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aquad69 (---.---.100.34) 16 avril 2007 14:41

Bonjour Martine,

c’est...une bonne question, et je vous remercie de l’avoir posée !

Il s’agit là de choses assez étrangères à notre mentalité, et difficilement définissables avec précision ; mais celà n’enlève rien à leur réalité.

Ce que j’appelle le « génie » féminin, c’est un peu comme la nature humaine : celà existe, à l’évidence, et il y a des constantes que l’on peut comprendre et sur lesquelles on peut essayer de mettre le doigt, mais on ne saurait la définir de manière précise, et celà d’autant plus que cette nature peut s’exprimer différemment selon les peuples et les sociétés.

Un peu comme l’espace que l’on ne peut complètement définir, mais au sein duquel on peut essayer de s’orienter.

Celà revient à constater, par exemple, que les femmes et les hommes, d’une manière générale et sans s’arrêter à tel ou tel individu, ont sur les choses un regard, un point de vue différent, et que, spontanément, ils auront en général tendance à s’organiser entre eux différemment et à travailler autrement ; mais celà apparait moins aujourd’hui car notre système réprime la spontanéité et impose les organisations.

Pour prendre un exemple précis, une société féminine pratiquera beaucoup les rapports transversaux, et c’est ces « réseaux féminins » qui ont toujours fondé les liens sociaux dans les communautés humaines ; les hommes auront plus tendance à s’organiser selon une pyramide hiérarchisée.

Un des aspects de patriarcat caractéristique de l’Etat Nation moderne est précisément son organisation en pyramide, tellement gigantesque que la tête finit par en perdre de vue la base : c’est ainsi qu’à mon avis, l’expression de Mr Balladur « la France d’en bas » correspond à un véritable cri d’impuissance masculine...

Cette notion de la nature féminine ou masculine de chacun paraît à première vue en opposition avec la doctrine moderne qui définit l’être humain : d’après celle-ci, nous n’aurions d’autre intelligence que rationnelle, identifiée et située dans un cerveau à vocation de « machine à penser » neutre du point de vue sexuel ; et les biologistes de chercher à « peser » et « mesurer » les différences entre nos cerveaux respectifs et à définir l’humain comme un organisme unique qui développerait ses caractéristiques sexuelles sous l’influences d’hormones commandées par quelques gènes.

Toutes les anciennes sociétés étaient d’un autre avis, et voyaient la société humaine comme un rapport, une danse harmonieuse entre deux principes ou tempéraments indispensables l’un à l’autre parce que différents et complémentaires.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que ces deux points de vue ne sont pas en opposition, mais qu’ils s’appliquent simplement à des plans différents de réalité.

Les théories modernes sont vraies en ce qui concerne notre corps physique et sa construction biologique, mais elles n’expliquent en rien nos dons respectifs et ne permettent en rien de comprendre l’aspect social de l’humain.

Pour reprendre l’exemple du théatre, elles analysent les coulisses et les supports de la scène, mais sont impuissantes à saisir le sens de la pièce elle-même.

En vérité, il existait jadis tout un domaine de « schémas sociaux symboliques » que l’on ignore aujourd’hui et qui ne sont plus guère pris au sérieux, car ils ne sont pas rationnellement « prouvables » et ne « produisent » et ne « rapportent » rien de monnayable. C’étaient des choses qui s’enseignaient et qui faisaient partie de l’art de vivre des temps anciens.

Les éléments de ce genre manquent aujourd’hui à notre société ; on évite de regarder la vérité en face, par tabou, mais il est évident que nous sommes différents, que c’est un élément de la nature humaine qu’il faut savoir assumer et maîtriser : toutes les richesses des différents folklores, cultures et civilisations humaines y ont trouvé leurs sources.

Ce sont des domaines qu’il faut explorer et redécouvrir car, faute de disposer d’une trame symbolique de signifiants sociaux et d’avoir appris à la pratiquer, faute de comprendre ce qu’est notre rôle, nous mélangeons tout : nous ne savons plus nous situer les uns par rapport aux autres, ni comment exprimer notre réalité, savoir donner et recevoir sans ressentir l’autre comme une menace.

Cette ignorance ne peut alors que déboucher sur des rivalités aveugles entre gens qui tous ont l’impression d’avoir été agressés par l’autre, et qui s’affrontent d’autant plus violemment qu’ils ont chacun la certitude d’être en train de se défendre. Et c’est ainsi que naissent les drames et les violences familiales, la défiance entre les sexes, et que se meurent les derniers restes d’une société véritablement humaine chez nous.

Les « sexistes de tous poils » n’ont pas d’autres origines. Ce sont des gens perpétuellement sur la défensive car se sentant toujours menacés.

Maintenant, que toutes ces notions apparaissent comme un peu « ésotériques » et trop facilement « balayable d’un revers de la mains par les sexistes de tous poils », sans doute : une vérité subtile sera toujours « balayée » par ceux qui ne la comprennent pas, ou qui ne veulent pas entendre.

Un véritable débat n’est pas un affrontement à coup d’arguments simplistes ou de slogans « puissants » que l’on s’enverrait comme des polochons ; c’est plutôt la rencontre d’esprits curieux et intelligents, à la recherche d’autres points de vues pour élargir leur perspective, et c’est en petit comité que ça se passe le mieux, loin des tribunes publiques ; mais un débat n’a d’intérêt que s’il a, à plus ou moins long terme, la vocation de déboucher sur des tentatives concrètes pour améliorer les choses.

Or, améliorer les choses aujourd’hui, ce n’est pas faire plus vite ou moins cher, mais faire différemment ; et ce différent ne peut que provenir d’une autre image de soi-même et du personnage humain.

L’image humaine exemplaire de cette société a depuis plusieurs siècles été la figure masculine ; mais aujourd’hui celle-ci est tellement usée et déconsidérée en tant qu’autorité que par défiance l’humanité en est à lui préférer n’importe quel système technique, non-humain, de contrôle.

La seule figure qui puisse nous réconcilier aujourd’hui avec notre nature humaine est féminine ; le matriarcat, jadis beaucoup plus répandu que ne le croient nos ethnologues, n’a en vérité jamais correspondu à un amoindrissement du masculin, mais plutôt à l’encadrement de ses excès ; de tous temps la force et la puissance ont été du côté de l’homme, mais c’était dans ces sociétés une puissance déléguée et codifiée ;l’autorité et le prestige féminin permettait un arbitrage, une maîtrise de ses dérives et de l’abus de pouvoir, causes visibles aujourd’hui de bien des maux de notre sociétés.

Mais le mot même est devenu un énorme fantasme chez nous...

Le matriarcat, celà n’a jamais été une société d’amazones guerrières, aux pieds desquelles se seraient trouvés des petits maris rabougris en train de frotter les strings et les petites culottes en peaux de panthères de mesdames ! Il faut tout de même sortir un peu de Hollywood...

Les matriarcats, c’étaient tout simplement des sociétés fondées sur des valeurs matriarcales, valeurs qui étaient partagées par tout le monde, hommes et femmes ; et celà générait chez chacun une image de soi, une identité d’être humain différente de celle qui existe chez nous, et une organisation de société différente, plus consensuelle et « horizontale ». Celà pourrait aujourd’hui nous inspirer quelques idées applicables chez nous...

Voilà, j’espère avoir un peu répondu à votre question, sans être trop flou...

Si le sujet vous intéresse, ou si vous avez d’autres questions, mon adresse : [email protected]

Cordialement Thierry


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