« L’effacement soit ma façon de resplendir »
Toute en retenue, effacée et même transparente, la démarche du poète Philippe Jaccottet semble tenir tout entière dans ses vers célèbres de "L’ignorant" : "Plus je vieillis et plus je croîs en ignorance, plus j’ai vécu, moins je possède et moins je règne." Croître en ignorance semble inéluctable au poète qui ne se fait guère d’illusion. Tel est le poète qui ne cherche pas à posséder ou à régner. Le peu de bruit qu’il produit ne contribue pas à sa popularité.
L’un des plus grands poètes de notre époque aime à se faire discret. Heureusement qu’il est quelquefois tiré de son relatif oubli par des amoureux des lettres qui nous en rappellent l’existence si frêle. A l’occasion d’un texte que Jaccottet a écrit pour l’exposition de l’oeuvre de sa femme (aquarelles et dessins, à la galerie Alain Paire à Aix-en-Provence jusqu’au 31 décembre), Pierre Assouline rend sur son blog, "La République des livres", un nouvel hommage au poète, écrivain et traducteur Philippe Jaccottet, dont la notoriété n’est peut-être pas à la hauteur de son talent. Son dernier recueil, "Ce peu de bruits" prend le contrepied de l’époque que l’on dit au bling bling.
Installé avec son épouse depuis 1953 dans la Drôme, cet auteur suisse ne se montre guère. Le poète, également traducteur de Rilke, de Leopardi et de Hölderlin (ce qui n’est pas une mince affaire !) est aujourd’hui âgé de 83 ans. Hélas la Faucheuse a emporté ses compagnons de route : André du Bouchet, Louis-René Des Forêts entre autres, et le voici jeté dans un hiver définitif, confronté à des "Paysages avec figures absentes" (du titre de l’un de ses recueils). Il y a ce peu de bruits qui parvient encore à atteindre le coeur du poète dans la solitude endeuillée des amis disparus.
"Tant d’années,
et vraiment si maigre savoir,
coeur si défaillant ?"
("Pensées sous les nuages", 1983)
Ces vers retrouvent cette obsession que clamait l’Ignorant" : "Plus je vieillis et plus je croîs en ignorance, plus j’ai vécu, moins je possède et moins je règne."
On a vu très tôt disparaître de l’oeuvre du poète tous éléments autobiographiques, qui perçaient à peine dans quelques poèmes de "L’effraie" (recueil 1946-1950). Les poètes ne sont que "les bègues à la voix briséé" dit Philippe Jaccottet, lui qui autrefois pourtant - un autrefois imaginaire ? -...
"Autrefois
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