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Le Paris-Montmartre de Toulouse-Lautrec

Quelquefois, le destin met un malin plaisir à faire les choses. Si Henri de Toulouse Lautrec n''était pas venu au monde avec une maladie osseuse l'obligeant à arrêter l'équitation, il n'aurait pas dessiné les chevaux avec une telle fougue, par compensation de son immense frustation. Par suite, il n'aurait sans doute pas connu l'essor et l'effervescence de Montmartre en tant qu'artiste qui fera sa spécialité des peintures de danseuses du Moulin-Rouge.



Henri de Toulouse-Lautrec est issu de la vieille noblesse de France. Mais, à cause des mariages consanguins de sa famille, dont le mariage de ses parents - cousins entre eux -, il eut à subir les séquelles d'une maladie osseuse qui bloquèrent la croissance de ses jambes.

Henri est très aimé de sa famille. Avec sa mère, il entretient une complicité mais l’incompréhension régnera toujours avec son père. Il cesse de grandir à l’âge de 13 ans à cause de sa maladie osseuse qui occasionne deux chutes avec rupture des fémurs. Il n’est pas nain, il mesure 1 mètre 52 mais ses jambes sont très courtes.

Il va devoir renoncer à l’équitation. Il vivra désormais sa passion des chevaux à travers ses œuvres. Puis il étend sa passion du dessin auc caricatures. Il parodie le « Bois sacré cher aux arts et aux muses » de Puvis de Chavanne à la manière des comédies musicales d’Offenbach. Paris l'attire déjà...

Un Albigeois à Montmartre

Le peintre d’Albi se transforme en découvrant Montmartre où règne un grand brassage de classes sociales. Il y fait la connaissance d’Aristide Bruant qui ouvre le cabaret « Le Mirliton » à l’emplacement du Chat Noir. , Toulouse-Lautrec orne les murs de toiles qui représentent des filles qui illustrent les chansons de Bruant. Ainsi, Nini Peau de Chien est incarnée par Jeanne. Carmen Gaudin incarne Rosa-la-Rouge de la chanson « A Montrouge ». Cette rousse pose aussi pour "La Blanchisseuse". Pour vous faire une idée de l'ambiance de chez Bruant, voici un extrait sonore d'époque : la chanson "A la Bastille" par Bruant lui-même. Il fait le portrait d’Emile Bernard, et de Van Gogh à qui il conseille de s’installer dans le Midi.

Toulouse-Lautrec, l'affichiste qui s'affiche

Il devient un affichiste très demandé après avoir réalisé l’affiche du Moulin Rouge (ci-dessus) représentant la Goulue (Louise Weber dite) et Valentin le Désossé (Auguste Renaudin dit).

Lautrec simule des départs en voyage ou en cure pour se rendre dans des bordels non loin de chez lui. Son premier et peut-être unique amour sera Suzanne Valadon. Celle-ci sera la mère du peintre Utrillo. Elle a posé pour plusieurs peintres comme Auguste Renoir : voir ici une vidéo de toiles et photos de Suzanne Valadon. Comme elle aussi très petite (2 cm seulement de plus que le peintre), Toulouse-Lautrec se plaît en sa compagnie et veut l'épouser. Comme la belle refus, leur relation prendra fin. Mais Lautrec aura décelé le talent de Suzanne et l'aura fait connaître de Degas qui, enthousiaste, en fera son élève et sa protégée.

Toulouse-Lautrec et les femmes

(Cha-U-Kao au bras de la Grosse Gabrielle. A droite, on peut voir Tristan Bernard).

Au « Divan japonais », il peut voir se produire la chanteuse Yvette Guilbert (la dame aux gants noirs) - découvrir Yvette Guilbert sur cette vidéo, chantant"Le Fiacre" - et la danseuse Jane Avril (la fille au chapeau). Au Moulin Rouge, la clownesse Cha-U-Kao, Grille d’Egout (ainsi nommée à cause de sa dentition) et la Goulue (au chignon roux caractéristique).

Henri Toulouse-Lautrec et Jane Avril deviennent amis. Jane dite la Mélinite (substance proche de la dynamite) change souvent de « protecteur » et elle a pour amant Alphonse Allais. Cultivée, elle fréquente notamment Paul Fort, Mallarmé, Verlaine t Huysmans. Contrairement à La Goulue et aux autres danseuses, elle danse avec pudeur et sans vulgarité. C'est elle qui exportera au début du XXe siècle le french cancan dans les principales capitales européennes, au Palace Theatre de Londres comme à Madrid.

Lautrec se lie d’amitié avec le couple Natansson. La silhouette de Missia Natansson orne l’affiche de la Revue Blanche.

Il admire la danseuse extravagante Loïe Fuller. Ainsi que la danseuse faussement japonaise Cha-U-Kao (jeu de mots avec « chahut », danse précédent le cancan, et « chaos »). Il peint la danseuse Loïe Fuller et sa grande robe qu’elle fait voltiger pour réaliser des figures (vidéo d'une prestation artistique de Loïe Fuller, 1902). Il fait aussi le portrait de May Belfort, une Irlandaise concubine de May Milton et amie de Jane Avril. Lautrec va d’ailleurs dédier une dizaine de toiles aux amours saphiques.

« Lassitude » constitue l’image finale de son album « Elles » consacré aux courtisanes et aux modèles. Les œuvres de cet album sont d’une cruelle vérité. Lautrec ne craint pas de recevoir le marchand d’art Paul Durand-Ruel dans un bordel où il tient son atelier.

Toulouse-Lautrec et La Goulue

La Goulue exécute la « quadrille naturaliste », dérivé du french cancan où il fallait passer la jambe derrière la tête et terminer par un grand écart en poussant un cri strident. Elle exécute aussi la figure dite de la « guitare », une figure du chahut.

Après trois ans de succès, elle se met à son compte à la Foire du Trône ou, à sa demande, Toulouse-Lautrec décore sa baraque. Voir vidéo des photos de la Goulue et un court passage filmé en 1925.

- Panneau de gauche

« La Goulue dansant au Moulin Rouge » : Il s’agit d’une référence au passé glorieux de la Goulue. Moins coloré que le panneau de droite qui évoque le présent. Dans le public, on peut voir Jane Avril et son grand chapeau, le père la Pudeur à gauche qui veille au respect des moeurs.

- Panneau de droite

"La danse mauresque ou les Almées" : On voit Oscar Wilde de dos et privé de couleurs, Lautrec lui-même, la Goulue levant la jambe à sa manière qui n’est pas à la manière d’une danse mauresque.

Découpées en morceaux, ces deux oeuvres seront vendues séparément et reconstituées en 1929. Sauf une partie manquante : le morceau où l’on voit la Goulue lever la jambe. Ce morceau central, qui cachait la porte d’entrée de la baraque, sera récupéré en 2007.

La Goulue va vite connaître la décadence et mourra à 54 ans.

Toulouse-Lautrec, illustre illustrateur

"Chocolat dansant dans un bar"

Grâce à l’influence de son ami d’enfance, Maurice Joyant, qui devient marchand d’art en succédant à Vincent Van Gogh, Lautrec va se faire connaître comme illustrateur d’œuvres littéraires.

Toulouse-Lautrec collabora ainsi avec des écrivains tels que Jules Renart. Mais aussi avec “Le Rire”, le plus réussi des journaux humoristiques de la “Belle Epoque” (les dernières années du XIXème siècle). Il fit dix remarquables illustrations en couleurs, et sept en noir et blanc, rien que pendant les trois premières années de publications (Octobre 1894 – Octobre 1897).

Toulouse-Lautrec interné

Suite à une crise de delirium tremens, il sera interné en clinique par sa famille. Il devra suivre une cure de désintoxication. En 1900, sa mère est obligée de réduire sa pension car la vigne rapporte moins. En 1901, très affaibli, il fait un pèlerinage auprès de tous ceux qu’il a bien connus et meurt dans sa famille à l’âge de 36 ans.

Une fois sorti, Lautrec peint l’album dédié au cirque. On y voit notamment la clownesse Cha-U-Kao. « La Belle Hélène » est inspirée d’Offenbach.

L’œuvre de Toulouse-Lautrec

"La Blanchisseuse"

Quatre périodes jalonnent la carrière de Lautrec. Il y a d'abord la période des influences familiales, puis la période de formation et d’influence impressionniste (chef-d’œuvre représentatif de cette période : "La Blanchisseuse" : ci-dessus). Durant la période postérieure à 1890, il néglige la couleur au profit du dessin (« Danseuse de dos »), et enfin il connaît une période plus empâtée et sombre à partir de 1897.

Lautrec va au théâtre, moins pour y voir les pièces que pour observer les comédiens. Tout comme il adore s'amuser à scruter sur les visages de ses hotes les effets de l’abus d’alcool (il les saoule volontiers) ou de la lecture de son livre coquin d’estampes érotiques.

Vidéo des oeuvres de Toulouse Lautrec sur des musiques d'Offenbach : Gaîté parisienne (ouverture), Orphée aux Enfers (air très populaire emblématique du french cancan) ; La Vie parisienne (ouverture).
 

 


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9 réactions à cet article    


  • Taverne Taverne 7 janvier 2013 14:27

    Born to lose, Lautrec...

    Si je me permets un recours à l’anglais pour ce calembour, c’est parce que Toulouse Lautrec parsemait ses lettres de mots anglais. Par exemple, il commençait par « dear sir » et terminait par « Je vous embrasse. Yours ».


    • alberto alberto 7 janvier 2013 15:57

      Toulouse-Lautrec : un livre de mémoire illustrant magnifiquement cette époque terrible...

      Sinon de passage à Albi, visite de l’intérieur de la cathédrale Ste Cécile, et visite obligatoire du musée Toulouse-Lautrec : c’est juste à côté, mais tu en as pour la journée !

      Salut Taverne et bravo pour tes clips.


      • Taverne Taverne 7 janvier 2013 19:06

        Salut Alberto. Je réalise mes clips par plaisir égoïste. Je les fais partager pour provoquer du bonheur collatéral. smiley


      • alberto alberto 7 janvier 2013 17:53

        Re-salut,

        Ce soir, sur la cinq, si toutefois la propagation hertzienne arrose bien ton Armorique adorée, voir « Le vernis craque », ça pourrait être intéressant.

        @+ : alberto


        • Taverne Taverne 7 janvier 2013 19:03

          Merci pour l’indication. Mais je préfère un bon documentaire (comme la série des « Palettes ») à un médiocre téléfilm. Or, il semble que ce soit ici un médiocre téléfilm. Et comme il se trouve que je suis un cinéphile averti, amateur de cinéma d’auteur, je dis « tant pis ! »


        • rocla (haddock) rocla (haddock) 7 janvier 2013 19:08

          Très inspiré  Henri Toulouse . 


          A dû connaître un destin difficile .

          Artiste poignant , oeuvres magnifiques .

          • S.C. 9 janvier 2013 09:25

            Article très intéressant !


            • SALOMON2345 13 janvier 2013 10:58

              Jamais on ne s’en lasse ! Selon moi, HTL est le plus grand dessinateur « moderne », également un coloriste « dingue » (au sens de génie), le choix de ses sujets (l’époque y contribue certes) et son absolue liberté en font - avec Cl. Monet - l’un des artistes (parmi 4 ou 5 encore) le plus « révolutionnaire »... mais tout cela est bien subjectif... quoique...

              Salutations.

              • Taverne Taverne 13 janvier 2013 17:21

                Petite chanson improvisée en hommage à Jacques Offenbach dont la musique illustre la vidéo.

                I

                J’écoute chanter la Barcarolle
                Par la fille du bar, Carole.

                Ainsi va la vie parisienne.
                J’la préfère à l’Arlésienne.

                II

                J’écoute les contes d’Hoffman
                Allongé dans ma cabane.

                Les oiseaux dans la charmille
                Sont un peu de ma famille.

                III

                Ils sifflent un prélude de Bach,
                Et des chansons d’Offenbach.

                Moi, enveloppé dans une laine,
                Je rêve de la Belle Hélène.

                IV

                J’envie le Barbier de Séville
                Sur le vieux phono qui grésille.

                Belles nuits, belles nuits d’amour
                Elles sont à lui pour toujours.

                V

                Dans les bras d’Morphée,
                Sans m’en faire,

                Moi, j’écoute Orphée
                Qui french cancanne aux Enfers...

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