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FH : mandat pluvieux, mandat heureux, mandat fumeux

Ou l’art de l’attente, du divertissement et du bien-être engourdi

François Hollande va fêter dans quelques jours son troisième anniversaire comme Président de la République française. Il s’est prêté ce dimanche 19 avril à un bilan de son action sur Canal +, la presse ne manquera pas de se livrer à son tour à quelques bilans plus ou moins bien chiffrés. Pour ma part, j’aimerais me risquer à formuler quelques remarques. Au bout de trois ans, on ne peut plus vraiment parler d’un début de mandat et les impressions qui se sont formées peu à peu dans mon esprit finissent par avoir une consistance directionnelle nette et persistante.

Ce qui me frappe le plus quand je regarde le parcours de François Hollande à la tête du pays, c’est la conjonction plutôt paradoxale de sa très faible popularité installée depuis les tout débuts et du rejet de la politique de son gouvernement exprimé sans fard (mais avec beaucoup d’abstention, début du paradoxe) dans les résultats des élections intermédiaires, avec une impression de résignation désabusée des Français qui se montrent finalement assez complaisants avec lui : quand François Hollande, entouré soit de Jean-Marc Ayrault, soit de Manuel Valls, a-t-il dû rengainer un projet de loi en cours d’examen ? A ma connaissance, jamais, sauf cas de la Loi Macron qui n’a pu passer que grâce au recours au 49.3, et ceci uniquement parce que sa majorité traînait les pieds.

On a bien eu des manifestations de grande ampleur contre le « Mariage pour tous », des pigeons, des bonnets rouges, des notaires et des médecins contestataires, des radars, des portiques « écotaxe » ou des centres des impôts incendiés, mais tout cela glisse sur François Hollande comme des gouttes de pluie sur les plumes d’un canard. Il est vrai que côté pluie, il s’y connait. Mandat pluvieux, mandat heureux, apparemment.

L’art de l’attente est au coeur du projet présidentiel de François Hollande. En dépit d’un programme électoral qui comportait « 60 engagements pour la France » et d’une conclusion du débat d’entre-deux-tours composée de 15 brins d’anaphore à résonance programmatique tels que « Moi Président, je constituerai un gouvernement qui sera paritaire, autant de femmes que d’hommes », François Hollande n’avait qu’une idée en tête : après la crise de 2008, un retournement cyclique ne manquerait pas de se produire à un moment ou à un autre entre 2012 et 2017, apportant avec lui baisse du chômage et relance de l’économie. Il suffirait donc d’attendre tout en faisant semblant de faire quelque chose, notamment pour apaiser les craintes ou les foudres des instances dirigeantes de l’Union européenne qui tiennent beaucoup à leur Pacte de stabilité et de croissance, c’est à dire le retour aux fameux 3 % de déficit public. A ce sujet précis, notons d’ailleurs que selon les engagements de François Hollande en campagne électorale, ces 3 % devaient être atteints en 2013. Dans la réalité du gouvernement, on en est à deux reports de date : on espère maintenant y arriver en 2017 après avoir un instant envisagé l’horizon de 2015.

Dans cette perspective d’attente de l’inversion, assez imprudemment promise pour la courbe du chômage avant la fin de l’année 2013, la politique annoncée comme la politique menée n’ont aucune espèce d’importance. En conséquence, on peut se faire élire sur « Mon ennemi, c’est la finance » et gouverner avec une timide loi Macron, promettre dans ses anaphores de faire tout le contraire de Sarkozy côté « bling-bling » et se ruer rue du Cirque en scooter sous le nez de la presse people, défiler comme des centaines de milliers de Français contre le terrorisme islamiste et pour la liberté d’expression et y convier des chefs d’Etat plus que douteux sur le plan des libertés individuelles, se présenter comme le parangon de la vertu démocratique et proposer une loi Renseignement qui donnera à la France un axe d’exception supplémentaire dans le genre Brave New World. La boucle est bouclée.

Cet écart permanent dans l’attente serait beaucoup plus difficile à maintenir si François Hollande ne pouvait compter sur l’art du divertissement, et trouver du soutien du côté de l’industrie du spectacle. Comment mieux nous faire comprendre qu’il est en représentation que par son intervention de dimanche sur Canal + ? Cette chaîne se veut divertissement et éclat de rire général quel que soit le type d’émission et quel que soit le sujet traité. Ca parait tout à fait normal que le Président de la République vienne animer le plateau avec des déclarations du style « Moi Président, je choisis mes costumes. » L’anaphore est passé du sanctuaire républicain au vestiaire médiatique, on dirait. Et quoi de plus normal que de voir et d’entendre le ministre de l’économie chanter « L’été indien », vieux tube des années 1970 qui « caractérise le moment » parait-il ? Décidément, mandat pluvieux, mandat très très joyeux, et moment TV très très juteux, un record d’audience pour « Supplément » ! Naturellement, l’émission avait commencé avec les tristes mines de circonstances dictées par l’information relative à un nouveau naufrage de migrants au large de l’Italie. Naturellement, tout n’est pas parfait au pays du rire et des chants. Le chômage tarde à refluer. Mais François Hollande l’a promis, il se battra jusqu’au bout, même si ça parait long. Bien sûr, c’est long, il faut attendre, c’est tout.

Attente, divertissement, bien-être engourdi, voilà la bonne recette du Hollandisme : nous les Français, nous les citoyens, nous parfois les électeurs et souvent les contribuables, nous sommes comme des grenouilles (froggies, diraient nos amis les anglais) plongées dans l’eau tiède de l’Etat protecteur. On s’y sent si bien qu’on ne songe nullement à en sortir, même si en bons Français râleurs, on pousse de temps en temps un petit coup de gueule. Et pendant ce temps, Manuel Valls et tout son gouvernement s’activent pour monter la température tout doucettement. Les degrés Celsius s’appellent loi Santé, loi Renseignement, plan contre le racisme et l’antisémitisme, réforme du collège etc…, le tout baigné dans pas mal d’impôts et encore plus de dettes. Et en 2017, nous autres grenouilles seront gentiment ébouillantées, sans plus aucune chance d’échapper à un second mandat de François Hollande. Tout vient à point pour qui sait attendre.

Vous l’aurez remarqué, contrairement à mes précédentes publications, j’ai écrit cet article sans donner ni sources ni références en lien. Il faut donc le considérer comme un pur texte d’opinion, comme une saute d’humeur personnelle. Correspondant néanmoins à l’accumulation d’observations peu réjouissantes faites depuis trois ans. Ouvrez la presse, lisez quelques blogs, tapez dans un moteur de recherche les mots : chômage, croissance, déficit, dette, compte pénibilité, gaz de schiste, réforme du collège ou loi Renseignement, ou bien d’autres encore, et vous verrez à coup sûr qu’il n’y a pas vraiment lieu d’être heureux. Ce qu’il faudrait faire n’est pas fait, ou si peu. Ce qui est fait est au mieux un catalogue sans fin d’interdictions (de fumer en voiture avec des mineurs, de vapoter dans un lieu public, de payer plus de 1000 euros en liquide etc..) et au pire un modèle de régression. Le projet de réforme du collège porté par Najat Vallaud-Belkacem est à cet égard un excellent exemple du nivellement par le bas développé avec beaucoup d’énergie par notre gouvernement. « On va dans le mur… » comme dirait Agnès Verdier-Molinié.

Pourtant, à beaucoup de points de vue, dont taux bas, euro bas, pétrole bas, le moment est favorable pour changer progressivement mais sûrement de politique. Hélas, pour François Hollande le moment est favorable pour ne surtout rien bouger d’ici 2017. Pour peu qu’une petite dose de croissance montre mécaniquement le bout de son nez, et hop, un deuxième mandat dans la poche sans avoir rien réformé. Et sans plus avoir le souci de le faire puisque notre Constitution limite les mandats présidentiels consécutifs à deux.

Mandat pluvieux, mandat heureux, mandat fumeux.


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1 réactions à cet article    


  • Le p’tit Charles 24 avril 2015 13:06

    +++++
    Phrases cultes du président...
    F.Hollande.....Je veux être « Futile » à la France...
    Un nouveau pays vient de naitre !Sur l’ancienne République yougoslave de Macédonie [...]
    Alors qu’on l’interroge sur la situation en Egypte...La France a pris acte de la situation en Tunisie.
    C’était la guerre froide et Mitterrand a nommé des communistes au gouvernement. Aujourd’hui, il n’y a pas de communistes en France...

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