• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Nouvelles mesures pour les HLM : à qui profitera le crime ?

Nouvelles mesures pour les HLM : à qui profitera le crime ?

Sous la pression des associations et avec la permanente tentation des effets d’annonces, les mesures sur le logement des personnes défavorisées se succèdent. Au milieu du gué et à l’aube des grands froids, nous pouvons encore envisager le meilleur comme le pire.

[logement-crime.jpg]Le gouvernement a contracté avec l’Union sociale pour l’habitat la mise en vente de 140 000 logements HLM versus USH (1) ou la vente de 40 000 logements versus gouvernement.

Le président de la République dans son discours de Vandoeuvre avait déjà mentionné cette possibilité tout en indiquant par ailleurs son souhait de voir libérés les logements HLM par les personnes dont les revenus sont devenus supérieurs aux plafonds, par ailleurs raisonnablement élevés (2) et par les ménages qui bénéficient de logements manifestement trop grands.

Dans l’esprit du discours de Vandoeuvre, ces logements libérés seraient mis à la disposition des pensionnaires des centres d’hébergement pour lesquels tout le monde s’entend à reconnaître que les débouchés en logements sociaux ou privés s’avèrent totalement insuffisants.

Une inévitable bataille de chiffre s’est immédiatement faite jour autour du nombre de logements libérables : 400 000 pour les uns, 160 000 pour les autres, d’autres encore stigmatisant le risque de remettre en cause la mixité sociale des quartiers difficiles.

Information incidente, le directeur de cabinet du ministre du Logement dont on peut raisonnablement penser les revenus suffisants, serait logé, en complète légalité d’ailleurs dans un logement de la ville de Paris (3) à un peu plus de 6 euros le m2 ce qui correspond à 60 % du prix pratiqué dans un centre de ville moyenne française.

En quoi ces quelques éléments sont-ils susceptibles de nous permettre de mieux comprendre le fonctionnement du logement social ou public en France et de tenter d’entrevoir quelques solutions ?

Premièrement, nous apprenons que s’il manque de logements à finalité sociale dans le parc privé, il existe manifestement des logements pour les gens aisés dans le parc public ce qui tend à conforter la vision de Vandoeuvre. Notons au passage que tous les logements publics ne sont pas nécessairement des HLM et qu’il serait sans doute utile de régler définitivement cette question en conférant progressivement un statut « HLM » à l’ensemble de ce patrimoine public dévoyé dont la plus grande part se trouve sur la ville de Paris.

Deuxièmement, les logements qui pourraient être libérés au regard des revenus actuels de leurs occupants ou de leur sous-occupation semblent promis à une double évolution possible : soit ils contribuent à accroître l’offre disponible pour les ménages les plus démunis, soit ils pourraient être vendus à leurs occupants. Convenons qu’une des solutions est plus vertueuse que l’autre et qu’il serait plus convenable que les occupants les plus fortunés des logements sociaux ou publics ne puissent pas tirer avantage de leur caractère social pour acquérir à un prix très raisonnable des logements dont ils ont déjà tiré profit pendant leur période locative.

Troisièmement, nous pouvons raisonnablement douter du rôle de ces locations extra sociales sur la mixité. A en croire l’adresse de notre bienheureux haut fonctionnaire (le Val-de-Grâce), peut-être même contribue-t-il à la formation de ghettos de riches dont on ne dira jamais assez le rôle ségrégatif et déprimant pour le bas peuple. D’une manière plus générale, il est fort peu probable que les plus aisés des occupants des organismes HLM aient fait des pieds et des mains pour se maintenir dans les quartiers les plus sensibles de notre pays. Les statistiques de la Délégation interministérielle à la ville en témoignent d’ailleurs largement.

En conclusion, nous disposons actuellement d’un ensemble de propositions qui peuvent aboutir au meilleur ou au pire.

Au meilleur, si l’accent est résolument mis sur la libération de logements indûment occupés dans le parc HLM au profit, pour l’essentiel, des ménages les plus démunis. Cette évolution souhaitable n’exclut d’ailleurs pas que les locataires ordinaires des HLM puissent acquérir leur logement et on peut s’étonner que les associations qui oeuvrent pour la mise en oeuvre du droit au logement ne cherchent pas plus à tirer avantage de ce potentiel de logements libérables.

Au pire, si ces mesures aboutissaient au maintien dans les lieux des ménages les plus favorisés du parc social et public, qui deviendraient propriétaires à bon compte, cumulant l’avantage du bon prix à celui du bon loyer, tout en contribuant faute de logements à reléguer les plus pauvres dans les quartiers les plus difficiles.

(1) L’USH, ou Union sociale pour l’habitat regroupe nationalement l’ensemble des organismes HLM. A la demande de ses mandants, cette organisation a tout mis en œuvre pour limiter la contrainte de la vente à une obligation de moyen, la mise en vente, et s’exonérer de l’obligation de résultat, la vente effective, souhaitée par le gouvernement.

(2) A titre indicatif, pour un ménage comprenant 2 adultes et 2 enfants, le revenu net mensuel équivalent au plafond d’accès au logement HLM classique (dit PLUS) s’élève à Paris à 5 000 €.

(3) La ville de Paris dispose de différents outils en matière de logement social la RIVP, la SAGI et l’OPAC de Paris.


Moyenne des avis sur cet article :  5/5   (10 votes)




Réagissez à l'article

9 réactions à cet article    


  • Leila Leila 19 décembre 2007 12:45

    @Eric

    Bravo pour ton article. Dommage que la photo soit ratée. A propos du logement du préfet Bolufer, tu aurais pu diriger les lecteurs vers :

    http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=33299

    Je lis : « Préfet hors-cadre, Jean-Paul Bolufer est le directeur de cabinet de la ministre du logement Christine Boutin. Il occuperait, selon le Canard enchaîné, un logement de 190 m2 dans le parc social (RIVP) de la Ville de Paris, du côté de Port-Royal. C’est pas franchement la zone. »

    Cette politique du logement social me fait vomir. Et dire que Madame Boutin, la bigote, ira prier pour les mal logés à la messe de minuit !


    • Céphale Céphale 19 décembre 2007 20:37

      Si je comprends bien, le problème est de pouvoir loger dans des conditions décentes et pour un loyer correspondant à leurs revenus les pensionnaires des centres d’hébergement. Déloger les locataires de logements HLM qui ont les moyens de payer un loyer dans le privé, ou les moyens d’accéder à la propriété, c’est une piste. Mais je crois que le fond du problème est ailleurs.

      Le fond du problème, c’est qu’il n’y a pas assez de logements HLM. Le problème sera résolu quand on aura construit massivement dans les zones où les besoins sont les plus importants. Ce n’est pas pour demain.


      • Jules Boncors Eric 20 décembre 2007 19:11

        Bonjour,

        Nul doute qu’il manque de logements et qu’il faille en construire sans doute 5 ou 600 000 par an dans les 5 prochaines années pour rendre les choses acceptables.

        Dans cette attente, la situation des uns n’est pas celle des autres et il me semple que les collectivités publiques, l’Etat mais également les collectivités territoriales doivent faire flèche de tout bois pour résoudre la question des sans logis et celle des mal logés.

        J’ai exploré dans mon petit texte une solution de court terme pour desserrer l’étau.

        Je n’oublie pas non plus qu’en déplaçant ne serait-ce qu’un peu le problème des exclus vers les classes moyennes voire les classes moyennes supérieures, la question du logement retrouve une pertinence politique notamment locale de nature à faire évoluer les collectivités locales qui tiennent une part de la solution dans leur gestion de l’urbanisme.


      • TSS 20 décembre 2007 12:58

        la nouvelle politique du livret A ne va pas arranger les choses. Jusqu’à present l’argent allait à la CDD qui servait de garant à la construction de logements sociaux !!

        maintenant que les banques privées sont dans le coup le logement social a du souci à se faire ! Tout le contraire du discours lenifiant du gvt !!


        • Jules Boncors Eric 20 décembre 2007 19:17

          Je comprends cette préoccupation du monde HLM même si les dépôts sur le livret A sont manifestentement sous consommés par les organismes et que l’argent prêté l’est à taux variable combinant l’inflation et le taux du marché interbancaire à 3 mois.

          Cette situation risque d’aboutir dans les prochaines semaines à une hausse de 0,75% du taux de l’ensemble de l’encours HLM ce qui est fort coûteux.

          Je ne suis pas sûr qu’au regard de cette situation la libéralisation de la collecte change quoi que ce soit au problème.

          Cela reste symbolique.


        • Takkie Cardie 20 décembre 2007 14:36

          Bonjour à tous !

          Je suis très intéressée par tout ce qui se dit ou s’écrit en ce moment sur le logement social, car, depuis très peu de temps, je suis directement concernée par le problème.

          Je vous explique.

          J’habite depuis presque 27 ans, un petit immeuble du 11 ème arrondissement, petite rue calme, mais assez moche, un appartement fonctionnel, assez bien agencé. Depuis l’installation de ma petite famille ( mon fils de 26 ans est né et a toujours vécu ici ) nous avons vu défiler au moins 5 ou 6 bailleurs institutionnels, avec, à chaque fois, augmentations et galères invraisemblables pour se maintenir dans les lieux, à cause d’un loyer qui, par moments, était vraiment trop élevé pour nos moyens modestes, allant jusqu’à 50, 60, voire 70% de nos revenus de l’époque !...

          Nous étions artisans, et je peux vous dire que j’ai, à une époque, connu presque tout ce que Paris compte d’huissiers !...mais nous étions très attachés à notre appartement, mon mari y avait fait beaucoup de travaux, et nous voulions le garder coûte que coûte...

          Enfin, est arrivé le dernier bailleur, la société GECINA, entreprise connue pour ses ventes nombreuses à la découpe...inutile de vous dire que, quand la gardienne nous a annoncé que l’immeuble était en vente, il y a un an, nous avons vraiment été très, très, inquiets...impossible d’avoir un quelconque crédit bancaire, du fait de notre situation professionnelle, trop « à risque » pour un banquier...

          Aussi, je ne vous décrirai pas la joie que j’ai éprouvée quand j’ai appris que nous étions rachetés par l’Opac ! Bien-sûr, certains locataires ont un peu tiqué quand ils ont vu s’installer dans « leur » immeuble des gens un peu « limite » , alcoolos notoires et visiblement très désocialisés, mixité sociale oblige ! mais moi, je suis très contente, mon loyer a un peu diminué , suite à l’enquête annuelle concernant les revenus...

          Nous sommes dans la situation type de la grande masse de Parisiens à revenus moyens, pour lesquels acheter à Paris est devenu impossible, même après trente ans d’activité professionnelle, et louer dans le privé inaccessible aussi.

          Nous avons eu beaucoup de chance, je le reconnais, je ne sais vraiment pas dans quelle situation nous serions actuellement, si l’immeuble avait été vendu à la découpe...

          Mais, voyez-vous, et très sincèrement, mon voeu le plus cher serait de pouvoir acheter mon logement. je ne chercherai pas à le revendre en faisant une plus-value - ce qui est d’ailleurs impossible à réaliser avec l’achat d’un logement HLM - mais juste pouvoir faire en sorte que mon mari puisse enfin se « poser », à 54 ans, après une vie de travail, dure,dans le bâtiment, et sans beaucoup de compensations.

          Après tout, avec tout l’argent que nous lui avons consacré depuis ces presque trente années, il serait déjà à nous, ce foutu appartement !....

          Je vous envoie mes amitiés à tous !


          • Jules Boncors Eric 20 décembre 2007 18:16

            Bonjour,

            votre situation illustre bien l’intérêt qu’il y a pour des locataires HLM à revenu modeste à pouvoir acquérir leur logement.

            Sur le plan pratique vous auriez tout intérêt à saisir l’OPAC de votre souhait même si l’acquisition récente de votre logement par cet organisme compromet sans doute cette opportunité.

            En principe les organismes HLM ne vendent pas les logements intégrés dans leur patrimoine depuis moins de 10 ans. Par ailleurs les organismes HLM ont souhaité en accord avec Mme Boutin qui n’est peut être pas tout le gouvernement de ne pas céder de logements dans les communes dites SRU (ayant moins de 20% de logements sociaux) ce qui me semble être le cas de la Ville de Paris.

            Compte tenu de la sincérité de votre témoignage je souhaiterais le reproduire sur mon blog en illustration de la question de la vente HLM et de l’intérêt qu’elle représente pour certains locataires.

            Pouvez vous m’adresser un message mentionnant votre accord ou votre désaccord sur ce point.

            Dans tous les cas je reste à votre disposition pour le cas où vous souhaiteriez des renseignement pratiques et ce dans la limite de mes compétences.


          • Takkie Cardie 20 décembre 2007 23:31

            Pour Eric, et merci de votre réponse.

            Oui, bien-sûr, je suis tout à fait d’accord, si cela vous intéresse, vous pouvez faire figurer mon témoignage sur votre blog. Donnez-nous seulement l’adresse ou le lien. Et, oui encore, je n’hésiterai pas à faire appel à vos compétences le moment venu.

            Merci encore !


            • Thegrannysmith Thegrannysmith 21 décembre 2007 13:30

              Très bon article, qui met en place les élèments de ce stupide dossier d’actualité.

              Mais ce pose un problème d’urbanisme. Par exemple dans ma cité bretonne (BREST) on a des tours, de 13-18 étages, symbole même des « cités », et la politique de reconstruire des immeubles, salubres, mais surtout moins hauts, pour être la « théorie du clapier ».

              Or, vu qu’il faut de la place, on en arrive au point, où il y’a un déplacement progressif des populations de ce quartier en rennovation, dans les quartiers, non pas brestois, mais à l’extérieur de la ville, sans de réels efforts de rapprocher ces populations, de BREST, par notamment les transports publics .

              Donc, dans certains on dégage le problème, tout simplement, ce qui est fort dommage, et pas très écologique dans ce cas de BREST .

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès