Aéronautique : incident & accident aériens
Dimanche 19 janvier 2025 deux jeunes pilotes décollent chacun aux commandes d'un DR400 et un MCR01 du terrain de Pontarlier (Doubs) pour Reims. Fin de matinée les deux pilotes se sont égarés au nord de Paris en raison de conditions météorologiques exécrables avec un plafond bas et brouillard. Vers midi, le commandement du Centre de Planification et de Conduite des Opérations Aériennes et de la Défense Aérienne dépêche un Rafale B de la base de Saint-Dizier (Haute-Marne), un Mirage 2000-5 d'Evreux et un hélicoptère Fennec de la base de Villacoublay. Une heure plus tard les deux avions, se posent en sécurité sur l'aérodrome de Beauvais guidés par l'hélicoptère plus apte à voler à base altitude.
« un aéronef en vol VFR (Visual Flight Rules) ne doit ni décoller d'un aérodrome situé dans une zone de contrôle, ni atterrir sur cet aérodrome, ni pénétrer dans la circulation de cet aérodrome : lorsque le plafond est inférieur à 450 m (1 500 ft) ; ou lorsque la visibilité au sol est inférieure à 5 km. Une clairance VFR spécial est nécessaire pour pénétrer ou évoluer dans une zone de contrôle, quand le pilote estime que les conditions météorologiques de vol à vue ne sont pas réunies ou ne vont plus l'être. En VFR spécial, la règle établissant un rapport entre la visibilité et la distance parcourue en 30 s de vol, telle qu'elle est définie dans le tableau 3.1 pour les espaces aériens non contrôlés à et au dessous du plus élevé des deux niveaux 900 mètres (3 000 ft) au-dessus du niveau moyen de la mer ou 300 mètres (1 000 ft) au-dessus de la surface, s'applique dans les espaces aériens contrôlés ».
La licence de pilote d''Avion Privé (Private Pilot Licence) permet à tout pilote âgé au minimum de 17 ans reconnu apte médicalement de prendre les commandes d'un avion de tourisme (moteur à pistons). La formation requiert 45 heures de vol d’instruction dont 25 en double commande et environ 10 heures de vol solo (prix de la formation environ 6 500 €). Les possibilités de financer une licence à moindre coût (Croix rouge par exemple) ayant disparues, il est possible cependant d'en obtenir le financement : https://www.france-bia.com/formation-pilote-aides-financieres-bourses. Pour conserver sa qualification, le pilote doit accomplir 12 heures de vols (env 160 €/h ; astuce pour réduire la facture, le co-avionage) 12 mois avant son expiration (validité 2 ans). Le pilote peut ensuite suivre une qualification IFR, vol de nuit, etc.
L'initiation au Vol Sans Visibilité est accompli de plus en plus sur simulateur de vol (Flight Navigation and Procedure Trainer). Les vols sont à vue, c'est à dire par le cheminement de repères au sol. En cas de mauvaise visibilité, nuages, forte pluie ou brouillard, le pilote perd tous ses repères et dépend des instruments pour savoir dans quelle position son appareil se trouve sur le plan horizontal et vertical. Le pilote éprouve une impression bizarre, car ses sens, notamment visuel et vestibulaire sont abusés. Les appareils du tableau de bord lui fournissant des informations contredites par ses sens, il finit par mettre en doute leur fiabilité et enchaîne des manœuvres incorrectes. Les sensations du pilote « aveugle » sont essentiellement liées aux variations d’accélération, décélération et inclinaisons.
Au début des années vingt les aéronefs sont dotés d'instruments rudimentaires. Le pilote René Labouchère met au point le « Badin » du nom du fabricant de l'appareil qui regroupe un indicateur de vitesse, un niveau pour la position latérale, et un gyroscope pour les changements de direction. Le 19 décembre 1930, les pilotes Génin et Aubert, entreprennent un vol Paris - Cologne par mauvais temps en Pilotage sans visibilité. L'avion atterrira finalement à Dormund sous un épais brouillard, les autorités de Cologne ayant refusé l’atterrissage à cause du mauvais temps malgré l’insistance des Français ! Génin et Aubert mettent au point la méthode ZZ pour les atterrissages par très mauvaise visibilité en 1931. Les vols par mauvaise visibilité se généralisant, le risque de collision en est accru. En 1932 un texte fixe les procédures des circuits d’attente (hippodrome) et l'ordre de priorité à l’atterrissage. A l'approche d'un aéroport les virages se font à gauche, sauf si le balisage ou que des feux indiquent le contraire,
Les aéronefs se déplacent dans l'espace aérien partagé : avions, hélicoptères, ULM, planeurs, parapentes, voire drones. La pratique du vol à vue est régie par trois principes, voir, être vu et éviter. Tout aéronef croisant à la même altitude peut présenter un danger de collision, aussi les appareils sont équipés de feux semblables aux navires : lumière rouge sur l'aile gauche, verte sur l'aile droite, feu arrière blanc, et un feu stroboscopique. Si le pilote distingue une lumière rouge sur sa gauche et un feu blanc, cela lui indique que l'appareil s'éloigne. S'il aperçoit la lumière rouge sur la droite et verte sur la gauche, l'avion vient de face. Si les deux appareils croisent à la même altitude avec un relèvement à gisement constant, le risque d'une collision est à craindre.
Le pilote se doit de distinguer l'altitude absolue au-dessus du sol (Above Ground Level) ou hauteur, de l'altitude vraie rapportée au niveau de la mer (Mean Sea Level) donnée par l'altimètre. Leit motif des instructeurs IFR : « ne vous fiez pas à ce que vous ressentez ou éprouvez. Ne faire confiance qu'à vos instruments ». Les manœuvres intuitives étant souvent dictées par la proprioception et/ou les réflexes conditionnés, il s'agit d'en acquérir de nouveau. Les six instruments standards sont :
- l’altimètre (à droite de l'horizon artificiel) permet de connaître l’altitude grâce à la mesure de la pression atmosphérique. Il est réglé sur l’altitude au moment du décollage (la pression atmosphérique décroît d'un pouce de mercure et la température de 2°C par 1 000 pieds d'altitude).
- Le variomètre indique le sens (montée, descente) et la vitesse de variation de l’altitude.
- L'horizon artificiel informe sur l'inclinaison longitudinale et latérale. Lors d'une descente appareil cabré, l'horizon artificiel indique une montée !
- L'anémomètre (situé à gauche de l'horizon artificiel) indique la vitesse relative dans l'air (Indicated Air Speed). La vitesse vraie par rapport au sol (True Air Speed) correspond à la vitesse anémomètrique corrigée selon la pression, l'altitude et la température.
- L'indicateur de virage indique la direction (Left et Right) et le taux de virage.
- Le conservateur de cap ou gyrocompas conserve le cap sur lequel il a été réglé (un compas reste soumis à la déviation et déclinaison magnétiques).
Les avions de tourisme qui volent généralement à des altitudes comprises entre 3 000 et 15 000 pieds restent soumis fortement aux turbulences en raison de leur faible envergure, masse beaucoup plus faible se déplaçant à des altitudes affectées par les phénomènes météorologiques. L'altitude de l'avion affecte directement son taux de montée et ses performances de croisière. La densité de l'air diminue avec l'altitude, ce qui signifie qu'il y a moins d'oxygène pour la combustion du moteur (la poussée moteur est réduite), la vitesse de montée diminue à mesure que l'altitude augmente et la portance aérodynamique est moindre en raison de la raréfaction de l'air. Parvenu à l'altitude maximale l'avion ne peut plus monter même en poussant les gaz à fond.
En accidentologie il convient de différencier les incidents des accidents. L'incident n'entraine pas de dommages physiques (blessé) ni matériels (casse) mais comporte des risques. Mardi 21 janvier 2025 un Piper PA-18 est entré en collision avec deux parapentistes en tandem avant de s'écraser sur un chalet inoccupé de Méribel-Les Allues (Savoie) vers 17 heures. Les deux hommes qui trouvaient à bord sont morts. Le pilote et propriétaire de l'appareil âgé de 58 ans était pilote de ligne, instructeur de voltige et selon le président de l'aéroclub de Méribel, « un pilote complet, un excellent manœuvrier ». Les deux parapentistes qui ont atterri dans des arbres ont été légèrement blessés, mais sont hors de danger. « L'appareil a été très bien entretenu, un avion comme ça est certifié, très contrôlé, un suivi mécanique est réalisé toutes les 50 heures de vol ». Classe de l'espace aérien non communiqué... « En espace aérien non contrôlé (NdA : G) il est possible de voler à vue sous l’altitude de 3 000 pieds sans qu’un espacement soit défini par rapport aux nuages, avec une visibilité minimale de 1 500 m, à 140 Noeuds au maximum, mais dans des circonstances où la probabilité de rencontrer d’autres aéronefs serait normalement faible ».
Le vol proche du sol augmente le risque d'une collision avec le relief, antenne, pylône, arbres, aéronef, etc. Les conditions météorologiques s'y dégradent rapidement et les turbulences affectent la stabilité de l'appareil. Le vol à basse altitude nécessite une concentration maximale et une bonne acuité visuelle d'autant plus que l'appareil possède de nombreux angles morts ! En montée une partie de l’espace devant l'appareil est masquée, et pendant un virage l’aile basse cache un secteur à l’intérieur de celui-ci. Un avion à ailes hautes peut ne pas apercevoir un appareil volant au-dessus, et un appareil à ailes basses celui en dessous de lui. Les risques sont accrus à proximité des aérodromes le W.E, en période touristique et sous 3 000 ft. La durée pour interpréter la situation et réagir prend plusieurs secondes. La proximité du sol peut venir restreindre une manœuvre d'évitement, d'ajouter la faible réactivité des appareils de tourisme. Quelques caractéristiques, par exemple, du Cessna 182S monomoteur quatre places et un pilote : masse maximale 1410 kg - vitesse de croisière au niveau de la mer 145 nœuds - taux de montée maximal 924 pieds/minute - plafond pratique 18 100 pieds (5 517 m) - capacité utile 88 gallons (333 litres) - consommation 0 à 15 GPH.
Qu'il s'agisse d'un incident, accident, abordage, collision, atterrissage périlleux, amérissage ou d'une disparition tous font l'objet d'une enquête afin d'en identifier les causes. Le 5 décembre 1945 cinq bombardiers torpilleurs Avenger de l'USN décollent de Fort Lauderdale (Floride) à 14 h 10 pour un exercice de navigation et de bombardement, durée prévue, trois heures. Après avoir atteint leur objectif, l'escadrille 19 doit voler plein est sur 67 miles, virer au nord sur 73 miles et revenir à son point de départ (le vol représentait un triangle). Les relèvements radar situent le groupe de bombardiers au nord des Bahamas et à l’est de la côte de la Floride avant de disparaître des écrans. Un avion de recherche et de sauvetage Mariner décolle à 19 h 27 avec un équipage de 13 personnes. A 19 h 50 un pétrolier signale une explosion au large de la Floride.
Au mois d'août 1964 le magazine Argosy publie un article sur la disparition de l’escadrille 19 et du Mariner. Le « triangle des Bermudes » va constituer la légende éponyme. D’après un rapport militaire, cette disparition n’aurait rien de mystérieux, le commandant d’escadrille aurait confondu les îles des Keys avec celles des Bahamas. Les avions auraient volé dans des conditions météorologiques difficiles jusqu'à épuisement des réservoirs et ne trouvant pas la piste d’atterrissage, auraient été contraints à un amerrissage. Les appareils, 4 600 kilos, reposent très probablement par le fond. D'après les statistiques des gardes-côtes américains : 56 % des signalements sont imputables à des erreurs humaines - 17 % à des avaries - 15 % aux conditions météo - 4 % une mauvaise maintenance - 4 % aux tours de contrôle. Une correction, une précision, une remarque ?
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