L’Ukraine met-elle en péril l’approvisionnement gazier européen ?
L'accord gazier entre la Russie et l'Ukraine a expiré le mardi 30 juin dernier sans qu'aucune entente sur les prix n'ait été trouvée lors des négociations de Vienne auxquelles participait l'Union Européenne. Les livraisons de gaz de l'opérateur russe Gazprom vers son homologue ukrainien Naftogaz, devraient donc cesser dès le 1er juillet dans l'attente de nouvelles négociations. Une situation des plus inquiétantes pour l'UE, encore aujourd'hui très dépendante de la situation en Ukraine (pas lequel transite un tiers de ses achats à Gazprom) pour son approvisionnement en gaz.
Le géant russe Gazprom a confirmé mercredi l'arrêt de ses livraisons de gaz à l'Ukraine, faisant suite à l'annonce la veille par Kiev de la suspension de tous ses achats de gaz à la Russie après l'échec de négociations sur les prix. "L'Ukraine n'a pas payé pour ses livraisons de gaz pour juillet. A partir de 10 heures du matin le 1er juillet, les livraisons de gaz de Gazprom à l'Ukraine sont arrêtées. Gazprom ne livrera pas de gaz à l'Ukraine - quel que soit le prix - sans prépaiement", a déclaré le PDG de Gazprom, Alexeï Miller, dans un communiqué.
En vertu d'un accord signé en octobre 2014, l'Ukraine bénéficiait jusqu'au 30 juin dernier d’une remise de 100 dollars par millier de mètres cubes par rapport au prix du marché. Un tarif avantageux que la Russie n'est plus en mesure de garantir au regard des fluctuations à la baisse des cours du pétrole et du gaz ces derniers mois. Le prix fixé aujourd'hui à 247,12 dollars les 1.000 m3 n'a donc pas satisfait les attentes du gouvernement ukrainien, qui réclamait une baisse supplémentaire de 40 dollars.
De son côté, le ministre russe de l’Energie, Alexandre Novak, a estimé qu’aucune logique économique ne présidait à la décision de Kiev de cesser ses achats de gaz. “Il ne s’agit que de politique. Kiev veut que l’Union européenne participe au financement de l’achat de gaz pour la période hivernale”, a-t-il déclaré dans les colonnes du quotidien russe Gazeta. "Cette attitude s’adresse avant tout à l’Europe, très concernée par l’approvisionnement des réserves de gaz ukrainiennes”, a-t-il ajouté. Une déclaration polémique par laquelle M. Novak tente de dédouaner la Russie de toute responsabilité dans cet échec mais qui d'un autre côté, rappelle également la position de grande faiblesse de l'Europe dans ce dossier.
En effet, si le commissaire européen Marcos Sefkovic s'est voulu rassurant sur les intentions de l'Ukraine et de la Russie concernant l'approvisionnement gazier européen, on ne peut s'empêcher de craindre un scénario identique à celui de l'hiver 2008-2009. A cette époque, Kiev, déjà en conflit avec Moscou sur le dossier du gaz, avait puisé illégalement dans le gaz de transit, provoquant un défaut d'approvisionnement dans plusieurs pays européens.
La situation actuelle est toutefois sensiblement différente en 2015 et Marcos Sefkovic affirme qu'il existe des mécanismes solides de flux inversés permettant à l'Ukraine comme aux pays de l'Union et se prémunir contre des problèmes d'approvisionnement en énergie. L'Ukraine dispose en effet à ce jour de 12 milliards de mètres cubes de gaz en réserve, et la Commission estime qu'il lui en faudrait 19 pour "s'assurer que la saison hivernale commence de façon appropriée", en octobre. Il reste donc trois mois à l'Ukraine pour compléter ses réserves, via le recours à des importations en "flux inversés", c'est-à-dire en achetant du gaz à d'autres fournisseurs européens comme la Norvège ou les pays d'Europe centrale, ou via l'extraction domestique de gaz en Ukraine.
Le mécanisme de flux inversés est néanmoins contesté par la Russie qui estime que ces livraisons concernent du gaz venant initialement de Russie et revendu à l'Ukraine par d'autres pays européens.
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