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Accueil du site > Tribune Libre > L’enfantement des écrans

L’enfantement des écrans

Les écrans portent bien leur nom. Ils font écran à la conscience pleine de l'existence et nous font perdre la notion du temps.
Les écrans absorbent jusqu'à la presque totalité de notre existence, ils nous attirent sans cesse car ils répondent à nos désirs immédiatement.
Répondre à nos désirs immédiats, n'est-ce pas se révéler enfant à jamais. Les écrans seraient donc le vecteur d'une forme d'immaturité collective.

Mais les écrans sont ambivalents_ : d'un côté ils se révèlent être des outils d'une efficacité redoutable_ ; de l'autre une source intarissable de divertissements. L'ampleur considérable du divertissement se cache derrière sa petite fonction d'outil, ainsi l'honneur est sauf donc. Pourtant la culture véritable bien souvent, s'en est allée.

L'immaturité et l'impulsivité du « no limit »vont pouvoir donc régner à échelle civilisationnelle, comme un nouvel art de vivre.

Nous ne parlerons pas des adultes dans cet article mais juste des enfants.
Pourquoi réduire le temps qu'ils passent devant les écrans ?
Parce que sans la culture et la connaissance historique l’homme est dépourvu du sens de l'histoire. Nos enfants suréquipés se détournent de la culture véritable et de la concentration profonde, ils retournent à une forme d’impulsivité et d’animalité redoutable. La société consumériste organise actuellement une terrible régression collective, une véritable violence en devenir. Lorsque les têtes sont vides de l’essentiel, il ne reste ni conscience, ni compassion, ni empathie. Il reste essentiellement un ego vide, instable, insatisfait et tyrannique.
Il semble que notre progrès technologique s’accompagne d’un retour au néant existentiel, au vide sidéral. La crise économique actuelle risque de mettre en évidence cet avènement de l’ignorance produite par l’ère des écrans multiples, de la connexion continue, des notifications directes au système nerveux. Trop de stimuli virtuels tuant finalement la capacité à ressentir le réel ainsi les enfants ne sont plus ni disponibles ni ouverts au monde véritable.

Réduisons donc la quantité de stimuli pour reprendre la main sur le réel, son histoire, son sens profond et donc son avenir.

Oser donner des limites aux désirs des enfants, semble être considéré comme une forme de violence dans notre société consumériste hédoniste, ultra-permissive.
Poser des limites, il y a quelques années encore on appelait cela “éduquer”.

Beaucoup de parents renoncent simplement à éduquer leurs enfants, laissant à l’école le soin de “gérer” la situation (bon courage). Je rencontre de plus en plus d’adolescents qui ne savent même plus tenir une simple fourchette, ou mangent un pied sur la chaise, le genou au niveau du visage. Le plaisir avant tout, l’enfant peut donc se comporter comme il l’entend et consommer ce qu’il souhaite quand il le veut. Inutile donc de se dire bonjour ou même un merci reconnaissant à ceux qui prennent soin de lui.
Soit. Et le commun alors ? Le repas à table, le jeu, l’échange véritable, la culture commune ?
Toutes ces choses simples partent en poussière sous la puissance attractive de la sous-culture de masse orchestrée par les écrans. Les divertissements et les stimulations nerveuses en guise de culture feront donc l’affaire.
Les choses sont ainsi et se dessine rapidement le monde bien cruel de demain. Voyez l’état de la planète et chacun saura l’état de l’humanité dans sa conscience et dans ce qu’elle produit.

S’il y a erreur aujourd’hui c’est de laisser les enfants face aux médias, publicités, technologies, alors qu’au fond tout est question de liens, d’attention, de temps réellement passé ensemble, de culture véritable, d’échanges et par-dessus tout de réalité. Encore faut-il se rendre « _réellement_ » disponible à ses enfants.
Beaucoup de grands-parents ne s’intéressent plus actuellement à leurs petits-enfants et d’une façon terrible, la réciproque est tout aussi vraie. La transmission s’arrête dans les coeurs et dans les faits. Mais faute de culture, et de liens intergénérationnels, qu’y a t-il encore à transmettre finalement ?

Allumons donc les écrans faute de ne plus savoir quoi faire d'autre.

L’enjeu de notre temps est le lien humain et la transmission_ : les écrans, sous prétexte de les renforcer, les font disparaître rapidement sous de simples apparences de réalités.
Nous sommes tous reliés technologiquement, certes, mais où sont donc passés l’amour et l’amitié véritables ? Où est le temps, ce temps du commun en-dehors des écrans qui nous fait connaître l’expérience commune du réel, de l’amitié et de l’amour.
Nos enfants auront bientôt exclusivement des relations d’objets entre eux. Tout cela est de notre faute, nous les parents qui ne mettons pas de limites aux plaisirs de pacotilles orchestrés par notre monde techno-industriel.

Entre les enfants d'aujourd'hui par exemple, existe-t-il encore cette notion de “la parole donnée” ? Notion qui structurait nos sociétés à l’époque encore récente de nos grands-parents.

L'instantanéité semble devenir la règle de vie, et les plaisirs comme les désirs, désorganisent des liens sociaux et les font disparaître dans la grande soupe du virtuel. Nos relations deviennent conditionnelles et mécaniques, filtrées par nos écrans de smartphones. Sous couvert de nous rapprocher, les écrans nous ont éloignés les uns des autres, et plus encore de nous-mêmes ainsi que du monde réel de la vie.

Auteur : Mathias Demain

- Source du texte : "Passager 120", page 9 du premier numéro, édité le 22 février 2017, journal trimestriel, directeur de la publication Mathias Demain, disponible sur abonnement (pour découvrir les 4 premières pages) http://passager120.chez.com

- Photo CCO Public Domain, auteur : Geralt

 


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5 réactions à cet article    


  • chantecler chantecler 16 février 2017 09:49

    Ce sont les temps modernes : on détruit l’humain : la famille ,les groupes , et on les remplace par des ersatz .


    •  
      Le Capital a besoin de narcissiques, de gogocho bucco-anaux restés infantiles (interdiction de la fessée !).
       
      Aux concepts politiques doivent faire place les valeurs naturelles, la convivialité dans la file du Supermarhé, l’anti-racisme de la traite négrière à Soros, le jouir sans contrainte de l’épicurien, l’émollient vide.
       
      L’écran des mattuvus sur InterBEnet est ce miroir de Narcisse, ersatz existentiel au sur-moi politique, au village, à l’Eglise, à la classe.
       
      Mais quand le concept recule la régression avance. Ce qui en termes hégeliens veut dire remplacer le concept (politiquen objectif) par l’essence du particulier (de la société civile), c.a.d l’homme en tant que tel (le droitdelhommiste) c.a.d le citoyen devenu adjectif (pédéraste citoyen ... colon citoyen ...) L’homme est sujet de ses déterminations, de ses qualités (riche et pédé comme Bergé) c’est un retour de l’objectivité à la subjectivité, le miroir, l’écran en sont symboles.
       
      L’inter-subjectif (la branlette du « care » par ex) la masturbation sociétaliste rencontrera inévitablement son destin, la régression qui sera son ennemie. Alors le citoyen, homo politis, qui ne veut plus être un adjectif apprend la haine.


      • L’écran est cette interaction simpliste, de gogoche, de l’inter-subjectif, de la communication,
         
        Les léninistes pensaient que si la libération de la proprété, la collectivisation même sans liberté individuelle, ammènerait le bonheur par nécessité. Leslibéraux pensent que la libération individuelle, sans liberté collective fera de même.
         
        Dans les 2 cas il n’y a pas de totalisation de l’individu, le sociétal est atomisation.
         
        Alors la conscience malheureuse hégelienne, le resentiment du souchien gland remplacé, le déclassement, le mal-petre de cet inter-subjectif hypostasié, la destruction de la forteresse Nation que le vieux Rothschild disait être la dernière à abattre, les derniers parapets de la libverté collective tombés, de la liberté objectivée remplacée par la liberté formelle (« Tout est permis rien est possible » de Clouscard mais pas seulement, surtout « tu n’as ni pays, ni peuplen ni dieu, ni état, ni chef, ni vision, et bientôt plus de famille tu es un sous-homme souchien ! ») ce mal-être est la négation (la 1ère négation) mais elle est farce de la répition de l’Histoire comme dirait Marx, après avoir tout réussi l’occidental se suicide comme un crétin ... Energie des peuples, grandeurs de ses chefs sont mortes.
         
        Pour identifier les différences (colon, souchien) il ne suffit pas simplement de les poser comme différentes, faire du séparatisme gogocho multiculti, la simple identification les creuse, mais trouver la nécessité, la vision qui totalise cette différence. Mais une chiure finale de son Histoire ne le peut.

         


      • Clocel Clocel 16 février 2017 10:10

        Le principal problème des écrans, ce n’est pas tant ce qu’ils montrent, mais ce qu’ils dissimulent...

        La définition du mot même est ambigue... Un écran sert à montrer, et à cacher...


        • ricoxy ricoxy 16 février 2017 14:18

           
          On en revient à « 1984 » d’Orwell : écran ou télécran  ?
           

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