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Henri Masson 3 janvier 2006 19:42

Il y a énormément de légendes, de mythes et aussi de bluff autour de la connaissance des langues.

A propos de l’enseignement des langues, au début du siècle dernier, en 1907, le professeur Théophile Cart avait écrit, dans un rapport au ministre de l’Instruction publique : "Le malaise résultant d’un tel état de choses est si réel, qu’on s’efforce d’y apporter remède, en tous pays, par la place, de plus en plus grande, qu’on réserve, dans l’enseignement public, aux langues vivantes, alors que, d’autre part, la somme des connaissances générales qu’il convient d’acquérir, va, elle aussi, en augmentant.

Il n’y a aucune témérité à prédire que la solution par l’étude des langues étrangères, toujours plus nombreuses et mieux apprises, aboutira à la faillite. Vainement on s’efforce de la retarder par de fréquents remaniements de méthodes. Elle est fatale, parce que la mémoire a ses limites. Le nombre de personnes capables d’apprendre ‘pratiquement’ deux ou trois langues étrangères, avec tant d’autres choses, en outre est infime ; or c’est à un nombre d’hommes continuellement croissant qu’il importe de communiquer avec des nations de langues différentes, de plus en plus nombreuses."

Il suffit de prendre connaissance du rapport Berteaux (1982), du rapport de l’Inspection générale de l’enseignement (1992), du rapport n° 73 de la commission du Sénat sur l’enseignement des langues (1995 : « situation alarmente »), des deux rapports Legendre (1995-1996 et 2003-2004) pour se rendre compte de l’ampleur du problème : on patauge et on tourne en rond.

Théophile Cart (1855-1931) était pourtant lui-même polyglotte, licencié de grec et de latin, agrégé en langues modernes, lecteur à l’Université d’Uppsala, en Suède (1891-1892) puis professeur au Lycée Henri IV (1892-1921) et à l’Ecole des Sciences Politiques à partir de 1893. Donc pas vraiment du genre demeuré.

Dans « L’homme qui a défié Babel », dont je suis coauteur (éd. L’Harmattan), on trouve le cas du prix Nobel Elias Canetti qui a fait part de sa propre expérience à propos de la prétendue connaissance des langues dans son livre« Le Territoire de l’homme » : Mais était-il possible de parler dix-sept langues, c’est-à-dire autant que son grand-père prétendait maîtriser alors que ses connaissances linguistiques étaient “terriblement lacunaires” ? Quand le petit Elias posa la question à sa mère, celle-ci répondit : “Non ! Dans ce cas, on n’en parle aucune comme il faut !”

Georges Kersaudy, l’auteur de « Langues sans frontières » (éd. Autrement), dans lequel il présente 29 langues de l’Europe, dont l’espéranto, a été amené, durant sa carrière de fonctionnaire international, à parler, écrire et traduire une cinquantaine de langue dont l’espéranto. J’ai eu plusieurs fois l’occasion de lui parler. Il dit pour sa part qu’il n’a pas eu de grosses difficultés à apprendre tant de langues. Mais, à mon avis, il pense comme quelqu’un qui est tombé dans la marmite des langues smiley A signaler que l’espéranto est l’une des premières langues qu’il avait apprises. Nous avons un cas semblable en Maxime Rodinson qui en parlait une trentaine et qui avait découvert l’espéranto, lui aussi, au début de son adolescence. Donc ceci confirmerait l’avis de Mario Pei (1901-1978), qui fut professeur à l’Université de Columbia :

« Ne voulant pas le moins du monde atténuer la valeur des autres langues actuellement enseignées, je pense que l’enseignement de l’espéranto aux degrés élémentaires présente plusieurs avantages : il a été prouvé expérimentalement que l’espéranto constitue un excellent pont pour l’étude des autres langues, car grâce à sa simplicité de structure et de vocabulaire il brise la résistance initiale de l’élève moyen unilingue. Il renforce en même temps son vocabulaire de mots étrangers et crée chez l’enfant une confiance en sa propre capacité d’étudier et d’assimiler des langues étrangères. »

Ce n’est certainement pas par pure fantaisie que l’espéranto est l’une des matières enseignées à l’Université des Affaires étrangères et d’Économie de Pékin, l’une des plus cotées en Chine.


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