Dans le ciel du Texas et du Kansas, le coup de crayon de Virgile Opfer ?

L'histoire de Virgile Opfer que j'emprunte ici à sa biographie officielle (il est devenu depuis agent immobilier, en qualité de PDG de G5 Enterprises, Inc !), sera donc peut-être bientôt aussi connue que l'est celle de Kenny Johnson et Robert Widmer. Il faut dire qu'il aura été bien plus discret qu'eux, surtout du premier qui aimait à poser avec ses pilotes favoris. Son histoire est celle d'une jeune homme talentueux, issu d'un famille moyenne qui est arrivée à force de travail. Ses parents, Opal Fowler et Waldo Opfer, enfants d'émigrés allemands ont un jour quitté leur maison du Kansas natal dans l'espoir de trouver du travail à cueillir des fruits à Salinas, en Californie. Au lieu de cela, le jeune couple (ils se sont mariés le 25 décembre 1935) se retrouvera à Littleton, au Colorado, à la fin de l'automne 1936. Waldo Opfer y avait trouvé du travail en tant que contremaître de chemin de fer en charge d'une équipe qui construisait des enclos de chargement attenants aux rails de chemin de fer, il suivait donc l'avancée de la ligne et ils se retrouvent ainsi tous ensemble à Fresno en 1937. Quelques années plus tard, la famille déménage une nouvelle fois pour San Diego, attirée par les salaires élevés reçus par les travailleurs de l'industrie aérienne au cours de la Seconde Guerre Mondiale. À la fin de la guerre, ils étaient donc installés définitivement à San Diego, où Waldo Opfer travaillait, d'abord comme techinicien, puis comme contremaître à la Ryan Aeronautical Company, un constructeur aéronautique de petite taille, mais à la bonne réputation (c'est l'entreprise quiavait construit le Spirit of St-Louis de Lindbergh, à partir d'un excellent avion courrier, avait sorti l'avion d'entraînement NR1 devenu PT 20, 21, 22 et 25, et qui réalisera plus tard beaucoup de prototypes de VTOL (celui-ci aussi) pour finir dans se spécialiser dans le drone, comme je l'ai évoqué ici !). C'est aussi là où son premier fils Virgile, passionné de dessin, va s'inscrire à l'Université avant de rentrer en 1955, faute d'argent en apprentissage (Ryan ne paie pas tant que cela !), dans le département d'ingénierie de Ryan, au rayon des dessinateurs, où travaille déjà son père. Avant, il avait tâté de la carrosserie du ponçage de la peinture dans un garage de voitures pour se faire de l'argent : il était un grand fan de roadster (et achètera une voiture anglaise, une MGA 1956 rouge dont il restera longtemps très fier). Virgile restera chez Ryan jusque dans les années 80, prenant le temps de s'inscrire à des cours du soir en ingénierie pour améliorer ses connaissances, faisant des journées débutant à 6 heures et se terminant à minuit : il en finira diplômé en 1970.

Obstiné et travailleur, et surtout fort méticuleux, il finira ingénieur principal du bureau d'Advanced Design pour Ryan, un des plus hauts postes dans l'entreprise, travaillant avec un petit groupe d'élite pour la conception d'avions nouveaux. "C'est là que son talent à gérer un projet a été repéré par l'armée. Travailler sur un concept, et certains paramètres avec une limite de temps, Virgile s'y montrera très bon, coordonnant à la fois les efforts de l'aérodynamique, de la propulsion et de l'électronique, travaillant avec la direction, les ingénieurs et les autres concepteurs pour mettre tous les morceaux ensemble. De la même manière qu'un architecte crée un bâtiment à usage spécial pour répondre aux besoins d'un client, Virgile créera des dessins d'avions, pilotés et sans pilote, qui incorporeront les besoins de l'armée. La conception commençait autour du système de propulsion, généralement un turboréacteur, puis un fuselage qui devait abriter tous les autres composants requis pour remplir une mission spécifique. Il avait un talent unique pour assembler le tout dans une configuration concise et attrayante. Les politiques ou la concurrence pure se montrera souvent vexée des efforts déployés par la proposition de Ryan, car Virgile, en collaboration avec son équipe de conception avancée, produisait des dessins techniques égaux ou supérieurs à celles des grands fabricants de l'aéronautique, et pour un coût identique ou inférieur . "Plus souvent qu'autrement " dit-il, ils n'ont pas obtenu le contrat, mais les militaires ont toujours donné des notes élevées pour Ryan et ses conceptions " nous dit sa biographie. La firme touchera à tout : si l'astronaute Neil Armstrong a pu guider son module lunaire Eagle vers la Mer de la Tranquillité sur la Lune en 1969, c'est en utilisant un système d'atterrissage que Ryan avait développé (pour ses VTOLs), et qui a permis à l'homme de faire ses premiers pas historiques sur la Lune.

Et il est vrai que Ryan, petite entreprise face aux grands de l'aéronautique, est condamnée à innover pour hériter de marchés squatté par les plus grosses comme Boeing, Grumman, Northrop ou Lockheed. Le résultat, je l'ai écrit en partie ici, avec l'intuition d'un "drone oublié" qui semble aujourd'hui rappeler fortement quelque chose... "Les avions à décollage vertical (des STOL aussi comme le YO-51), des véhicules téléguidés cibles, des missiles de croisière et de haute altitude, des drones de reconnaissance sont quelques exemples de projets développés par l'équipe Ryan en conception avancée. En raison de la nature des travaux de pointe menée par ce groupe, Virgile a aidé à développer de nouvelles idées et il détient quatre brevets américains en son nom. Un brevet de conception, brevet US n ° D244265, publié le 10 mai 1977, pour une configuration de l'avion qui est conçu pour minimiser la détection radar est étonnamment similaire aux chasseurs furtifs d'aujourd'hui.  Virgile a déclaré avec une certaine fierté que, de temps en temps, T. Claude Ryan, fondateur et créateur de la société du Spirit of Saint-Louis, passait regarder par-dessus l'épaule de Virgile pour obtenir un coup d'oeil aux plus récents efforts de conception de l'équipe". Et il est vrai que ce dessin breveté a de quoi intriguer aujourd'hui, 37 ans après sa réalisation. Vu de dessous on est en effet très proche des deux derniers clichés pris : celui du Texas, avec un nez qui semble visible, un peu moins pour celui de Wichita, ou le triangle est beaucoup moins ouvert. En tout cas, le coup de crayon d'Opfer semble bien là... et davantage encore sur son projet de drone qui a suivi...

Il semble d'autant plus là que la première fois qu'un triangle volant ait été aperçu c'était au dessus d'Antelope Valley, qui se situe entre l'ancienne base de Muroc, celle d'Edwards et le ranch de Pancho Barnes, qui avait vu les premiers pilotes se battant pour passer le mur du son le premier (le XF-86, prototype du Sabre, à ce sujet a certainement battu de peu le X-1 de Yeager), un lieu d'essais lié à ce qu'on appellera plus tard la Zone 51. Un endroit rêvé pour faire du planeur, dans les années 70 : là où en 1977 a été tourné le documentaire “El Mirage” par Christopher Woods, lors du 43^eme concours de l' US Unlimited Class Soaring Nationals qui s'était tenu au El Mirage Glider Port, en plein désert du Mojave. Au bon temps des planeurs Libelle, Glasflugel 604 et des Nimbus. Car d'autres dessins ont suivin notamment celui d'un drone, aux formes adoucies, dessiné en 1977 lui aussi sousle numéro de brevet "U.S. Patent 4,019,699". Un drone triangulaire signé Teledyne Ryan, firme spécialisée dans le genre, on le sait. Un engin ainsi décrit : "un aéronef qui a une très faible observabilité visuellement et au radar thermique et aux dispositifs de détection acoustique. L'avion est conçu pour avoir le moins de bords et de surfaces réflectives possible, avec un type d'aile delta, les bords étant droits, ou presque droites, et des sommets arrondis. Toutes les surfaces sont aussi près du plat que possible, dans les limites des exigences aérodynamiques, et toute la surface de l'aéronef est conducteur de l'électricité avec au moins une discontinuité. L'unité de propulsion est carénée dans et à l'abri du radar par l'aile. Des parties de l'aéronef, en particulier des bords, peuvent être dans un matériau absorbant les ondes radar, et les ouvertures essentielles, des conduits ou des ailettes en saillie sont de façon similaire à l'abri afin de minimiser la surface équivalente aux radars". On remarquera l'observation du manque de bruit, une des caractéristiques de beaucoup d'observations d'OVNIS triangulaires observés alors qu"ils n'avançaient pas vite. L'engin ultra-léger ne devant pas nécessiter une importante poussée pourrait en effet faire beaucoup baisser le niveau sonore lors de ses vols. Comme j'ai pu l'écrire ici, "l'idée qui avait prévalu chez Ryan était simple : il suffisait de possèder un bon moteur de petite taille pour faire un bon drone". Un petit moteur à bord qui aurait très bien pu avoir une origine française : "l'histoire du dernier drone de la saga a débuté en 1971, avec un énième projet Ryan, appelé 147S-2, un drone de reconnaissance cette fois destiné à la basse altitude, en pénétration rapide, propulsé par un Teledyne CAE (Continental) J69-T-406 qui équipait déjà le drone supersonique Ryan. En fait une turbine Turbomeca construite sous licence !". Celle équipant le Tweet T-37, guère plus bruyant qu'un Fouga Magister (il siffle, en revanche)... en tout cas, en 1977 on avait tout chez Ryan ce qu'il fallait pour construire un appareil le moins bruyant possible, demeurant subsonique et surtout "invisible" aux radars : si le F-117 a été choisi, il se peut très bien que l'option Ryan n'ait pas été abandonnée.

Dans ce cas, cela remet en cause beaucoup de choses, si l'engin a été réellement construit... car il aurait aujourd'hui plus de 30 ans ! Comme ma proposition de Kingfish comme solution, à l'évidence, l'engin photographié ne serait donc pas si neuf que ça ! Et cela permettrait d'expliquer en même temps pas mal de choses liées au mythe du fameux TR-3, ce "black project" si souvent décrit un peu partout, mélangé au projet Aurora. Selon Curtis Peebles , ce sympathique ufosceptique, dans "Dark Eagles",  "Les observations ont commencé à la mi-1989, lorsque les opérations de jour du F -117A ont commencé. Le modèle a été vu pendant à suivre la même route que plusieurs F- 117A, séparé par huit à dix minutes. Les observateurs ont signaler que trois ou quatre F- 117As passaient, puis l'engin triangulaire, triangulaire, puis trois ou quatre autres F- 117A. L'avion a été décrit comme plus grand et plus silencieux que les F- 117A. Il a montré un modèle d'éclairage semblable au F- 117A - des lumières ambbrées au bout des ailes et un feu rouge près du nez. Il y avait aussi eu des observations de l'avion triangulaire pendant des nuits de pleine lune. Plusieurs de ces observations ont eu lieu dans la nuit du 3 mai 1990. Cinq observateurs différents ont rapporté l'avoir vu au-dessus de Mojave, de Lancaster, de Palmdale de Tehachapi,en Californie , (près de l'Edwards Air Force Base ) au cours d'une période de quatre heures. L'avion triangulaire a rapidement reçu le nom de « TR- 3A Black Manta . "L'historrique" de son programme a été reconstruite, il est affirmé que Northrop a obtenu un contrat à la fin de 1978 pour développer un avion d'essai furtif . C'était une conception aile volante appelée la pénétration à haute altitude tactique (ou THAP ) . L'histoire continue en disant que l'avion d'essai a effectué son premier vol en 1981 (une référence au rapport de 1981 d'Aviation Week et l'histoire du Shamu, le SR-71) . En 1982 , Northrop est décrit comme ayant reçu un contrat pour la construction d'un aéronef de production , sur la base de l'appareil de test . Depuis, les histoires ont continué et c'est devenu le TR- 3A." Certains témoignages confondants laissent entrevoir une technique de dissimulation particulière : "Il est également allégué que le modèle a de petites lumières blanches sur la face inférieure noire du triangle, pour fournir " camouflage de constellation " contre le ciel étoilé" . Amusante façon de faire ! Et confirmation que l'engin est contenporain du F-117, et qu'il volait déjà il y a 24 ans au moins !

Selon les rumeurs, tenaces, le modèle "Manta" existerait en effet depuis des années (à gauche le hangar des Skunkworks), et aurait fait quelques incursions dès la seconde guerre d'Irak pour accompagner des raids de F-111 ou des F-117. Ce qui en ferait aussi un drone possible, surtout si le F-111 en personne aurait été un Raven, qui aurait servi de guide, les "Mantas" se chargeant de bombarder à sa place, lui ne pouvant le faire (il avait sa soute occupée par ce qui étaient les "pods" de son concurrent le Prowler). Problème, l'engin selon le reportage TV aurait été aperçu dès 1996 et non durant la première guerre : ce serait donc bien lors de la seconde guerre du Golfe américaine donc ! Il aurait été vu également à la même époque (il y a donc plus de vingt ans !) en compagnie des avions-citernes KC-135 (confondu avec l'Aurora), ou aux côtés de F-117 et T-38 : le premier en faisant une version piloté, les deux autres un drone "accompagné" : or le premier projet d'Opfer se prête aux deux configurations ! Il a été rapporté comme étant opérationnel avec le F-117 au cours de la guerre du Golfe, fonctionnant alors comme "Team Spirit" - un terme abscons utilisé par les pilotes sur certains vols de F-117, et entendus par des opérateurs radios. Les rapports des observateurs indiquent également que le TR-3 pouvait avoir une forme en plan plus triangulaire, ou aux extrémités arrondies, mais il y a aussi eu à la même époque des rapports d'un engin avec des forme plus en dents de scie sur le bord de fuite. Cela a été appelé à une époque « artichoke-artichaut », qui aurait été aperçu au-dessus de Tonopah, et peut indiquer les travaux qui auraient suivi le développement du F-117, ou peut-être plutôt un plus gros avion, plus important (ce sera le B-2, à l'arrière caractéristique devenu "queue de castor" !).