@ Alexandre Gerbi
Pardonnez-moi la parenthèse mais
elle était nécessaire. Je n’ai pas voulu mettre fin aux commentaires qui
suivent votre article ni le faire dévier. Il y a bien des éléments intéressants dans le débat,
qui est un vrai débat.
Je trouve incohérente la démarche
des harkis que vous rapportez mais pas leur indignation. L’attitude de la
France à leur égard en 62, l’abandon de nombreux d’entre eux à la vengeance et
au massacre était révoltants, indigne, monstrueux.
Mais je suis stupéfait de
constater que l’on peut encore aujourd’hui défendre et regretter le passé
colonial.
Comme Mourot, j’ai été envoyé
plus d’un an en Algérie pour faire la guerre aux Algériens en lutte pour leur
indépendance. J’ai eu la grande chance de ne pas être conduit à tuer, à faire
la vraie guerre car on a fait de moi, sur un piton de Kabylie, un
« instituteur ».
Et ce sont essentiellement les
enfants de « mon » école qui m’ont permis de tenir le coup.
Aujourd’hui, ma femme a une amie
fille de harki qui est une femme formidable, qui s’est construite avec beaucoup
de courage alors que son père, dans le ressentiment, se détruisait après son
aventure désolante.
Je crois que, comme beaucoup
d’autres, il a eu surtout la malchance d’avoir 20 ans dans le merdier de l’Algérie
colonisée qui se décolonisait (ce qui était nécessaire, et qui est resté pour
moi très positif).
Je voudrais donner un élément à
Serpico, qui pourrait éventuellement modérer un peu sa position très tranchée.
Là où j’étais, le recrutement des harkis n’était pas du tout celui de
« traitres » décidés à lutter contre leur peuple. Ça se passait plutôt
comme ça : dans des familles divisées, malheureuses, l’armée française prenait
quelques paumés et leur tenait des discours du genre : "On sait que ton frère
ou ton cousin est parti avec les fellaghas, tu sais ce qui t’attend, tu peux
t’en sortir en t’engageant à nos côtés, tu auras un salaire assuré pour ta
famille…".
Mais je reste convaincu qu’il
fallait décoloniser l’Algérie.
Quant aux promesses électoralistes
de Sarkozy, on a mille preuves maintenant que c’est toujours n’importe quoi.
C’est un individu indigne de diriger le pays. Ses positions seront toujours déterminées
par l’arrivisme.
Constatons tout de même qu’il est
très représentatif de la perte de sens et de la « morale » politique aujourd’hui
dominantes en France et Europe : si un jour c’est payant on flatte et reçoit
avec tous les honneurs les bourreaux Khadafi ou Bachar el-Assad ; si le lendemain
leurs peuples veulent s’en débarrasser on les déclare responsables de
« crimes contre l’humanité ».
Ce qui n’empêche pas notre ministre des
affaires étrangères d’aller inaugurer la naissance du Sud Soudan aux côtés
d’un autre bourreau officiellement sous mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale
(pour le massacre des Centaines de milliers de Sud-Soudanais qui
« fêtent » sous terre la naissance de leur pays).
Nos enfants et petits-enfants
vont devoir redonner du sens, de la dignité, de l’humanité à une monde devenu
un monstrueux n’importe quoi.