Le dernier souffle (précisions)
J'ai démarré l'avion ce jour là fatigué, ma femme et mes gosses venaient de me larguer, pas mes crédits, mes espoirs déçus, mon boulot low cost. Enfin, low cost faut le dire vite. J'avais dû aligner 30 000 Euros pour travailler comme co-pilote d'avion, un métier bien payé avant, bien payé et top prestige, comme les anciennes hôtesses de l'air si jolies, belles comme des mannequins pas anorexiques. Et le prestige de l'uniforme faisait que n'importe quel pilote d'avion même moche emballait facile.
Mais voilà, le temps passe et avec lui la jeunesse, l'espoir, les salaires, les retraites, tout. Alors j'ai commencé à déprimer cher. À 15 000 mètres, au milieu des nuages véritables, si blancs et duveteux, ceux gris noirs de mes soucis insurmontables m'encerclèrent en bloc. Des images mainstream communes gore m'envahirent ; plus belle la vie, le 911 et ses terroristes aux cutters, Mérah, la bande à Charlie, tous ces djihadistes novateurs me parlèrent à l'oreille en plein ciel.
Allez fais le, montre leur qui tu es ! Débraye, oublie tout, efface ta vie de merde ! C'était aussi clair que Jeanne d'Arc ! La réflexion superflue, l'action divine !
Alors bon, pour moi qui vivait en Europe et m'intéressait presque à l'histoire, j'ai bien vu que l'espace entre les guerres se rallongeait pensez ; entre la guerre de 1870 et celle de 1914, même pas 45 ans passés. Entre 1918 et 1939, moins de 20 ans ! Normalement, à ce rythme là, vers 1960 la dernière guerre mondiale aurait dû irrupter cash. Je serais pas né...
Mais bon, il paraît qu'on a été sauvés par la bombe atomique.
Mais sauvés de quoi ?
À 28 ans, à la fin du mois, avec mon surendettement et la solitude qui va avec, la fuite de celle que je croyais la femme de ma vie, mes gamins traumatisés par des années de cris de disputes j'y voyais plus clair. J'avais carrément l'impression d'être un pion dans un mauvais jeu vidéo.
En plus le pilote avait pris l'habitude de m'humilier pour le plaisir. Il s'amusait à me prendre pour un con devant tout le monde, sabotait le café en rajoutant des gouttes de kérosène dedans. Alors j'ai entrevu la solution.
Au loin, une montagne nacrée, si petite vue de haut m'apparut comme un refuge définitif qu'il fallait que je percute à fond, une communion ultime avec la nature, la vraie. Le pilote s'était barré comme d'habitude en me laissant les responsabilités du vol. Et puis, depuis le 911, un sas nous séparait des passagers, une porte blindée, avec caméra et tout.
Trop facile, je claquais la porte, enclenchait le pilote automatique vers la descente finale tout en mesurant l'angle précis pour arriver à mes fins. À peu près10 minutes de silence, de méditation solitaire et puis BOUM !
Voilà, c'était sûr, les boîtes noires rouges enregistreraient mon exploit jusqu'à mon dernier souffle. Accompagné de 150 sacrifiés, tel un pharaon du 21ème siècle, je saisirai physiquement les neiges éternelles, je serai enfin reconnu, même à titre posthume.
Précisions : il ne s'agit pas de stigmatiser qui que ce soit ici, à commencer le 'responsable qui nous est est désigné aujourd'hui, à savoir le co-pilote de l'avion. Ce texte est à prendre au second degré et tente de traduire un état d'esprit 'suicidaire, proche de la folie réelle, c'est pour cela que je parle de 'voix qui parlent au désespéré, syndromes courants chez les gens très dépressifs.
Première constatation, la présentation des évènements qui nous est faite par le procureur est au minimum étrange. Selon lui, le co-pilote aurait voulu détruire l'avion… Ah bon ?
Sachant qu'il précipitait effectivement l'avion à environ 700 km/h contre une montagne, et si il a réellement activé la manoeuvre fatale, il apparaît évident que le co-pilote voulait détruire, non seulement l'avion, mais lui même plus les passagers, plus l'équipage, ce qui s'apparente qu'on le veuille ou non plus à un attentat terroriste qu'à un suicide. Mais pour le procureur mis en scène devant un drapeau européen, l'important c'est l'avion ?
Ensuite, il nous dit qu'on entend sur les 'bandes de la boîte noire plusieurs appels du pilote qui voulait réintégrer sa place dans le cockpit, bon, d'accord. Mais il nous dit également qu'on perçoit un souffle de respiration jusqu'à la fin, dans la cabine où le co pilote s'est enfermé. J'ignore le niveau de sensibilité des micros connectés aux boîtes noires, mais avec le bruit de fond des réacteurs, est ce possible que le rendu de l'enregistrement soit équivalent à une chaîne hifi haut de gamme avec enregistrement haute définition du support ?
La polémique dans ces conditions est inévitable, et à moins que les boîtes noires des appareils civils soient désormais protégés par le 'secret défense, la seule solution est de rendre publics les enregistrements des boîtes noires pour couper court aux spéculations 'complotistes.
Dans la mesure où cet 'accident a fait 150 morts, les familles des victimes ont le droit de connaître la vérité.
30 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON