Titi.

                                    Il est vrai que Cordier souligne l’indigence des effectifs de la Résistance. Il parle même d’un effectif global de 245 000 alors que l’on s’accorde généralement sur le nombre de 300 000 environ, ce qui peut paraître faible. Il convient toutefois de prendre en considération les aides apportées par les populations aux réseaux de résistance ; sans elles, leur action eût été nettement plus circonscrite.

                                    Mais vous avez raison, la France a été un pays vaincu qui a mis beaucoup de temps à structurer sa résistance.

                                    Bonne nuit.


                                  • Fergus Fergus 25 mai 2013 09:28

                                    Bonjour, Selena.

                                    Un grand merci pour ce commentaire. « Qu’aurais-je fait ? » est en effet l’une des questions que l’on ne peut manquer de se poser en portant le regard sur ce passé douloureux.

                                    Difficile de répondre à cette question si l’on fait référence au soutien à Pétain par exemple, comme cela a été souligné dans ce fil.

                                    Difficile de répondre également s’il s’agit d’évoquer un éventuel engagement dans la Résistance.

                                    Plus facile en revanche lorsqu’il s’agit d’actes commis à l’encontre d’autres individus. Vous n’auriez pas pu tondre des femmes à la Libération. Moi non plus. Et sans doute n’auriez-vous pas pu dénoncer une personne au motif qu’elle est juive. Moi non plus. Sur ces plans-là, il suffit de regarder notre vie dans le rétroviseur pour constater si l’on a, à des moments quelconques, dérogé à l’éthique et à la morale.


                                  • brieli67 25 mai 2013 10:18

                                    Et certains diront encore que les notions de droite et de gauche sont dépassées :

                                    Pour ma part, j’aurais tendance à regretter le temps de la Guerre Froide et de la bipolarité :Les repères n’étaient pas comme aujourd’hui noyés dans le brouillard.

                                    Il existe un ouvrage qui dresse le catalogue des différentes interprétations du nazisme :

                                    La question nazie, de Pierre Ayçoberry (en édition de poche)


                                    • Fergus Fergus 25 mai 2013 12:18

                                      Bonjour, Brieli.

                                      Les repères sont effectivement devenus complètement flous, et sur de nombreux sujets, clivages et points d’accord transcendent les partis malgré les postures des uns et des autres.

                                      Merci pour la référence.


                                    • rocla (haddock) rocla (haddock) 25 mai 2013 10:25

                                      Ben oui Monsieur , du temps de la Guerre pas chaude on avait la bipolarité au moins .

                                      Les bipolaires derrière le mur de Berlin et les tripolaires devant . 

                                      C ’avait une de ces gueules , les Vopos et leurs chaussures à crampons . 

                                      On savait à quoi s’ en tenir . 

                                      d’ailleurs c’ était encore mieux avant avant , quand le père Joseph montait ses belles moustaches . 

                                      Une époque de rêve .

                                      • Fergus Fergus 25 mai 2013 12:21

                                        Salut, Capitaine.

                                        Il est en effet des passés et des expériences qu’il vaut mieux ne pas revivre, et le modèle du « Père Joseph » en fait partie.

                                        Cela dit, il serait temps que notre classe politique devienne adulte.

                                        Bonne journée.

                                         


                                      • rocla (haddock) rocla (haddock) 26 mai 2013 08:43

                                        Bon dimanche Fergus .


                                        • Fergus Fergus 26 mai 2013 09:17

                                          Excellent dimanche également, Capitaine.


                                        • Jonas 26 mai 2013 18:08

                                          Voilà un texte pour les ARABO-MUSULMANS.

                                          Déclaration de Tozeur - mai 2009.

                                          « Nous sur le continent africain au colloque de Tozeur ( 1er et 3 mai 2009) autour d’un thème longuement mis à l’ombre dans l’histoire du monde arabe : l’esclavage des Noirs.
                                          Dans un pays , la Tunisie qui s’est préoccupées dès le milieu du XIXe siècle de la question pour aboutir a son abolition en 1846 et en résonance avec notre revendication persistante avant et après la déclaration de 1988 sur les non-dits de nos histoires et ratifiée par l’ONU, nous réclamons à notre tour :

                                          - de condamner cet épisode dramatique de notre histoire , dont les plaies et blessures ne sont pas encore définitivement guéries comme une ignominie de l’histoire 

                                          - que cette trace reconnues et acceptée, soit présente dans notre mémoire , dans nos livres d’histoire ,portée dans la conscience de notre jeunesse pour une meilleure pensée du monde 

                                          - que la construction de notre identité s’affirme en revenant aux sources de notre diversité inscrite aussi dans les souffrances de l’homme noir d’ou sont sortis arts, métissage et liberté.

                                          Signataires.

                                          Edouard Glissant : Philosophe poète et écrivain. La Martinique.

                                          Salah Trabelsi : Historien . France

                                          Abdelhamid Larguèche : Historien . Tunisie.

                                           » A Tozeur, anthropologues et historiens comme Ibrahim Jadla, Jean Schmits pou Esma Dorugnul ont commencé à poser des jalons et à formuler des questions à explorer autour de ce commerce structuré et international, étalé dans le temps et la géographie . Quels étaient les profits des marchands de la traite arabe ? N’y avait-il pas aussi une entreprise massive d’ asservissement des non-musulmans dans la traite orientale ?Quel patrimoine culturel et musical ont légué les esclaves Noirs aux pays trafiquants* ? 
                                          Quels sont les effets de ce silence mémoriel sur les sociétés arabes , et sur les héritiers de cette histoire dans les banlieues d’Europe ? « .

                                          Du VII ème au XIX ème siècle . La » traite orientale « ( Pays arabes) aurait déporté au bout du compte, 17 millions d’esclaves Noirs. C’est le trafic en volume le plus important du commerce négrier.

                                          La » traite Atlantique « ( Europe) , celle qui concerne la déportation des Noirs en Amérique , la plus connue aussi par sa planification et sa logistique pré-industrielle, aura déportée 15 millions de personnes ( et c’est celle dont les arabo-musulmans et leurs compagnons de route parlent le plus souvent ,-c’est moi qui souligne-)

                                          Les traites internes à l’Afrique pré-coloniale quant à elles seraient responsables du déplacement de 14 millions d’esclaves.

                                           Nous avons abordé un thème longuement tabou, relégué dans l’ombre de l’histoire du monde arabe, celui de la traite et de l’esclavage des Noirs. Jusqu’alors , on se concentrait sur la traite Atlantique, raconte , le magnifique et regretté Edouard Glissant . Notre déclaration de Tozeur condamne l’épisode dramatique de l’esclavage et demande que » cette trace soit acceptée et reconnus dans nos livres d’histoire.

                                          A part une minorité éclairée d’arabo-musulmanes , les masses analphabètes et incultes sont les jouets de leurs dirigeants, qui font et défont l’histoire de leur pays selon les points de vues des besoins du moment. 

                                          Ce ne sont pas les historiens libres et indépendants qui écrivent l’histoire dans les pays arabe-musulmans . Ce sont les dirigeants qui dictent ce qu’il faut écrire et ne pas écrire.

                                          PS : J’ai rappelé dans un de mes derniers courriels que le seul chef d’Etat arabo-musulman qui a reconnu et demander pardon aux Africains pour leurs souffrances et l’esclavage était Muammar Kadhafi dans une interview à la chaine TV qatarie Al-Jazeera en 2010.

                                          Par ailleurs je vais cité trois livres qui ne sont pas publiés dans les pays arabo-musulmans traitant de l’esclavage, comme par hasard.

                                          1) « Les traites négrières » Ollivier Pétré- Grenouilleau« . Ed, Gallimard 2004

                                          2) » L’esclavage en Terre d’Islam«  de l’anthropologue . Malek Chebel. Ed. Fayard 2007

                                          3) » Le génocide voilé « enquête historique par Tidiane N’Diaye ( Chargé d’études de l’INSEE et directeur de recherches Sup. de Co Caraïbes. 
                                          Tidiane N’Diaye est anthropologue et écrivain franco-sénégalais.

                                          Son livre est terrible et douloureux à lire en voici un petit extrait :

                                           » Sous l’avancée arabe ( ...) des millions d’Africains furent razziés , massacrés ou capturés , castrés et déportés vers le monde arabo-musulman. Cela dans des conditions inhumaines , par caravanes à travers le Sahara ou par mer , à partir des comptoirs à chair humaine de l’Afrique orientale.

                                          Telle était en réalité la première entreprise de la majorité des Arabes qui islamisaient les peuples africains, en se faisant passer pour des piliers de la foi et les modèles des croyants. 
                                          Ils allaient souvent de contrées en contrées , le Coran d’une main, le couteau à eunuque de l’autre, menant hypocritement une « vie de prière, ne prononçant pas une parole sans évoquer Allah et les hadiths de son Prophète ». Fin.

                                          Les arabo-musulmans passent leur temps à citer des extraits de livres pour des besoins polémiques alors qu’ils sont ignorants de leur propre histoire.

                                          Boutéflika a fait la démonstration grandeur nature qu’ un arabo-musulman est incapable de comprendre et de faire appel à la raison. Donc il est nourri de fadaises et de religiosité.

























                                          • Fergus Fergus 26 mai 2013 22:44

                                            Bonjour, Jonas.

                                            Les faits évoqués - ces razzias massives et nombreuses dans les populations noires - sont une réalité qui est trop souvent occultée et, de ce fait, largement méconnus de nos concitoyens.

                                            Je ne crois pas pour autant que l’on puisse généraliser en écrivant « un arabo-musulman est incapable de comprendre et de faire appel à la raison ». Des discussions sur ce thème, j’en ai eu avec des « arabo-musulmans » qui reconnaissaient ces faits. Mais je vous accorde que ce sujet reste trop souvent tabou dans cette communauté.

                                             


                                          • Jonas 27 mai 2013 12:39

                                            Bonjour Fergus ,


                                            Je précise toujours dans mes courriels « qu’ils existe dans le monde arabo-musulman, des femmes et des hommes admirables de courage. Comme Malek Chebel avec son livre » L’esclavage en Terre d’Islam«  Ed Fayard , 2007 qui corrobore les chiffres donnés par Olivier Pétré-Grenouilleau » Les traites négrières« Gallimard 2004.

                                            Aucun de ces livres n’est diffusé dans le monde arabo-musulman. Par ailleurs, lors de la sortie du livre d’Olivier Pétré-Grenouilleau, en dehors du Cran, cet organisme communautaire, qui avait porté plainte contre l’auteur du livre, beaucoup d’arabo-musulmans se sont acharnés contre O.Pétré -Grenouilleau le traitant de raciste et de colonialiste pour avoir soulevé ce sujet

                                            Alors que le livre de Malek Chebel, lui est passé sous silence du Cran et des Arabo-musulmans.

                                            La même chose en ce qui concerne le nombre de personnes en prison d’origine noire et arabo-musulmane dépassant 60 et 70 %.

                                            L’ essai, du philosophe et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales. Farhad Khosrokhavar, » L’islam des prisons« Balland 2004. Ce livre était passé inaperçu et n’a pas fait la » UNE« des journaux.

                                            En revanche la phrase d’Eric Zemmour fut colportée partout et le Cran et les arabo-musulmans avaient crié comme des écorchés vifs sur des faits indiscutables.

                                            Nous sommes dans un pays où les seules vérités sont celles des minorités agitées et protégées par un grand nombre d’Organisations de toutes sortes.



                                            Ce sont les manuels scolaires des pays arabo-musulmans qui font foi et non les déclarations individuelles en Occident. Il y a un concept religieux nommé » Taqiyya" qui autorise la dissimulation et le mensonge.





                                            • Fergus Fergus 27 mai 2013 13:22

                                              Bonjour, Jonas.

                                              Merci pour ces précisions littéraires.

                                              Pour ce qui est du taux des Noirs et des Maghrébins dans la population carcérale, je ne mets pas en doute cette statistique. Mais ma lecture en est différente : je n’y vois pas la conséquence des origines ethniques des délinquants, mais celle, d’une part, de la grande précarisation, voire de l’exclusion, d’une partie de la population, le plus souvent reléguée dans des ghettos de cité ; d’autre part, de la politique d’abandon des cités, sciemment abandonnées depuis 20 ou 30 ans au développement de trafics par des pouvoirs publics pratiquant « la part du feu » dans l’espoir de circonscrire les difficultés sociales à ces seuls territoires.


                                            • Jonas 28 mai 2013 10:16

                                              Bonjour Fergus,


                                              Moi, je ne peux expliquer tout par la détresse comme vous le faites et comme certains le font, pour essayer d’éviter d’analyser correctement le problème.

                                              Connaissant le monde arabo-musulman et ayant travailler dans de nombreux pays. Je peux certifier que les « jeunes de banlieues » vivent cent ( 100) fois mieux que dans n’importe lequel des 57 pays que constitue le monde arabo-musulman. Je dis bien 100 fois mieux ’(En dehors des Emirats pour les princes et pour les princes seulement)

                                              La preuve c’est que des femmes et des hommes fuient ces pays ne vont pas pour aller vivre dans un quelconque de ces pays, mais en Occident , Europe-Etats-Unis- Canada- Australie etc.

                                              Malgré une croissance de 5 à 6% très peu de Turcs par exemple sont retournés vivre dans leur pays..( 450 000 en France et 2 à 3 millions en Allemagne sans parler des autres pays)

                                              Non le chômage, la détresse, la souffrance ne peuvent pas pousser des gens à se faire exploser dans les mariages, mosquées, écoles , maternelles, marchés , cimetières ni à égorger ou ouvrir la poitrine de son adversaire pour bouffer son coeur.

                                              Je suis obligé de constater que vous ne répondez pas a ma question comme le l’ai suggéré à savoir : Pourquoi, ni Farhad Khosrokhavar ni Malek Chebel ne furent attaquer ni désigner à la vindicte publique pour leur livre ?

                                              Par ailleurs, comme je l’ai signalé, il existe des arabo-musulmans ( très peu selon moi) courageux. En voilà un .

                                              L’écrivain Algérien Rachid Boudjedra évoque dans son roman « Maâkatou Ezoulak » (La prise de Gibraltar ) sur l’entrée des musulmans en Andalousie . 

                                              " On parle peu , mais il s’agit bien d’une colonisation dit-il, il faut avoir le courage de le dire. Nous avons colonisé et nous avons esclavagé , les autres. Bien avant les Portugais. Les Arabes étaient des esclavagistes , il y a encore des non-dits a-t-il souligné .

                                              Donc cher ,monsieur Fergus, n’essayer pas d’occulter la réalité comme le font les historiens arabo-musulmans .



                                              La Turquie est un autre exemple flagrant de cette amnésie, arabo-musulmane concernant le génocide arménien.
                                              D’ailleurs très peu de manuels scolaires dans les pays arabes parlent de la colonisation des Ottomans pendant + de quatre siècles des pays arabes à l’exception du Maroc.

                                               Ils ne se souviennent que de la colonisation européenne et de l’esclavage dû aux Occidentaux. Pourquoi ? l’Enseignement.
                                              Le reste n’a jamais existé.

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