On a les chiens que l’on mérite
Histoire de chiens entre France et Inde...
Bref, les chiens sont pris en charge. Et il y a une chose qu’ils ne font pas, c’est être ensemble : avez-vous déjà vu un groupe de chiens sillonner les rues d’une quelconque ville ? Comme une bande de copains partis en goguette. Non, n’est-ce pas ? Les chiens vivent séparément les uns des autres, chacun dans sa niche, chacun avec son maître.
En Inde, à l’inverse, le plus souvent, les chiens sont libres et entre eux. Souvenir surtout de ces nuits à Darjeeling où la ville devenait leur territoire. Plus une âme humaine qui vive au-delà d’onze heures le soir. Alors, il ne reste plus que les chiens et ils en profitent. Les rues deviennent le théâtre de leurs jeux et de leurs guerres. Le jour, les hommes s’agitent et les chiens se tiennent tranquilles, comme cachés. Ils lézardent sur un toit abandonné, jettent un œil dans une poubelle, et dorment le plus souvent.
Est-ce le fruit d’un pacte entre les hommes – représentés, je suppose par les autorités locales –, et les chiens – mais qui peut bien les avoir représentés ? – ? Est-ce en échange de la paix accordée dans la journée, que les chiens font ce qu’ils veulent la nuit ? Alors pourquoi aboient-ils la nuit ? Pour rappeler aux hommes leur possession nocturne ? Pour se venger des pierres prises dans la journée ? Allez savoir.
Être chien à Darjeeling est vraiment le rêve – je dois avouer que ce n’est qu’une conviction, je n’ai jamais réussi à recueillir un témoignage direct d’un chien sur ce sujet –, car, vu l’altitude de plus de deux mille cent mètres, la température y est moins élevée qu’ailleurs. Ils ne cheminent pas la langue au ras du sol comme je les ai vus dans d’autres villes.
Les chiens en Inde sont donc solidaires, libres et un brin sauvages. Je n’ai pas non plus vu de chien agressif : pas de rottweilers, pas de monstres prêts à mordre, pas de muselières…
Finalement on a les chiens que l’on mérite. Nos chiens sont à notre image : solitaires et agressifs. Nous vivons juxtaposés, inquiets de perdre ce que nous possédons, sans souvent nous poser la question de la légitimité et de la nécessité de cette possession. Nous tenons en laisse nos chiens et décidons pour eux ce qu’ils ont le droit de faire ou de ne pas, comme d’autres décident pour nous…
Nos chiens sont ordonnés comme toute la nature que nous avons disciplinée, construite, reconstruite. Le moindre morceau de terre a été nivelé et repensé. Combien restent-ils d’espaces vraiment « naturels », c’est-à-dire tels qu’ils étaient avant la présence de l’homme ? Notre climat local lui-même est sage et ordonné. Délicieux climat tempéré où la température évite les extrêmes, les pluies sont au rendez-vous sans excès. Nous n’avons donc pas peur de la nature. Elle est à notre main.
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