District 9 : le patchwork SF fabuleux de Neill Blomkamp
Dans le futur, des extra-terrestres se seront implantés sur Terre. Après des années passées sous quarantaine, ils sont libres d’aller et venir mais sont victimes d’une nouvelle forme de discrimination. Dans ce contexte, San Francisco est le premier officier de police extra-terrestre. Son partenaire est un vétéran de la police raciste. Ils devront surmonter leurs différences pour mettre à mal les complots des dirigeants extra-terrestres.
Le Neill Blomkamp commençait mal dans mon esprit. WTF ! Des extra-terrestres atterrissent sur Terre et sont traités comme des parias. Une apologie contre le racisme à peine voilé. En plus, en Afrique du Sud, dans Johannesburg, et de son mythique township Soweto (que l’on a l’impression de voir tout le film), bidonville symbole de l’apartheid. Mazette, Cliché à tous les étages. Allait-il mettre les pieds dans les gros sabots, le Blomkamp ?
Le premier teaser a effacé une partie de mes craintes. Un faux documentaire présentant l’arrivée d’un vaisseau au-dessus de la fameuse ville de Johannesburg (genre V, dont la nouvelle série commence sur ABC), des insectoïdes sifflotant en guise de langage (mais moins effrayants que dans Independance Day), un ghetto créé spécialement pour eux : District 9. Une bande-annonce a suivi, montrant le potentiel du métrage. Un campagne marketing parfaite avec une aura de mystère qui a marché sur moi.
La première image du métrage fait immédiatement penser à The Office (façon US) : Wikus Van De Merwe
(joué par Sharlto Copley, qui a gagné ses galons de Looping Murdock dans l’adaptation filmique de l’Agence Tout Risque) a un chandail élimé, une mèche collée avec des litres de gel, et disons-le, une bonne tête de gland. Nommé parce qu’il est le gendre de la mariée, il a pour mission de notifier aux « mollusques » (prawns en anglais) qu’ils vont être expulsés de D9 (le Disctrict 9 relocation program).
20 ans que les mollusques sont là. Personne ne sait pourquoi, ni comment. Ils sont restés là, et la Communauté internationale a forcé les Sud-Africains à s’en occuper. Dans cette première partie du film, où l’on comprend que les ET sont là par hasard, ghettoïsés, mis dans une banlieue sordide, entourés d’un mur et de grillages, parfois même mis en esclavage, mais interdit de tous loisirs humains, la cohabitation semble impossible. Les images sont cruelles pour nous humains. Cela nous rappelle pêle-mêle la découverte des Camps de la mort Nazis avec ses photos de victimes décharnés (lors de la scène très rapide de premier contact) Calcutta et ses décharges à ciel ouvert, les indications White-Only dans les bus, les toilettes, les restaurants… des états du sud des USA dans les années 50-60 (les panneaux anti-extraterrestres), les émeutes de banlieues (Grèce, France, Etats-Unis, vous avez le choix), l’esclavage, le trafic d’armes et même la prostitution. Et de la xénophobie à tous les étages. Blomkamp réussit son premier patchwork : l’Humanité a reproduit toutes ces erreurs en une seule fois. La seule préoccupation des humains est de vendre des armes, et de déplacer le problème. L’un des buts de la MNU est de trouver des armes extra-terrestres et de les reproduire.
Ce n’est que juste après que Wikus soit aspergé du « fluide noir » que le mockumentary bascule. Le documentaire est en fait sur Wikus. Sur sa transformation. Le film bascule alors dans sa partie infected : la transformation de Wikus en « mollusque ». Et devient alors proche d’un de ces films de genre de personnes atteintes d’un virus mystérieux ou qui deviennent des zombies ou des monstres sanguinaires. Mutants, 28 jours plus tard, et se rapproche ainsi du film espagnol REC, voir du Romero Diary of the Dead. Deuxième patchwork.
Wikus mute donc et c’est encore l’humanité qui prend. De véritables docteurs Mengele font des expériences sur les mollusques. Uniquement pour la biotechnologie et les armes qui ne peuvent fonctionner sans l’ADN ET.
Wikus s’enfuit et nous arrivons dans la partie survival. Il revient dans D9 pour retrouver Christopher, le mollusque qui possédait la maison où était le fluide. Pour guérir Wikus, il faut des armes. Ils vont donc demander au Scarface nigérian invalide du coin, qui mange des morceaux d’ET pour retrouver ses jambes. Des armes que seuls Wikus est capable de faire marcher.
Le métrage devient un COPS vidéo-ludique, dans lequel on ne fait même pas la différence entre les truands et les militaires ( »Un mollusque, une balle, et dire que je suis payé pour ça »), qui n’ont qu’un seul but, ramener Wikus, Dead or Alive. Wikus n’a qu’un seul but, survivre. Et Christopher n’a qu’un seul but, faire survivre son peuple, tombé sur la mauvaise planète.
La fin du film nous rappelle furieusement que Neill Blomkamp devait à l’origine diriger la version cinématographique du jeu Halo, avec une orgie d’explosion et d’effets spéciaux parfois invisibles dans cette ambiance photo-réaliste qui nous a mené tout le long. A la fin de l’homme Wikus. Au début de Wikus, le mollusque. Et au District 10.
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