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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > L’édition face à son destin

L’édition face à son destin

L’édition demain sera radicalement différente. La presse quotidienne va servir de fer de lance pour habituer les lecteurs à de nouveaux supports de lecture. Édition, universités, centres de recherche et auteurs indépendants suivront, pour fournir du contenu.

Historiquement, l’édition est liée à l’imprimerie et à la librairie.

L’histoire de l’édition, c’est d’abord l’histoire de l’imprimerie. Nous pouvons la faire débuter en 1440, avec la mise au point par Johann Gensfleish, dit Gutenberg, du procédé de l’impression typographique.

Faisant commerce du livre, les imprimeurs étaient également des sortes de libraires. Progressivement, à partir du dix-huitième siècle, le statut d’éditeur, tel que nous le concevons, émerge, avec quelques particularismes.

Jusqu’à cette époque et longtemps après encore, les auteurs s’autoéditent, soit avec l’assistance d’un mécène, soit avec un crédit du libraire imprimeur.

Traditionnelle, l’édition reste artisanale par bien des aspects.

Si l’édition semble, ces dernières années (de 1990 à 2006, disons...) avoir absorbé l’impact des nouvelles technologies de l’information et de la communication, en fait, il n’en est rien. La chaîne s’est emballée : augmentation exponentielle de titres, de collections et de retours (invendus). L’économie faisant loi, l’édition a bien été forcée d’assimiler l’impression numérique et de s’accommoder de l’industrie de l’entertainment. Pour le reste, son utilisation d’Internet comme arme de vente et de développement reste timide. L’édition électronique reste marginale. Les “professionnels de la profession” rechignent à s’investir sur la Toile dans un Web littéraire très riche mais laissé aux mains des amateurs. La préparation du marché et des lectorats à l’émergence de nouveaux appareils et systèmes de lecture est inexistante.

La presse quotidienne sera le cheval de Troie du papier électronique.

La révolution du support papier se prépare pendant ce temps. Le Projet SFN (Shaping the future of the newspaper : Forger l’avenir des journaux) se poursuit d’année en année, avec l’AMJ-WAN (Association mondiale des journaux, World association of newspaper), et les industriels partagent les mêmes objectifs.

La présentation de Plastic Logic lors du Congrès mondial des journaux (Séoul, 29 mai-1er juin 2005) est claire sur ce point : "Plastic Logic [...] est impatient d’engager le dialogue avec les rédacteurs en chef et les éditeurs du monde entier. Nous sommes le principal concepteur d’électronique dite plastique. Notre approche unique de l’électronique imprimée nous permet d’offrir des affichages flexibles de haute résolution, impossibles jusqu’ici. [...] Nos affichages sont fins, flexibles, portables et équipés d’une connexion sans fil. Ils offrent une plate-forme idéale pour le e-journal, tant pour le lecteur que pour le vendeur de journaux. En qualité de nouveau membre de l’AMJ, Plastic Logic Limited se réjouit de participer au Projet SFN pour façonner l’avenir du journal." (Stuart Evans, PDG, Plastic Logic Limited).

Presse et édition : vers une fédération de l’écrit.

Une fois ce nouveau support du papier électronique testé sur le marché et les utilisateurs habitués à son usage, l’édition sautera alors le pas. Mais seulement pour fournir des contenus spécifiques, et non plus pour produire des livres.

Si depuis le dix-neuvième siècle presse et édition sont sporadiquement en concurrence sur le marché de l’écrit, si, récemment, les ventes couplées (un journal/un livre) ont provoqué quelques grognements dans les syndicats de libraires, l’entente de raison est à court terme inévitable.

Aujourd’hui, édition et presse sont confrontées à deux problèmes communs. D’abord, la place de l’écrit dans le commerce culturel et dans l’industrie du divertissement. Ensuite, l’adaptation à la nouvelle donne économique, progressivement engendrée par les nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Nous prenons comme révélateur du rapprochement le colloque “Presse, édition : vers de nouveaux modèles”, organisé le 24 novembre 2005 par le SPCS (Syndicat de la presse culturelle et scientifique). Notons que Pascal Fouché, secrétaire général du SPCS, est par ailleurs directeur du développement d’Électre, et que le président du syndicat n’est autre que Jean-Marie Doublet, directeur général d’Électre -Électre étant la plus importante base de données bibliographiques et la société éditrice de Livres Hebdo, magazine des professionnels du livre.

Ce sont sans doute les meilleurs interlocuteurs pour travailler à une fédération de l’écrit entre la presse et l’édition (Cf. Livres Hebdo 624, page 54).

Disons-le clairement : il n’y aura pas d’ebook.

Il y aura, bientôt, de nouveaux appareils, dédiés spécialement à la lecture et sur lesquels nous pourrons tout aussi bien lire notre quotidien du matin que notre roman du soir, d’où la nécessité d’un rapprochement entre les différents fournisseurs de textes.

L’Electronic Reader Iliad ER100 d’iRex Technologies (Philips), mis au point dans cette optique, devrait être commercialisé sur Internet en avril 2006. C’est avec cet appareil de lecture que se déroule le "Test ePaper : Digitaal papier". Deux cents abonnés du journal belge De TIJD testent ainsi le produit.

Ces ebooks ne sont encore que des produits de première génération. Les appareils de lecture de deuxième génération auront une meilleure maniabilité, une autonomie plus longue, et, surtout, ne seront plus rétroéclairés mais réflecteurs.

Si, dans notre précédent article “Métamorphose du livre”, nous nous sommes attachés aux aspects positifs des ebooks, il est juste d’en indiquer ici les points négatifs :

- Maniabilité et poids

- Autonomie

- Confort de lecture (support qui émet la lumière)

- Tendance à induire une lecture zappée (effet négatif de l’hypertexte). Les appareils issus des recherches sur le papier et l’encre électroniques devraient remédier à ces défauts de jeunesse, en tout cas, pour les questions de maniabilité, de poids et de confort de lecture.

En ces premiers jours de janvier 2006, dans le cadre du Consumer electronic show (CES) de Las Vegas, Sony vient de lancer son terminal de lecture Librié sur le marché américain. Commercialisé depuis 2004 au Japon, ce modèle adopte toujours l’aspect d’un ebook. Ses concurrents directs, qui devraient arriver sur le marché entre 2007 et 2010, sont majoritairement issus de filiales de Philips. Par exemple, Polymer Vision travaille sur des écrans souples et des terminaux de lecture qui ne seront pas sans rappeler les rouleaux de parchemin d’antan, avantages du numérique en plus !

L’édition est appelée à se recentrer sur le contenu et la relation avec l’auteur.

Si l’édition, par la force des choses, s’émancipe donc aujourd’hui des techniques d’impression, elle sera néanmoins soumise durant quelques années encore aux techniques de numérisation. Les nouveaux procédés qui permettent d’accélérer la numérisation des livres se succèdent mois après mois.

Parallèlement, les auteurs, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, peuvent eux-mêmes se saisir des outils de production et de diffusion. Ils acquièrent une indépendance qui renforce leur liberté d’expression.

En jouant la synergie Web-papier, l’autoédition retrouve un deuxième souffle. A côté des possibilités nouvelles d’impression numérique, d’édition en ligne, de création de son propre site, de son blog, etc., de nouveaux outils logiciels apparaissent. Leurs objectifs : faciliter la création littéraire, permettre le passage à l’acte pour écrire, publier et diffuser.

En conclusion, le destin de l’édition est bel et bien de se recentrer sur le texte et la relation à l’écrivain, en revalorisant ses fonctions nobles, progressivement conquises au cours des siècles précédents, de validation éditoriale et de suivi des auteurs. Faute quoi tout le monde pourrait bien devenir un jour fournisseur de contenu.

Évolution, ou révolution ? C’est peut-être aujourd’hui qu’il faut choisir.

Un blog est dédié à cette actualité en marche...

Les sujets d’actualité évoqués dans cet article font régulièrement l’objet d’informations sur le blog de veille Nouvolivractu.

La vocation de ce blog est d’accompagner lecteurs et partenaires de la chaîne du livre dans l’appropriation des nouveaux appareils de lecture.

Soyons franc : l’auteur de cet article et l’auteur du blog en question sont une seule et même personne.

Nous avons lancé ce blog, et nous écrivons ces articles pour susciter le débat. Tant AgoraVox que Nouvolivractu recueillent volontiers vos commentaires.

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1 réactions à cet article    


  • Sylvio (---.---.13.120) 10 janvier 2006 23:31

    Les livres électroniques n’émettent pas de lumière. J’ai lu récement une présentation technique d’un appareil « livre électronique ».

    Il ne consomme de l’énergie que lors du changement de page et l’article disait à ce propos qu’il avait donc une autonomie importante (au moins 7500 changement de pages) : http://www.clubic.com/actualite-30664-ces-06-sony-presente-son-livre-electronique.html

    Si il ne consomme pas d’énergie lors de l’affichage (et non le changement de page), cela induit qu’il ne diffuse pas de lumière (comme les cristaux liquides mais ce n’est pas cette technologie).

    Le seul fait qui m’inquiète sur les livres électroniques est les protections type DRM et leur virtualité (les oeuvres ne pourront pas vivre des siècles) : Pourra-t-on s’échanger, donner librement des livres ? Les livres deviendront-ils des objets de marchandise vendu à prix fixe comme les single WMA ou AAC ? J’en ai bien peur. Encore une fois le business passera devant la culture et la transmission des écrits de l’homme.

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