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easy easy 17 novembre 2010 13:00

Cette question est des plus intéressantes à creuser. J’ai moi aussi écrit un billet dans ce sens « Les élus c’est dépassé, on peut s’en passer »

Mais constater, surtout avec Internet que la démocratie directe est davantage possible malgré notre foultitude, ne doit pas nous empêcher de voir également que nous n’en voulons pas.
Ce n’est probablement qu’à force d’en parler que nous deviendront nombreux à la vouloir mais en attendant, clairement, la grande majorité d’entre nous n’en veut pas.

Dans la horde primitive, où la démocratie directe allait de soi, il y avait probablement des individus qui s’étaient posés en chefs.
Mais il y avait également plein de chefs qui avaient été propulsés sur le trône par la horde.

Cette poussée de la masse pour qu’un individu la dirige peut se voir constamment au détour des réflexions courantes du genre « Punaise mais qu’est-ce qu’on attend pour tout renverser ? » Il y a derrière cette provocation un appel à un chef. Ne pas voir ce principe c’est être aveugle à tout ce qui en découle.

Même dans un groupuscule, quand il s’agit par exemple d’aller demander au prof un report de la date de rendu des copies, on observe qu’il émane une recherche d’un leader qui ira voir le prof. Quand cette espérance n’aboutit pas, quand personne n’est volontaire pour aller au front, c’est résigné et par dépit que le groupe se pointe en rang bien serré vers le prof.

Cette demande de chef peut certes être opportuniste, très occasionnelle et circonstancielle, mais elle existe et il est capital de la considérer.
Un chef l’est finalement rarement en raison de sa seule volonté de diriger.

Examiner les raisons pour lesquelles le groupe cherche toujours à se voir dirigé par un chef, un représentant donc, est passionnant. On découvre que les pousseurs suivent une stratégie très subtile, souvent bien plus intelligente que celle de celui qui va se retrouver chef malgré lui.
Malgré lui, mais finesse de la stratégie des pousseurs faisant, il se dégagera l’idée que c’est lui qui avait voulu diriger. « Il a voulu commander, qu’il assume »

Mettons que l’élection de ce chef soit complexifiée par l’apparition d’un concurrent au poste. On en viendrait donc vite (’car on le veut) à considérer que finalement, ces deux compétiteurs sont tous deux des ambitieux et que le meilleur gagne. En réalité il n’y a pas de combat de coqs qui n’ait été finement voulu par le groupe pour que se distingue le plus mordant, le plus résistant.

Si l’on refuse de considérer la sourde volonté de la masse pour que se désigne ou se démarque un chef, on reste très éloigné de la réalité du jeu de dupes où le plus malin n’est pas forcément celui qu’on croit.

Prenons par exemple Mélanchon.
Un groupe ayant repéré sa potentialité à l’impertinence, le place devant une caméra et lui montre une interview entre un Pujadas et un « chef » d’ouvriers révoltés. Comme espéré, Mélanchon, piégé par l’impression d’intimité de cette réunion, se sachant attendu en la matière, lâche une ou deux réflexions qui, sans la caméra, seraient strictement sans aucune conséquence. Des réflexions dans le genre de celles qu’il a faites, il y en a des tombereaux sur Avox comme autour de tous les zincs. Mais voilà, non seulement la caméra a enregistré ce qu’a dit ce député mais en plus, les malins du groupe l’ont diffusé en cherchant à faire buzzer
Et tu penses bien que ça a buzzé puisque la masse a envie que se dégage un Chavez, un Castro.
Le Mélanchon, informé du buzz, que pouvait-il faire ? Renier ? Ce serait alors décevoir trop de gens qui en veulent toujours plus. Alors il n’a pas le choix. Il doit persister. Et le voilà propulsé en tête de gondole. C’est désormais sur lui que la masse compte pour boxer l’autre chef. Et Mélanchon de se coller à cette nouvelle dévolution.
Bon, il connaît le destin de Georges Marchais, il va essayer de ne pas se faire trop manipuler par un néo Kremlin. Mais alors que jusque là il se la coulait douce, il va devoir répondre aux demandes de boxage des gens qui soudain coagulent autour de lui. « Vas-y Mélanchon, mets-lui une tannée au nabot ! On est avec toi, t’inquiète ». S’il ne se dégage fissa de cette forte sollicitation à la surenchère, il va se cramer les ailes.



Un individu, un garçon surtout, est d’abord poussé par sa mère « Défends-toi, ne te laisse pas faire ! » Ce qui contient déjà un message qui va au-delà de la seule défense. Il y a déjà un encouragement à l’attaque là-dedans.

Puis le garçon devenu jeune homme est encore poussé par la jeune compagne. « Ne te laisse pas faire » « Je méprise les gens qui manquent d’ambition »
Puis il est poussé par les camarades, puis par tous les ouvriers de l’usine ou les copains de la promo. Il faut vraiment qu’il soit malin pour échapper à ce poussage capitolien.




Il y a 20 ans, quand j’étais conseiller municipal (commune de 90 000 hab) je croyais normal de me mêler des affaires de la mairie, de faire ma part de boulot pour que les écoles soient correctes, que le système informatique soit correct et économique, pour que les rues soient sûres, pour que les vieux Algériens aient plus de prestige auprès de leurs gosses.
Punaise, le boulot ! 
Chaque semaine, une soirée se finissant à 2h du mat. et des heures ici et là à arpenter la ville, à écouter les gens, à pondre des plans, à vérifier les comptes bizarres des associations paramunicipales.
De tout ça, clairement, on m’y avait poussé. Reculer m’aurait fait passer pour un lâche, un déserteur, un traître.

J’ai demandé qu’il y ait des caméras dans la salle du conseil municipal afin que les habitants puissent au moins suivre les débats, comprendre où passaients leurs impôts. Mon maire a refusé et je suis entré en dissidence. J’ai cherché des remplaçants, des relais. Oh la la, non non non me répondaient mes citoyens. « J’ai autre chose à foutre que m’occuper en plus de la ville ».

Râler, réclamer le droit d’élire, de râler, de dénigrer, d’acclamer le chef, oui.
Participer régulièrement donc obligatoirement aux corvées collectives, non.

C’est pour ça qu’on aime autant le théâtre.


C’est tout de même à force de creuser cette question de la démocratie directe, de dire toute la stratégie hypocrite de la masse poussante qu’on finira par s’y mettre, progressivement. Sans doute en commençant par les communes ou les syndicats.


Bon, sur le plan pratique, on se retrouverait tout de même avec un paquet de problèmes. Une démocratie directe, si elle est absolue, aboutirait à faire disparaître le secret. Au moins celui des délibérations et cela dans tous les domaines (diplômes, obtention d’une bourse, d’un logement, d’une faveur, d’un permis de construire, d’un emplacement au marché, d’un emploi, d’un crédit...).
Dans tous les domaines, sur tous les cas, 60 millions de personnes devraient voter.
 
Ouille !

Enfin, vis à vis de l’étranger, des bandits, des ennemis, comment faire s’il n’y avait plus de secret, si 60 millions de Français avaient accès à tous les dossiers, même les plus militaires. 60 millions de personnes ayant accès à tous les comptes publics mais aussi privés par effet de cascade ? 60 millions de personnes ayant accès au clic de la Bombe ?

Plus d’ennemis, plus de frontières ? Alors c’est 7 milliards de personnes qui devraient examiner ma demande d’HLM.

On n’en a pas fini avec notre préférence pour les pyramides.


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