Et les policiers retombent sur l’équipe de Torcy... six ans après ?
C'est France-Info qui nous l'a annoncé : les policiers ont bien déterminé que la cellule islamiste de Torcy découverte en octobre dernier était dangereuse, et que quatre terroristes en puissance en relation avec elle, arrêtés la semaine dernière, venaient d'être déférés, ce qui en fait 18 au total à ce jour dans le groupe. Tous extrêmement dangereux, selon le procureur de la République (*). Or, nulle part il n'est dit, dans les dépêches d'agence ou dans les articles de presse quels liens entretenait cette cellule avec une région qui nous intéresse au plus haut chef, celle de Toulouse, car les ramifications de l'affaire Merah ne s'arrêtaient pas au bâtiment où il a été abattu. A ce jour, seules Cannes et Strasbourg sont citées comme villes secondaires des arrestations effectuées. Et pourtant, l'examen attentif du cas des jihadistes toulousains arrêtés il y a bien longtemps aurait dû mettre la puce à l'oreille aux policiers... car depuis six ans maintenant on tourne autour... des mêmes individus ! Qui l'étaient déjà, dangereux !!! Pourquoi certains d'entre eux sont passés au travers, voilà bien toute la question...
Le 26 mars 2012, ici-même, je vous l'avais pourtant rappelé, en revenant sur une rafle d'islamistes survenue... le 15 février 2007 à Toulouse et dans ses environs, où des islamistes extrémistes avaient été arrêtés, dans lequel figurait... le dénommé "Abou Yasin", un pseudo bien sûr, qui avait vite été relâché pour des raisons que l'on ignore toujours à cette date. L'homme s'était alors précipité sur un site jihadiste connu (celui de la veuve noire bruxelloise) pour raconter son arrestation et ses interrogatoires. Les enquêteurs avaient alors relié eux aussi Toulouse à Bruxelles... en faisant des toulousains des habitués du site SOS MInbar de la veuve noire Malika El Aroud. "L'enquête les a menés à la région de Toulouse, en Ile-de-France et dans les zones de banlieue autour de Bruxelles, où la plupart des amis des deux suspects vivaient" avait-on conclu à l'époque, en remarquant d'emblée un fait plutôt troublant. "Plus de 20 personnes ont été arrêtées ; les Belges ont été libérés, mais chez les Français, seul Abou Yasin a échappé à la prison. Après 72 heures de détention et neuf séances d'interrogatoire, il a été rendu à la liberté". Un bien étrange personnage que cet "Abou Yasin"... le nom figurant sur le site incriminé, dont les premiers mots en forum avaient été pour prendre la défense des policiers qui l'avaient arrêté, dont un inspecteur toulousain, surnommé "Mouloud" et une inspectrice surnommée "Audrey", et dont l'identité véritable fait aujourd'hui penser à quelqu'un d'autre... de bien connu, à nouveau à l'ombre depuis plusieurs mois...
Quelques mois plus tard, le 1er octobre, à la grande mosquée de Paris, le ministre de l'intérieur de l'époque tenait un discours très ferme sur les extrémistes islamistes : « ceux qui parlent de haine blasphèment l'islam. Ils n'ont rien à faire sur le sol de la République française ». Hier soir, devant un parterre composé de tous les représentants de l'islam de France, le chef de l'État est intervenu à la grande mosquée de Paris, à l'occasion de la rupture du jeûne du ramadan. Nicolas Sarkozy s'est montré ferme à l'égard des extrémistes « qui tuent au nom de l'islam et qui voudraient nous précipiter dans une guerre de religion à l'échelle mondiale ». Ceux qui n'affichent pas un message « de paix et d'amour de l'autre », a-t-il précisé, « seront expulsés du territoire ». Il a assuré qu'il n'y aurait « aucune faiblesse à leur égard ». Le 18 février 2007, les juges Jean-Louis Bruguière et Philippe Coirre avaient donc mis en examen quatre toulousains, un ariégeois (Olivier Corel) et un albigeois (Thomas Barnouin) pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » ; trois d'entre eux l'étant pour « financement du terrorisme ». Le coup de filet était parti de l'arrestation fin 2006 de Thomas Barnouin (qui a été Témoin de Jéhovah avant de devenir musulman !) et de Sabri Essid, à leur retour de Syrie. Essid, dont le père épousera la mère de Mohamed Merah. Essid en prison, c'est Mohamed Merah qui lui rend visite régulièrement. On dira plus tard que c'est Essid qui le convertira au jihadisme )- c'est lui aussi qui l'enterrera- (sans oublier l'influence d'Abdelkader). Les autres inculpés du moment s'appellent Fabien Clain, Mohamed Merghebi, Anouar el Madhi et Miloud Chachou.
La Dépêche du midi du 18 février était bien formelle : c'était bien un réseau de fournisseurs de combattants en Irak, destinés à mourir là-bas : "Chez l'un d'eux, un testament a même été trouvé, faisant état d'une volonté de « vouloir mourir en martyr ». Tous étaient dans le même état d'esprit, selon les enquêteurs. Récenmment convertis à l'Islam, ils se seraient radicalisés. Leurs voyages réguliers en Syrie, officiellement pour y apprendre l'arabe littéraire, n'auraient été qu'une étape d'un long processus d'apprentissage fanatique. Ils entretenaient des relations avec d'autres groupes, ailleurs en France et en Europe. « Le réseau comprenait de cinquante à soixante personnes, à Toulouse, en région parisienne, en Belgique », précise un enquêteur. Neuf hommes avaient été interpellés vendredi en Belgique ; ils ont été relâchés, en attendant un complément d'enquête. Selon les policiers, le réseau démantelé cette semaine serait le même que celui qui avait acheminé une jeune kamikaze belge en Irak, où elle a commis un attentat suicide en 2005." C'étaient donc bien des hommes dangereux.
La presse ne s'y était pas trompée en effet sur le groupe arrêté, qui accusait nommément le gourou toulousain d'endoctriner les jeunes pour en faire de la chair à canon : "La filière toulousaine, elle, fonctionnait depuis plusieurs mois, et aurait recruté une dizaine d’apprentis djihadistes, dont certains auraient rallié la Syrie en bus. « Il y avait une première phase d’endoctrinement, explique un enquêteur. Puis, les jeunes étaient envoyés en Égypte, pour des séjours de plus en plus longs. » Une phase de préparation, plus dure, était ensuite organisée : stages sportifs, conditionnement à base de vidéos de combats de djihad. Les candidats djihadistes devaient compléter leur « formation » en Égypte, dans une école du Caire, avant d’atteindre l’Irak, via la Syrie" écrit la La Dépêche du Midi, du 18 février 2007. La même école où l'on trouvera Abdelkader Merah. "Parmi les huit hommes mis en examen, le cerveau du groupe, cheikh Olivier Qorel, 60 ans, Français d’origine syrienne, habitant Artigat, un village de l’Ariège. C’est lui qui convainc Sabri Essid, un compagnon de Barnouin, d’aller rejoindre ce dernier en Syrie, via la Bulgarie et la Turquie. « Tu retrouveras ta copine au paradis, mais avant vends ta voiture et règle tes dettes » lui enjoint Qorel" ajoute Le Figaro, 28 mars 2007. On s'attendait donc à voir inculpé... celui qui promettait des vierges au paradis.
La fermeté promise par le ministre de l'intérieur ne semblait donc pas avoir été lettre morte avec les arrestations toulousaines des mois précédents... mais elle présentera étrangement deux (grosses) exceptions, que sont Abdelkader, alias "Abou Yasin", relâché après 72 heures et non inculpé, pour le premier, et celle du fameux gourou d'Artigat, Olivier Corel, qui sera bien mis en examen au départ pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » dans un premier temps, et ensuite placé sous contrôle judiciaire, avant de finir... par bénéficier d'un non-lieu qui laissera tout le monde pantois ! Chose étonnante en effet : alors que chez les policiers le dossier de cette cellule terroriste s'appellait "filière Artigat" (le classeur contenant l'affaire était ainsi estampillé)... son responsable échappait donc à l'enfermement sur décision des juges chargés du dossier alors que tout concluait pourtant à le voir comme principal organisateur de la filière jihadiste syrienne. Qui avait pu faire pression sur eux pour éviter la prison à ce qui était à l'évidence l'organisateur du réseau ? Car les preuves n semblaient pas manquer, l'homme ayant été visiblement mis sous écoute et sa maison surveillée pendant des semaines pour y constater les alées et venues... Corel, cet homme d'influence (de son vrai nom Abdulilah Qorel au départ), qui mariera plus tard religieusement la mère de Merah et le père de Sabri Essid, et qui s'occupera aussi de celui express de Mohamed Merah et de son divorce tout aussi express d'avec la jeune Hizia. Comment la "fermeté" promise par Nicolas Sarkozy a pu faire autant l'économie de ses deux personnages-clé des tueries de Toulouse demeure une énigme. Les six autres arrêtés (dont Sabri Essid) n'avaient pas eu cette chance : En 2009, des peines de six mois à six ans de prison seront prononcées par le tribunal correctionnel de Paris à leur encontre, pour "avoir mis en place une filière de recrutement et d’acheminement de volontaires à la guerre sainte en Irak" . Des sanctions auxquelles échappaient Abdelkader Merah et Olivier Corel... ce qui aujourd'hui encore, ne cesse d'intriguer.
Vous allez me dire certes, mais quel est le lien avec Torcy (**) ? Et bien il est simple : en 2007 déjà, un des membres de la rafle en provenait déjà, comme le montrait la liste des personnes arrêtées : "Au total, onze personnes, soupçonnées d'entretenir des liens avec Al Qaïda, ont été interpellées : les deux jeunes hommes expulsés de Syrie, âgés de 23 et 27 ans ; trois couples dans la Ville rose ; un couple franco syrien d'une soixantaine d'années à Artigat, en Ariège ; et un homme à Torcy, en Seine-et-Marne, en banlieue parisienne. Tous sont de nationalité française et plusieurs sont de récents convertis à l'Islam". On note au passage la citation une nouvelle fois du fameux gourou syrien d'Artigat, inquiété puis disculpé, maintenant comme avant, ce qui laisse tout envisager (y compris, cela vient automatiquement à l'esprit, le rôle d'informateur possible), et le fait sidérant que dès 2007, la mouvance dangereuse rédécouverte en 2013 existait déjà, et qu'elle comprenait aussi l'aîné des Merah, aujourd'hui sous les barreaux, mis en examen aujourd'hui, six ans après, on le rappelle, pour "complicité d'assassinats, vol en réunion et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'acte de terrorisme"... lors des attentats, un passager d'un train de banlieue se rendant à....Torcy sera intrigué par la conversation d'une jeune femme qui avait au bout du fil...Mohamed Merah, censé ne pas avoir de téléphone selon la police, dans son appartement de Toulouse...
Pourquoi est-on passé à côté il y six ans pour redécouvrir les mêmes six ans plus tard ? Qui donc avait décidé de laisser faire et pourquoi ??? Qui est responsable d'un tel laxisme organisé ?
(*) François Molins, aperçu lors du dénouement de l'affaire Merah et qui a déclaré à propos du groupe arrêté qu'il s'agissait du « groupe terroriste le plus dangereux jamais démantelé depuis 1996 ». L'enquête était partie d'une agression visant une épicerie juive. "Quatorze personnes ont déjà été mises en examen dans cette enquête, qui trouve son origine dans l'attentat contre une épicerie juive de Sarcelles (Val-d'Oise) le 19 septembre. Une personne avait été blessée par le jet d'une grenade dans ce commerce. L'attaque avait conduit au démantèlement en octobre à Torcy (Seine-et-Marne) et Cannes (Alpes-Maritime) d'une cellule islamiste composée de personnes ayant pour certaines d'entre elles le profil de délinquant convertis à "l'islam radical". Le coup de filet d'octobre a été marqué par le décès d'un chef présumé de cette cellule, Jérémie Louis-Sidney, abattu à Strasbourg par la riposte de policiers sur lesquels il a tiré alors qu'ils venaient l'arrêter. Outre les arrestations, l'enquête a permis depuis de découvrir de nombreux éléments susceptibles d'entrer dans la composition d'un "engin incendiaire similaire à ceux utilisés lors de la vague d'attentats commis par le GIA en 1995 et 1996". Les enquêteurs pensent que plusieurs des suspects poursuivis dans ce dossier ont participé à la mise en place d'une filière visant à rejoindre des groupes armés à l'étranger pour y mener le jihad. Les spécialistes estiment que plusieurs dizaines de Français se sont rendus ou ambitionnent de se rendre en Syrie. "
(**) Rappelons que lors du premier coup de filet de d'octobre 2012 à Torcy un échange de coups de feu avec les policiers avait fait un mort, à Strasbourg, Jérémy Louis-Sidney, versé islamiste radical et partie prenante de la cellule dangereuse découverte. Des bombes atisanales comme celles du réseau Kelkal (ou de Boston !) avait été découvertes.
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