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Philou017 Philou017 3 mars 2008 23:32

Un éditorial intéréssant d’un journal Colombien :

COLOMBIE •  Sommes-nous l’Israël de la région ?

 L’élimination du numéro deux des Farc, Raúl Reyes, par l’armée colombienne a provoqué une grave escalade de la tension entre la Colombie et ses voisins, le Venezuela et l’Equateur. Une éditorialiste du journal El Tiempo s’interroge sur les méthodes du président Uribe et sur l’avenir du pays.

Soyons clairs : jusqu’à vendredi dernier, affirmer que la guérilla des FARC était exsangue relevait davantage de la propagande officielle que de la réalité. Une guérilla dont la tête n’était pas encore tombée ne pouvait être agonisante. Pourtant, avec la mort de Raúl Reyes, la donne a changé : on peut aujourd’hui affirmer que les FARC sont sérieusement éprouvées et peut-être très proches de leur fin.

Il ne doit pas être facile pour les membres du Secrétariat de voir à quel point la mort de leur numéro deux a été accueilli avec soulagement et ravissement par la plupart des Colombiens. "Un de moins", voilà ce que j’ai pu entendre un peu partout. Non seulement personne ne regrette Raúl Reyes, mais l’atmosphère dans les rues de Colombie n’est pas sans rappeler la mort de Pablo Escobar.

Tant d’années d’exactions, de mines fabriquées maison et d’enlèvements ont fini par transformer les FARC en une guérilla honnie par l’ensemble du pays, toutes classes confondues : propriétaires terriens et déplacés ; riches et pauvres. Pour de nombreuses raisons, Uribe jouit d’un soutien inconditionnel de la population dans sa guerre contre les FARC. Personne ne peut le nier, pas même ses opposants.

C’est la bonne nouvelle. La mauvaise, c’est que cette opinion colombienne, aussi manipulable que dégradée en raison du conflit, ne se préoccupe pas de savoir si cette guerre a recours à des procédés douteux. Ainsi, vendredi dernier, l’opération commando contre Reyes a été lancée tout en sachant sciemment que ce dernier se trouvait en territoire équatorien. La réaction du gouvernement voisin ne s’est pas fait attendre. L’opération a été considérée comme une agression par le président Correa, qui a rappelé son ambassadeur et a traité son homologue Uribe de menteur pour lui avoir présenté une version maquillée des faits. Et, comme si cela ne suffisait pas, le président Chávez en a profité pour jeter de l’huile sur le feu en fermant son ambassade en Colombie et en se mettant sur le pied de guerre à la frontière. La majorité des Colombiens n’en ont cure et sont persuadés que, dans la guerre contre les FARC, la fin justifie les moyens.

Pourtant, nous sommes quelques-uns uns à penser différemment. Frapper les FARC est une chose, mais devenir l’Israël de la région en est une autre, d’autant plus que la problématique est loin d’être la même. Une telle audace pourrait nous coûter très cher. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le gouvernement du président Uribe réalise ce type d’opération inspiré des raids israéliens.

L’autre danger qui menace la démocratie colombienne est plus difficile à contourner. Il est intimement lié à cette thèse de plus en plus partagée dans le pays qui veut que la chute des FARC passe forcément par la réélection du président Uribe, seul capable d’accomplir un pareil exploit. Le jour de la mort de Raúl Reyes, dans les rues, les centres commerciaux et les associations, les partisans de la réélection d’Uribe sont sortis récolter des voix dans l’intention de capitaliser cet élan. Vous allez me dire que je suis un rabat-joie, qu’ils se contentaient de fêter l’événement. Mais, si nous lions la lutte contre les FARC à la permanence au pouvoir du président Uribe, non seulement nous continuerons à amoindrir les institutions de ce pays, déjà suffisamment chancelantes, mais la reconduction d’Uribe à la tête du pays serait un blanc-seing pour de nouvelles violences. Les FARC vont probablement disparaître, mais notre Etat de droit les suivra dans la tombe.

Editorial de María Jimena Duzán

www.courrierinternational.com/article.asp


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