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Accueil du site > Tribune Libre > Pour une vraie relance de l’aménagement du territoire

Pour une vraie relance de l’aménagement du territoire

Réinventer la DATAR en tenant compte de la décentralisation et de la nouvelle donne économique mondiale

Au moment de la montée des réseaux numériques, du brassage des populations – tant au sein du territoire national, que de l’Europe ou avec les autres nations – et de la perte de repères qui en est souvent induite, le territoire reste le lieu des cohabitations physiques et de l’incarnation d’un passé notamment culturel.
Il est aussi un des éléments de la compétition internationale pour toutes les implantations structurantes, que ce soit celles de grandes universités, de laboratoires de recherche ou d’unités de production majeures.

Ce n’est pas en menant des politiques sectorielles et verticales, décoordonnées entre elles, que l’on assurera la compétitivité de nos régions françaises, et le maintien des solidarités. Si l’on n’y prête pas garde, nos territoires nationaux peuvent se trouver « non compétitifs » par rapport à des localisations alternatives européennes… et au sein du territoire national, certains peuvent décrocher et se paupériser.

Une politique d’Aménagement du Territoire est donc plus que jamais nécessaire. Pourtant combien il est frappant de constater son absence : nos dirigeants politiques croiraient-ils que le monde est devenu virtuel, et que l’incarnation spatiale de ce qui est entrepris n’est plus un sujet important ?

L’Aménagement du Territoire ne peut évidemment pas se penser sans les Régions, c’est-à-dire que l’État n’est plus légitime à intervenir directement sur le territoire, mais il est le seul à pouvoir :

- assurer une péréquation entre les territoires pour que le succès des plus performants tire en avant ceux qui sont moins favorisés,
- articuler les politiques nationales entre elles,
- peser réellement au niveau européen et international, et défendre les régions françaises.

C’est le rôle d’une administration de mission capable de peser sur les politiques sectorielles de l’État, et s’assurer qu’elles s’articulent pour le mieux physiquement dans l’espace, et tisser des liens avec les Régions. C’est ce qu’a fait la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale (DATAR) de sa création jusqu’au milieu des années 80.

Il est frappant ensuite de voir comme elle n’a jamais su repenser son rôle avec le développement de la décentralisation, et la modification de la donne économique mondiale. Elle s’est transformée petit à petit en une administration gérant les primes d’aménagement du territoire et les crédits européens, sans être capable d’incarner une vision et de peser sur les autres administrations. Pour l’essentiel, tout se passe sans elle… et l’Aménagement du Territoire est absent de toutes les grandes décisions…

La Datar fête cette année le cinquantenaire de sa création, et une renaissance est aujourd’hui indispensable sous la forme d’un retour aux sources : une équipe ramassée pilotée par un Délégué proche du pouvoir politique et porteur de la vision.

La suppression de la terminaison « Action régionale » serait souhaitable pour matérialiser que ce n’est pas à elle d’agir au plan régional : le rôle de la Datar devenue DAT serait d’avoir une vision transverse des politiques de l’État – c’est-à-dire s’assurant des articulations spatiales entre les routes, les universités, la santé… –, d’agir pour un rééquilibrage des ressources financières locales et de soutenir à l’international les champions nationaux. Elle développerait aussi une politique de relations contractuelles avec les Régions, en orientant le contenu des plans État-Région.

Relancer une telle politique est une urgence…


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10 réactions à cet article    


  • Robert Branche Robert Branche 18 juin 2013 17:16

    Mais mener une réelle politique d’aménagement du territoire ne veut pas dire un accroissement de la dépense publique !

    Cela veut dire d’avoir une vision territoriale et transverse de ce que l’on fait, et de s’assurer des cohérences : par exemple, à quoi sert de développer la zone de Fos sans la raccorder à une autoroute ?

  • Martin Lucas Martin Lucas 18 juin 2013 23:27

    Vous avez pointé le coeur du problème, Monsieur Branche, et j’espère que nous serons de plus en plus nombreux à partager cette analyse.

    Comme vous pouvez le constater dans les commentaires, l’enjeu est culturel, ce qui rend la tâche d’autant plus difficile. Le territoire a disparu de la culture commune, et ceux qui ressentent un tiraillement à l’endroit du territoire, ont de plus en plus de mal à définir ce qui cloche, faute de bagage lexical et théorique.

    Bien sûr, contrairement à ce qu’affirme Démosthène, une vraie politique du territoire est faite non de budgets, mais d’analyse transversale, de comparaisons, de repérage des potentiels et des carences, de solutions contextuelles, d’optimisation, seules méthodes qui permettent d’orienter efficacement des budgets par ailleurs déjà prévus.

    Parce que le réel est indépassable, une vraie politique du territoire est la seule solution de sortie à la crise économique.


    • Robert Branche Robert Branche 19 juin 2013 00:01

      Merci de votre commentaire de quelqu’un qui a enfin compris ce que je voulais dire !

      Effectivement, il m’est interessant de constater au travers de tous les autres commentaire, comme la notion même d’Aménagement du Territoire a disparu du paysage (j’ai été il y a 30 ans chargé de mission à la DATAR puis Commissaire à l’industrialisation...). Raison de plus pour se mobiliser !

    • Michel DROUET Michel DROUET 19 juin 2013 10:54

      Bonjour

      Tant que l’on aura un empilement de structures publiques locales, qui toutes peu ou prou se piquent d’aménagement du territoire, nous n’avanceront pas.

      La notion de territoire vu par les élus qui gouvernent ces structures publiques locales est largement guidée par la notion d’intérêt politique et la délimitation d’un territoires en fonction des habitudes de vie (commerces, déplacements domicile travail,...) est totalement absente de la réflexion politique dans ce cadre étriqué.

      Vous avez raison de dire que la Région doit être au centre des réflexions, mais la structure utile qui suit immédiatement la Région, ce n’est pas le Département, devenu inutile, ni l’intercommunalité actuelle, dispersée et qui ne correspond que rarement aux bassins de vie, et encore moins la commune, c’est le Pays qui tient compte plus souvent de cette notion de bassin de vie et qui gagnerait à être légitimé aux côtés de la Région en lieu et place des autres collectivités territoriales.


      • Robert Branche Robert Branche 19 juin 2013 12:50

        Oui il est aussi nécessaire de clarifier le nombre et le rôle de chaque structure publique locale. Le problème n’est pas tant l’existence du département entre la région et les communes que, comme vous le mentionnez la taille des communes, et la superposition de niveaux intermédiaires pour le compenser. Il faut faire le ménage, et ramener à minimum à 4 niveaux : Etat, Région, Département, Commune, avec des compétences distinctes et des communes élargies (probablement proche de la notion de pays - nos communes actuelles devenant des arrondissements de proximité)


      • viva 19 juin 2013 13:27

        Et si c’était la région qui était en trop plutôt que les départements ? 


        Peut être faudrait il plutôt supprimer la région qui finalement vient s’interposer entre le département qui est la structure la plus proche de la problématique locale et l’état seule structure en capacité d’établir des plans de développements pour le pays.

        • Michel DROUET Michel DROUET 19 juin 2013 15:25

          Le problème, c’est que le Département se fait progressivement « bouffer » par les intercommunalités et qu’il n’est plus, en fait qu’un’ grosse administration chargée de gérer des dispositifs. Sa marge de manoeuvre pour impulser des politiques nouvelles se réduit comme peau de chagrin.

          Cela est dû également à la clause générale de compétences qui permet à chaque collectivité de faire tout et parfois n’importe quoi.

           


        • Robert Branche Robert Branche 19 juin 2013 17:50

          C’est précisément cette clause de compétence générale qu’il faut revoir : il faut dédier chaque niveau à certaines compétences, et éviter les doublons. Le problème me semble plus celui là, ainsi que la superposition groupement de communes et communes que celui du département en tant que tel.


        • Michel DROUET Michel DROUET 19 juin 2013 18:37

          Malheureusement, dans le cadre de la loi de réforme sur la décentralisation, la majorité actuelle au Sénat a rétabli cette clause de compétence générale que l’ancien gouvernement avait supprimée avec effet en 2015...

          ...et la majorité actuelle n’envisage pas de revenir sur le mille feuille territorial, donc c’est mal parti pour l’aménagement du territoire. Chaque couche du mille feuille aura tendance à dire que c’est sur son territoire et non sur celui du voisin que devra se faire cet aménagement.

          Les querelles de chapelles et les bisbilles politiques ont encore de beaux jours devant elles et l’immobilisme devrait encore être la règle pour longtemps encore.


        • Martin Lucas Martin Lucas 20 juin 2013 16:54

          En attendant que les structures soient simplifiées (ne rêvons pas, il faudrait un cataclysme pour que cela arrive), pourquoi ne pas réfléchir aux nouveaux outils de l’aménagement du territoire ?

          Qu’est-ce qui nous empêche de créer une base de données accessible facilement , sous forme de carte, qui permette de repérer un certain nombre de dysfonctionnements et de déséquilibres, ainsi que les potentiels ?

          Cette base de données pourrait être alimentée par les citoyens eux-mêmes, de manière à obtenir un matériau vraiment exhaustif en peu de temps. Au passage, les établissements scolaires pourraient aussi monter des projets pour l’alimenter.

          -Dysfonctionnements-

          Circulations, continuités : ruptures de cheminements piétons et auto, enclaves, cul-de-sac.

          Occupation des sols : monofonctionnalité (zones pavillonnaires, zones d’activité, zones commerciales), surfaces agricoles/bocages en péril, zones inondables occupées, etc.

          Distances : zones isolées par rapport aux services publics, aux commerces, au traitement des déchets, aux approvisionnements en matériaux.

          -Potentiels-

          Surfaces exposées au soleil : toitures susceptibles d’accueillir panneaux solaires, de l’agriculture, etc.

          Surfaces constructibles : Délaissés, friches, extensions possibles.

          Une carte isochrone est aussi un bon outil pour pointer les aberrations (centralisation, notamment) et aboutir à une meilleure répartition du transport sur le territoire.

          Ce type d’outil, avec sa dimension citoyenne, permettrait de faire rentrer l’aménagement du territoire dans la culture commune, et d’interroger, de réorienter sans fard les projets qui se présentent ici ou là.
          Ensuite seulement, le besoin de structures en accord avec cette nouvelle donne serait si criant que la réforme serait inévitable.

          Voilà où nous devrions en être, nous avons énormément de retard à rattraper !

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