Intelligentsia sous le drapeau de Khomeiny

Mais les fruits de la révolution sont ultérieurement ramassés par les Mollahs, ceux qui dégraderont la situation du pays après la révolution. En effet la révolution islamique n’avait qu’un chemin sur lequel les Iraniens allaient pendant 37 ans du régime islamique de mal en pis.

Peu après la mainmise sur le pouvoir, le régime islamique tourne son méchant regard vers ces anciens alliés, plutôt ces malheureux figurants intellectuels. Tout en mettant l’accent sur leur manque de foi en l’Islam et la loyauté pour le régime islamique, le régime les exclue l’un après l’autre du pouvoir politique et certains sont mis en prison ou même exécutés.

Ainsi, les purges se poursuivent en Iran et sont accompagnées, plus particulièrement, d'une répression continue et intensifiée des droits civils et politiques. Les Mollahs rétrogrades refusent de réaliser leur promesse relative à la création d'une société libre et égalitaire. Par contre, ils renforcent des mesuresres strictives à l'encontre de l’islamisation du pays.

Vu la révolution d’une grande majorité d’iraniens, la chute du Shah fut inévitable. Sur la base de ce constat, l’intelligentsia justifie son alliance avec les Mollahs qui avaient une grande influence sur le peuple. Le paradoxe émergera lorsque cette même intelligentsia égalitaire aide les mollahs dans la phase initiale à établir un régime au bonheur de la classe de la bourgeoisie traditionaliste du bazar ,alliée traditionnelle des Mollahs.

L’idée de l’alliance fut bien entendu de considérer que le mouvement islamique est un mouvement "progressiste" et " anti-impérialiste" qui défendait les intérêts des opprimés. Cette position fut propagée par le parti prosoviétique Toudeh qui a toujours inféodé les Big Brothers de Moscou – ce parti continua son soutien inconditionnel au régime islamique « antiimpérialiste » jusqu’à ce que le régime se tourne contre lui en 1983 et élimine un nombre de ses cadres.

Également, il y a eu une partie de la confédération Maoïste des étudiants iraniens (SIS) en Europe qui était très active contre le régime du Shah et qui s’alignait avec la ligne « anti impérialisme des USA / URSS » du régime. L’autre allié de Khomeiny fut Le Front National, un front constitué de plusieurs courants modérés qui avaient lutté contre le despotisme absolu du Shah mais pas contre la monarchie. Le premier PM du régime, Mr. Bazargan, fut d’un courant islamique du Front National.

Contrairement aux intellectuels, Khomeiny savait ce qu’il voulait. Il parvient à tourner la roue de l’histoire en arrière, à l’époque où les califes régnaient encore sur les communautés musulmanes selon les règles de la charia. Il avait rêvé depuis longtemps d’une telle société archaïque « Ommat Musulman. » Son opposition envers le Shah s’est résumée au rôle de l’islam dans une telle communauté. Il s’est élevé en 1963 contre les réformes agraires et surtout contre le droit devote accordé aux femmes par le Shah, les mesures qui ne correspondent pas aux valeurs de l’islam.

Malgré ces idées de Khomeiny, cette intelligentsia perplexe qualifie le mouvement de Khomeiny de "petite bourgeoisie progressiste, force antiimpérialiste, indépendante, populaire." Elle ignore le caractère du fascisme, de la misogynie, de l’obscurantismequi qui était à l’époque reconnaissable comme traits de Khomeiny. En réalité, l’intelligentsia iranienne n’est pas sélectivement parvenue à comprendre ses propres idéaux laïques, ni à identifier le caractère politique d’un mouvement islamique avec la démocratie.

Il est vrai que toute interprétation critique de l’islam était depuis le 7^ème siècleun tabou en Iran, d’autant plus que sous la dictature du Shah, la conscience politique des Iraniens ne pouvait pas s’épanouir car, mis à part une tolérance envers les mollahs, l'Etat surveillait et étranglait toutes les tendances susceptibles de provoquer une opposition à la dictature. Pourtant, tout cela ne suffît pas pour expliquer l’alignement de l’intelligentsia avec les Mollahs dont leurs ambitions misogyne, rétrograde et fasciste auraient dû être reconnues par les intellectuels.

En résumé, l’illusion à laquelle mena facilement l’alliance de l’Intelligentsia iranienne à s’aligner avec Khomeiny, même collaborer à installer son regime, fut l’idée d’un front commun pour détrôner le Shah à tout prix, sans se rendre compte des conséquences et sans se faire un modèle de post-Shah. Cette expérience nous montre que c’est faux d’imaginer ce que l’on veut, au prix de ce que l’on supprime. En effet la monarchie absolue d’avant 1979 est devenu aujourd’hui un despotisme absolu et même totalitaire. L’ironie de l’histoire est le fait que l’intelligentsia s’est ralliée sous le drapeau de Khomeiny pour contribuer à ce changement de mal en pis.

Par Jahanshah Rashidian