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Accueil du site > Culture & Loisirs > Étonnant > Un désert de jeunesse pour le troisième âge américain

Un désert de jeunesse pour le troisième âge américain

Tous les ans à la même époque, lorsque le froid s’invite dans les Etats du Nord, des centaines de milliers de retraités américains lèvent le camping-car pour retrouver la douceur d’une aventure en plein cœur de l’Arizona hivernal et rejouer au passage, le grand folklore de la conquête qui anima un temps, les vastes plateaux orifères de l’Ouest états-unien.

Ville éphémère, plantée de mobil-homes et de pick-up, parcourue de chemins terreux et irradiée d’un fin voile solaire, la "mobilcity" de Quartzsite est le théâtre d’un étrange rassemblement qui vient rythmer de manière quasi cyclique la "morte" saison, et donner au désert un petit air de Woodstock pour club du troisième âge.

Les snowbirds, retraités de l’"Amérique profonde" sont ces pionniers de l’automobile qui voient débarquer durant les décennies qui succèdent à la Seconde Guerre mondiale, "Sedans" et autres "Hardtops", au volant desquels ils vont parcourir les routes à la rencontre d’un hypothétique et souvent, inaccessible rêve américain.

Des snowbirds qui n’ont pour la plupart qu’effleuré la chaleur de ce libéralisme rêvé ; ... l’échec d’une vie, qu’aujourd’hui ils tentent de distiller au travers du rassemblement de Quartzsite, seul moyen pour beaucoup de ces seniors, de repousser toujours la mort et d’éterniser, aussi, une jeunesse qui voyait leurs esprits chargés d’un espoir égoïste.

Là-bas, rien ne manque aux occupations quotidiennes des quelques centaines de milliers de papis et de mamies routards.
D’abord, on organise les campements et puis on se regroupe jusqu’à former un vaste cercle composé d’une dizaine de caravanes. On discute et puis on joue. On écoute la radio locale qui dispense entre deux interviews de septuagénaires quelques conseils médicaux, on regarde la télévision étendu sur le canapé, le chien logé au creux de la hanche et de l’accoudoir...

Retraités atypiques aux vies modestes, sans attaches ni trop d’argent, les habitants de cette "cité" provisoire, symptomatique de l’hyper-mobilité de l’"Amérique" contemporaine, paraissent fuir le temps de quelques jours, la réalité de leur passé, de leur avenir et celle de leur pays.

On vient donc à "Quartzsite-city" pour oublier et puis pour se souvenir.
Se souvenir de ces années passées ici, à oublier, entre frères et sœurs d’une Amérique un peu mise de côté, vieillissante et pas très argentée.
On se souvient des raisons qui nous ont poussés à venir nous arrêter ici au cœur du désert.

Le soleil. C’est le mot, la raison qui revient le plus. Il y a ensuite les copains, la communauté. Il y en a qui viennent parce qu’ils souffrent, là-bas, dans les Etats du Nord, dans l’Amérique industrielle et fade de la Rustbelt, celle de la rouille. Il y en a d’autres encore qui viennent parce qu’ils souffrent, mais cette fois-ci physiquement. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est Big John King, sa prothèse de hanche et son arthrite, qui ne supportent pas le froid...

Quartzsite-city s’amuse et se repose, rattrape le rêve avant que ce dernier ne lui échappe, emporté par l’inexorable vent du désert qui un jour ou l’autre se fera froid pour les âmes délaissées du doux Empire songé.

+Toutes les photos sur VSD.


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7 réactions à cet article    


  • Kookaburra Kookaburra 2 avril 2008 20:38

     

    Bon article, bien écrit et intéressant. Mais il n’est pas clair si vous avez vécu ce que vous décrivez ou que vous avez glané les faits d’un autre reportage ? Les Snowbirds ne sont pas tous du troisième âge (enfin peut-être si pour le jeune qui vous êtes), mais ils sont bien sur des retraités. Ils ont souvent vendu leur maison pour acheter un énorme camping-car, inimaginable en Europe, dans lequel ils vivent en permanence, se déplaçant pour suivre le soleil. De temps en temps ils trouvent un petit boulot comme assistant sur un camping par exemple. Cela m’a fait rêver lors de notre dernier voyage en Arizona, pays magnifique !

     


    • J. Thonnelier J. Thonnelier 2 avril 2008 20:55

       

      @ kookaburra.

      Merci pour la réaction ! Non je n’ai en effet pas vécu cette "transhumance" américaine -sinon dans mon esprit- , cependant, j’ai lu pas mal d’articles sur le sujet, de témoignages individuels et me suis impregné de ces derniers afin de rédiger ce petit billet.

      Ces choses là me touchent et me poussent au partage. Partage que j’essaye d’initier au travers de quelques modestes écrits.


      • interscope 2 avril 2008 22:01

        Dans le même ordre d’idée j’avais vu un reportage sur m6 il y a de cela 2 ou 3 ans. Je crois que c’était du coté de Las Vegas ou tout au moins dans le Nevada à la limite du désert...

        Sauf que les gens installés là, dans des camping car ou caravanes, ne suivaient pas spécialement le soleil mais s’était posé à cet endroit faute de mieux... Des personnes âgées qui faute d’une retraite et d’un système de soins convenables géraient leur 3ème âge dans un dénuement assez pitoyable pour un pays riche.

        Ici une ancienne infirmière qui faisait une vaccination en échange d’une poignée de haricots, là un ancien mécano qui remettait en état un moteur à bout de souffle contre je ne sais plus quoi... Bref de la survie, et le moindre "emmerde" de santé ou de véhicule prennait des proportions gigantesques. (détail qui ne ment pas : l’état bucco dentaire des personnes filmées)

        Le "camping" était posé à coté d’un village qui n’avait que le strict nécessaire : un bureau de poste pour percevoir le minimum vieillesse US (pire que le notre) et l’équivalent d’un Lidl / Leader Price pour alimenter tout ce monde...

        Et, grosso modo tous les mois, les plus valides montaient une expédition en direction du Mexique pour acheter en gros les médicaments dont ils avaient besoin et dont les prix étaient plus bas sous le Rio Grande qu’à Las Vegas.

        D’après le journaliste ce n’était pas un cas isolé aux USA

         



          • J. Thonnelier J. Thonnelier 3 avril 2008 10:44

             

            Dans la même thématique, j’avais publié il y a peu sur mon blog un billet qui traitait du "retour" massif de la pauvreté aux portes des grandes villes américaines.

            http://rueblogglobe.over-blog.com/article-17864863.html

             


            • foufouille foufouille 3 avril 2008 11:01

              un camping car US est hors de prix. leur maison devait etre tres cher.

              en arizona les armes doivent etre autorises ?

              en france, le camping special est obligatoire si on veut pas se faire agresser. ceux qui vivent ds des cabanes ou caravane se font generalement vire. meme si ils sont proprietaire du terrain


              • sisyphe sisyphe 3 avril 2008 11:38

                Article interessant.

                Les français retraités, eux, dans leurs camping cars, s’installent dans de véritables villages de caravanes au Maroc, où ils jouissent, bein sûr, par rapport à leurs revenus, d’un tout autre confort de vie.

                Pour compenser l’immigration des jeunes (étrangers), on a, de plus en plus, l’émigration des vieux (français) : si chacun y trouve son compte ...

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