De l’idéologie dominante, de la gouvernance globale et du néo-totalitarisme à travers l’opération « Pussy riot »

« vous n’êtes pas Sophie Sholl et vous ne ferez pas endosser l’uniforme du SS à vos « ennemis » idéologiques. »

Jean-Michel Lemonnier

Sophie Sholl était une résistante allemande au nazisme et elle n’a jamais « fait endosser » quelque uniforme que ce soit à quiconque, et sûrement pas celui du SS à ses « ennemis idéologiques . Etant donné ce qui lui est arrivé, elle n’en aurait guère eu le temps, la pauvre. Les nazis connaissaient très bien l’adresse du tailleur sans avoir besoin qu’on les y conduisît et ils y sont allés de leur plein gré. Je tiens à dire que je décline également toute responsabilité dans les dérives fascisantes de ce site et particulièrement de cette page : je ne crois pas avoir jamais montré l’exemple de ces sortes de de délires, toujours plus ou moins associés à l’antisémitisme. Au reste, la main levée de la petite statue de Bartholdi au jardin du Luxembourg, qui apparaît à côté de chacun de mes messages, porte la flamme de la liberté ; il ne faut pas confondre ce bras levé (si on y voit mal) avec un autre qui ferait le salut fasciste encore en usage dans les réunions d’un Hezbollah très caractéristique, idéologiquement, de l’islamonazisme des bons aryens chiites d’Iran.

A cette petite réserve près, j’apprécie beaucoup votre style et je vous donne licence pour continuer ainsi autant que vous pourrez le souhaiter : on ne saurait s’en lasser.

@Jean-Michel Lemonnier

Votre phrase était malheureusement un peu ambiguë. Ces choses-là arrivent aussi trop souvent aux miennes - et je m’en rends compte trop tard - pour que je puisse songer à vous le reprocher. On pouvait donc la lire de deux manières différentes, dont une qui vous surprendrait. C’est cette lecture-là que j’ai évidemment choisie, non pas par mauvaise foi, mais par jeu ironique. Faire des farces à un interlocuteur dans un débat polémique, c’est tout de même beaucoup moins cruel, vous en conviendrez aisément, que de faire bon marché publiquement du traitement réservé à trois pauvres filles qui vont tâter pendant deux ans des prisons russes. Dans deux heures, vous aurez complètement oublié, et moi aussi. Pour elles, ce sera plus long. S’il n’y avait pas d’autre férocité que polémique dans ce bas monde, il serait un vrai paradis !

Il n’y a aucun débat de fond dans cette histoire. Ou alors, étant donné les obsessions vaguement sadiques et en tout cas assez glauques émergeant depuis le début des imaginations intervenantes, ça ne peut être qu’un débat de fond de petite culotte.

Par ailleurs, si vous n’avez pas encore perçu la nature fascisante du régime des mollahs iraniens, essayez de vous informer un peu, on en reparlera ensuite.

Jean-Michel Lemonnier

Je vous trouve quand même un peu expéditif avec votre interlocuteur. J’ai fait ce triste métier de prof pendant près de trente-huit ans ; j’y ai été assez constamment perçu comme un furieux anarchiste et je dois bien avouer que de ce type humain dont on nous donne quelques caractéristiques précises, j’ai bien dû connaitre une trentaine d’exemplaires. A l’époque du 25e congrès du parti communiste - cela ne date pas d’hier !- j’en avais trois ou quatre dans le collimateur à qui je peux me flatter d’avoir fait passer d’assez mauvais quarts d’heures polémiques.

Jean-Michel Lemonnier

Vous ai-je jamais dit qu’il n’y avait pas de manipulation médiatique ? On a dû beaucoup en parler puisqu’il en est question ici. Je n’ai entendu que deux ou trois brèves allusions aux infos de France culture, qui ne m’ont pas laissé un souvenir très précis. Je ne regarde jamais la télévision. Mais comme il y a eu sur AgoraVox cinq ou six articles pour un fait divers jugé par leurs auteurs tout à fait dépourvu d’intérêt, on serait tout aussi bien fondé à se demander qui les manipule !

A l’époque bénie de Léonid Brejnev où en envoyait dans les prisons et les hôpitaux psychiatriques les dissidents russes, il y avait aussi une mobilisation en occident. On en parlait beaucoup - pas tant que ça il est vrai dans « l’Huma » !- et des pétitions circulaient. Fallait-il refuser des les signer pour ne pas faire je jeu de ces chiens d’anticommunistes ? Tous ces dissidents méritaient-ils le sort abject qui leur était réservé ? Soljénitsyne - que je n’apprécie guère - et que la gauche française a quelque peu critiqué, rien n’empêcherait que vous le portassiez aujourd’hui au pinâcle : ce qu’il souhaitait et qui horrifiait quelque peu ici : la Russie éternelle, l’alliance du césarisme et de l’orthodoxie, c’est très précisément ce qu’est en train de réaliser le camarade Poutine ; et c’est ça, cette monstrueuse régression que, par un curieux retournement des choses, vous êtes en train maintenant d’approuver allègrement. Il est vrai qu’on n’est pas des Russes, et que c’est peut-être une bonne chose pour nous, bien je n’en puisse voir la raison : le malheur des uns peut quelquefois faire le bonheur des autres ! Mais il faut cesser alors de gémir sur les guerres et les horreurs ici et là dans le monde. Prendre la défense du régime de Poutine, c’est être cynique, et il vaut mieux consentir à l’être jusqu’au bout, renoncer à la tartufferie des prétentions morales en politique.

@ Christian Labrune,

Je viens de lire votre échange de commentaires avec l’auteur de l’article et je dois vous dire que vous êtes plus crédible quand vous n’utiliser pas l’ironie.
Vous critiquez à juste titre le système Poutine (église & pouvoir politique) et je suis d’accord avec vous pour dire que ce serait une énorme régression s’il était appliqué chez nous.
Il n’en est pas de même en Russie où l’alternative qui pourrait sortir des urnes est le parti communiste de Guennadi Ziouganov. Les partis libéraux sont associés au chaos qui a régné durant les années Eltsine ainsi qu’au bradage des richesses nationales à des intérêts étrangers. Ils sont rejetés par plus de 85 % des Russes. 
Je crois que le système Poutine est un passage obligé et qu’il aboutira à une réelle démocratie quand le pays sera réorganisé, parce que c’est la volonté des Russes. Ce ne sera pas rapidement, la Russie est un pays de traditions et est habituée à avoir un pouvoir exécutif fort.
De toute façon, avant de donner des conseils aux autres, ne devrait-on pas commencer par nous occuper de notre propre démocratie qui part en lambeaux ? Nous serions alors plus crédibles pour donner des conseils.

Quelques exemples.

États-Unis. Y-a-t-il une place possible pour un candidat indépendant à l’élection présidentielle ?

France. Est-il normal qu’un parti dont la présidente fait près de 20 % au premier tour des présidentielles ne soit quasi pas représenté au parlement ou qu’un parti qui fait environ 30 % au premier tour des législatives ait une majorité absolue de parlementaires ?

La liste peut être longue, je m’arrête là.

Bien cordialement.

@Pierre,

Je connais trop mal la situation actuelle en Russie pour m’aventurer à en dire quoi que ce soit, ce serait téméraire, mais je me garderai bien de prendre parti pour un courant politique plutôt que pour un autre, et c’est ce que je reproche à beaucoup d’intervenants ici, qui prennent fait et cause pour le nouveau tzar, lors même que le fonctionnement des institutions produit des horreurs. Pour l’instant, la situation paraît à peu près stable, mais considérez une situation historique de transition, celle qu’on a connue par exemple en 2011 dans les pays arabes, et l’erreur où sont tombés la plupart des observateurs occidentaux : d’abominables tyrans étaient sur le point d’être renversés, les peuples aspiraient enfin à la démocratie, les « révolutionnaires » siégeaient sur les places publiques. On est resté, dans la presse et probablement dans l’opinion, au moins jusqu’au début de l’été 2011 dans ce qu’il faut bien appeler après Malraux une « illusion lyrique » des plus calamiteuses avant que se profile le spectre d’un hiver islamiste qui s’est enfin installé, et pour « un certain temps ».

Les religions monothéistes, à moyen terme, sont condamnées, et l’islam comme les autres ; quand les réserves monétaires seront complètement épuisées en Egypte et que les Frères seront confrontés à une misère sociale contre laquelle ils ne pourront plus rien, le petit peuple abandonné par Allah se trouvera évidemment quelque peu dessaoulé, mais cela va prendre combien de temps ? Combien de générations sacrifiées ? Au moins deux, dans l’hypothèse la plus optimiste. Vous me dites que « le système Poutine est un passage obligé et qu’il aboutira à une réelle démocratie quand le pays sera réorganisé ». C’est une très vieille rengaine que vous me chantez-là ! « Sacrifiez-vous au bonheur des générations futures » disait déjà le communisme stalinien dans les années 30. On a vu le résultat. Evidemment, lorsqu’il s’agit de pays lointains où nous ne vivons pas, ces choses-là sont aussi faciles à admettre que pour les journalistes du Monde en 75 le déplacement vers les campagnes des habitants de Phnom Penh. Cela paraîtrait difficile à concevoir en France, disaient-ils, mais le Kampuchea démocratique n’est pas la France et les Cambodgiens ne devraient pas tarder, après « un certain temps », à s’en trouver mieux. Quand il s’agit de la France et qu’un parti politique brigue le pouvoir, on ne promet évidemment pas une amélioration pour les générations futures, personne ne le comprendrait, et « le changement, c’est tout de suite ».

A ce compte-là, on peut très bien justifier aussi le système capitaliste. Il fonctionne en Europe sans interruption depuis le moyen-âge, et malgré les crises et le marxisme qui prédisait son effondrement fatal, il finit toujours par retomber sur ses pattes. Sauf que les réajustements nécessaires pour un minimum de redistribution des richesses, la perpétuation du système et son homéostasie, se font toujours sur une ou deux générations et qu’il y a toujours une grande quantité de gens qui, pendant ce temps-là, se trouvent condamnés à la misère et à l’humiliation. Dans votre logique, c’est donc cette idée de la nécessité des délais qui me paraît critiquable : on ne peut pas, quand on regarde sa propre situation dans le monde, considérer qu’on a qu’une vie et qu’elle est au centre de l’histoire, et regarder les peuples lointains avec le regard d’un historien de la longue durée qui ne perçoit que des groupes humains réduits à des abstractions.

Je ne suis pas du tout d’accord non plus avec ce que vous écrivez concernant une démocratie française qui serait injuste avec le FN. Le FN vient du fascisme, c’est l’héritage d’un Mitterrand qui en vient aussi, qui a délibérément a voulu et très bien programmé sa croissance. C’est bien, du reste, le seul domaine où son action ait été une réussite, et vraiment calamiteuse. Je n’envoie plus d’articles sur AgoraVox, ils sont systématiquement refusés, et le seul qui n’ait pas été bloqué par la modération porte justement sur cette question du FN et des 500 signatures. Pas de pitié pour ces gens-là et les pauvres bougres d’hilotes qui les soutiennent ! C’est ma position.

@ Christian Labrune,
A lire votre dernier commentaire, je constate que nos opinions ne divergent pas tant que cela. Certes, il y a des points important comme le délai pour une transition vers plus de démocratie mais je crois que c’est moins important que vous ne le penser. La libre circulation des personnes existe bel et bien en Russie. La liberté d’entreprendre n’est limités que par la corruption, pas par la loi. La liberté de parole est bien réelle, la preuve en est par exemple donnée avec les slogans des opposants ou avec la déclaration de plus de 40 minutes des Pussy Riot lors de leur procès. Une déclaration qui a été enregistrée et qui circule sur Internet. Il y a un contrôle sur les média (pas tous) mais il est plutôt exercé par des groupes privés, propriétaires de ces média et proche du pouvoir. Comme en France ? !
La Russie se trouve à peu près dans la même situation que durant les années 60 chez nous, celles qu’on appelle les golden sixties. Il y a eu une lente évolution de la démocratie en France et il ne me semble pas que cela ait laissé des traumatismes à une ou deux générations. 
Pour les religions monothéistes, j’espère que vous avez raison.
Pour le FN, c’est malgré tout un manque de démocratie au niveau des principes. Il en serait de même pour tout nouveau partit non conventionnel. Les règles d’éligibilité sont plus souples en Russie.

J’ai eu un plaisir à vous lire et je me dis que souvent les commentaires sont plus intéressants que certains articles. Je pense qu’ici l’article était bon mais c’est mon avis personnel.

Bien cordialement.

pierre,
je ne sais pas quand je pourrai vous répondre, ma machine est en panne et je ne peux plus corriger ce que j’écris ; une réponse assez longue à un autre correspondant s’est complètement évaporée tout à l’heure avant l’envoi. A bientôt.

@ Tf1Goupie,
Oui, j’ai voyagé en Russie. En Ukraine aussi et les situations sont assez semblables. Oui, j’ai une connaissance suffisante de la langue russe pour comprendre mes interlocuteurs et être compris par eux. Non, je ne suis ni journaliste ni sondeur d’opinions. Je suis un citoyen lambda qui est parti découvrir des pays, surtout sous l’angle culturel.
Ma constatation est que les gens s’expriment librement dans la rue, dans le métro ou en privé. Il n’y a rien de changé sur ce point depuis la fin de l’époque communiste. Quand ils sont contre Vladimir Poutine, ils le disent haut et fort. Ce qui les irrite le plus, c’est la corruption à tous les niveaux, depuis le policier qui les rackette jusqu’au ministre qui se fait acheter en passant par le fonctionnaire qui veut son pot de vin. Généralement, ils n’accusent pas Vladimir Poutine d’en être directement responsable mais ils disent qu’il ne fait rien pour faire cesser cela. Personnellement, je ne vois pas comment il peut y arriver. Peut-être en créant une brigade d’Incorruptibles ?
Des journalistes ont été assassinés. C’est inacceptable. C’était déjà le cas sous l’ère Eltsine. Le point commun entre la plupart de ces assassinats est qu’ils enquêtaient sur des sujets maffieux. Comme les enquêteurs de la police peuvent être achetés, les coupables sont souvent introuvables. Là, Vladimir Poutine a intérêt à trouver une solution. Je constate cependant qu’il n’y a plus eu d’assassinat de journaliste depuis quelques années.
Pour le reste, tout est comme chez nous. Les mêmes niaiseries à la télé, le football qui fait l’essentiel des conversations, et la vodka (à un prix dérisoire) qui coule à flot.