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Accueil du site > Tribune Libre > La mort (organisée) de la contestation - ou le début de la révolte (...)

La mort (organisée) de la contestation - ou le début de la révolte ?

Les citoyens ne font plus confiance en leurs institutions, et encore moins en leurs « élus » : à en croire les sondages d’où qu’ils viennent, la colère gronde et le peuple désire que son mécontentement soit entendu. Pourtant, et malgré le nombre de grèves, de manifestations, de pétitions ou d’autres alternatives contestataires, on s’aperçoit que la contestation n’a absolument aucun effet sur le comportement de nos représentants. Des Lois sont votées bien sûr, toujours soi-disant au nom de la justice sociale ou de la croissance, mais dans la réalité la situation d’une majorité de citoyens ne fait que s’empirer. Les « bonnes lois » sont vidées de leur contenu ou jamais appliquées (décret d’application jamais publié, loi organique non terminée, amendements annihilant les effets de la loi…), et les « mauvaises lois » sont votées sous des apparats consensuels ou trompeurs (assorties d’amendements vicieux étendant discrètement leur champ d’application, ou votées en catimini ou en accéléré pour éviter les débats, ou tout simplement directement rédigées par les lobbies au service de la finance…). En bref, les citoyens sont de plus en plus nombreux à avoir compris qu’on se moquait d’eux.

Mais si comprendre est une chose aisée, que critiquer est pour le moment encore autorisé, contester devient chaque jour un peu plus compliqué : à force d’user le vieil adage « diviser pour mieux régner », les gouvernements qui se sont succédés au pouvoir ont réussi à amoindrir considérablement, pas à pas, toutes les forces contestataires qui ont permis, pour telle ou telle corporation, des avancées sociales qui protégeaient leurs conditions de travail. En prenant pour modèle le « moins-disant social », ils sont parvenus non seulement à rabaisser tous les avantages qu’avaient certaines corporations tout en conduisant les uns à se désolidariser de tous les autres. Des lois, comme celle sur le service minimum, ont rendu les « grandes grèves » obsolètes, ou comme celle sur la représentation syndicale qui a permis d’amoindrir considérablement le pouvoir des syndicats. La future réforme sur les prudhommes et sans doute bien d’autres « réformes » ont peu à peu interdit toute forme de rassemblement contestataire, comme par exemple celles sur le terrorisme qui ont totalement modifié les « rapports de force ».

Tant et si bien qu’aujourd’hui les grèves et manifestations sont devenues non seulement inutiles, mais même souvent contreproductives : les manifestants sont considérés comme de mauvais citoyens empêchant les autres de travailler. Alors qu’il suffirait de rendre gratuits les péages par exemple pour obtenir le soutien d’un grand nombre de citoyens, ou de faire les parkings gratuits…

Le problème majeur de ces mouvements est le manque d’objectif commun, car face à la crise tous pensent qu’étant donnée la situation économique de la France tout le monde ne sortira pas gagnant : et chaque « corporation » préférerait que ce soit elle qu’on sauve, plus personne n’osant exiger -par exemple- une augmentation générale des salaires ou des conditions de travail…

Depuis quelques semaines en France défilent tour à tour les cheminots, les contrôleurs aériens, les examinateurs du permis, les avocats et j’en oublie.

En plus de la contestation qui devient obsolète s’ajoutent les problèmes de médiatisation de tous ces mouvements de contestation : entre le décompte des manifestants (j’ai entendu des chiffres police/organisateurs divisés par dix, alors qu’il serait si simple de se ranger par 10 ou 20 !), la focalisation sur certaines violences ou l’absence de relai médiatique, on voit bien que le peuple « qui se bouge » n’a plus aucune influence sur le pouvoir…

Alors on se dit qu’il ne sert plus à rien de continuer à lutter, et certains rêvent à la révolution – allant même pour les plus radicaux jusqu’à penser que la violence est le seul moyen de parvenir à de véritables changements. Mais c’est faire fausse route que de réfléchir ainsi : on s’en rend compte peu à peu, toutes les révolutions « démocratiques » qui ont eu lieu depuis les « printemps arabes » semblent avoir été fomentées par les Etats-Unis eux-mêmes, ainsi qu’ils l’ont déjà fait à maintes reprises dans l’Histoire…

Car il ne faut pas oublier une chose : lorsque la contestation devient inutile, la révolte devient alors l’ultime forme de contestation qu’il reste au citoyen ; et comme disait Isaac Asimov, « la violence est le dernier refuge de l’incompétence » – cette maxime s’appliquant à la fois aux « deux camps » qui se font face.
Nous n’instaurerons pas une démocratie par la violence, et ils n’instaureront pas leur dictature sans la violence. « On n’établit pas une dictature pour sauver une révolution, mais on fait une révolution pour établir une dictature », disait George Orwell. En supprimant les conditions de la contestation, le gouvernement crée les conditions de la révolte.

Et c’est tout le sens de la nouvelle proposition du premier ministre concernant la suppression possible de sites « suspects » de terrorisme sans l’accord préalable d’un magistrat. Il faut bien sûr comprendre derrière le prétexte du terrorisme la volonté du gouvernement de préparer la censure de la contestation sur internet, dernier refuge des contestataires démocrates : car comment croyez-vous que les « trolls » considéreront les sites qui condamnent à la fois le camp des « djihadistes » et la propagande islamophobe dont les musulmans modérés sont les victimes, autrement que comme des soutiens des premiers puisque par le syllogisme désormais communément accepté les musulmans sont forcément des islamistes, et par extension des terroristes ?

Il ne faut pas nous laisser prendre à ce petit jeu malsain. Nous devons nous unir pour lutter ensemble, pacifiquement. Nous avons déjà un objectif commun : le changement de notre « classe politique », après refonte totale de nos institutions. Nous pourrons alors discuter de l’Europe, de l’Otan ou des impôts peu importe, mais avant tout nous devons mettre tous ces faiseurs de guerre en dehors du champ politique pour reprendre le pouvoir. J’avais déjà proposé quelques « pistes » pour une grève générale « pas comme les autres », et il me manquait à l’époque l’objectif commun susceptible de rassembler tous les Français, qu’ils soient de droite ou de gauche : l’Assemblée Constituante doit être celui-ci. Commençons par unifier tous les partisans de ce projet sans préjuger de sa forme pour faire connaître ensuite les diverses tendances qui traversent ce projet commun. Ensuite seulement nous pourrons sortir ensemble dans la rue, rassemblés ensemble derrière un même objectif. Ne serait-ce que pour ne pas basculer ni dans la violence, ni dans la dictature…

Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr


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11 réactions à cet article    


  • Nestor 26 juin 2014 11:00

    Salut,

    "Depuis quelques semaines en France défilent tour à tour les cheminots, les contrôleurs aériens, les examinateurs du permis, les avocats et j’en oublie."

    Oui t’en oublie comme d’ailleurs les journaleux aux infos et même leur propre ministre qui lors de son passage chez Bourdin le 5 mai n’a pas dit un seul mot sur l’agriculture ...

     Stéphane Le Foll porte parole du gouvernement et ministre de ??????????

    Tout le monde s’en fout de l’agriculture ... Pourtant les agriculteurs sont bien les seuls à pouvoir mettre ce pays TOTALEMENT OUT en moins de 10 MINUTES ... Pire que du Poutine dans une grosse colère !


    • stetienne stetienne 26 juin 2014 18:50

      les agriculteurs sont ultra minoritaire maintenant
      en plus juste des pousse bouton
      au pire on envoit l armee qui peut les remplacer sans probleme en meme pas 1 jours


    • Nestor 26 juin 2014 22:11

      Salut,

      « au pire on envoit l armee qui peut les remplacer sans problème en meme pas 1 jours »

      Oui c’est ça envoie l’armée pour les remplacer ... smiley

      Pendant ce temps eux iront tranquilles arracher les poteaux électriques dans leurs champs ou autres aux quatre coins de France histoire que le jus ne passe plus ... Couper des arbres par groupe de cinq ou six pour stopper net la circulation sur autoroutes, nationales, départementales, comme autres réseaux style voies ferrées ... Passer le décompacteur là où les tuyaux d’eau et de gaz passent ...

      Dans la campagne ils savent où trouver tout ça et s’il fallait faire le taf sans être dérangés pas de soucis pour eux ... Et ils ont tout ce qui faut pour (tracteurs, câbles aciers, tronçonneuses, décompacteurs ... Etc) ...

      Bien organisé comme ce maudit vendredi 13 de l’année 1307 et la France est à genou en peu de temps ...

      Et la minorité en question te prive en deux temps trois mouvements de routes, de voies ferrées, d’électricité, de gaz, d’eau et de bonbon Haribo (c’est beau la vie  smiley ) ... 

      Oui tu as raison envoie l’armée pour les remplacer ...  smiley


    • jef88 jef88 26 juin 2014 11:38

      Erreur dans le titre !
      ce devrait être « L’euthanasie de la contestation »


      • caleb irri 26 juin 2014 20:14

        @ jef88

        J’ai hésité, mais je n’ai pas osé !


      • bernard29 bernard29 26 juin 2014 16:38

        très bon. 


      • christophe nicolas christophe nicolas 26 juin 2014 21:53

        très bon sauf pour l’âne, c’est un animal noble.


      • Hermes Hermes 26 juin 2014 16:46

        Bonjour,

         Il suffir de constater que l’on dort profondément à 99% du temps. L’homme qui dort est vulnérable à toutes les suggestions et manipulations, et vous décrivez cette situation très bien. Il est son propre pion, victime de ses propres peurs, rancoeurs, désirs, avidités, violences refoulées, pales reflets de son profond orgueil, lui même masqué sous des couches de justifications et de faux bons sentiments ou d’opinions politiques toutes plus salvatrices les unes que les autres.... et même s’il n’a pas envie de le reconnaitre, il souffre dans son sommeil.

         De tous temps il y a eu des hommes qui ont parlé de se réveiller, mais leurs messages ont été déformés et utilisés pour asservir. On comprend pourquoi : un homme éveillé est totalement libre ! Il n’a pas besoin de défendre sa propre importance.

         La solution est au sein de chacun de nous, et ce n’est l’affaire de personne d’autre que soi-même de la chercher. Le chemin est très simple et très difficile en même temps :
         « ne crois en rien que ce qui est dans la présence » (*)

         Comment vivre la présence, sans que ce soit l’idée de la vivre ? Comment être soi-même sans que ce soit l’idée de soi-même ?  smiley

        Pour chacun le chemin sera différent.

        Bonne soirée.

        (*) toute ressemblance avec un texte ancien n’est peut-être pas si fortuite que ça.


      • bernard29 bernard29 26 juin 2014 17:17

         Si au moins, on réussissait à rassembler des militants de la rénovation démocratique sur quelques revendications précises et étayées et que l’on s’y tienne ce serait pas mal pendant le temps de la mobilisation. Mais déjà, chacun a sa petite idée son combat particulier (vote blanc ou non, RIC et lequel, tirage au sort ou pas, proportionnelle ou mixte, vote obligatoire, contre le vote électronique ou consultation internet, disparition du sénat ou non , régime primo-ministériel, parlementaires présidentiel, ou pas, etc etc )..

        je suppose que la demande d’une constituante permet de régler le problème en disant on verra cela plus tard, lors de l’établissement de la constitution nouvelle de la VI eme république. Mais alors, ce serait faire croire que l’on est capable de se mobiliser et de mobiliser sur du flou artistique . Et ça, de mon point de vue ce n’est possible ni envisageable et même grave d’un point de vue démocratique. 

        ce que je crois c’est qu’il arrêter une liste de revendications précises, limitées, réfléchies, sérieusement étayées, qui correspondent aux interrogations actuelles des citoyens sur notre démocratie et qui offrent des solutions pragmatiques, facilement appréhendables et qui sont susceptibles d’enclencher un processus de démocratisation continu pour envisager une nouvelle civilisation démocratique.

        J’avais établi quelques propositions à débattre, mais je crois que vous les connaissez (http://pacte-democratique.blogspot.fr/ ou http://changerlarepublique.over-blog.com/ . 

        Enfin chacun continue son petit bout de chemin et malheureusement ils ont parallèles et ne croisent pas.. 


        • Jean Keim Jean Keim 26 juin 2014 21:15

          Vouloir changer la classe politique en place ou vouloir changer le monde, c’est comme changer de place une décharge publique pour satisfaire un groupe de gens, ce n’est que déplacer le problème, c’est comme le dit la formule bien connue : changer dans la continuité. Vouloir changer le monde ce sera toujours mettre en place des « nouvelles mesures » avec des sympathisants et des opposants et donc des désordres.

          Qu’est-ce qui ne tourne pas rond sur notre planète ? Il faut comprendre le sens de cette question, la considérer sous un angle nouveau et non pas la survoler avec des réponses toutes prêtes piochées dans notre banque de données mentales, il ne s’agit pas de revendiquer pour conserver ou d’obtenir de nouveaux avantages, cela c’est ce qui se fait depuis le début de l’histoire mais de voir ce qu’il convient de rejeter à défaut de savoir ce qu’il faut faire. Très honnêtement nous ne savons pas (plus) quoi faire et c’est normal puisque nous ne pouvons appliquer que des recettes connues et tout ce qui a été fait jusqu’à maintenant ne marche pas.

          • christophe nicolas christophe nicolas 26 juin 2014 22:13

            Ils vont au précipice eux même... On n’essaie pas de les changer mais de les sauver.


            De quoi ? Des rouges qui auront moins d’état d’âme. Il y a des solutions mais n’en veulent pas car elle froisse l’orgueil et comme « après moi le déluge », le problème c’est qu’un jour, le déluge vient. Ca peut être une explosion de centrale nucléaire, une catastrophe écologique « naturelle », une révolte sociale. 

            Les solutions existent, Andréa Rossi pousse la chansonnette du triomphe, j’ai longuement expliqué. Quand on sort de la vérité, les puissants vont au châtiment et là, au niveau scientifique, on est parti loin de la vérité par orgueil.

            En faisant votre possible vous sauver votre âme même si cela ne marche pas. Eux s’ils gagnent, ils se damnent... s’ils se repentent, ils donnent raison à la vérité et vous rendent justice. En restant des esprits de vérité vous vaincrez toujours, quelque soit l’issue.

            Ils font comme si de rien n’était pour ne pas perdre la face mais ils flippent car ils savent, je les ai déjà informé, mais les pontes des sciences ont fait les bourricots.

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