L’Être et le Néant : Comprendre la pensée de Jean-Paul Sartre en la pensant comme pensée dans le vécu des hommes
Jean-Paul Sartre a publié en plein guerre mondiale un livre qui a fait sa renommée mondiale, l’Être et le néant. Mobilisé en 1939, prisonnier de guerre en 1940, après l’occupation de la France par l’Allemagne, relâché en 1941, il est nommé professeur en khâgne au lycée Condorcet. Khâgne est un mot argot scolaire signifiant « classe préparatoire littéraire », une des quatre filières préparant les élèves au concours d’entrée aux grandes écoles, en France. Et c’est en pleine guerre qu’il rédigea le volumineux ouvrage philosophique de 722 pages, « l’Être et le Néant », qu’il publia en 1943 (Édition Gallimard).
Dans cet « essai d’ontologie phénoménologique », Jean-Paul Sartre a cherché à définir le réel existant de l’humain dans son essence ? L’œuvre est immense, nous ne retenons que quelques passages de son livre, « l’Être et le Néant », et voir ce que son approche philosophique peut avoir d’utilité dans le vécu des hommes.
« Une étude de la réalité-humaine doit commencer par Je cogito. Mais le « Je pense » cartésien est conçu dans une perspective instantanéiste de la temporalité. Peut-on trouver au sein du cogito un moyen de transcender cette instantanéité ? Si la réalité-humaine se limitait à l’être du Je pense, elle n’aurait qu’une vérité d’instant. Et il est bien vrai qu’elle est chez Descartes une totalité instantanée, puisqu’elle n’élève, par elle-même, aucune prétention sur l’avenir, puisqu’elle qu’il faut un acte de « création » continuée pour la faire passer d’un instant à l’autre. Mais peut-on même concevoir une vérité de l’instant ? Et le cogito n’engage-t-il pas à sa manière le passé et l’avenir ? Heidegger est tellement persuadé que le Je pense de Husserl est un piège aux alouettes fascinant et engluant, qu’il a totalement évité le recours à la conscience dans sa description du Dasein. Son but est de le montrer immédiatement comme souci, c’est-à-dire comme s’échappant à soi dans le projet de soi vers les possibilités qu’il est. C’est ce projet de soi hors de soi qu’il nomme la « compréhension » (Verstand) et qui lui permet d’établir la réalité-humaine comme étant « révélante-révélée ». Mais cette tentative pour montrer d’abord l’échappement à soi du Dasein va rencontrer à son tour des difficultés insurmontables : on ne peut pas supprimer d’abord la dimension « conscience », fût-ce pour la rétablir ensuite. La compréhension n’a de sens que si elle est conscience de compréhension. Ma possibilité ne peut exister comme ma possibilité que si c’est ma conscience qui s’échappe à soi vers elle. Sinon tout le système de l’être et de ses possibilités tombera dans l’inconscient, c’est-à-dire dans l’en-soi. Nous voilà rejeté vers le cogito. Il faut en partir. Peut-on l’élargir sans perdre les bénéfices de l’évidence réflexive ? Que nous a révélé la description du pour-soi ? Que nous révélé la description du pour-soi ?
Nous avons rencontré d’abord une néantisation dont l’être du pour-soi s’affecte en son être. Et cette révélation du néant ne nous a pas paru dépasser les bornes du cogito. Mais regardons-mieux.
Le pour-soi ne peut soutenir la néantisation sans se déterminer lui-même comme un défaut d’être. Cela signifie que la néantisation ne coïncide pas avec une simple introduction du vide dans la conscience. Un être extérieur n’a pas expulsé l’en-soi de la conscience, mais c’est le pour-soi qui se détermine perpétuellement lui-même à n’être pas en soi. Cela signifie qu’il ne peut se fonder lui-même qu’à partir de l’en-soi et contre l’en-soi. Ainsi la néantisation, étant néantisation d’être, représente la liaison originelle entre l’être du pour-soi et l’être de l’en-soi. L’en-soi concret et réel est tout entier présent au cœur de la conscience comme ce qu’elle se détermine elle-même à ne pas être. Le cogito doit nous amener nécessairement à découvrir cette présence totale et hors d’atteinte de l’en-soi. Et, sans doute, le fait de cette présence sera-t-il la transcendance elle-même du pour-soi. Mais précisément c’est la néantisation qui est l’origine de la transcendance conçue comme le lien originel du pour-soi avec l’en-soi. Ainsi entrevoyons-nous un moyen de sortir du cogito. Et nous verrons plus loin, en effet, que le sens profond du cogito c’est de rejeter par essence hors de soi. [...]
De toutes les négations internes, celle qui pénètre le plus profondément l’être, celle qui constitue dans son être l’être dont elle nie avec l’être qu’elle nie, c’est le manque. Ce manque n’appartient pas à la nature de l’en-soi, qui est tout positivité. Il ne paraît dans le monde qu’avec le surgissement de la réalité-humaine. [...]
L’être qui est livré à l’intuition de la réalité-humaine est toujours ce à quoi il manque ou existant. Par exemple, si je dis que la lune n’est pas pleine et qu’il lui manque un quartier, je porte ce jugement sur une intuition pleine d’un croissant de lune. Ainsi ce qui est livré à l’intuition est un en-soi qui, en lui-même, n’est ni complet ni incomplet, mais qui est ce qu’il est tout simplement, sans rapport avec d’autres êtres. Pour que cet en-soi soit saisi comme croissant de lune, il faut qu’une réalité-humaine dépasse le donné vers le projet de la totalité réalisée – ici le disque de la pleine lune – et revienne ensuite vers le donné pour le constituer croissant de lune. C’est-à-dire pour le réaliser dans son être à partir de la totalité qui en devient le fondement. Et dans ce même dépassement le manquant sera posé comme ce dont l’adjonction synthétique à l’existant reconstituera la totalité synthétique du manqué. [...]
La réalité-humaine est dépassement perpétuel vers une coïncidence avec soi qui n’est jamais donnée. Si le cogito tend vers l’être, c’est que par sa surrection même il se dépasse vers l’être en se qualifiant dans son être comme l’être à qui la coïncidence avec soi manque pour être ce qu’il est. Le cogito est indissolublement lié à l’être-en-soi, non comme une pensée à son objet – ce qui relativiserait l’en-soi – mais comme un manque à ce qui définit son manque. En ce sens la seconde preuve cartésienne est rigoureuse ; l’être imparfait se dépasse vers l’être parfait ; l’être qui n’est fondement que de son néant se dépasse vers l’être qui est fondement de son être. » (Pages 121, 122, 125,126)
Ce développement de la pensée de Jean-Paul Sartre dans son essai sur l’ontologie phénoménologique, s’il est certes complexe, difficile pour en saisir le sens, il demeure qu’il est saisissable par la pensée qui cherchera à penser la pensée de Jean-Paul Sartre. Évidemment, pas avec son approche philosophique qui ne fera qu’ajouter la confusion à l’incompréhension. Mais avec des faits concrets dans le quotidien des hommes que nous développerons au fur et à mesure dans cette analyse. Le lecteur pourra juger en lui-même et à travers son vécu. Tous les exemples qui seront retracés par la vision sartrienne sont du ressort du vécu de l’être dans la réalité vivante de son existence.
Cependant il convient d’avertir que Sartre reste très logique dans la structure qu’il propose de l’être. Le seul problème est la complexité du sujet, donc de l’homme et sa nature humaine sur le plan ontologique. Ce qui n’est pas facile d’aborder, d’entrevoir puisque l’ontologie s’interroge sur le sens de l’être. Qu’est-ce que l’être humain ? Comment il se structure vis-à-vis de lui-même et vis-à-vis du monde extérieur ? Une question de l’essence et comme l’essence humaine est inconnue, ce sont des déterminations métaphysiques qui prennent le dessus. L’homme n’a pas le choix. Ne se connaissant pas par l’essence, il se connaît par des « détours logiques » qu’il conceptualise, qu’il structure pour rendre explicite le mouvement de la pensée dans la compréhension de l’être. Et c’est ce qu’il a fait Jean-Paul Sartre.
Ceci étant, que propose-t-il en clair Jean-Paul Sartre dans son système en-soi et pour soi ? Et cette réalité-humaine qui commence par le Je cogito. Emprunté à Descartes, le cogito est « je pense donc je suis ». C’est une vérité, si l’homme pense, c’est qu’il est. Mais l’homme ne pense pas par le fait seul de penser. En pensant, il doit remplir son être, nourrir son être. Et comme le dit Sartre : « Si la réalité-humaine se limitait à l’être du Je pense, elle n’aurait qu’une vérité d’instant. » Mais l’être humain se constitue en toute une vie, et donc en une infinité d’instants qui se succèdent et ne s’arrêtera que lorsque viendra sa mort. Mais dans sa vie, il y a un tumulte d’événements qu’il faut comprendre et comment l’être en tant que pensée il « devient ». Car, en fin de compte, ce que l’homme cherche s’il veut se comprendre est qu’il trouve les mécanismes qui lui permettent de se comprendre en tant qu’être de pensée, de conscience dans ce monde où il se trouve existant.
La première approche que fait Sartre est qu’il se rapporte à Heidegger et que celui-ci énonce dans le « projet de soi hors de soi qu’il nomme la « compréhension » et lui permet d’établir la réalité-humaine comme étant « révélante-révélée ». Partant de cet échappement de soi vers les possibilités de l’être, Sartre le définit comme un pour-soi. Comme il le dit « Ma possibilité ne peut exister comme ma possibilité que si c’est ma conscience qui s’échappe à soi vers elle. » Cette conscience qui s’échappe à soi, donc à l’être puisque l’être c’est soi, Sartre l’appelle le pour-soi.
Que signifie concrètement le pour-soi ? Tout d’abord, c’est une pensée et il ne peut être autrement. Et soi, l’être, c’est aussi le siège de la pensée. Mais la pensée n’est pas figée, elle s’échappe de soi pour retourner à soi. Un homme qui pense, par exemple, à son travail, alors qu’il est rentré chez lui. Sa pensée est vers là où l’homme l’a pensée. Dans son bureau. Peut-être qu’il (ou elle) n’a pas fermé son bureau à clé, qu’il n’a pas mis des documents sensibles dans son coffre-fort, par exemple. Ou bien il est en Algérie, il (ou elle) pense à son fils en France où il fait des études. Donc, il projette sa pensée en dehors de soi. Il regarde par exemple une montagne de la fenêtre et il voit la neige. Il a une pensée visuelle, peut-on dire. Ses yeux n’ont été que des capteurs d’images. Ils ont certes vu la neige, mais instantanément la pensée a vu aussi la neige. C’est comme si la pensée s’est projetée vers la neige. Mais qui reçoit toutes ces impressions pensées ou vues par des yeux qui ont pour ainsi dire aussi pensé par la pensée. Les yeux dans la vision sont-ils dotés de pensées ? La question reste posée. Y a-t-il une réponse ? Peu probable que la médecine puisse répondre aux phénomènes de la pensée. Un domaine entièrement métaphysique que la médecine elle-même a été et toujours reste révélée par la pensée.
Mais ce qui est important, c’est que l’être humain peut se projeter par la pensée. Si, par exemple, il a été en Amérique, et visité des villes, sa pensée peut aller jusqu’aux lieux qu’il a visité. De même dans les autres pays. Donc la projection de la pensée par Heidegger ou par Sartre que celui-ci appelle le pour-soi est un étant et un été et un venir tout à fait naturel. Qui existe dans la nature de l’homme. L’homme pour connaître le monde se projette par la pensée, ou c’est la pensée dont il est le siège (son cerveau) en tant que pensant la pensée qui se projette elle-même en même temps qu’elle projette l’homme dans cette pensée qui est sa pensée.
Donc encore faut-il répéter que le pour-soi est un détour intellectuel de l’homme par la pensée, une abstraction et il faut le devoir à la pensée de Sartre qui l’a comprise en tant que comme il dit elle est révélante-révélée. A travers le dasein d’Heidegger. Le Dasein, que les philosophes définissent cet être là, cette réalité humaine, ou simplement cet ek-sisté qui doit son existence à l’ek-sistence. Un peu comme une existence sortie d’une ek-sistence, un néant-univers ou univers-néant. Mais ces deux néants tous comptes faits sont existence, ils expriment la réalité humaine du vécu, de tous les jours. Même si, au fond, cette ek-sistence souvent n’est pas comprise.
Et par cette ek-sistence, l’homme à la fois n’est pas et il est. Il se sait et il ne se sait pas. Un dilemme, un paradoxe non. L’homme existe dans cet ek-sisté qui est tout à fait normal. C’est devenu une habitude d’être à force d’être. Qu’il soit pauvre ou qu’il soit riche, il est habitué à être riche ou il est habitué à être pauvre. La seule chose qu’il sait profondément est qu’il est, qu’il existe par-delà et au-delà de la richesse et de la pauvreté.
Parce que sa pensée sait ce qu’il ne sait pas. Et c’est la raison pour laquelle Jean-Paul Sartre cherche à néantiser son en-soi sachant qu’il est peuplé de néants. Il part de l’être, et dit de lui le soi, l’être là, le Dasein heideggérien, et lui donne le terme plus juste le en-soi qui va de soi. Que signifie le soi ou le dasein, c’est l’homme et ses néants qui de plus en plus ne sont pas néants et appartiennent à la conscience. La conscience donc apparaît en l’homme naissant. Il naît, il est naissant, mais sa conscience n’est pas. Donc le vécu progressivement le sort de son néant. Il n’était pas, il n’a pas existé, puis il naît, il existe mais il n’a pas de soi, ni en-soi ni pour-soi, ni conscience. Jean-Paul Sartre assimile tous ces abstraits parce qu’ils ne sont que des abstraits qui veut dire beaucoup de choses mais ne disent que ce qu’ils veulent bien dire parce qu’au fond ceux-là même cherchent à découvrir l’être pour l’être.
Précisément du soi heideggérien qui se projette, Sartre lui donne un nom le pour-soi qui se projette par la pensée et revient à soi par la pensée. Mais il apporte quelque chose du monde qui néantise le ou les néants qui peuplent ce soi. Par cette néantisation de soi qui est destruction de ou des néants, le pour-soi fait naître la conscience pour l’être-venu au monde, enrichit la conscience pour l’être-déjà-dans le monde conscient dans le sens que la conscience s’est déjà formée par le vécu, l’homme selon Sartre passe de soi à en-soi par le pour-soi. Et c’est cette dynamique de son essence qui fait dire à Sartre à travers cette « néantisation, étant néantisation d’être, qui lui fait qu’elle représente la liaison originelle entre l’être du pour-soi et l’être de l’en-soi. »
Que peut-on de cet extrait de l’Être et le Néant de Jean-Paul Sartre ? Tout d’abord cette « liaison originelle » en chacun des êtres. La seule réponse et elle est métaphysique, l’être est habitée par une transcendance sinon elle ne peut pas être. On ne peut croire que dire de soi, de l’en-soi et le pour-soi suffirait à définir l’essence de l’être au sens humain. Rappelons-le l’homme se sait et ne se sait pas. Et cette affirmation est très importante, d’autant plus que sa vie est finitude. Donc c’est un être-fait-pour-la-mort. En naissant, tout homme est ainsi, et tout philosophe que sont les philosophes sont ainsi. De Sartre, Heidegger, Kant, Schopenhauer, Spinoza aux anciens, Platon, Aristote, et aux Présocratiques, Parménide, Héraclite... ils n’ont qu’une vie pour exister. Et c’est la raison que c’est ainsi et que l’homme ne se sait pas, que la philosophie existe, et, par son essence même, la philosophie est devenue la mère des sciences. Pourquoi ? Les sciences dérivent de la pensée qui pense. C’est la pensée qui féconde les sciences. Et que fait la philosophie ? Elle étudie la pensée qui les engendre.
Prenons l’intuition, une faculté humaine, fille de la pensée. Lorsque Jean-Paul Sartre dit : « L’être qui est livré à l’intuition de la réalité-humaine est toujours ce à quoi il manque ou existant. » Et il prend l’exemple de la lune qui n’est pas pleine et qu’il lui manque un quartier, c’est l’intuition pensante qui lui fait savoir qu’en fait ce n’est pas que le quartier manque mais simplement qu’une partie d’elle n’est plus visible et la lune demeure en réalité dans sa totalité.
Ce qu’il énonce : « Pour que cet en-soi soit saisi comme croissant de lune, il faut qu’une réalité-humaine dépasse le donné vers le projet de la totalité réalisée – ici le disque de la pleine lune – et revienne ensuite vers le donné pour le constituer croissant de lune. C’est-à-dire pour le réaliser dans son être à partir de la totalité qui en devient le fondement. Et dans ce même dépassement le manquant sera posé comme ce dont l’adjonction synthétique à l’existant reconstituera la totalité synthétique du manqué. » En clair, l’intuition pensante, à travers le pour-soi qui s’est projeté vers le croissant de lune et en retournant dans l’en-soi, réordonne le rapport qui existe entre le quartier manquant et sa totalité pour le constituer en croissant de lune.
Il existe donc en l’être un facteur essentiel dans la pensée pour la compréhension de soi et du monde. Et ce facteur dans la pensée est celui qui unit, qui clarifie, qui fait naître la compréhension dans cette liaison originelle de l’être vis-à-vis du monde. Comprendre soi et hors de soi ou l’intériorité et l’extériorité passe par ce facteur qui s’appelle l’intuition intelligente de la pensée. Ou disons tout court intuition qui, par la pensée, habite l’être. C’est elle qui oriente toute l’existence humaine – l’homme n’y pense pas, ne pense pas cette intuition, c’est l’intuition qui pense en lui.
Cependant cette intuition pensante vient pour ainsi dire de l’essence. L’homme la sent plus qu’il ne la connaît. L’homme ne la raisonne parce que la connaissance qu’elle lui octroie est immédiate. La réponse rationnelle, raisonnée et raisonnante, active qu’elle donne s’opère par elle-même. En guidant l’être humain dans ses actes immédiats, l’intuition joue un rôle essentiel dans son existence. Par rapport à l’en-soi et le pour-soi, elle peut se constituer pour l’être en « hors-de-soi-pour-soi immédiat ». Ce qui signifie que, en répondant à son-être-face-à-la vie, elle tend à répondre à tout ce qui peut influencer ou entraver les possibilités existentielles de l’être qu’elle éclaire, de l’être qu’elle protège...
Pour la compréhension, prenons un cas concret, pris dans le quotidien de nombreuses personnes dans le monde. Un homme traverse une rue encombrée de voitures. En Algérie, par exemple, avec l’explosion du marché des voitures depuis une quinzaine d’années, il est souvent difficile de traverser en sécurité les boulevards. On a cette impression qu’il y a plus de voitures que de passants. Le nombre de voitures a explosé en Algérie grâce au boom du pétrole et la politique agressive de Bush contre le monde arabe et aujourd’hui Donald Trump, mais c’est là une autre histoire.
Pour traverser, un homme se trouve toujours à regarder les voitures, même s’il est sur un passage piéton. Les voitures ne s’arrêtent pas. Soit il leur fait signe de s’arrêter, soit avec l’encombrement, lorsqu’elles s’arrêtent, il profite pour passer. Mais il ne passe pas entièrement, il s’arrête au milieu de la chaussée en faisant attention qu’une voiture n’arrive du sens inverse. Il regarde donc à droite et à gauche si d’autres voitures n’arrivent pas rapidement de l’autre sens. Précisément, des voitures arrivent, et il attend, de nouveau des motocyclistes arrivent souvent des deux sens, et il attend toujours. Parfois, la file qu’il vient de dépasser se trouve doublée par une autre voiture qui veut les dépasser, voire même en accélérant.
Mais que s’opère-t-il dans l’homme face à ce désordre qui ressemble à une traversée de l’Himalaya, tellement le danger est là et qu’il faut éviter. Et souvent, dans certains endroits, c’est le lot de tous les jours. Comment arrive-t-il à répondre à cette situation pour se préserver ? Il a ses yeux pour regarder. Mais elle ne lui donne qu’une vision de la situation. Il faut surtout qu’il pense ce qu’il doit faire, c’est-à-dire avancer ou patienter encore. Et sa tête se retrouve à tourner à droite et à gauche et rapidement pour trouver une éclaircie et traverser. Parfois il hèle avec sa main, et souvent les voitures ne s’arrêtent pas. Mais intérieurement qu’est-ce qui le fait mouvoir ? Sa pensée ? Oui, il doit penser et raisonner très vite. Précisément c’est là où entre l’intuition. C’est elle, par l’intermédiaire de ses yeux qui sont, comme on l’a dit, comme des capteurs qui lui donnent la situation de l’être dans ce désordre qui peut comporter des dangers. Donc, c’est elle, instant après instant, en scrutant l’abord immédiat du boulevard, sans qu’elle donne connaissance à l’homme qu’elle est là, qu’elle pense en lui, qu’elle le guide, que c’est elle qui lui fait tourner la tête à droite et à gauche très rapidement.
Le temps donc presse et « elle doit lui faire regagner rapidement l’autre trottoir. » Il ne doit pas rester au milieu de la chaussée. Parce qu’il y a danger. Précisément, c’est elle qui va décider pour le faire avancer. Une éclaircie et même si une voiture arrive rapidement ou un motocycliste, elle lui « commande » d’avancer. Bien sûr, tout en lui soufflant intérieurement, ou simplement en pensant en lui, lui disant « tu traverses, mais tu n’es pas assuré d’une sécurité totale. » « Cependant, tu dois avancer, tu n’as pas le choix, tu ne peux attendre indéfiniment que les voitures s’arrêtent pour toi ». Elles aussi, leurs conducteurs ont leur en-soi et le pour soi, et leur intuition. Ils doivent trouver dans cet encombrement une éclaircie pour passer. Et c’est souvent, au bonheur la chance, malgré son intuition, que l’homme traverse cet enchevêtrement de voitures dans les boulevards des villes depuis le boom pétrolier-voiture-moto.
Ainsi, malgré qu’intuitivement, l’homme pense qu’il peut passer, il sait intérieurement qu’un accident peut lui survenir. Pour peu qu’un automobiliste ou un motocycliste qui s’est mal réveillé, et donc un en-soi et un pour-soi non maîtrisé, et une intuition inattentive, et il peut créer un désastre en blessant ou en tuant un passant involontairement. Et là faudrait-il dire plutôt volontairement par la situation dont étaient son en-soi, son pour-soi et son intuition mais que lui involontairement n’avait pas « décelés ».
L’intuition pensante de l’homme ne peut être infaillible. Tout peut arriver. L’homme relève de la contingence de l’existence et non de la nécessité. « L’homme est, il existe mais il ne peut garantir qu’il sera. » Il ne dispose pas de son avenir qui appartient à l’essence. L’intuition cherche à le protéger à son insu, pense en lui sans qu’il ne se rende compte réellement, mais ne peut s’opposer à ce qui peut arriver. Comme pour cet homme, il croit qu’il traverse, en réalité, c’est elle qui le guide et lui fait traverser le boulevard, en lui évitant au maximum le danger.
On comprend dès lors que l’homme par cette intuition pensante est un « être-au-monde », un « être-pour autrui » et un « être libre jusqu’à ce que cette liberté trouve par elle-même sa limite ». Et c’est elle qui lui « fait » régir son existence. Traverser une rue encombrée de voiture est un exemple édifiant des possibilités que renferme l’intuition humaine.
Un autre exemple intéressant à analyser. Prenons une structure étatique ou privée, et deux hommes qui y travaillent et ne s’entendent pas. Un est un supérieur, l’autre est un adjoint (ou sous-adjoint) à ce supérieur. Ils sont très proches dans le travail. Partons d’une situation où le supérieur n’est pas content de son adjoint. Et il fait tout pour le rabaisser. La situation peut s’envenimer comme elle peut rester stable, mais toujours avec des rapports difficiles. On peut se poser la question pourquoi ce supérieur en a après son adjoint. Craint-il pour sa place que cet adjoint la lui prenne ? Ou cet adjoint fait-il partie de gens qui médisent sur lui ? Ou pour d’autres raisons connues de lui ? Ou simplement des raisons de caractère que le supérieur n’arrive pas à cerner ? Et qui provoque une antipathie naturelle. Par exemple, « cet homme n’est pas moi, et je ne peux m’empêcher de le rejeter. » Et cela arrive parfois ce type de relation entre les êtres.
Sur le plan du discours sartrien, ils ont tous deux un en-soi et pour-soi, et comme on l’a montré, l’être a une intuition qui guide ses abstraits, qui sont globalement les mêmes en tout être. Avec des différences dans les caractères. Tout être est lui-même et cherche sa projection en l’autre. Et cela a relation avec l’affectivité de chacun. Pour comprendre l’animosité entre ces deux hommes, on peut supposer que le supérieur craint pour sa place. D’être remplacé par son adjoint. Ce qui est une possibilité. Mais si ce supérieur monte dans la hiérarchie et son adjoint le remplace. Et c’est aussi une possibilité. Et les relations peuvent être cordiales. Donc ce n’est pas ce cas qui nous intéresse, puisque ce processus est tout à fait naturel et se déroule sans animosité.
Mais si on prend le cas général où il n’y a aucune crainte pour le supérieur (qui peut être étatique ou simplement patron d’une boîte privée), donc indépendamment ou non de toute promotion sociale ou de tout litige en affaire, et cet adjoint horripile le supérieur ou le patron, et peu importe la raison. Il est évident que l’agacement du supérieur ne provient pas ex nihilo. Il vient quelque part de son en-soi intérieur, et celui-ci est « cimenté » par son affectivité. L’être en-soi et pour-soi qu’il est aime avant tout son soi. Et tout être normal aime son soi. Par ce soi, l’être peut aimer autrui, peut sympathique avec autrui surtout si l’être est ouvert au monde, et donc il est réceptif de par son caractère même. Un autre être peut être le contraire. Introverti, il est moins réceptif. Et entre l’extraverti et l’introverti, il existe une multitude de caractères. Er généralement la société humaine privilégie majoritairement les caractères extravertis qui sont tournés vers le monde extérieur.
Donc, ces deux hommes se différentient par leur affectivité, et celle-ci s’inscrit dans leur soi. Par conséquent, il existe des raisons d’ordre intellectuel et affectif qui font que le supérieur se trouve irritée intérieurement par la relation qu’il a avec son adjoint. L’un, par exemple, a un caractère du type rugueux, dur et l’autre un caractère, du type flexible. Et ce contact entre caractères opposés créé la mésentente. On peut même supposer que le supérieur refoule en soi quelque chose de passé, de mal vécu que son adjoint lui rappelle, ce qui explique le rejet de l’autre irraisonné.
Cependant, la machine humaine réagit toujours dans les mêmes conditions et quelles que soient les circonstances. Il y a toujours l’en-soi, le pour-soi et l’intuition qui guident leur être, et au-delà de leur affectivité. Si le supérieur cherche à se débarrasser de son adjoint soit en le mutant, soit en trouvant un moyen quelconque qu’il ourdit lui-même pour lui porter préjudice et se débarrasser de lui. Ou s’il est patron en le congédiant seulement quelque soient les raisons que le patron peut invoquer. Dans tout ce que fait le supérieur, c’est son en-soi et pour-soi et l’intuition qui va dicter son comportement. Toutes ces pensées pour se débarrasser de cet être-là est pour rester dans son avoir-être, avoir qui est ce qu’il est, et donc sa plénitude. L’autre créait une brèche dans sa plénitude. Donc la haine, le rejet refoulé, l’égoïsme de son être vont jouer dans cet en-soi et cet aller et retour du pour-soi vers l’autre qui vont dicter le comportement de ce supérieur pour arriver à ses fins. S’il ne trouve pas de solution à son affectivité, parce qu’en fait c’est ce soi affectif qui est en jeu, il sera obligé d’accepter cette présence-là.
Qu’en est-il pour l’adjoint ? Le même processus. Lui aussi est confronté à cet agacement de son supérieur. Il ne comprenant pas l’homme face à lui qui s’agace. Dans son en-soi, et son pour-soi, il pressent par son intuition le rejet de l’autre. Et l’adjoint lui aussi réagit au moyen de ses abstraits. Il cherche à se protéger de l’autre. Son intuition lui dicte son comportement. Soit laisser faire le temps, et se protéger autant que possible en ne répondant pas à l’animosité parce qu’il n’a pas d’issue. Il n’a d’autre travail que ce travail, et « il en a besoin pour vivre. Et s’il a une famille à charge, raison de plus. » Soit de changer autant que possible pour plaire et ainsi lui éviter cet agacement. Surtout d’un patron qui peut le congédier à tout moment. Et il a besoin de cet emploi pour lui et sa famille s’il est le soutien. Soit s’il a une possibilité de s’en sortir, il se fait muter de service. Soit il démissionne s’il peut trouver un autre travail. Donc les quatre possibilités extérieures, mais ce sera toujours l’intuition pensante qui « intelligera la situation » et lui dictera son comportement. Comme lorsque cet homme qui traversait un boulevard encombré.
Donc, au final, ce n’est pas lui qui n’a pas trouvé, mais l’« intuition pensante » à travers cette conscience qui est pour soi et cette non-conscience mais à venir qui est dans l’en-soi. Et par cette confrontation de deux consciences et non-consciences que inévitablement se dénouera le conflit par l’acceptation de part et d’autre ou par la séparation. Sans oublier une situation où une violence refoulée surtout chez le supérieur peut se terminer en exacerbation du conflit, et en violence. Donc l’être se trouve amené à des limites qu’il n’a pu commander. Limites qui proviennent de cet en-soi qu’il ne connaît pas, une non-conscience de ce qu’il fait. Ainsi peut-on comprendre ce qui peut survenir dans certaines situations où les êtres se trouvent dominés par ce qui est leur réalité-humaine et contre laquelle ils ne peuvent rien sinon à suivre leur en-soi qu’ils ne connaissent pas.
Enfin, un autre exemple d’intuition vivante qui a joué dans une situation réelle, et que raconte un homme dans son vécu. Une intuition qui a permis à son pays de faire une économie de devises.
Il raconte que c’était dans les années 1980, au sein d’une structure étatique de son pays, qu’un grave problème technique est survenu dans un grand navire. C’était le fleuron de la flotte. Et ce navire devait appareiller pour une mission. Le problème technique portait sur une avarie du bloc moteur du groupe diésel principal d’alimentation en énergie le réseau électrique du navire. Une bielle coulée est sortie du bloc moteur. Le bloc moteur et les bielles coulées devaient être changés. Le problème est qu’il n’y avait pas de pièces de rechange disponibles dans les magasins. Le moteur principal avarié, le navire ne pouvait pas appareiller avec un seul groupe de secours. Et l’homme qui raconte était le chargé de la maintenance de la structure marine de son pays.
L’urgence se posait. Réfléchissant sur ce problème, une intuition vint à cet homme. Se rappelant que des blocs moteurs neufs d’anciens moteurs qui ne sont plus en service, existaient dans les magasins, et ils étaient de la même firme qui les a produits, il décida de voir leurs données techniques. Il s’aperçut que le diamètre et la course du piston étaient identiques. La seule différence résidait dans la conception des blocs et culasses. Les anciens moteurs avaient des blocs moteurs séparés des culasses. Les nouveaux moteurs avaient des monoblocs, c’est-à-dire la culasse et le bloc moteur constituaient une seule pièce. La puissance se différenciait, les neufs étaient beaucoup plus puissants, en V, alors que les anciens en ligne, de l’ordre de milliers de chevaux.
Il fit venir des coopérants étrangers de la firme qui étaient présents dans la structure pour la maintenance. Invités à donner leur avis, les coopérants ont donné une réponse négative. La réparation avec des blocs et culasses séparées à la place des monoblocs ne marcheraient pas selon leurs dires.
Cet homme décida de passer outre les dires des coopérants et demanda à ses supérieurs de procéder à la réparation en utilisant des pièces neuves des anciens moteurs. L’autorisation accordée, il passa à l’action. Toujours se fiant à son intuition, il organisa la réparation en créant deux équipes de travail venant des ateliers, une de jour et l’autre de nuit. Et c’est ainsi, en trois jours et trois nuits, le moteur a été pour ainsi dire ramené à neuf. Sont venus les essais. Tous les responsables étaient dans la salle des machines. Tous étaient anxieux. Marchera-t-il ou non ce groupe pour l’alimentation électrique ? L’essai opéré par l’ingénieur de bord s’est avéré négatif. Le lancement se fait par un système d’injection d’air à haute pression (150 bars).
L’homme raconte. L’ingénieur de bord lui demande ce qu’il faut faire. Sans même penser, l’intuition parlait en lui, dit-il, il répondit : « Enlève tout le système de lancement du moteur par air comprimé ! » Les équipes de travail des ateliers refusèrent de travailler. Probablement par la fatigue, et surtout déçues par tant de travail, cet homme toujours par son intuition les libéra. Il estime qu’il n’en avait plus besoin, le moteur étant remonté, il ne restait que quelques points à définir.
Et ce point à définir lui a été donné précisément par l’intuition qui lui a soufflé que l’erreur se trouve dans l’utilisation du système de lancement à air à haute pression (pièce de rechange qui venait déjà montée dans la culasse neuve de l’ancien moteur). Donc il devait démonter le système de lancement d’air et le remplacer par celle déjà utilisée par le moteur avarié. L’homme me raconta qu’il avait compris que la distribution d’air dans les cylindres n’était pas la même, ce qui expliquait pourquoi le moteur ne s’est pas lancé.
La tuyauterie replacée du système de lancement, c’est une nouvelle attente de nouveau anxieuse, me raconte-il cet homme. L’ingénieur de bord tourne la manette. Et c’est la joie. Tous les efforts ont été récompensés par la remise en état de ce groupe. D’autres moteurs de navires eurent la même avarie. Les pièces achetées à l’étranger et qui étaient là depuis des années dans les magasins de la flotte servirent de nouveau. Cet homme me dit-il a fait une économie en devises pour son pays.
Que peut-on dire de cet épisode du vécu de cet homme ? Son intuition a permis un prodige puisqu’elle a démenti même les spécialistes étrangers. Pouvait-il être assuré que son intuition allait être positive ? Non, il ne le savait pas. Il savait seulement ce que l’intuition lui a dicté. Mais qu’est-ce que l’intuition ?
Comme le dit Jean-Paul Sartre, « L’être qui est livré à l’intuition de la réalité-humaine est toujours ce à quoi il manque ou existant. ... Ainsi ce qui est livré à l’intuition est un en-soi qui, en lui-même, n’est ni complet ni incomplet, mais qui est ce qu’il est tout simplement, sans rapport avec d’autres êtres. » Mais dans le cas de ce vécu de cet homme, on peut dire qu’il a été livré à cette intuition de la réalité-humaine à lui, uniquement à lui dans ce cas précis. D’autre part, dans le sens que cette intuition il ne l’a pas cherché ni ne pouvait la chercher. Il n’a fait que « penser » à un problème qui était pour ainsi dire insoluble pour lui, et qu’il ne pouvait résoudre. Par manque de solution, et n’ayant pas de solution, par manque d’intelligence, par manque de pensée qui pouvait lui permettre de résoudre ce problème qui était insoluble. Il n’y avait pas de pièce de rechange disponible.
La question, alors d’où venait-elle cette intuition puisqu’elle est lui est venue et lui a soufflé la solution du problème ? Sartre dit que « l’intuition est un en-soi », et donc vient d’un en-soi qui est ce qui est le profond en l’être. En clair une non-conscience pour l’être. On peut dire aussi que c’est son essence. Et que lui signifie-elle son essence ? C’est son inconnaissant ou encore dans le discourt sartrien le « néant » qui en réalité n’est pas le néant, juste une abstraction pour « désigner » parce qu’il ne peut le connaître. Ce qui n’entre pas dans la faculté de l’être de connaître ce qu’il ne peut connaître. Et c’est d’ailleurs de son en-soi grâce à son cogito (je pense donc je suis) qu’il expulse de l’en-soi un néant qui se néantise – il n’est plus néant mais connaissance - vers et en la réalité-humaine pour déterminer son être. Ce que Sartre appelle le pour-soi.
Dès lors, l’intuition est le trait d’union entre l’en-soi et le pour-soi, ou encore entre la non-conscience et la conscience. Et c’est précisément ce trait d’union qui est arrivé à cet homme et que cet homme a pensé à son corps défendant, et qu’on appelle « intuition ». C’est elle qui se trouve dans le néant et le non-néant, c’est-à-dire la réalité humaine totale de cet homme en provenance de l’essence non physique et l’essence du monde physique, qui embrasse toutes ses connaissances qu’elle analyse hors du temps (par sa nature intemporelle), et qui avait en quelque sorte « absorbé » ce qui devrait être en acte.
En effet, en orientant la pensée de l’homme deux fois de suite, d’abord en lui montrant la similitude dans le diamètre et la course du piston des deux moteurs et l’intérêt et par conséquent une culasse séparée du bloc moteur pouvait remplacer un monobloc (non séparé), et une seconde fois, l’erreur d’avoir utilisé un système de lancement par air comprimé qui était déjà monté dans la culasse neuve et qui ne pouvait fonctionner. Et c’est l’intuition qui lui a fait soufflé de reprendre le système de lancement d’air du monobloc avarié est de le remonter à la place du système d’air qui ne pouvait pas fonctionner. La distribution d’air dans les cylindres étant différente.
D’autre part, rien ne laissait présager que l’opération serait un succès. En effet, n’importe quel problème technique dans la construction du moteur ou erreur dans le remontage pouvait mettre à néant tous les efforts entrepris. Et ce succès qui est finalement a été un succès avec tous les efforts entrepris peut laisser apparaître que l’intuition qui est intemporelle, savait par précisément ce temps qui n’existe pas pour elle. De plus, « l’intuition est », elle n’est pas prémonitoire.
On comprend dès lors que la pensée de Jean-Paul Sartre est juste et qu’elle a continué la pensée de Heidegger, et ceux avant lui. Le problème pour l’homme est qu’il est difficile pour lui de se comprendre dans ce dédale d’abstractions. Cependant, avec l’ère moderne ouverte à tous les possibles, le processus de la pensée qui est encore inconnu même si des progrès significatifs ont été réalisés, notamment dans la psychologie, la psychanalyse et la psychiatrie, est du ressort de l’infini. Tout est à venir.
Ce qu’on peut dire, et ceci est très important, tous les progrès techniques réalisés dans le monde qu’il s’agisse de l’aéronautique, de la construction navale, du nucléaire, de la médecine, de la technologie de l’information et de la communication, et dans tout domaine, relèvent de la pensée. « Et rien n’empêche que les époques à venir d’autres progrès vont apparaître, et ils seront révolutionnaires, ils feront apparaître un homme entièrement différent. Que l’homme sera un autre homme, il ne sera pas ce qu’il est aujourd’hui. Notre époque apparaîtra un Moyen-Âge du nouveau monde. Et peut-être que l’humanité ne sera qu’une nation. Les frontières seront supprimées. Peut-être que demain, l'homme habitera la planète Mars. Peut-être que les hommes seront plus unis. Que les guerres entre nations seraient interdites. Peut-être que sera instauré un revenu universel pour tous les hommes. Tous les hommes mangeront à leur faim. Peut-être que la démographie galopante sera maîtrisée « naturellement ». Nous dépasserons le monde d’aujourd’hui. La mondialisation perdra son sens, et ne sera plus qu'un lointain concept. Et c’est précisément la pensée, cette pensée mystérieuse dont sa provenance est à la fois du néant du non-néant, qui changera le monde et l’homme-dans-le-monde. Et l’homme dans ce progrès restera toujours à la recherche de son être. Parce que cet être est infini, il est hors du temps. » Et c’est la raison que tout est à venir... sauf que l’homme ne sait pas et ne se sait pas.
Medjdoub Hamed
Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale,
Relations internationales et Prospective.
www.sens-du-monde.com
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