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C'est Nabum C’est Nabum 15 janvier 2013 07:02

Ce petit jet insignifiant …

Le condensé de haine !



Poursuivant mon œuvre d’expectoration des petits et des grands travers de cette société, j’ai décidé de vous tenir le crachoir sur un sujet visqueux qui, phénomène de mode ou mouvement de fond, se répand de bouche à oreille dans notre belle jeunesse pour concerner dès maintenant 60 % d’entre-eux au grand désespoir des adorateurs de l’héritage de notre grand Louis Pasteur.


Il est bon de revenir aux sources de cette histoire, l’hygiène taillait sa route dans les esprits civiques d’alors. Le microbe venait de faire une entrée tonitruante dans les représentations populaires et l’aversion qu’il provoquait alors, avait eu raison des habitudes fâcheuses des chiqueurs, priseurs et autres ’expectoreurs’ de cette belle époque.


Les effets se firent sentir immédiatement et les âmes nobles n’avaient plus besoin de se pincer le nez lorsqu’elles sortaient en public. La tuberculose allait tirer une révérence que l’on pensait définitive et seuls les fabricants ou les lustreurs de crachoirs faisaient la lippe.


Le glaviot était devenu « persona non-crachat » de nos cités. On gardait pour soi ses viscosités verdâtres, purulentes et mousseuses. D’énormes mouchoirs à carreaux recueillaient les derniers spécimens de quelques irréductibles incontinents. Le malotrus qui se faisait prendre devait payer une amende, cracher à ce bassinet fiscal qui calme les plus récalcitrants.


Les cours de récréation pouvaient accueillir les joueurs de billes, l’hygiène ne laissait personne indifférent et les plus sceptiques savaient maîtriser leurs humeurs. Le respect était la règle et l’on ne risquait pas la plus petite infection naseau-comiale.


Puis, tout a changé. Les hordes de cracheurs sont sortis du bois, plus exactement de la télévision. La jeunesse, toujours à la recherche de modèles, a vu les gros plans des retransmissions sportives. L’idole en plein effort crachait, il fallait l’imiter pour devenir son égal.


Ce nivellement par le bas eut des effets immédiats. Le sol s’est retrouvé orné de ces ronds abjects, les cours de récréation redevinrent des lieux parfaitement infréquentables et la tuberculose retrouva un peu de vigueur et quelques milliers de poumons à infester.


Bien-sûr, il est conseillé de garder le silence sur cette marque formidable de la décadence que nous subissons. Les beaux esprits déclarent avec la fierté de celui pour qui un bon mot remplace toute réflexion de fond « Que celui qui n’a jamais craché me jette la première glaire ! ». Les tenants de la mondialisation et de l’angélisme réunis ne veulent pas stigmatiser des pratiques qu’ils qualifient de culturelles.


Le phénomène se généralise, les compteurs s’affolent et on estime à quinze mille tonnes ces jolis postillons qui jonchent notre Planète chaque jour. Le mollard a des adeptes dans le monde entier, la contagion gagne et bientôt, nous serons submergés par un tsunami de cette salive du mépris et de l’indélicatesse.


Il y a bien plus qu’un problème d’imitation ou de pratique ancestrale, le crachat a une signification sociale forte : « Je vous crache à la figure, je vous dénie le droit de vivre dans cet espace qui m’appartient ! ».


Ces glaviots, ces gluaux, ces postillons, ces sécrétions visqueuses, ces expectorations buccales ne sont rien d’autre que l’expression d’un lexique défaillant pour exprimer sa détestation de l’autre. Faute de mots, ce merveilleux condensé de haine, vous est envoyé en pleine figure. On s’exprime comme on peut, mon bon monsieur, surtout quand la soupe est mauvaise à en cracher dedans !


Crachotement vôtre


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