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Éric Guéguen Éric Guéguen 27 octobre 2012 14:02

@ Morpheus :

Croyez bien que je ne crois nullement en la fable contractualiste consistant à inventer un état de nature, lieu de la guerre de tous contre tous pour certains, âge de l’ingénuité et de la bonté innée de l’être humain pour d’autres. Tout ceci n’a eu pour vocation, précisément, que de nous faire assentir à l’idée de contrat, typiquement « horizontale » et propre à diluer, à terme, toute notion de pouvoir politique de peur qu’il ne soit accaparé par quelque faction.
Et c’est justement ce que je reproche le plus à Chouard : il se réfère à un âge mythifié - et tout le monde a tendance à le faire, vous en particulier, et je vais y revenir - l’âge classique de la démocratie athénienne, en faisant fi de la révolution anthropologique que nous avons connue depuis. À l’époque, l’individu s’effaçait devant la communauté, et la politique, le bien commun avaient un sens. L’idée de contrat, mercantile au possible, a balayé cette vision des choses. Le devoir n’est plus à l’ordre du jour, et l’intérêt personnel est devenu le moteur de chaque individu, des pauvres comme des riches.
Aussi Chouard commence-t-il sa reconstruction politique en partant du principe : « Comment ne plus se faire avoir par les affreux ? ». C’est une construction négative, une défiance de toute idée de pouvoir. Les Anciens, eux, partaient de ce principe, positif : « Comment confier le pouvoir aux plus vertueux ? » Soit comment donner tout son sens au pouvoir. Ce qui n’a rien, rien, rien à voir.

J’en reviens à présent à l’âge d’or d’avant le néolithique : je ne doute absolument pas de ce que vous me dites, et n’allez pas croire que je n’ai pas, moi aussi, une certaine aversion pour le recours constant à la monétisation. Mais il se trouve que les sociétés dont vous parlez étaient des sociétés très réduites, où tous les membres se connaissaient entre eux et pouvaient donc substituer l’amitié à la justice, l’entraide à la hiérarchie. Et il se trouve que les éléments les plus progressistes de notre planète vont précisément à rebours de cette vision des choses : ils voient en le monde une immense société de frères qui s’ignorent et qui devraient abolir les frontières pour le bien de tous. L’amitié entre 7 milliards d’êtres humains ? Bah, laissons faire Facebook ! smiley
Non, voyez-vous, je pense qu’à partir du moment où l’on a la volonté de mener des millions d’individus sur des sentiers communs, avec tout ce que cela implique de dissensions, d’éternels conflits, jalousies, et autres (avec ou sans les affreux banquiers), il faut recourir à la justice distributive. Remettre le commerce à sa place, c’est avant tout remettre la politique à la sienne, je crois que nous sommes d’accord là-dessus. Mais la politique doit prendre en compte ce que vous avez fort heureusement mis en évidence : la nature. Et si la nature est harmonieuse, d’un certain point de vue, et en tout cas bien plus que ne le sont nos sociétés contemporaines, elle ne fait droit en aucun cas à l’égalité. La nature n’est pas égalitaire, elle en fait fi, elle distribue au hasard les talents et les défauts, les vertus et les vices. Ceci, il nous faut aussi le prendre en considération. C’est malheureux, peut-être, mais c’est ainsi : l’égalité n’est qu’une construction culturelle et mentale, il n’y a jamais eu d’égalité originelle, du moins je n’y crois pas. En revanche, je crois à la justice, sans laquelle ne serons perdus.


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