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bluebeer bluebeer 25 décembre 2009 20:42

Bonjour bourre-pif, bonjour l’auteur.

Désolé, je n’ai pas regardé les vidéos. Juste la flemme aujourd’hui, c’est Noël... Demain peut-être. Je suis psy, travaille en hôpital, notamment dans le domaine de la neuropsychologie. Mais pas seulement.

Je voudrais juste faire quelques remarques.

La psychologie en tant que science regroupe plusieurs disciplines distinctes obéissant à des protocoles de recherche scientifique expérimentale (hypothèse-expériences-résultats-épreuve d’hypothèse). La psychologie développementale est plus particulièrement consacrée à l’enfant et étudie (« mesure ») des phénomènes comme l’attachement et la soumission à l’autorité. Tout est possible, donc.

La psychologie sociale, la psychologie cognitive ou la psychologie de l’apprentissage sont d’excellents exemples de disciplines démontrant qu’on peut faire de la psychologie scientifique ans passer par le cerveau. Néanmoins, et notamment parce que c’est aussi mon domaine, je peux attester des énormes progrès réalisés en la matière au cours des deux dernières décennies, surtout en raison des progrès réalisés au niveau des techniques d’imagerie dynamique de l’activité cérébrale (en particulier le PET Scan, qui permet de visualiser les circuits impliqués dans certains traitements de la pensée). La fusion de la psychologie et des neurosciences est en train de se faire, mais il n’est nul besoin d’attendre son accomplissement pour aborder le sujet de l’éducation.

Pour revenir à l’objet de l’article, je voudrais seulement me cantonner aux observations suivantes. Un système éducatif efficace doit s’efforcer de respecter l’enfant et lui donner un rôle dans le processus d’apprentissage qui lui est imposé. Une stratégie qui consiste uniquement à dresser l’enfant aux règles et aux normes, par la coercition, confronte ce dernier à une alternative simple : se soumettre ou se rebeller. La soumission ouvre la voie au conformisme et au suivisme ; les adultes tendent à trouver leur place dans la société, mais rarement l’épanouissement personnel car bridé par la menace de règles confuses et obscures, auxquelles il « faut » obéir. La rébellion ouvre quant à elle les voies aux excès, et même s’il s’agit généralement d’une phase transitoire, elle peut suffire à faire chuter ou marginaliser durablement une personnalité, à la cristalliser dans une attitude de guérilla sans fin et sans but. Pour paraphraser un aphorisme dont j’ai oublié l’auteur : « il est facile de savoir comment votent les français : une moitié vote comme son père, l’autre moitié vote contre son père ».

Un jeune enfant attend trois choses au moins de ses parents, trois choses vitales. Une protection, une légitimité et un décodage des événements extérieurs.

Pour ce qui est de la protection, ses parents doivent être forts, savoir ce qu’ils veulent. Si les parents se laissent marcher sur la tête, s’ils sont incapables de mettre au pas leur propre progéniture, il y a peu de chance qu’ils puissent résister aux menaces autrement plus dangereuses en provenance de l’extérieur. D’où les provocations répétées des enfants qui testent leurs limites. C’est aussi une manière de se rassurer sur leur dispositif de protection. Un protecteur fort est nettement plus sécurisant qu’un protecteur faible.

Mais c’est surtout la légitimité qui est vitale. Si nos parents ne nous aiment pas, si ils ne sont pas près à nous traiter avec bienveillance, qui le fera à leur place, et quelle est notre place dans tout ceci ? Les blessures créées par les carences affectives constituent 90% de la consultation psy. Les patients doutent de leur place : on ne les a pas rassuré au bon moment, Ils se sont sentis contraints de se révolter contre la main qui les protégeait et les nourrissait. C’est un point crucial, un enfant doit avoir sa place, ça fonde sa légitimité en ce bas monde. « Pardonnes moi si je t’ai donné l’impression que tu devais mériter mon affection » disait fort justement le papa de Chicken Little. Mais comme dit plus haut, ça n’exonère pas de la discipline.

Pour ce qui est du décodage des événements extérieurs, le rôle des adultes est incontournable. A six ans, on sera cosmonaute. A onze ans footballeur. A seize, informaticien. A vint et un … Les adultes expliquent le monde aux enfants. De leur assurance, de leur cohérence, de l’ajustement de leur attitudes à leurs dires, dépendra beaucoup la confiance du jeune adulte en son futur, en lui même. S’il voit ses parents surmonter les difficultés de la vie et maintenir le cap, il saura que c’est possible, et l’intégrera à sa vision du monde. Encore faut-il, évidemment, que ses parents soient présents. Et qu’ils soient adultes.

On respectera toujours un parent aimant et juste, même s’il est sévère ou colérique. On méprisera toujours un peu un parent doux mais faible et inconsistant. On aura toujours la nostalgie d’un parent absent. De la nostalgie et du ressentiment, de la colère. Et on obtiendra toujours plus de quelqu’un en le traitant avec respect, pour ce qu’il est, et non pour ce qu’on voudrait qu’il soit. Particulièrement un enfant, qui dépend des adultes, qui ne saurait s’en passer et a besoin de leur faire confiance.


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