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alinea Alinea 22 septembre 2012 12:49

Objet : Analyse de l’annonce de Hollande - permis d’exploration

 

Sarko avait annulé 3 permis, Hollande rejète 7 demandes. Ci-dessous une analyse que j’ai faite du discours et de la stratégie des pétroliers. Je l’ai, en partie, proposées à la liste de diffusion de la coordination nationale des collectifs.

 

 

Dans son discours inaugural de la Conférence environnementale, s’agissant des gaz de schiste, le Président de la République a dit qu’il respecterait et ferait respecter la Loi. Saluons l’acte civique. À ce titre il demande le rejet de 7 demandes de permis d’exploration et de recherche. Et puis, c’est tout. J’insiste, ce ne sont que des demandes, un tout petit nombre de demandes qui ont été rejetées. Je ne vois pas en quoi ce serait la porte fermée à l’exploitation future des hydrocarbures de roche-mère. De ce point de vue, le précédent Président avait fait mieux en annulant trois permis existants !

 

Selon des membres de la liste de diffusion de la coordination nationale dignes de confiance, il y aurait à ce jour :

Au 1er janvier 2012 selon le BEPH (Bureau Exploration Prospection Hydrocarbures) du Ministère :
58 permis de recherche en cours de validité
4 offshore en cours de validité
82 demandes de permis de recherche (dont offshore) - dont 7 rejetées par Hollande !
63 concession accordées
3 demandes de concession

 

Pour ce qui est de l’enfumage, on peut penser que François Hollande a cherché à caresser dans le sens du poil les « écolos », notamment d’EELV, sans pour autant mécontenter trop les pétroliers et le MEDEF. On peut considérer que l’opération est du même type que le coup de la Loi de juillet 2011, en plus subtil. Les écolos ont raison de s’inquiéter donc on interdit ( et on maintient l’interdiction) la fracturation hydraulique. Mais on laisse une porte ouverte derrière par laquelle l’exploitation des hydrocarbures de schiste redeviendra possible.

 

La construction du discours peut expliquer la réaction, à la sortie, de certains responsables d’EELV et d’autres. François Hollande a incontestablement surpris son auditoire. Personne ne s’attendait à ce qu’il ait des envolées de ce type :

Le nouvel ordre commercial que nous devons construire doit être aussi un nouvel ordre écologique. Mais c’est en France que nous devons être exemplaires. D’abord en insufflant un nouvel état d’esprit. Accepter le constat de la fragilité de notre planète, de ses éco systèmes, de sa biodiversité, c’est admettre l’idée que le progrès de l’humanité, à l’heure de la mondialisation, ne peut se concevoir sur les schémas nés de l’ère industrielle du siècle dernier.

L’avenir, l’avenir économique, l’avenir productif appartient aux Nations qui l’auront compris. C’est pourquoi l’exigence environnementale est à la fois une obligation, une volonté, et en même temps, un atout pour l’emploi.

« Le progrès de l’humanité (…) ne peut se concevoir sur les schémas nés de l’ère industrielle du siècle dernier » voilà une affirmation qui n’a, en apparence, rien d’anodine. Cela rejoint les idées les plus avancées de ceux qui pensent qu’avec la fin, même progressive, des énergies carbonées c’est toute une civilisation, celle du pétrole, qui s’effondre et que nous devons en inventer une nouvelle. (Je fais partie de ceux-ci qui pensent cela, avec quelques réserves). Personne n’imaginait le Président aussi avancé sur ces sujets. Les responsables d’EELV espéraient que ce discours et la conférence qui suivait ne les obligeraient pas à trop de contorsions et de consommation de chapeaux pour continuer à justifier leur alliance avec les socialistes. Les belles et profondes réflexions ainsi que les quelques annonces sur la rénovation énergétique des bâtiments, la biodiversité et autres, les a fait respirer un bon coup, le pire était évité. Les 5 phrases, pas plus, dont les plus importantes fort longues pour qu’on n’en retienne que l’écume, sur les gaz de schistes, se sont donc trouvées noyées dans un ensemble lyrique qui a charmé l’auditoire, réduisant considérablement le sens critique !

 

Nous aurons à démonter plus encore l’insuffisance foncière des intentions du Président et de gouvernement. Mais en attendant je voudrais insister sur le fait que rien dans le discours ne peit inquiéter les pétroliers, le MEDEF et tous les tenants de l’exploitation des hydrocarbures de roche-mère (experts, journalistes, personnalités politiques).

 

Si l’on observe bien le discours qu’ils tiennent actuellement on s’aperçoit qu’ils cherchent à amener les opposants sur leur propre terrain. Il faut connaître, disent-ils, l’état des réserves pour pouvoir débattre de l’opportunité de leur exploitation. Ils ne cherchent plus à contester l’interdiction de la fracturation hydraulique, dont ils concèdent volontiers qu’elle pourrait comporter des risques, même s’ils les minimisent. Mais ils accusent ses opposants (entre autres nous-mêmes) de refuser, d’interdire même le débat ! S’appuyant sur l’exemple des USA, dont ils font une description plutôt partielle, ils déplacent le sujet des questions environnementales et sanitaires vers une unique question économique : si nous marchons sur un « eldorado » pourquoi ne pas l’exploiter ? Cette manœuvre pour fixer le centre de gravité du débat sur la seule question économique est révélatrice, selon moi de deux choses : tout d’abord pour les pétroliers et leurs alliés la rentabilité financière est première, ce n’est pas une surprise. En deuxième lieu c’est probablement qu’ils ont bien conscience que leur argumentaire sur les questions environnementales (risque de pollution et atteinte à l’eau) et sanitaires est très faible et qu’ils ne peuvent espérer convaincre la population sur ces sujets.

 

Rien dans le discours de François Hollande ne peut inciter les pétroliers à renoncer à leur stratégie, ils sont donc fonder à continuer, batteries de sondages aidant, à réclamer, non pas un débat (il y en a un en cours) mais le seul débat qui leur convienne.

Outre la mobilisation qu’il va falloir développer pour empêcher les forages prévus dans les semaines qui viennent, nous avons intérêt à ne pas nous faire piéger dans une demande de débat où seraient exclues les raisons de notre combat.


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