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Accueil du site > Tribune Libre > Je me souviens...

Je me souviens...

Lorsque j’étais gamin, nous vivions à Paris, mes parents, mes sœurs et moi. Nous habitions à la limite des 13e et 14e arrondissements, au deuxième étage d’une vieille bâtisse insalubre condamnée à être démolie. Une impasse, faite de gros pavés, longeait notre maison. Elle aboutissait à une cour secrète, cernée d’ateliers vétustes et de cabanons délabrés envahis par les acacias et les sycomores. Ces constructions de bric et de broc étaient, elles aussi, vouées à la démolition. Un sculpteur au poil broussailleux vivait pourtant là. Témoins de sa présence, d’innombrables débris de plâtre jonchaient le pavé de la cour. L’homme était du genre bourru  ; nous évitions de l’approcher, de peur qu’il ne nous découpe en morceaux et nous fasse disparaître dans l’une de ses statues monumentales.

Au-delà de cette cour, d’autres maisons, encore plus vétustes que la nôtre, avaient d’ores et déjà été détruites par les pioches des démolisseurs. Elles avaient laissé la place à un terrain vague parsemé de débris, au pied des murs noirâtres de la prison de la Santé. Des tas de gravats en formaient les collines  ; des vestiges d’escaliers, plongeant dans les caves, en constituaient les grottes souterraines. En quelques mois, buddleias, sureaux et acacias s’y étaient développés avec une surprenante volubilité en formant des îlots touffus de végétation où l’on pouvait facilement se dissimuler. C’est là, dans ce dangereux abri de verdure ceint par une palissade, que nous partions à l’aventure, mes potes et moi. Ce mystérieux territoire nous était pourtant interdit, sous peine de recevoir une paire de taloches. Il n’en avait que plus d’attraits  : une fois découverts les points faibles de la palissade, nous en avions fait, malgré les rats, les tessons de verre et les débris de métal rouillé, notre terrain de jeux préféré. De temps à autre, au milieu d’une partie de cache-cache ou d’une guerre sans merci entre Indiens et cow-boys, un détenu de la Santé nous interpellait gentiment depuis sa cellule  ; nous lui répondions d’un signe amical de la main avant de reprendre nos jeux, sans avoir conscience du réconfort que ce simple geste apportait au prisonnier.

Nous étions en 1957. J’avais 10 ans.

Je me souviens que mes premiers contacts avec le 7e art datent de cette période. Chaque jeudi, ma mère nous emmenait, mes sœurs et moi, galoper au parc Montsouris ou au jardin des Plantes, en escomptant que la fatigue de nos courses incessantes nous assommerait rapidement le soir venu. Jusqu’au jour où notre mère nous a entraînés pour la première fois dans la minuscule salle de cinéma du Muséum d’histoire naturelle. On y projetait un documentaire en noir et blanc sur la faune montagnarde.

Je me souviens être resté scotché sur mon siège devant l’espièglerie des marmottes, les spectaculaires piqués des rapaces et surtout l’impressionnante virtuosité des bouquetins. Dès lors, j’ai attendu chaque semaine avec impatience le retour du jeudi, en espérant très fort que nous irions au jardin des Plantes. Par chance, nous y sommes retournés très souvent. De cette époque, datent sans doute les milliers d’images animalières qui trottent encore aujourd’hui dans ma tête.

Naturellement, j’aurais bien aimé aller voir un film de cinéma, un vrai, avec des acteurs et des actrices comme dans Cinémonde. Mais le moment n’était pas encore venu. Et voilà que, miracle  !, une équipe de cinéastes tourne un film sous les marronniers du boulevard Arago, à deux pas de ma communale. Avec des acteurs en chair et en os, une grosse caméra sur pied, des projecteurs et tout le toutim  ! Sitôt la classe finie, les copains et moi, nous sommes sortis de l’école en hurlant comme d’habitude malgré les interdictions réitérées du concierge. Mais au lieu d’entamer une partie de foot sur le trottoir avec une balle en papier, ou d’aller tirer des sonnettes comme un jour ordinaire, nous sommes partis en courant vers le lieu du tournage.

Je me souviens que les techniciens, la clope au bec, s’affairaient au milieu des câbles et des projecteurs. Dans le même temps, la maquilleuse pomponnait une actrice, une blonde plutôt bien balancée. Sur le coup, on a été déçus que ce ne soit pas Brigitte Bardot ou, mieux encore, Gina Lollobrigida dont les roploplos alimentaient nos fantasmes. Quand même, on trouvait la fille* vachement classe. Jusqu’au moment où un redoublant du CM2 a déclaré qu’elle avait l’air d’une bêcheuse. Et c’est vrai qu’à bien l’examiner on aurait dit la fille du boulanger, une pimbêche qui se croyait supérieure depuis qu’elle avait décroché son CAP de coiffure. Du coup, on s’est intéressé au grand type en blouson à col d’aviateur qui s’impatientait en faisant des ronds comme les loups du jardin des Plantes. À proximité de lui, assise sur une cantine en métal, une petite femme à lunettes, genre secrétaire, notait des tas de trucs sur des blocs de papier sans se préoccuper du reste. Celle-là, elle n’était vraiment pas terrible, mais bon, ce n’était pas une actrice.

Au bout d’un moment, il ne s’était toujours rien passé. Mes potes et moi, nous étions d’autant plus déçus qu’on allait finir par se faire appeler Arthur en rentrant à la maison. En attendant que ça démarre, nous avons entrepris de sauter par-dessus la corde qui délimitait le plateau pour nous amuser. Au début, ça s’est bien passé, on rigolait bien. Jusqu’au moment où quelqu’un a tiré sur la corde au moment précis où je sautais. Résultat  : une gamelle sur le macadam et un KO pire que si j’avais pris un uppercut d’Alphonse Halimi. Lorsque je me suis réveillé, la moitié de l’équipe de tournage se penchait sur moi. Quant à mes salauds de potes, ils s’étaient tous carapatés. Je me suis senti devenir rouge comme une écrevisse après la cuisson. J’ai bondi sur mes pieds, récupéré mon cartable et filé en courant avant que le producteur ne vienne me demander des comptes. Le film s’appelait À pied, à cheval, en voiture. Il n’a pas laissé une grande trace dans la filmographie française.

Enfin, quelques semaines après cet incident, la bonne nouvelle est tombée  : le lendemain samedi, promis-juré, pendant que notre père irait travailler, notre mère nous emmènerait tous les trois pour la première fois de notre vie au cinéma. Un vrai cinoche, avec des vrais fauteuils et un vrai rideau rouge, pas la petite salle de 50 places du Muséum. Ce cinéma se nommait le Petit Denfert. On y projetait Jeux interdits.

Je me souviens avoir été surpris de découvrir un film en noir et blanc, alors que la couleur se généralisait. D’après le fils du dentiste, le noir et blanc, c’était carrément nul  : la preuve, les Amerloques, ils ne faisaient plus que des films en couleur  ! Fastoche de critiquer quand on y va souvent, au cinéma. Moi, même en noir et blanc, ça me paraissait génial. Et puis j’étais tout de suite entré dans cette histoire tragique. Entre ce gamin qui me ressemblait et la petite orpheline, si jolie et si craquante avec ses croix de bois et son désespoir, j’écarquillais tout grand les yeux pour ne pas en perdre une miette. Ce jour-là, malgré tous mes efforts, je me souviens avoir pleuré comme une madeleine, bien que ce soit indigne d’un garçon. Après la projection, je suis resté très longtemps obsédé par la détresse de la petite Paulette et par la mélodie envoûtante de la guitare. Aujourd’hui encore, j’éprouve de l’émotion à les retrouver dans ma mémoire, et je ne peux pas voir Brigitte Fossey sur un écran sans avoir une pensée émue pour la merveilleuse petite fille qu’elle a été.

Quelques semaines plus tard, un autre film était programmé au Petit Denfert  : Hans Christian Andersen et la danseuse. Par chance, il a fait le dimanche un temps de chien, peu propice aux jeux d’extérieur. Après un temps d’hésitation, notre mère s’est résignée, malgré la dépense, à nous emmener une nouvelle fois au cinéma pour ne pas nous avoir dans les pattes durant tout l’après-midi.

Pour être franc, je ne me souviens plus très bien du film. Je n’ai qu’une certitude  : celui-là était bel et bien en couleur. Il racontait l’histoire d’amour du conteur danois pour une belle danseuse, en mêlant la vie d’Andersen à celle de ses héros. Je n’en ai gardé que quelques images en mémoire, notamment celle de la petite marchande d’allumettes, désespérée sur le trottoir enneigé d’une ville scandinave. Cette fois-là encore, j’ai beaucoup pleuré. Par chance, il n’y avait aucun de mes copains dans la salle... Si je me souviens peu du film, la musique est en revanche restée gravée dans ma tête, à tel point que je me surprends parfois à la fredonner, si longtemps après. Et puis surtout, je me souviens avoir craqué pour la danseuse, assurément la plus belle femme du monde. Je crois bien que c’était Zizi Jeanmaire, mais je n’en suis pas très sûr. Quoi qu’il en soit, elle m’a durablement ébloui, et j’ai longtemps rêvé de son sourire et de ses yeux pétillants.

Un demi-siècle plus tard, il m’arrive encore de rêver d’elle. Ou plus exactement du souvenir émerveillé qu’elle a gravé dans la mémoire d’un gamin de 10 ans.

* Sophie Daumier


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60 réactions à cet article    


  • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 10:23

    Super récit Fergus ,

    Il nous est arrivé la même chose qu’ à vous , ceux qui sont nés dans les année 46 - 48 .

    Mêmes taudis , mêmes rats et mêmes palissades .

    Mon premier film , un Charlot à Haguenau , pas dans un cinoche , sous un chapiteau .

    Bien à vous .


    • Gazi BORAT 31 juillet 2008 11:44

      @ Haddock

      Je confirme.. Les rats !

      tout un monde de mystère pour un môme autour de ces mammifères.. Surtout ces des bords de canal, les plus gros...

      Les guetter, les observer, les appâter.. et, suprême exploit, réussir à en attraper un !

      Quand même plus fascinant qu’un jeu sur console.. Mais comment font les gosses d’aujourd’hui maintenant que, soit disant au nom de l’hygiène, on a rendu plus discrete dans nos villes cette faune si sympathique ?

      gAZi bORAt


    • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 11:56

      Ben oui Gazi ,


      Après-guerre c ’était encore beaucoup de taudis , le chauffage au charbon , dans les rues on voyait des revenants d’ la guerre marchant avec des béquilles , des gueulles cassées , des gens qui revenaient de la forêt trainant du bois ramassé là .

      Mais dans tout ça on était pas malheureux comme semblent l’être un paquet de monde comme on peut lire ici .

      On dirait que le progrès ne sert pas à rendre heureux . 


      A propos dans la discute de hier avec le chanoine Kir , le mec lui disant " comment pouvez-vous dire que Dieu existe , on ne l’ a jamais vu ?

      Réponse du chanoine " et mon cul vous ne l’ avez jamais vu non plus , et pourtant il existe "


    • claude claude 31 juillet 2008 12:50

      est-ce que quelqu’un peut m’expliquer pourquoi les notations du capitaine sont bloquées ?

      son premier post est ancré à -1 et le second à 0...

      c’est-y encore un coup du spectre d’agora-vox ?

       smiley


    • claude claude 31 juillet 2008 13:31

      dans ma tendre enfance, j’ai vécu à aubervilliers,
      j’ai encore le souvenir des murs noircis par la crasse et les grandes rigoles nauséabondes laissées par les messieurs qui s’oubliaient contre les murs, portes cochères, passages entre les immeubles. l’odeur y était infernale.

      de cette époque, je garde aussi le souvenir de ces boucheries aux rideaux rouges et blanc ; ouvertes à tous vents, car de simples grilles tenaient lieu de vitrines et sur le sol, la sciure....
      il y avait derrière la caisse, mme la bouchère, engoncée dans de multiples pulls et les doigts à moitiés cachés par des mitaines. sur la caisse, il y avait une sorte de grande aiguille sur laquelle elle empalait energiquement les tickets de caisse.
      son mari, le crayon sur l’oreille, pour qui les clientes étaient toutes ses "p’tites dam’ " était impéccable dans sa veste pied de poule recouverte d’un grand tablier blanc un peu maculé de sang, avec des noeuds savamnent noués, ce qui valait aussi pour sa cravate qui trouvait parfaitement sa place dans l’échancrure de la veste.

      et les crèmeries ! avec ces grandes mottes de beurre ! la crème qui sentait bon... et le lait que le crémier nous servait directement d’un grand bidon, avec une mesure en aluminium laquelle était accrochée comme une louche au col dudit bidon.
      quand on achetait le lait en bouteille de verre, il y avait ce délicieux col de crème qui se formait près du goulot et que l’on dégustait avec délice du bout du doigt...
      on trouvait alors une pépite qui a pratiquement disparu des étals de fromagers : le fontainebleau, délicatement entouré de sa mousseline : une splendeur pour le palais !

      il y avait aussi 2 sortes de magasins qui ont aujourd’hui pratiquement disparu : les quicailleries et les drogueries. ces cavernes d’ali baba, tenue par des hommes en blouse bleue aux doigts noircis...

      tous ces commerçants portaient la cravate, comme une marque de respect envers leur clients.


    • Fergus fergus 31 juillet 2008 14:57

      Merci pour votre commentaire, capitaine. Et Charlot, ce n’est pas mal non plus. Ne serait-ce que pour l’image de fin du Kid !


    • maxim maxim 31 juillet 2008 15:34

      chère Claude ..

      le fromage qui fit vos délices ,le Fontainebleau existe toujours ,chez un affineur de la rue des Sablons ( j’habite Fontainebleau depuis 1972 ..)

      Barthélémy qui était rue Grande n’existe plus ,mais la Ferme des Sablons continue à le commercialiser

      ce fromage battu dont mon épouse raffole ,se consomme avec du sucre de canne en poudre ,ou mieux de la cassonnate ou de la vergeoise .....ou de la confiture de figue ......

      un petit Montbazillac bien frais pour faire passer et hop ,le bonheur total ....


    • claude claude 31 juillet 2008 16:15

      mon cher maxim,

      j’habite un petit village à 10KM de colmar...

      je peux toujours essayer de demander qu’on m’ouvre une ligne de métro "mon village - le fromager-rue des sablons à fontainebleau - qui fait encore des fontainebleaux"

      car ce fromage est vraiment une création proche du divin !

       smiley smiley


    • BOBW BOBW 22 avril 2011 21:14

      Et ce bijou ,Les Temps modernes, et Le DIctateur,véritables chef d’oeuvre de ce visionnaire du futur !


    • Fergus Fergus 23 avril 2011 09:21

      Bonjour, Bobw.

      Vous avez raison de rappeler ces deux immenses films de Chaplin, très durs dans le constat qu’il font des travers de l’humanité, mais aussi chargés de poésie et d’espoir.


    • Charles Bwele Charles Bwele 31 juillet 2008 11:51

      @ L’auteur,

      Mr Fergus, je n’ai pas lu votre récit, je l’ai bu...
      Aviez-vous eu la chance de voir aussi les fabuleux films
      Ballon Rouge et Crin Blanc datant de cette époque ?

      Deux moyens métrages made in France que j’ai visionné
      en vidéo quand j’étais gosse et qui m’ont marqué...
      Amicalement


      • Gazi BORAT 31 juillet 2008 12:07

        @ Charles Bwele

        Le Ballon Rouge, je l’ai vu à l’école, et c’est aussi un film qui m’a marqué.

        Un film fabuleux, pour des images du Paris des années soixante, c’est :

        gAZi bORAt

      • Charles Bwele Charles Bwele 31 juillet 2008 12:30

        @ Gazi,
         
        Ouiiii ! Zazie dans le métro... En effet, un autre film qui m’a également marqué... Un tantinet baroque presque kitsch mais vraiment bien foutu...

        Une autre "mervieille" française (mais tournée dans les 60’s) que que j’ai vu en vidéo dans les 80’s egalement : Ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines. Le genre de films qu’un gosse n’oublie jamais...


      • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 14:27

        Charles ,
         
        Zazie dans le métro , lire Raymond Queneau , une écriture fabuleuse . Merci de l’ avoir cité .


      • Fergus fergus 31 juillet 2008 15:09

        Merci M. Bwele. Oui j’ai vu les deux films de Lamorisse, pas très longtemps d’ailleurs après ceux que j’ai mentionnés dans mon évocation. Et si le très poétique Ballon rouge m’a fait voyager, Crin-Blanc m’a ouvert les yeux sur la méchanceté, pas toujours volontaire, des puissants et les conséquences que leurs actes peuvent avoir sur la vie des autres, et notamment celle des faibles. Inconsciemment, ce film a été ma première révélation de l’injustice sociale.


      • TALL 31 juillet 2008 15:38

        Ah oui, "les merveilleux fous volants", je m’en souviens, ainsi que "opération jupon" ( le sous-marin rose ) ou encore "la belle américaine"... etc


      • maggie maggie 31 juillet 2008 12:12

        Une fort belle chronique.


        • Parpaillot Parpaillot 31 juillet 2008 12:44

          @ Fergus :

          Merci pour ce magnifique récit qui m’a replacé dans mes souvenirs d’enfance, semblables aux vôtres ...

          Bien à vous !


          • Fergus fergus 31 juillet 2008 15:12

            Merci à vous, Parpaillot, pour ce commentaire élogieux. Peut-être nous ferez -vous partager un jour vos propres souvenirs d’enfance ?


          • claude claude 31 juillet 2008 12:46

            bonjour fergus,

            merci pour cette belle évocation du paris des années 50.

            doineau et truffeau auraient pu fixer les images d’une telle enfance ! que du bonheur !

            j’ai une petite dizaine d’années de moins que vous.

            mes premiers souvenirs cinématographiques furent animés : ce fut "blanche-neige". je me souviens avoir été effrayée par la transformation de la méchante reine et m’être raccrochée à la main de mon papa.

            mes parents m’emmenaient, avec ma petite soeur, au cinéma à noël et à la fin de l’année scolaire, quand nous avions bien travaillé en classe. c’était une vraie sortie avec "les habits du dimanche". comme nous habitions la banlieue sud, nous prenions alors la voiture. nous allions voir les films "en 1° exclusivité" sur les champs-élysées. c’était une fête !

            mon enfance a été enchantée par disney, et les comédies musicales dont maman était friande. j’adorais l’entracte, car c’étaient alors, le seul lieu où l’on pouvait déguster des esquimaux...

             smiley


            • clostra 31 juillet 2008 12:57

              On s’y reconnaît...on s’y croirait ! tendre enfance où nous dénichions les cocons jaunes dans les enfractuosités des immeubles...souvenirs parfois douloureux de "Désert vivant" et de la prédation, "Le monde du silence"... des espaces de jeu où l’on peut se cacher dans la verdure...

              Merci !


              • italiasempre 31 juillet 2008 13:14

                @l’auteur smiley
                tres beau récit,felicitations


                • Gül 31 juillet 2008 13:31

                  Fergus,

                  C’est un superbe premier opus !

                  Je n’ai pas connu ces années là car je n’étais pas née, mais votre description les rendent bien réelles. Elle me rappelle des photos en N&B contenues dans un très beau livre appartenant à ma mère et que je feuilletais et re-feuilletais à longueur de jours...

                  Merci.


                  • Charles Bwele Charles Bwele 31 juillet 2008 13:52

                    En effet, on a l’impression de voguer dans un Robert Doisneau animé...


                  • TALL 31 juillet 2008 15:14

                    Salut Charles

                    Si tu pistes les zozos l’air de rien, tu découvriras avec bonheur que nous sommes entourés désormais par une joyeuse bande d’amazones ( baptisées récemment zozottes ) et dont la finesse d’esprit ne rivalise qu’avec la beauté. Dans le désordre et au hasard ( en présence d’un huissier ) je cite : Gül, Italisasempre, Dame Jessica, Claude... et peut-être même Olga un jour


                  • Fergus fergus 31 juillet 2008 17:50

                    Sincèrement merci, Gül, pour ce commentaire flatteur.

                    Il y a évidemment mille autres choses ou personnages qui pourraient illustrer cette séquence de mon enfance.

                    Tel ce vieux monsieur kabyle qui entreposait dans l’une des remises de l’impasse ses fruits, ses légumes et sa voiture à bras aux roues cerclées de fer de marchand de quatre-saisons. Il était toujours très gentil avec nous, ce brave homme. Gentil, mais aussi très vieux et très fatigué. Souvent, nous lui donnions un coup de main – lui tirant, nous poussant – pour l’aider à sortir sa lourde charrette du local et à la manœuvrer sur les pavés disjoints de l’impasse. En retour, il nous gratifiait, selon la saison, d’une reinette ou d’un brugnon. Cet humble cadeau suffisait à notre contentement.

                    Et que dire de ce grand jeune homme au regard énigmatique qui venait rendre visite à ses parents dans notre vieil immeuble délabré ? Qui aurait pu penser alors qu’il deviendrait le danseur étoile Michel Renault ? 


                  • ASINUS 31 juillet 2008 14:14

                    yep fergus

                    merci




                    @claude cool jeune dame j ai plussé le captain ça marche


                    • sisyphe sisyphe 31 juillet 2008 14:23

                      Très beau texte, belle évocation, qui m’a immanquablement fait penser au livre de Tardi , entre autres...
                      Je me souviens d’un  film qui avait suscité  mes premiers émois érotiques : "Le blé en herbe" : de Claude Autant Lara : l’initiation d’un jeune homme à l’amour par une femme mûre...


                      • sisyphe sisyphe 31 juillet 2008 15:17

                        A rapprocher aussi du très beau livre de Daniel Picouly : Le champ de personne


                      • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 14:25

                        Eddy Mitchell dans sa chanson la dernière scéance raconte bien cette époque ....


                        J ’ ai comme l’ impression qu’ on était obligés d’ être contents , rapport à nos vieux qui ont vécu les années noires . J’ ai quatre frères ainés , tous réchappés de la tuberculose , ayant vécu dans une cave , la nuit pour que les Allemands ne voient pas de lumière .

                        En fait c ’est rien du tout rapport aux images envoyées d’ Irak , néanmoins la maison dans laquelle nous avons vécu a encore les traces des rafales envoyées par nos amis Outre Rhin . Mon frère le plus près de mon âge , dans son berceau , ce jour-là dans le salon au rez-de-chaussée suite à un tir ennemi un projecticle atteignit le lustre . Bout de lustre lui tranchant l’ occiput . Plus de peur que de mal , pas de séquelles .

                        Comme dit Claude , on avait une vie de quartier , le laitier , boulanger , droguiste , boucher , marchand et découpeur de vitres , etc... le crieur de peaux de lapins , le crieur de ferrailles , le clochard , un autre qui se donnait air à faire peur à tout le monde , ensuite sont venus les temps de JFK , Kroutchov , Boulganine , Gromiko ( une crème de gonzigue ) après Pie 12 , le Jean 23 avec sa bonne tronche , pour finir Ségolénosarkosisé là maintenant en 2008 avec sur Avox la même contruction , la brave type , le militaire , l’ intello , le jem’lapète , l’ érudit , tous plus intelligents les uns les autres , alors qu’ à un un poilde cul près si Hitler avait eu ses V2 on parlerait peut-être tous une autre langue , pendant que de ce temps là au Japon Hiroshima la langue du pays ne donnait plus signe de vie ...

                        On avait également des nouvelles d’ un mec avec une Rolesque nous parlant du continent noir , il disoit il est minuit dotor ... allo ..ici Lambarénée .... Un Alsaco qui avait le goùt des voyages ...enfin y avait plein de trucs ... comme à chaque époque ...


                        r


                        • JoëlP JoëlP 31 juillet 2008 17:35

                          "On avait également des nouvelles d’ un mec avec une Rolesque nous parlant du continent noir , il disoit il est minuit dotor ... allo ..ici Lambarénée .... Un Alsaco qui avait le goùt des voyages"

                          Boris Vian avait écrit : "Qu’il soit midi, qu’il soit minuit, Vous me faites chier, Docteur Schweitzer / Si vous entrez dans la légende, / Portez des semelles de caoutchouc / Vos grosses godasses de trappeur, / ça fait du bruit sur les cailloux."

                          ...enfin y avait plein de trucs ... comme à chaque époque ... Eh oui maintenant on a Kouchner et son sac de riz. Allo... ici la maison des Bruni, on écoute le disque de Carla avec Nicolas et Christine...

                          J’allais oublier, sympa l’article.


                        • HELIOS HELIOS 31 juillet 2008 14:40

                          Moi, c’est 1949... mais c’etait exactement pareil. sauf que dans le terrain vague, un peu plus loin, il y avait 2 oliviers envahi de lierre, des pies et des couleuvres. les rats, je ne pense pas.

                          J’ai une nostalgie pour "le monde du silence" et "20 000 lieues sous les mers" et.... des cauchemars pour un film qui s’appellait "Godzilla" que mon père avait souhaité voir "entre homme".

                          J’ai egalement plein d’autres souvenirs, vous vous en doutez, comme celui du camion de glace qui passait le matin pour nous donner un gros "pain" cubique coupé d’une barre plus longue et qui allait fondre lentement dans la glacière de la cuisine, juste sous la fenêtre... et de soirées pendant lesquelles mes parents discutaient ou ecoutaient la radio. il y avait une emission dont je ne me souviens plus le nom qui racontait une histoire plutôt policière et qui etait tres prisée... J’ai rarement eu la chance d’aller jusqu’au bout des emissions qui s’arretaient a minuit par l’hymne national, même le mercredi soir la veille du jour de vacance de la semaine.


                          • TALL 31 juillet 2008 15:01

                            Ben voilà, encore un superbe petit texte qui me rappelle, en qualité de narration, le voyage de Gül hier en Bretagne, ainsi que d’autres beaux textes précédents écrits par d’autres internautes anonymes mais qui avaient la même qualité littéraire.

                            Je souligne ça, car autant, comme je l’ai dit hier, je ne crois pas au "journalisme" citoyen, à "l’intelligence collective", etc... autant je crois par contre à l’art littéraire citoyen.
                            Car autant il est ridicule de se prétendre médecin-citoyen avec un diplôme en charcuterie, autant il est parfaitement possible pour un anonyme d’écrire de très belles choses sur base de son ressenti personnel.

                            Bref, l’art littéraire citoyen, ça j’y crois ! smiley


                            • Fergus fergus 31 juillet 2008 17:19

                              Merci pour ce commentaire, Tall. Et comme vous, j’ai apprécié le superbe texte de Gül sur Quiberon.


                            • Marsupilami Marsupilami 31 juillet 2008 15:03

                               @ Fergus

                              Très beau texte, merci. On se croirait dans le Paris de Doisneau...


                              • maxim maxim 31 juillet 2008 15:21

                                c’est toute mon enfance là aussi ,je suis de 1942 ,né accidentellement à Paris ,et élévé dans une famille d’accueil en banlieue Sud ( enfant de l’assistance publique )....

                                c’était cette banlieue encore campagne à une vingtaine de kms de Paris ,là ou il y avait des champs des jardins ,le bourg avec le bistrot tabac,l’église ,le boucher ,le boulanger ,l’épicier ,la quincaillerie ,les quelques petits troquets épiceries dans la rue principale ,et deux fermes ,nous habitions juste en face de la plus importante ,réveillés par les vaches ,les chevaux ( le tracteur n’est apparu qu’au début des années 50 ..)
                                il y avait également les ruelles pisseuses là où allaient pisser les ivrognes qui sortaient du bistrot de la rue principale ,le cordonnier bourré au petits blancs secs dès le matin ,le maréchal ferrand qui picolait tout autant ,le bouilleur de crue qui passait à une fois l’an pour distiller les fruits en excedent et faire de la goutte qui sortait de l’alambic à au moins 70 degrés alcooliques et que dés fois les vieux cons nous faisaient boire nous les gamins pour le plaisir de nous voir bourrés ( j’te raconte pas la branlée en rentrant à la maison ! )..
                                et la boucherie ( le fils était un de mes meilleurs copains ..) j’avais un pote qui habitait sur la place d’Armes en face de la boucherie ,son jeu favori était la nuit venue d’essayer de mater dans la chambre de la fille du boucher qui était déjà bien roulée ,il avait emprunté les jumelle de son père ,dans l’espoir de la voir à poil ,il n’y avait pas de volets ....

                                son vieux l’a surpris ,mon pote avait des marques de coups de ceinture sur tout le corps !

                                je me souviens également des virées dans les jardins pour bouffer les fruits des voisins alors que nous en avions dans le nôtre ,des parties de cache cache dans les remises de la ferme ,sur les immenses tas de fourrage ( c’est au cours d’une de ces parties de cache cache qu’à 15 piges une copine plus âgée que moi m’a fait découvrir comment on s’y prenait pour faire plaisir aux dames ,mais là c’est une autre histoire qui commence !)

                                Orly n’était pas loin ,on allait voir en vélo les gros avions juste en bordure de la Rn7 ,des Constellations et des Dc 6 ,des Stratocruisers ,marqués TWA ,PAA ,Air France ,Aérolinas Argentinas ,Swissair ,Panair Do Brasil ,Avianca ,de quoi de beaux voyages !

                                les fims qui m’avaient marqué à l’époque : Jeux interdits ,la bête humaine ,les raisins de la colère ,la Bandéra ,interdits aux moins de 16 ans ,mais vus chez quelqu’un de ma famille d’accueil qui possédait une salle de projection privée avec un matériel de professionnel aussi bien ciné que radio ....

                                j’en aurai encore tellement à raconter !....

                                bel article en tout cas ! que de souvenirs !


                                • Fergus fergus 31 juillet 2008 17:16

                                  Merci à vous pour cette évocation.

                                  J’ai un peu connu la banlieue sud car l’un de mes oncles travaillait à Orly. Il habitait un pavillon à Paray-Vieille-Poste. Toutes les trois minutes, un avion (du genre Caravelle ou Super G Constellation) nous passait au dessus de la tête dans un bruit d’enfer lorsque nous lui rendions visite. Un jour l’un de ces avions s’est crashé. L’une des hélices est allée se planter dans le jardin d’une voisine, à quelques mètres du berceau où dormait son gamin.

                                  Pour ce qui est des jumelles, j’avoue avoir également pratiqué. Cela se passait en Bavière, dans une petite ville de garnison près d’Ulm où j’avais été envoyé pour faire des progrès en allemand dans une famille du cru. J’avais 15 ans, et chaque soir, dans l’immeuble d’en face, une fille se déshabillait en pleine lumière. Pour la première fois de ma vie, j’assistais à un strip-tease en live. Par chance, il y avait une paire de jumelles dans mon placard. Je m’en suis naturellement servi. Ce n’est qu’en quittant mes hôtes hilares que j’ai compris qu’elles avaient été placées là à mon intention. Bel exemple d’hospitalité pour un adolescent, n’est-ce pas ? 


                                • Fergus fergus 31 juillet 2008 16:51

                                  Il reste pourtant des lieux protégés et hors du temps dans Paris, essentiellement dans l’est parisien, du côté de Bastille, de Belleville ou de Ménilmontant : quelques cours pavées à l’ancienne et pas encore trop envahies par les acheteurs, un univers à la Klapisch où se côtoient des Mme Renée et des bobos respectueux de l’âme des lieux. Il suffit parfois de pousser la porte...


                                • Pierre 31 juillet 2008 16:35

                                  Un bel article, fort bien écrit et dit. Un véritable plaisir de lecture, ce qui est malheureusement d’une grande rareté ces jours.
                                  Toutes mes félicitations vont à vous, Fergus !
                                  Oui, il faut dire le monde de vie et l’expérience des gens du peuple, et surtout le dire avec un grand sens de la langue qui est la nôtre. 


                                  • Gazi BORAT 31 juillet 2008 16:48

                                    @ l’auteur

                                    Ce qui est intéressant aussi dans ce type de témoignages, c’est ce qui est relatif à l’éveil de la sensualité. On este ainsi marqués toute sa vie par ses premiers émois, avec des associations parfois curieuses.

                                    Quand j’étais môme, dans mon voisinage, il y avait un garage toujours ouvert avec à l’intérieur un véhicule magique : une 402 Peugeot...

                                    ... qui appartenait à un voisin qui disait toujours qu’il allait la redémarrer. Sympa, il me laissait jouer à l’intérieur, j’étais un gamin plutôt calme et sérieux... mais le plus intéressant de l’endroit était accroché au mur. Un magnifique calendrier publicitaire avec des dessins de filles splendides.

                                    Je venais de découvrir le monde d’Aslan..
                                    Depuis, curieusement, je trouve immanquablement aux voitures anciennes une forte charge érotique.

                                    Un peu plus tard, mon passe temps favoris a été de trainer les terrains vagues à la recherche d’épaves de voitures, les plus anciennes possibles. A cette époque, on en trouvait encore partout.

                                    Je connut rapidement ainsi toutes les casses de ma région, incroyables empilements de Dauphine, Traction avant, ID 19, véhicules non identifiés et me mis peu à peu à les photographier, en noir et blanc...
                                    De là, je passai aussi aux friches industrielles. Je découvris un jour à Dijon, entre le port du canal et le quartier des Bourroches un entrepôt avec tout le parc utilitaire d’un ancien fabricant de moutarde.. Des modèles Peugeot et Renault de la fin des années quarante :
                                    Toutes ces véhicules qui semblaient endormis, recouverts de poussière et de la livrée bleue de la marque de condiments, dans une semi pénombre..Ce jour là, à onze ans, je crois que je connus l’émotion de Lord Carnavon devant la tombe de Toutankhamon...

                                    gAZi bORAt

                                    • del Toro Kabyle d’Espagne 31 juillet 2008 17:27

                                      @ Gazi

                                      Fan de Crash, peut-être ? (mème si c’est un peu autre chose)


                                    • Gazi BORAT 31 juillet 2008 18:28

                                      @ Kabyle d’Espagne

                                      wAOw ! Quelle perspicacité !

                                      J’adore indistinctement TOUS les films de David Cronenberg !

                                      Une petite préférence pour Frissons (Aka Shivers ou Parasite murders) avec sa résidence pour cadres qui petit à petit, sous l’emprise d’un parasite particulièrement actif, deviennent peu à peu la proie d’une irrépressible montée de libido collective...

                                      gAZi bORAt


                                    • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 16:48

                                      Rien à voir presque , mais rigolo , dans les années 58 

                                      Ma future épouse ( du midi , avé l’ assent ) avait de la famille en Alsace , quand elle avait vers les dix ans dans la petite ville d’ Altkirch son grand-père l’ a envoyé chercher du beurre à la crèmerie .
                                      Hopla elle arrive au magasin et la patronne dit " qu’ est-ce qu’ il te faut petite ? " je voudrais un paing de beurreu ! Stupéfactionnée la commerçante la lui regarde ahuritemment ( on est en Alsace ) jusque -là on lui demandait un quart de beurre , une demie-livre ou un morceau découpé dans la motte , elle redemande " dis moi ce qu’ il te faut petite  ?" je voudré ung paing de beuhrreu , " ici tu choisir , ou bien tu veux du pain et tu vas à la boulangerie , ou alors si tu veux du beurre c ’est ici . Yo ...

                                      Du vrai vécu .


                                      • BOBW BOBW 27 avril 2011 22:26

                                        Puisqu’on évoque de beaux souvenirs avec des anciennes images qui restent gravées :

                                         « Souchien-Mesclun Nissart- Alssacien » :
                                        Elsass : yo-yooh ! :La ferme des grand-parents avec encorbellements et poutres apparentes, fumier tout à fait devant, et ces escapades dans les champs« afec des calopins » pour aller fumer en cachette la barbe de maïs, chasser les souris dans les champs de blé,dévorer les graines de pavots à pleines mains,(ça ne m’a pas rendu accro), grapiller les raisins blancs avec la trouille du « caard- champêtre » armé d’un fusil de chasse aux cartouches de gros sel, sans parler du beurre frais que je barattais avec la « gross-mama »qui mettait son turban noir le dimanche... smiley

                                      • Fergus Fergus 28 avril 2011 09:10

                                        Bonjour, Bobw, et merci pour ces souvenirs alsaciens qui fleurent bon des lieux que j’apprécie, entre Vosges et Rhin.

                                        Baratter le beurre, j’ai connu ça également, mais en Auvergne où je passais toutes mes vacances dans ma famille de paysans. Baratter le beurre, mais aussi pétrir la farine avant d’aller cuire le pain au four banal, préparer dana sun immense chaudron la soupàe des cochons, curer les étables, « pétasser » (réparer) les clôtures, garder les vaches, et tous les travaux des champs. Cela dit, il restait quand même du temps pour aller pêcher truites ety écrevisses à la main en faisant attention non au garde-champêtre mais au garde-pêche, tout aussi redoutable...

                                        Cordialement.


                                      • rocla (haddock) rocla (haddock) 31 juillet 2008 18:24

                                        J ’ crois les mecs on est un peu tous pareils , en train de faire mon service à Dijon caserne Krien située en ville , avec des immeubles autour qu’ est-ce qu’ il se passe-il pas un beau matin de printemps  ? En regardant en l’ air l’ adjudant encore à jeun ( c’ était matin ) nous dédigne une vtre derrière laquelle une nana prenait sa douche . Il avait une jumelle et tour à tour à chacun de se rincer l’ oeil . Tous les matins même heure notre spectacle quotidien , comme dans la chanson de Brassens , Margot donnait la gougoutte à son chat , la nana pareil . Le manège a duré une petite semaine , jusqu’ à ce que quelqun s’ apeçoive que la vitre opaque de la salle de bains était montée à l’ envers . Adieu la belle vie ...


                                        • Gazi BORAT 31 juillet 2008 18:45

                                          Ma grand mêre, à Dijon, aimait bien boire de temps en temps du Schweppes, quand il faisait chaud, c’était sa fantaisie à elle...

                                          Elle s’en faisait livrer une caisse de petites bouteilles tous les quinze jours par le camion qui livrait le bistrot au bout de sa cour. Le type venait, amenait un casier de bouteilles pleines et reprenait les vides.

                                          Il montait l’escalier extérieur, frappait à la porte.. ma grand mêre proposait alors, au manut’ et au chauffeur, un petit coup d’rouge.

                                          • "Ah ben c’est pas d’refus par cette chaleur.."
                                          Et les deux livreurs et la grand mêre de s’envoyer de un à trois canons de rouge en f’sant la causette.
                                          • "Bon, c’est pas tout ça.. Y’a du boulot qu’attend, et c’est du boulot qu’attend pas.."
                                          Ben voyons... Les deux compères passaient bien facile une vingtaine de minutes, voire une demi-heure, tout ça pour un casier de 12 bouteilles de 25 cl de soda...

                                          L’époque n’était pas à la recherche absolue de rentabilité.. On savait encore prendre le temps. Aujourd’hui, la grand-mêre irait à la supérette du coin et la caissière passerait au lecteur optique le code barre de la bouteille d’un litre cinq en plastique.

                                          Quant à une livraison à domicile sans supplément pour une si faible quantité, pas la peine d’y compter ou alors, pas question pour l’employé de trainer en s’faisant rincer par tous ses clients..

                                          gAZi bORAt

                                        • HELIOS HELIOS 31 juillet 2008 18:58

                                          Et je ne te dis pas le "p’tit canon de rouge" de ta grand mère... le livreur, il en perdrait son permis illico presto !


                                        • maxim maxim 31 juillet 2008 19:34

                                          nous ,c’était le facteur ,chaque fois qu’il arrivait vers les Midi en gueulant " FACTEUR !!!!" avec son vélo porteur et sa grosse sacoche ,les gens lui payaient un coup de rouge, été comme hiver ,un coup de rouge ,tout le monde le connaissait c’était Hervé ,VéVé pour les intimes ,au milieu de sa tournée il en avait souvent un coup dans l’aile ,et des gars du village bienveillants l’aidaient à finir sa tournée ( tout le monde se connaissait ) et c’était surtout parce qu’il avait l’argent des mandats avec lui ( on ne sait jamais sur qui on peut tomber ) surtout qu’il y avait des Romanos ( Romanichels ) à la sortie du village ....
                                          et puis on n’aurait pas voulù qu’il se fasse virer des PTT .....

                                          autrefois c’était l’usage ,une petite pièce et un coup de rouge pour les livreurs ,les charbonniers ,l’artisan qui venait faire des travaux ,coup de rouge !
                                          et personne n’aurait osé ni le proposer ni le refuser ,c’était la tradition !

                                          et ben oui m’sieurs dames on n’est pas des sauvages chez nous !


                                          • Gül 31 juillet 2008 20:14

                                            @ Fergus et @ tous,

                                            La lecture de ce fil est un véritable petit bonheur, je l’ai repris depuis le début et je crois que je le relirai volontiers.

                                            C’est grâce à vous Fergus !!

                                            J’ai beau être plus jeune que l’ensemble des intervenants, étant petite je vivais dans un village de Seine et Marne près de Nemours et je me souviens des liens très cordiaux qui existaient avec les différents commerçants. En particulier la boulangère et le boucher qui faisait leur tournée 2 ou 3 fois par semaine. On attendais les coups de klaxon annonçant leur arrivée avec impatience pour faire les provisions de belles miches de pain, et de viande d’une qualité qu’on ne peut plus trouver ou presque aujourd’hui.

                                            Je retrouve un peu ce type d’atmosphère quand je vais en Turquie dans le village de mon mari...


                                            • Fergus fergus 31 juillet 2008 22:48

                                              Pour être jeune, vous n’en êtes pas moins talentueuse, Gül. Je n’en apprécie que mieux vos commentaires élogieux.

                                              J’aime bien Nemours, ses ruelles et ses rochers. Et lorsque je vivais à Paris, il nous est parfois arrivé d’aller "crapahuter ", mon épouse et moi, du côté de Larchant et de la Dame Jouanne.

                                              Les commerçants ambulants que vous décrivez, je les ai connus en Auvergne dans ma jeunesse et je ne doute pas un instant qu’ils soient en tous points semblables à ceux qui ravitaillent les villages turcs (je ne suis allé qu’à Istanbul), jusque dans leur mission non écrite de porteurs des nouvelles glanées ici et là au cours de la tournée.

                                              Leur disparition progressive au profit d’un supermarché au chef-lieu du canton est d’ailleurs l’un des vecteurs de la déliquescence du lien social que l’on constate ici et là, et c’est bien dommage !


                                            • Gül 1er août 2008 11:21

                                              Une petite anectdote sur la Turquie à propos des commerçants ambulants. Dans les villages mais aussi dans certains quartiers de grandes villes (!), le marchand de légumes pousse sa charette remplie principalement de belles tomates bien rouges, oignons, aubergines, etc...

                                              Il se fait alors happer par un cri venu de plusieurs étages en hauteur. Et pour éviter de descendre et remonter les kilos de légumes, les femmes ont un système de panier accroché à une corde, avec parfois une poulie. Elle font descendre le panier jusqu’au marchand qui le remplit selon les desiderata de la dame qui le remonte et le fait retomber pour payer. Pendant tout ce temps ça papote ! Je trouve ça génial !

                                              http://dumielauxepices.net/index.php/2006/12/15/321-scene-de-vie

                                              A savoir aussi, l’épicier en Turquie se dit "bakkal". Ce mot est la contraction de 2 verbes bakmak : regarder et kalmak : rester. "L’épicier" ou "l’épicerie" veut dire "regarde et reste", malin, non ? smiley


                                            • clostra 31 juillet 2008 20:23

                                              Je me souviens des "petits" ânes du champ de mars qui passaient le soir du 7ème au 15ème sans que l’on sache vraiment où ils allaient, vers quels pâturages...

                                              Je me souviens des "chanteurs de rue" qui pénétraient dans les cours intérieures carrelées, à qui l’on jetait des sous enveloppés dans des papiers.

                                              Je me souviens avoir entendu crier "vitrier...vitrier...vitrier" et "marchand d’habit chiffo"

                                              Je me souviens que la crèmière du marché avait demandé à maman si elle m’avait élevée avec du lait gloria

                                              Je me souviens...

                                              c’est imparable, on devrait tous écrire un livre "je me souviens"...

                                              Joé Brainard écrivait "...ces jours-ci je plane, travaillant un texte appelé "I remember". Je me sens comme Dieu écrivant la Bible.


                                              • maxim maxim 31 juillet 2008 21:43

                                                et puis ,on se souvient tous de l’école publique mixte celle du Cp 1er année jusqu’au certificat d’études primaire élémentaire ( j’ai encore le diplôme à la maison ,un grand truc enluminé ecrit en ronde avec tout un tas de signatures et de cachets de l’académie de Seine et Oise de 1956 )


                                                ma parole on dirait un diplôme de au moins président de la République !
                                                et puis le cours complémentaire qui remplaçait le collège ( je n’y suis resté que jusqu’en Juin 57 ,après ,au boulot ! )

                                                les cours terminés ,on allait devant le collège des filles ,pour jouer les cows boys à vélo afin d’épater les nanas ...

                                                j’avais le ticket avec la frangine d’un copain ,je guettais sa sortie ,elle m’est apparue ,j’ai enfourché mon vélo cadeau du certif à la façon de Kit Carson le célèbre justicier ,sauf que je n’étais ni Kit Carson ,ni Anquetil ,résultat ,je me suis écrasé les bijoux de famille sur le cadre ,j’ai fait celui qui n’avait rien eu ,j’ai foncé jusqu’à la première rue à gauche pour tomber de vélo de douleur ..

                                                un copain qui m’avait suivi me gueulait " vas pisser ça ira mieux ! " un autre qui était accouru me conseillait de siffler ...

                                                c’était " Siffle donc ! " suivi de " vas donc pisser !" ...

                                                je ne suis jamais revenu devant l’école des filles ,la frangine de mon copain a bien dû se foutre de ma gueule ,j’étais grillé à tout jamais !


                                                • artam 31 juillet 2008 23:01

                                                   À vous lire tous, cela réveille des tas de souvenirs. On a l’impression d’être au coin du feu et que chacun conte une partie nostalgique et émouvante de son passé. C’étaient d’autres temps, un univers disparu où peut-être les liens entre les  individus étaient plus forts. Né en ’47, je me reconnais presque dans les différents récits. Merci à l’auteur, qui par son texte, a généré cette vague d’émotion qui ne suscite aucun commentaire discourtois. Allez, là on commence à radoter comme les vieux schnocks que nous sommes. Bonsoir à toutes et à tous


                                                  • orange orange 1er août 2008 12:04

                                                    Merci à vous de nous confier se souvenir que j’ai aussi écrit un article sur le souvenir d’enfance. Les cités d’urgence construite par l’Abbé Pierre, sans confort, juste de quoi être à l’abrit de tous les temps hivernal.



                                                      • antennerelais 4 mai 2010 13:19

                                                        Excellent ce texte, on trouve vraiment des perles sur le net !
                                                        En le lisant on visualise quelque chose qui fait penser au Truffaut des « 400 coups »...

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