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Presse, mensonges et avionique

L’avion, l’avion, l’avion, ça fait lever les yeux... et ça excite les journaleux.

Waooo, comme la presse aime les titres racoleurs du genre "Limoges on a un problème", une "chute" de 8 000 mètres ! Comme il est aussi amusant de constater que dès qu’il y a un problème d’avion qui se crashe (cf. Spanair JK5022) les journalistes mettent de côté leur objectivité histoire de faire du sensationnel, finalement, Le Nouvel Obs, Le Monde, France Info, Le Figaro, 20 minutes, M6, TF1 et consorts ne valent pas mieux qu’un Détective ou Gala de bas étage. Bientôt, un passager a une diarrhée dans un avion et, hop, évacuation d’urgence, problème des low-cost, pas de papier à bord et, là, le moindre incident prend des proportions catastrophiques, je suis certain que certains « journalistes » vont fouiner dans tous les incidents aériens (et non pas accidents) pour sortir des articles, certainement à la mode, mais malgré tout soldés pour fin de série.

Bref, soyons sérieux, histoire de remettre un peu les choses à leur place et reprenons point par point les données de base du problème :

1 : un avion de ligne vole aux environs de 9 200 mètres d’altitude soit les fameux 30 000 pieds (1 pied = 0,3048 mètres, c’est un truc anglais…) ;

2 : l’équilibre entre la pression extérieure et intérieure se trouve à 2 000 mètres d’altitude ;

3 : la vitesse verticale normale d’un avion est d’environ 1 800 pieds/mn (+/- 550 mètres par minute - la vitesse verticale est la vitesse à laquelle l’avion monte ou descend selon qu’il décolle ou atterrit), pour un avion de ligne en phase normale de décollage ou d’atterrissage. Elle est indiquée par un instrument qui s’appelle le variomètre et qui est bien en évidence sur le tableau de bord ;

4 : la structure du fuselage d’un avion de ligne (ou autre) est étudiée pour supporter les efforts suivants : les efforts de flexion (verticale et horizontale), les efforts de torsion, les efforts de résistance à la pressurisation et les efforts localisés (impact à l’atterrissage) ; le fuselage peut supporter des efforts largement au-dessus que ceux autorisés dans les procédures de vol ;

5 : maintenant faisons un petit calcul : 8 000 mètres en 5 minutes cela nous donne 1 600 mètres par minute de descente soit, pour ramener cela à une vitesse compréhensible 26,6 mètres par seconde soit… 96 km/heure, quand on sait que la vitesse d’un 737 au décollage est de 145 nœuds environ (240 km/h) en charge normale et de 140 nœuds (230 km/h) à l’atterrissage, les forces exercées sur l’avion sont bien supérieures à une vitesse de descente en vol de 96 km/h. On a donc de la marge.

Par conséquent, c’est une ineptie racoleuse que de parler d’une « chute » de 8 000 mètres. D’une part, cette descente rapide (car c’est bien de cela dont il s’agit) était absolument nécessaire et le pilote aurait été un assassin s’il ne l’avait pas faite, car à 9 ou 10 000 mètres d’altitude, je mets au défi quiconque de non entraîné (et encore) en l’occurrence des passagers, de vivre plus de 10 minutes dans une cabine dépressurisée, d’où l’obligation de revenir TRES VITE à une altitude supportable inférieure ou égale à 2 000 mètres (cf. point n° 2). Le pilote a donc bien respecté une procédure normale pour assurer la sécurité de ses passagers, donc, en ce qui le concerne, chapeau pour la réactivité !

Il convient donc de savoir de quoi on parle avant se lancer dans « une chute de 8 000 mètres » alors qu’il s’agit d’une action complètement contrôlée.

Par contre, la vraie question est de savoir pourquoi a eu lieu cette dépressurisation.

D’une façon plus générale, il n’est pas non plus judicieux de taper sur les compagnies aériennes (low-cost ou autre, à noter que Spanair n’est pas une low-cost) puisque, pour avoir les autorisations de voler en Europe, elles sont soumises aux mêmes contrôles que les compagnies « normales » et il n’y a pas deux poids deux mesures pour les contrôles de sécurité aériens. De plus, dans la majorité des cas, ces compagnies utilisent des avions neufs et ce pour deux raisons : la première c’est que ce sont des compagnies récentes qui ont acheté leur flotte il y a peu de temps, et la deuxième parce que des avions neufs coûtent moins chers à la maintenance que des avions vieux, de la même façon qu’une voiture de 15 000 km coûte moins cher à l’entretien qu’une voiture de 100 000 km sur laquelle il y aura toujours une pièce à changer tous les 5 000.

En conclusion, il faut arrêter de faire du sensationnel avec de la désinformation qui n’a d’égale que l’opportunisme de certains journalistes avides de reconnaissance et dont l’objectif est de faire de l’audimat à la télé et des visites sur le net. J’aimerais bien savoir combien se vendent les espaces pub sur les pages relatives aux avions sur le web depuis le crash de Madrid…


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20 réactions à cet article    


  • Gül 27 août 2008 11:42

    Merci de cet article ! C’est bien de remettre les choses à leur vraie place de temps en temps. Si ça pouvait servir de leçon à certains...


    • n’a rien à dire 28 août 2008 03:09

      Effectivement, les titres des journaux ont été racoleurs. Cette descente rapide vers une altitude plus clémente est une procédure normale pour mettre en sécurité les passagers dans le cas dépressurisation. En effet à 12 ou 15 000 mètres  l’oxygène est d’abord rare et il n’y a plus de pression atmosphérique ce qui provoque des douleurs dans les oreilles et en plus il fait très froid et même très froid –30 voir –40. Les passagers ne pourraient pas supporter longtemps une température aussi basse sans vêtements. Donc il faut descendre le plus rapidement possible. Où est le problème ? Les journalistes ne savent plus ce qu’ils écrivent.

    • Lapa Lapa 27 août 2008 11:55

      notez que lesdis jounalistes sensationnalistes se fourvoyent même jusque sur AV :

      http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=43670

      il rale sur le fait qu’il n’ya pas eu d’annonce pendant la manoeuvre d’urgence. Sans doute doit-il confondre manoeuvre vitale d’urgence d’avion et retard du RER...

      ce populisme crasse en recherche de formules détonnantes et de faits divers exceptionnels est relativement pénible car c’est vraiment l’antipode du début de l’intelligence humaine.


      • Marc Bruxman 27 août 2008 12:22

        ta ta taaaaaa !

        Air Cercueil vous informe que votre avion va s’écraser. Le personel d’Air Cercueil et son personnel d’accompagnement vous prient de l’excuser pour la géne occasionnée !



      • Ronny Ronny 27 août 2008 12:14

        Juste pour confirmer ce que vous dites, selon une étude de 2006 de scientifiques US, environ 80% des informations reprises par la presse US sont le fait de dépêches d’agences ou de communiqués de presse de groupes politiques, industriels ou de lobbies !

        Je n’ai aucune raison depenser qu’il en irait différemment en France. Suffit de regarder les brèves, ou d’écouter les "informations" radio et TV pour constater que peu d’entre elles sont creusées - et encore faut-il elles sont données (je me permets de rnvoyer à un de mes récents papiers : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=42985).

        Suffit aussi de voir la façon dont certains partis politiques ont régi lorsqu’un de leur communiqué de presse n’a pas été reproduit par les journalistes pour comprendre à la fois les mauvaises habitudes des dits journalistes et celles des politiques tellement habitués à utiliser la presse et les médias comme caisses de resonnance. A la décharge de ces journalistes, il est vrai qu’ils risquent d’en prendre plein la tête lorsqu’ils ne se comportent pas en bons petits soldats : Cf ce qui se passe sur RFI de puis l’arrivée de Mme Kouchner, le limogeage de journalisstes pourtant peu vindicatifs pour des détails (ex Genestar), le cas de Denis Robert, ou celui de Gary Webb du San Jose Mercury News que les pouvoirs politiques et ses "confrères" bien pensants ont acculé au suicide....

        Nous vivons dans un "monde de merde" ou la prese ne joue pas son rôle de contre pouvoir vis à vis des politiques et ou les politiques ne jouent pas leur rôle de contre pouvoir vis à vis de la finance. Quelle part cette société n’est plus une démocratie si elle ne l’a jamais été...



      • HELIOS HELIOS 27 août 2008 14:13

        Juste pour me faire moinser un peu...

        Ce qu’il vient de se passer avec cet incident, c’est exactement pareil que ce qu’il se passe avec l’industrie nucleaire... chaque pet de travers c’est une catastrophe majeure... reprise et amplifiée par les journalistes...


        • Halman Halman 27 août 2008 16:47

          Cette descente accélérée n’avait rien de "on a cru mourir".

          Même en planeur on se fait des descentes de 6000 mètres d’un seul coup à des 70 km/h de vitesse verticale, et rien de dangereux, rien d’exploit, rien de "on a cru mourir".

          Par contre le crash du md82, d’après les dernières infos ça promet d’être loufoque ce qu’il semble s’être produit dans le cockpit, reverses enclanchées, l’étambot (la partie arrière inférieure du fuselage) qui touche violement la piste au point de provoquer des ruptures.



          • saint_sebastien saint_sebastien 27 août 2008 17:59

            pour avoir volé avec Ryan air, franchement certains de leur avions sont des cerceuils volants...


            • impertinent3 impertinent 27 août 2008 18:52

              Ah bon, tu es ingénieur en aéronautique ?


            • Jean-Luc Louis Judas Nanasse 27 août 2008 20:15

              Vous pourriez développer s’il vous plait ?

              J’ai souvent eu l’occasion d’être passager sur plusieurs compagnies dont Air France, Royal Air Maroc, Swissair, Balair, British Airways, Braniff, Ryanair et j’en passe, je n’estime pas que ces avions étaient des cercueils volants, pourtant toutes ces compagnies (sauf Ryanair à ma connaissance en ce qui concerne les crash, mais je peux me tromper, ils ne sont pas passés loin en 2006 suite à une histoire de modification de signalisation au sol mais l’avion n’était absolument pas en cause) ont eu des avions qui ont eu des incidents ou des accidents.

              Il faut rappeler une chose, c’est que la majorité des accidents d’avion résultent d’une succession d’erreurs dont en majorité des erreurs humaines (56 %) contre 17% dus à un problème des avions, le reste est réparti entre la météo (13 %), contrôle aérien (4 %), maintenance (4%) et le reste (6 %) sont dus à des causes diverses ( du type attentats etc.)

              Je pense donc que sur ce sujet, mieux vaut se contenter seulement des faits. Il faut savoir que le nombre d’avions en circulation ne cesse d’augmenter, et ce bien plus rapidement que le nombre d’accidents, il y en a automatiquement plus, c’est mathématique. Plus vous mettez de voitures sur une autoroute, plus il y a des risques d’accidents. A ma connaissance, Ryanair, au même titre qu’Air France, Easy Jet, BA, KLM ou Swissair ont toutes les autorisations de vol de la part des autorités françaises ou européennes.

              Donc dire qu’un avion est un cercueil volant reste relativement subjectif sans avoir d’arguments précis. Je ne conteste pas le fait que certains avions sont en plus mauvais état que d’autres, notamment dans certains pays ou les compagnies aériennes sont moins contrôlées et pour lesquels l’entretien coute très cher (cf. par exemple la fameuse "liste noire". 

              Donc, si vous êtes capable de dire qu’un avion est un cercueil, c’est que vous devez en connaître un bout sur la question. Merci donc d’éclairer notre lanterne.


            • Jean-Paul Foscarvel Jean-Paul Foscarvel 27 août 2008 22:50

              Il n’en reste pas moins que des tendances dangereuses peuvent se faire jour, comme chez Spanair où les difficultés économiques poussent à minimiser les incidents techniques.
              Avant de décoller, le MD-82 avait eu ue première avarie (détection d’une surchauffe), qui a été corrigée par la déconexion du détecteur, non obligatoire d’après les normes. Par ailleurs l’un des moteurs présentait des anomalies depuis un mois (dossier présenté par le quotidien "El Mundo").
              Je ne dis pas qu’il y a un lien avec l’accident survenu ensuite, mais il est certain que chercher une cause de surchauffe aurait duré plus longtemps que d’incriminer le capteur. La disponibilité a été privilégiée sur la sécurité, même si ce la ne constitue pas une faute en soi.
              Comme pour les lois, il y a l’esprit des normes, et la lettre. ils respectent tous la lettre, mais une compagnie dans un état délicat au niveau financier, et qui n’a pas connu d’accident majeur, aura tendance à pousser le bouchon jusqu’à tendre, voire dépassser, une limite pour le coup inacceptable.

              Ce sont les pilotes, les membres de l’équipage, et les passagers qui prennent les risques sur leur vie, pas les dirigeants.


            • Dzan 27 août 2008 19:00

              L’aviation.
              On en parle que pour les accidents.
              Nos pilotes de volige sont parmi les meilleurs du monde, les mé(r) dias vous en rendent compte ?
              Nos compétiteurs aéronautiques, remportent moultes trophées. Vous les avez vu à la télé ?

              Je me rappelle d’un article narrant un atterrissage forcé d’un avion de tourisme en Limousin
              "Le pilote évita de jutesse un arbre en donnant un coup de plafonnier"
              Pour les non initiés, il s’agit des palonniers, pédales qui agissent sur le gouvernail de direction d’un avion


              • Renaud Delaporte Renaud Delaporte 27 août 2008 19:27

                Mais non, vous n’avez pas compris.

                Le pilote a allumé son plafonnier afin de mieux apercevoir l’arbre devant lui.

                Encore un qui ne croit pas à ce que racontent les journaux...



              • Tcheub 27 août 2008 20:55

                Je trouve que le point 5 porte à confusion. Vous parlez de (-) 96 km/h de vitesse ascensionnelle et des vitesses de décollage et d’attérissage. Mais cela n’est pas comparable dans l’état. Car l’avion, dans sa "chute", n’a pas une trajectoire verticale. Sa vitesse doit donc être bien plus élevée en fait.

                Un spécialiste pourrait éclairer ce point ?


                • Jean-Luc Louis Judas Nanasse 27 août 2008 22:29

                  Dans le cas qui nous intéresse, la vitesse verticale correspond à la variation d’altitude par unité de temps, elle correspond en fait au taux de montée ou de descente de l’avion. Elle se mesure avec le variomètre qui mesure la différence de pression en fonction de l’alitude à laquelle l’avion se trouve (à chaque fois que l’avion change d’altitude, la pression change aussi).


                • vivelecentre 27 août 2008 22:23

                  Intéressant, mais pourquoi dans votre titre évoquez vous "l’avionique" ? Ce mot désigne une parti bien précise de l’équipement d’un avion et n’est pas concerné par votre démonstration !


                  • Jean-Luc Louis Judas Nanasse 27 août 2008 22:40

                    En effet, vous avez toutà fait raison, c’était surtout pour le rythme du titre.

                    l’avionique, pour être plus précis représente l’ensemble des équipements (instruments de navigation, certaines commandes de vols, radars, radio, pilote automatique etc.) qui permettent d’assister dans le pilotage d’un avion.


                  • vivelecentre 27 août 2008 23:10

                    merci
                    je m’en doutais
                    mais vous le savez ! lorsque l’on pilote on aime la précision et on doit la rigueur !!

                    Pour le reste hélas , dès que l’on découvre dans la presse des articles sur un domaine qui nous est familier, on s’aperçoit que la plupart du temps , le travail des journalistes manque de rigueur et comporte nombre d’approximations
                    Et encore, en étant gentil....


                    • goc goc 28 août 2008 04:12

                      En plus dans le cas de l’incident de Limoge, heureusement que l’hotesse n’a pas revelé aux passager qu’il ne restait plus de café smiley

                      (c) ya-t-il un pilote dans l’avion


                      • Wazix23 28 août 2008 11:14

                        Ex mécanicien avion, je signale aux profanes de l’aviation, que la sécurité matérielle des avions consistent en doublement, triplement des organes essentiels de l’appareil. Que la dépressurisation enclenche immédaitement la mise à disposition des masques à oxygène ( qui remplace très bien le doublement de l’appareil qui entretient la pression atmospghérique en altitude plus encombrant et coûteux) , voir les pilotes de chasse, malgré la pressurisation de la cabine de pilotage, et que la descente accélérée et non la chute comme il est dit est une manoeuvre obligatoire et régulière dans ce cas d’incident.. Cela fait parti de l’entrainement du pilotage. 
                        De là à parler de cerceuils volants pour des compagnies occidentales relève du mauvais esprit..


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