Zemmour Vichy, excuses des gauches nécessaires mais pas suffisantes
Pourquoi des juifs, mais pas les Tziganes ? Pourquoi les rouages intimes de notre Etat, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, à gauche. Parfois pas du tout. Mais toujours républicains, en sont-ils arrivé à livrer implicitement et parfois explicitement des juifs et des juifs français, au moment où ils sauvaient tziganes et maçons ?
Je n’ai pas lu le livre de Zemmour. Il se dit dans la presse, qu’il y insisterait sur certains mérites de Vichy concernant les juifs en France, pendant l’occupation. L’expérience suggère que les commentateurs de gauche se sont sans doute rués avec enthousiasme sur un « détail » du livre, relatant la complexité de cette période. Le but ? Assez traditionnel dans ces milieux : leur permettre d’unir ce journaliste, parce qu’ils ne l’aiment pas, à l’opprobre tenace, mais surtout très significative en laquelle ils tiennent cette période (sombre ! Est-il besoin de le rappeler) de notre histoire.
Si Zemour affirme que le régime de Vichy et la France, n’ont pas exclusivement à rougir de leurs comportements pendant l’occupation, notamment vis à vis des juifs, à mon avis, il se montre aussi rapide que ses adversaires. Parce que oui, il y a eu de tout et du reste à l’époque. Oui, tout n’est peut-être pas à jeter. Oui, les chiffres en font foi, ni la France ni même Vichy n’ont été massivement, idéologiquement et activement antisémites.
Il est vrai aussi que tous n’ont pas été a même enseigne et que certains sont plus responsables (coupables ?) que d’autres des vrais crimes qui furent vraiment perpétrés. Si la frontière ne passe pas entre Vichy et non Vichy. Elle existe quand même. Si Mitterrand a eu la francisque en étant résistant, il n’y a pas de collaboration sans Vichy et pas de Vichy sans l’administration de l’Etat. De notre Etat, de nos administrations, de nos fonctionnaires.
Il y a donc une vraie responsabilité, française, dans les horreurs des persécutions de l’époque qui nous concerne tous comme héritiers de nos grands-parents. Certains restent quand même plus concernés que d’autres...
Les réponses restent largement à donner. De préférence par des historiens, ce que je ne suis pas.
Mais la question est là, lancinante : collectivement, notre administration d’Etat, républicaine, incarnant physiquement nos valeurs républicaines, en tendance à gauche, non imposée, elle, par l’occupant, même si ce n’est qu’à la marge, a fait des choix entre français.
A peu près toutes les composantes de la société française ont battu leur coulpe au sujet de Vichy. On est sortit du mythe gaullien, « Vichy, ce n’était pas la France ». Il est significatif que l’héritier politique de l’homme qui le premier et le plus radicalement ait refusé ce régime, soit aussi le premier chef d’état à l’avoir reconnu. Mais il en reste une qui s’obstine à se regarder dans le miroir sans se reconnaitre.
Or, au delà du devoir de mémoire, le mystère de la participation de l’appareil d’Etat aux déportations, présente, on le verra, des enjeux parfaitement contemporains.
Pour en finir définitivement avec Vichy, il faut dire aux gauches que nous ne leur en voulons pas. Il faudrait aussi, dans l’idéal, qu'elles présentent des excuses pour Vichy. C’est nécessaire. Ce n’est pas suffisant. Au moins qu’elles fassent un effort de mémoire. Pas pour nous. Pour elles mêmes et pour les victimes de certains de leurs prédécesseurs directs. Pour notre avenir commun aussi. Qu’est-ce que qui a foiré, en pratique, dans leurs "grandes valeurs de gauche" mais également, malheureusement, dans nos grands principes républicains.
Parce que Vichy, c’est une histoire française bien sur, mais c’est un problème de « gauches » avant tout. Surtout, paradoxalement, aujourd’hui. Or, notre gauche en France, est une partie de notre pays, de notre histoire. On ne saurait l’exclure du destin national. Oui, à plus d’un titre, Vichy, ce fut notre Etat, et, nos administrations, donc, d’abord, nos gauches. Mais cela ne nous dédouane pas collectivement. Ou alors ce serait soi même être à gauche et considérer qu’il y a plusieurs catégories de citoyen dans ce pays.
Les gauches « républicaines »
Passons sur le rôle du PCF. Moins indépendant des soviétiques que Vichy des allemands. Beaucoup de militants ont eu raison contre leur partis à chacune des étapes des ses palinodies en matière de collaboration. Mais on ne peut pas porter de jugement objectif sur les comportements de gens qui n’étaient que peu libres de choisir. On sait que des résistants communistes de la première heure ont été sanctionnés, voire éliminés pour avoir résisté sans ordre (voir le film « Mémoire d’ex. »). Si les parlementaires communistes furent exclus avant le vote de la confiance au Maréchal, c’est bien parce que la position officielle de la filiale française du PCUS souhaitait aller beaucoup plus loin dans la collaboration... Vous me direz, individuellement, ils étaient au moins aussi libres que les fonctionnaires sous Vichy ? Je vous répondrai que c’est vrai...Mais à l’époque cela aurait été faire injure à ce parti révolutionnaire, de le traiter de républicain. Pour le meilleur et le pire, le PC est un peu hors jeu.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_Parti_communiste_fran%C3%A7ais#Septembre_39_-_Juin_40_:_De_la_dissolution_du_Parti_.C3.A0_l.27entr.C3.A9e_des_Allemands_dans_Paris
Gauche et pouvoir à Vichy Un « Gouvernement de rencontre » ou on ne rencontre pas n’importe qui.
Étape un : on ouvre la liste des ministres de Vichy, et on regarde, un par un, d'où ils viennent. http://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9gorie:Ministre_du_R%C3%A9gime_de_Vichy Un peu long et fastidieux, mais concluant. Vichy est un régime issu largement des gauches républicaines troisième république. A part quelques exécuteurs de basses œuvres, ils viennent à peu près tous des radicaux, des socialistes et des communistes. « Cœur des vierges effarouchées : Ah ouai, mais, « en fait », ils l’étaient plus, ou faussement, ou pas vraiment et de toute façon, cela ne prouve rien ! » Pourquoi pas. Passons. Parce que la question d’un pouvoir politique, quand il est sous la coupe d’un occupant, peut prêter à toutes les interprétations. Parce que ce n’est pas d’une actualité brulante.
Parce qu’ici aussi, si on résume ce régime à Pétain, comme le font nos médias, c’est bien surtout pour ne pas parler de ce qu’il y avait derrière. En 1940, quand il prononce ces fameux discours écrits par Emmanuel Berl, http://fr.wikipedia.org/wiki/Emmanuel_Berl, il a 84 ans...Cela c’est plutôt aggravé par la suite...Il faut relire les propos du Général de Gaulle. « La vieillesse est un naufrage et celle du Maréchal a malheureusement coïncidé avec celui de la France ». Parler de celle là permet surtout d’éviter de se pencher sur celui-ci.
Etat et Vichysme : La vraie « divine surprise ».
Étape deux : on ouvre les actes du colloque sur la fonction publique pendant l'occupation. On découvre qu'en pratique, plus encore qu'un pouvoir d'ex hommes de gauche, ce fut un pouvoir de fonctionnaires. Et là, on est à encore plus de gauche en proportion. Et on parle de grands corps de la nation qui existent encore ici et maintenant.
http://www.histoire-politique.fr/index.php?numero=02&rub=pistes&item=6
Le régime leur permettait d'accomplir toutes leurs aspirations. Plus d'élus pour les embêter, une grande liberté d'action, énormément de moyens (face à des besoins énormes on a jamais autant recruté, + 26% ! (Comme aujourd’hui embaucher un million de fonctionnaires du jour au lendemain au lieu de 60 000 en 5 ans !). Le tout pour le pire, mais aussi, parfois, le meilleur. Dans de nombreux domaines, les administrations en ont profité pour réaliser des réformes de bon sens que la politique interdisait auparavant.
Il y eut des réussites spectaculaires voire exemplaires.
Fonctionnaires et autres technocrates publics, ont par exemple réussi un taux de substitution des énergies fossiles, trustées par les allemands, par des « renouvelables » (gaz de fumier, distillation de sciure de bois etc.... Royal, Dufflot et même Hulot se reposent, comme on dit en Russe...
Dans de très nombreuses administrations il n'y a encore pas si longtemps, on découvrait avec surprise dans les statuts, à quel point Vichy fut réformateur (de mémoire par exemple l'enseignement vétérinaire). On peut voir dans le lien ci-dessus comment, Vichy, va au devant des revendications syndicales historiques des polices. Sans doute - certainement - par démagogie et pour s’assurer de leur soutien, peut-être, parce que le pouvoir n’était pas en état de s’opposer aux revendications, mais aussi parce qu’il n’y avait pas que du mauvais dans ces réformes.
Il y a sans doute là un des enseignements les plus positifs de Vichy.
Notre fonction publique, mobilisée face à l’urgence, est capable aussi du meilleur. Elle a fait face à des défis quasi insurmontables (alimentation, énergies, réfugiés, etc..). Elle a fait face assez largement seule. Un peu livrée à elle même. Nous savons que nous pouvons compter sur elle. Quel potentiel pour de vraies réformes dans notre pays, avec un cap fixés par des élus démocratique, veillant à éviter les écueils du corporatisme !
Il y eut aussi mesquineries et compromissions.
7000 fonctionnaires révoqués par Vichy en tout et pour tout (de mémoire)...Dont pas 1000 pour maçonnerie, et parmi eux, beaucoup parce que Juifs.... Dans un public d'instit. déjà à l'époque massivement à gauche, cela signifie pour résumer, qu'ils ont pour la plupart fait chanter « Maréchal nous voilà à leurs élèves » sans trop d'état d'âme... Qu’ils ont été de bons rouages du système. Il ne faut pas oublier, pour ne pas tomber dans le manichéisme, que c’était leur vocation et leur habitude. Que dans la société civile aussi, les héros n’ont pas été une majorité. Dans le camp de réfugiés ouvert de façon acrobatique, pour les tziganes expulsés d’Alsace par l'occupant, à Argeles, une des principales difficultés, l'absence d'école, fut liée au fait que les agents de l'éducation nationale, refusaient de travailler dans ces conditions peu syndicales. Il a fallu trouver un Curé volontaire...
Mais enfin, globalement, pour eux, professionnellement s’entend, vraiment, ce fut la "divine surprise". Y compris sur le plan purement humain. Il faut bien voir que le fonctionnaire doit être super populaire, quand c'est lui qui accorde les tickets de rationnement ou les Ausweis, grâce à sa « collaboration » peut être forcée mais quotidienne avec l’occupant. Ils ont du en recevoir du Monsieur, Madame. Et moins d'usagers insatisfaits que dans les bureaux des impôts aujourd'hui.
Conclusions 1 ? Ces fonctionnaires, comme la France, étaient fondamentalement républicains. Et si notre fonction publique est la colonne vertébrale, ses personnels sont la moelle épinière. Ce sont eux qui ont fait de la collaboration ce qu'elle a pu être, à nouveau, pour le meilleur et pour le pire, en l'absence à peu prêt totale de tout autre corps intermédiaires ou société civile ou politique organisés et visible.
Il faut le souligner. Ok, il y a les églises, quelques résistant, une structure clandestine des trotskistes, des communistes et autres partis. Mais tous cela est largement marginal. Existe peu et ne pèse presque pas (hors églises bien sur). Ne peuvent agir vraiment que les administrations. En pratique, elles ont plus de pouvoir qu'elles n'en n’ont jamais eu.
Vichy a peu de réelle base sociale. Tout le monde est plus ou moins d’accord pour subir, mais il n’y a plus vraiment de corps intermédiaires, d’associations légales, de partis reconnus officiels, libres. Qui pourrait vraiment organiser une action collective ? Vichy a peu de relais pour diffuser sa pensée ou imposer ses volontés politiques, en particulier à l’administration. Il faut imaginer une petite bande de gens dans des hôtels de cure à Vichy, recrutés à la va vite, alors qu’une masse d’homme est en captivité. C’est même physiquement que le régime n’a sans doute pas les moyens administratifs de ses ambitions.
Témoin ? L’ascension fulgurante du jeune Mitterrand alors que la troisième république voyait le triomphe des vieux dans une société vieille, notamment en raison de nos réalités démographique et des tueries de la grande guerre. Soit dit en passant, c’est peut être aussi grâce à cela que certaines décisions peuvent être prises vite et bien...
On le voit particulièrement avec les forces de l’ordre. Confrontées à des ordres, des textes précis, elles arrêtent peu de « frères », pas de Tziganes, un peu plus de communistes (mais ils sont souvent eux aussi étrangers anti républicains ou ressentis comme tels), et quand même, pas mal de juifs étrangers et français.
La création de la milice, avec les détachements spéciaux (10% des effectifs de la police voués à la lutte « idéologique »), à elle seule, suggère que le régime n’est pas enthousiasmé par la docilité des administrations en général et de la police en particulier. Si la police mettait en œuvre la politique, quel besoin d’une police politique ?
L’engagement individuel ou collectif des français en faveur des persécutés est au final assez massif.
On le voit dans les proportions de survivants par rapport à d’autres pays sous domination allemande. Souvent, il est permis, facilité, par les administrations, par certains éléments de leurs personnels. Ainsi, oui, au Chambon-sur-Lignon, le Pasteur Trocmet et la population locale, ont sauvé des tas de gens, mais c'est aussi parce que des fonctionnaires téléphonaient à l'avance pour prévenir des descentes. Et chez ma grand-mère, dans un village de 1000 habitants, le contrôle de l'approvisionnement faisait semblant de croire aux « suicides de moutons ». (On avait le droit de manger les bêtes mortes par accident), permettant aussi de nourrir les juifs allemands logés à la maison. Et tu parles que personne n'était au courant...en particulier les services publics.
Il y a une spécificité protestante dans la résistance et l’aide aux persécutés. Mais elle est double. Un héritage culturel et historique, oui. Mais aussi l’existence d’une organisation collective structurée qui survit à l’occupation. Un groupe humain organisé, de gens qui se connaissent souvent et qui peuvent avoir confiance les uns dans les autres. En qui peut on avoir confiance quand tout fout le camp ? Cela facilite grandement les choses. Ma grand-mère est comme les gens de sa génération et de son milieu. Elle appelle un juif un youpin. Quand son cousin pasteur lui dit « Odette tu vas cacher ces juifs allemands », elle le fait, parce que c’est conforme aux évangiles, mais aussi parce qu’elle a confiance et qu’il y a une autorité légitime pour lui dire quoi faire. Le Pasteur Boegner le président des protestants, a appelé tout le monde aux fourneaux. Cela n’enlève pas tout mérite. C’est quand même à tous égard plus facile de faire « le bon choix ». C’est pour les mêmes raisons que l’église catholique a été si active, même si, parce que plus universelle, elle a pu être plus traversée par les contradictions de la société française de l’époque.
Mais le grand corps constitué qui a survécut et a même embelli, peut être le seul, celui dont tant le pouvoir que l’occupant ont réellement besoin et de ce fait à certaines latitudes, ce sont les administrations.
Conclusion 2 ? Elles avaient aussi leurs priorités : Elles n’ont, en France, pas touché du tout ou presque aux Francs Macs et aux Tziganes, également réclamés par les allemands. Pour les juifs, en particulier étrangers, elles n'ont pas mis autant de bâtons dans les roues.
Pour les nationaux socialistes, on peut dire que maçons et tziganes sont un peu des juifs comme les autres. Moins pour l’administration française.
Un régime « d’extrême droite » indulgent avec les Maçons ?
Malgré leur adhésion aux thèses fascistes, les loges allemandes n’ont pas été épargnées. Elles allèrent pourtant, dans la complaisance, jusqu’à exclure les non aryens !
http://lamaconne.over-blog.com/la-franc-ma%C3%A7onnerie-en-allemagne
On peut aussi consulter leur lettre d’allégeance, en France, au Maréchal. Dégoulinant ? Oui, mais, « il faut tenir compte des circonstances. » Certains historiens estiment à entre 80 et 200 000 le nombre de maçons victimes des nazis en Europe. En France, on parle d’environ 500 fusillés ou morts en déportation sur une trentaine de milliers de membres. Essentiellement et d’abord, parce que juifs ou résistants aux dires de leurs propres instances. Et ce n’est pas faute d’avoir trouvé des relais au plus haut niveau de l’Etat français, voire dans une partie de là population. L’exposition dénonçant les maçons eut, paraît-il, autant de succès que celle sur les juifs...
Si Vichy avait été ce repaire de l’action française et autres droites « traditionnelles » qu’on nous présente parfois, comment expliquer ce peu d’intérêt de ses plus hautes autorités, sur une question qui mobilisait grandement les « extrêmes droites » avant guerre ?
Le 11 août 1941, Vichy adopte une loi concernant les frères, qui revient sensiblement à leur attribuer le statut des juifs. Les résultats sont loin d’être les mêmes. J’invite le lecteur à chercher les résultats, trop différenciés, des commissions chargées des « exceptions » (« bons juifs » ou « bons maçons », par exemple ayant été héroïques pendant la grande guerre).
Un régime de gauche qui aime les Roms avant l’heure ?
En ce qui concerne les Tziganes, c’est encore plus glorieux, plus paradoxal, et plus dérangeant. Il existe un véritable racisme anti-tzigane d’Etat et de gauche, matérialisé par les textes du Front Populaire et bien dans la tradition de ceux pris par Clémenceau. On pense notamment aux conséquences du décret du 12 novembre 1938 pris sous la législature du front populaire sur proposition de Daladier, ancien ministre de Blum. Il fût tellement discriminatoire pour les « nomades », qu’on en parle dans les livres d’histoires comme annonciateur de Vichy.... !
Malgré ce sinistre précédent la France est le seul pays occupé d’Europe de l’Ouest où "l’Auschwitz Erlass" du 16 décembre 1942 ordonnant la déportation des Tsiganes à Auschwitz ne fut pas appliqué.
http://memorial-wlc.recette.lbn.fr/..., http://centri.univr.it/resistenza/i...
Pour plus de détails : voir article et commentaires http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bobos-par-pitie-cessez-votre-80132
Il suffit de lire ces textes scandaleux et racistes pris par le Front Populaire contre les tziganes, pour comprendre qu'en refusant de les livrer, Vichy défendait des "français" et pas des tziganes. Qu'ils n'étaient sans doute pas plus "aimés" en tant que tziganes que les juifs en tant que juifs.
Vent debout pour défendre les tziganes, mou dans la recherche des francs maçons, le régime et la société française n’ont pas été aussi récalcitrant concernant les juifs. Pourquoi ?
Il n'est même pas sur que cela relève principalement du vague antisémitisme de fond qui caractérise alors des pans entiers de la population, toutes opinions politiques confondues. Une petite musique et pas une obsession. Un discours, qui ne se transmute que rarement en actes avant guerre.
Les administrations françaises sacrifient d’abord à l'occupant, des gens qui sont sans doute, pour elles, très largement, des étrangers avant d'être des juifs (deux tiers étrangers un tiers français, et au vu des statistiques, on devine que les naturalisés récents ont du être aux premières loges ?
http://fr.wikipedia.org/wiki/Collaboration_polici%C3%A8re_sous_le_r%C3%A9gime_de_Vichy .
Peut être. Ce ne serait pas très joli. Pas totalement incompréhensible non plus.
Juridiquement, ces étrangers relèvent de pays en général administrés par l’Allemagne occupante. Un juif allemand, aux yeux d’un fonctionnaire français, c’est aussi un allemand qui relève de son droit propre.
Les fonctionnaires largement à gauche à l'époque (sic) étaient sans doute dans bien des cas, des « Le Penistes » avant l'heure. "Ma cousine avant ma voisine". Avec vraisemblablement très peu de motivations racistes, puisqu'il étaient eux même issus d'une société peu portée au racisme. Si je comprends bien, ce serait un peu la thèse de Zemmour. J’imagine qu’on peut la défendre.
Il est vrai qu’on est « dans l’épaisseur du trait ». Les historiens débâtent sur les chiffres. 90 ? 92 ? 98% des juifs français « sauvés » pendant Vichy ?
N’empêche ! Pour qui connaît la police et l’administration, il n’est pas étonnant que la lutte anti maçonne n’ait pas provoqué beaucoup de vocations. Et c’est un euphémisme bien sur... Ce n’est pas parce que les administrations n’ont pas livré les « frères » qu’elles sont collectivement responsables des crimes de Vichy. C’est parce qu’elles se sont refusées, avec succès, à livrer les Tziganes. Pas les juifs ! Et tout particulièrement pas des juifs français. Ce n’était pas, on l’a vu du fait d’une sympathie particulière pour ces populations, au contraire. Pourquoi ? Pas de surreprésentation Tzigane dans les administrations, de richesse excessive supposée, de raisons religieuses ou culturelles ?
Il y a un vrai mystère dans ce choix différencié, au minimum implicite, de nos administrations et fonctionnaires. Il touche sans doute au tréfonds de l’âme de gauche et de l’esprit républicain.
Pourquoi les juifs et pas les tziganes ? Parce que c’est aussi une religion ? Parce qu’ils étaient réputés être des « riches » ? De la comparaison avec les tziganes, on serait porté à le croire. Difficile de conclure. Il ya là à l’évidence un vaste champ d’investigation pour les historiens et les politologues d’aujourd’hui.
Car ici, il y a des enjeux plus contemporains que la culpabilité personnelle de « l’illustre vieillard ».
Qui dira la place d’un sentiment de culpabilité dans les positions ouvertement favorable à l’islam d’une partie des gauches laïques fonctionnarisées aujourd’hui ? Le fait religieux juif a peut être été déterminant. Ont ils peur de commettre la même erreur ? Car aujourd’hui encore, « ils », « n’aiment pas les riches ». De même du grand écart entre lutte contre l’antisémitisme, antisionisme, jugement d’Israël, qui sont sujets de perpétuels débats houleux au sein des gauches, dans des conditions d’un irrationnel extrême.
Il est un peu pénible, de devoir entrer dans les petites boites dans lesquelles nos administrations rangent avec soin leurs administrés, hier comme aujourd’hui. On aurait envie de dire avec Jean Ferrat, que dans les trains, au fond, peu importe qui priait qui, ou la date d’ancienneté des naturalisations. Famille franco-russe, je suis régulièrement confronté à cette question des étuis bureaucratiques. Très souvent, tu es livré à un certain arbitraire administratif. Le préposé doit choisir dans laquelle il te range. Il y a heureusement a peu prêt autant de gens de bonne volonté que de foutraques braqués ou très idéologisés, prêt à ignorer même les textes en vigueur. Je ne suis pas sur d’avoir très envie de faire des distinguos entre le déporté par ce que non français et le déporté bien que français, à « culpabilité égale ». Le simple fait d’être juif.
Malheureusement, évaluer ce que fût Vichy nous contraint à cet exercice. Et pas seulement d’un point de vue historique. Mais parce que cela pose la question de l’humain dans les bureaucraties, même et surtout très progressistes, et qu’elle reste très actuelle. Au fond, quand on parle « gens du voyage, roms, tziganes, nomades sédentaires, carte scolaire », avant de parler des principes de la lois républicaine, du genre, tu ne t’installe pas sur le terrain du copain, ou tu peux aller à l’école, même si tu ne rentre pas complètement dans la boite, on reste dans ces problématiques très contemporaines.
L'âge aidant, il n'est pas sur non plus qu'il reste beaucoup de héros pour jeter la première pierre à ces fonctionnaires qui n'ont pas tous été héroïques mais qui étaient parfois placés devant des choix pas évidents.
Il n'empêche. Si ils avaient protégé les juifs étrangers et surtout les français juifs comme les français francs maçons et les français tziganes, il est vraisemblable que beaucoup plus de vies encore auraient été sauvées.
Comme le dit l’historien anglais Trevor Rooper dans son livre sur l’Europe à l’époque d’Erasme, dans la partie concernant l’expulsion des juifs et musulmans en Espagne, « ce sont les peuples qui exigent les persécutions, mais ce sont biens les dirigeants et leurs administrations qui les rendent possibles ».
Vichy c’est nous
Le régime de Vichy a vraisemblablement été à tous les niveaux, à l’image de la France. Pas très chaud pour persécuter dans l’ensemble. Mais du haut en bas de la pyramide de l’Etat, il s’est trouvé quand même des gens pour mettre en œuvre, de façon sélective, la politique voulue par l’occupant et par au moins une partie de la société. Il y a eu des français pour dénoncer des français. Il n’en reste pas moins que ceux qui sont aux commandes comme ceux qui mettent en œuvre, ont des responsabilités particulières. Le salaud qui écrit une lettre est un salaud. Le préposé qui prend le temps de la lire, de la faire suivre à sa hiérarchie, pour mise en œuvre, aussi. Le premier est un anonyme et on ne peut que lui souhaiter d’avoir pu le rester. Le second appartient à une institution qui ne peut fonctionner que si chacun de ses membres y met un peu du sien. Elle ne l’a pas fait également dans tous les cas. Il participe d’une responsabilité institutionnelle, au delà de sa responsabilité personnelle, individuelle.
Il faut être particulièrement clair. On n’a pas le droit, surtout rétrospectivement, et derrière le confort de son écran d’ordinateur, d’exiger des fonctionnaires de l’époque qu’ils aient toujours été des héros. Ce furent des français comme les autres. Il est difficile de leur parler de devoir de désobéissance en général, parce qu’ils sont formés à l’obéissance. Il est absurde d’invoquer une responsabilité individuelle ou collective, d’un aiguilleur qui a manœuvré un levier au mauvais moment pour un mauvais train. N’empêche : globalement, collectivement, nos administrations ont fait des choix et vaille que vaille, les ont mis en œuvre.
Dans le « Film Paris brule-t-il », il est un passage qui est trop beau pour ne pas être vrai. Belmondo est envoyé par le CNR pour prendre Matignon, « défendu par une cohorte de forces de l’ordre fidèles jusqu’à la mort au président du conseil Vichyste ». Il débarque avec sa copine, l’officier se met au garde à vous : « A vos ordre monsieur le ministre ! »
Toute l’ambigüité de la période. Obéir au pouvoir politique ? Lequel ? Quelle légitimité ? Un jour pour défendre Laval, le lendemain condamner les malgré-nous en Alsace.
On ne doit sans doute pas non plus sous-estimer le fait qu’à gauche, avant guerre, l’immigré, c’est « un allié objectif du capitalisme pesant sur les salaires des travailleurs ». Les gauches sont globalement très hostiles aux migrants. A l’époque, déjà, les fonctionnaires bénéficient de la préférence nationale et cela peut expliquer que côtoyant peu d’étrangers au quotidien, ils se sentent plus concernés par les problèmes administratifs qu’ils posent que par ceux qu’ils éprouvent au quotidien, que les éléments de la population qui les côtoyaient au jour le jour. Un peu comme aujourd’hui. Il y a mille explications, 10 000 excuses.
Il n’en reste pas moins vrai que les administrations françaises, au moment d’obéir à Vichy ont eu leur propre interprétation des réponses à ces questions. Trop souvent, la réponse fut, « les francs mac non, les juifs, si possible étrangers, à la rigueur ». Et elles ont obtenu des résultats dans les deux cas.
Il y eu certainement au moins autant de résistants dans la fonction publique que dans le reste de la population. Peut être plus pour diverses raisons. Entre autre, aussi, il faut le dire, parce que plus idéologisés, plus « à gauche », il y a avait peut être plus de gens résolument hostiles à l’idéologie concurrente du national socialisme. Surtout après le ralliement du PC ; Celui ci, en effet et contrairement à sa légende dorée, a toujours été largement, comme les autres partis de gauche, un parti de fonctionnaires. Il n’en reste pas moins qu’elle a suivit, peut-être sans grand enthousiasme, mais suivit quand même la politique de Vichy, ce qu’on ne peut pas entièrement lui reprocher vu le contexte, mais en faisant ses propres choix, dans les limites de ses degrés de liberté. Ici, elle a une vraie, une réelle responsabilité.
Dabs un article précédent, je m’interrogeai. Le pouvoir politique n’a-t-il pas tendance à paralyser les administrations par peur de ce passé ? http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/ratonnade-a-marseille-123434 A ce stade, on peut se demander l’inverse. Si il n’existe pas une réticence des administrations elles même à remettre les doigts dans ce genre d’engrenages ? Il n’est pas exclu que ces souvenirs soient un facteur de paralysie et d’irresponsabilité pour les uns et les autres. Le tout renforcé par l’obsession des gauches pour cette période. Avoir failli un temps à la République aurait des conséquences aujourd’hui. Le principal enseignement serati qu'il vaut mieux n'être jamais responsable de rien et s'en tenir aux textes. Un devoir de passivité au nom d'un devoir de désobéissance ?
Si on est responsable mais pas coupable, alors, il faut qu’un « autre le soit ».
La haine obsidionale et parfaitement irrationnelle qu'il est de bon ton d'afficher à gauche au sujet de la période Vichy, la tendance à passer son temps à ramener tout adversaire politique à cette période, ne peut se comprendre sans envisager une certaine culpabilité, consciente ou non, de partis qui sont pour l'essentiel composés de fonctionnaires et ne veulent pas regarder leur passé en face.
Une preuve au passage ? Ces gens ont accusé de Gaulle en son temps de Vichysme... ! Et ce n’est pas finit ! Zemmour est traité de Gaullo-vichyste ! C’est donc bien, pour eux, une qualification morale et non un jugement historique.
C’est aussi un aveu ! Si on retire de la période les gaullistes et les vichystes, voués, au final, à une même réprobation, on rejette tous ceux qui ont eu une position, un engagement clair pendant la guerre. Y compris les communistes. Malgré les relations ambiguës du parti avec le Général, les résistants et l’électorat communistes, eux, s’y sont moins trompé.
D’où nous parlent ceux qui renvoient ainsi tous le monde dos à dos ? Ce sont peut être bien, effectivement, les héritiers de ceux, innombrables qui n’avaient pas trop envie de choisir, de s’engager, de prendre des risques, de décider si un juif vaut un français un tzigane ou un franc mac, mais qui en tendance, on été dans le sens de la plus grande pente.
« Vichy, c’est mal parce que cela nous a obligé à livrer les juifs, mais De Gaulle ce n’est guère mieux parce qu’il a prouvé que d’autres choix étaient possibles » ?
C'est, pour eux, la pire injure, parce qu'elle pèse sur leur conscience. L'homme de droite en général, ne répond pas. Il ne se sent pas concerné. Les têtes de la France libre, c’est quand même une collection d’officiers supérieurs catho, nationalistes et républicains intransigeants jusqu’à la désobéissance. Il ne répond pas parce qu’il ne se sent pas concerné. Parce qu’aussi, il ne comprend pas à quel point c'est douloureux dans « l’inconscient collectif de gauche ».
Les droites françaises qui ont déjà fait leur mea culpa, doivent désormais aussi pardonner et les gauches républicaines se repentir
Dans le cadre du devoir de mémoire de la réconciliation nationale, il est temps que les droites leurs disent avec franchise et compassion : oui, en tendance, nos grand père étaient à Londres ou cachaient des juifs, quand les vôtres recevaient des francisques ou assuraient l'acheminement des trains. Oui, tous les français n’ont pas été exemplaires, et certains l’ont été moins que d’autres. Oui, les responsabilité de l’Etat français dans les déportation des juifs suffisent à qualifier moralement ce régime, quelles que soit les excuses que l’on puisse lui trouver. Mais : ce n'est pas votre faute à vous (Jospin n'avait pas à payer les engagement de son père par exemple. C’est peut-être parce que le premier était collabo, que le second se crut obligé d’être trotskiste), ce n'était pas toujours leur faute à eux non plus.
C’est notre responsabilité commune. C’est notre histoire. Il faut en commun, en tirer les enseignements.
Aucune collaboration n'aurait été possible sans les fonctionnaires. Beaucoup d’actes de résistance non plus. Beaucoup ont fait ce qu'ils ont pu. Les excès des autres doivent nous inciter à rappeler les risques d'une fonction publique livrée à elle même et sans vrai contrôle politique. Pas à les juger et rejuger sans arrêt, ou à condamner l'ensemble du reste de la population pour des erreurs qui furent, aussi, d'abord peut-être, les leurs.
Aujourd'hui, des excuses symboliques de leurs héritiers, les syndicats de la fonction publiques, les partis de la gauche non communiste, devraient être nécessaires pour aller de l’avant.
Elles doivent s'accompagner d'une prise de conscience à droite. Ce n'est pas en vain, ou par seul tactique, que ces gens voient du Vichysme partout, c'est le reflet d'une réelle souffrance.
Parce que Vichy pour l’essentiel, si ce n'était eux, c'étaient au moins leurs frères, ou pour plus de réalisme, disons, leurs grands parents....
Aujourd’hui, il existe un relatif consensus national pour considérer que Vichy, ce fut un régime français, et en particulier dans ses rouages les plus administratifs. Eux, ne furent pas imposés par l’occupant. Un régime pas tellement à l’honneur de la France quelles que soient les circonstances atténuantes que l’on puisse lui trouver. Sa participation réelle aux déportations est un vrai crime. Il n’y a qu’une portion de la sociologie, de l’histoire de notre pays, qui se refuse absolument obstinément, pathologiquement, à faire son propre bilan et fait mine de penser que Vichy, c’est toujours les autres.
Seule une vraie analyse historique et une repentance sincère lui permettra de se réconcilier, avec son histoire, avec nous tous et donc, avec elle même.
Nous devrons alors faire face, tous ensemble, à la question suivante. Ils étaient quoi les fonctionnaires ? 70% à gauche comme aujourd’hui et plus dans leurs organisations « représentatives » ? Peut-être. Ils étaient certainement à près de 100% républicains et pénétrés des valeurs de la république. Comme aujourd’hui.
A un moment crucial, c’est bien la République elle même, qui a fait des choix entre « les sauvés et les noyés », pour paraphraser Primo Levy. Nous quoi !
A titre personnel, il me semble que c’est une question importante qui mériterait qu’on en discute sérieusement. J’étais parti pour me faire plaisir avec une envolée « Zemmourienne ». « C’est celui qui l’dit qu’y l’est ! Il est vrai que nos gauches nous invitent plus qu’à leur tour à ces débats du niveau cour de récréation. Ils étaient à gauche, ces fonctionnaires aux ordres de Vichy. Un peu, beaucoup, passionnément à la folie. C’est en cours de route que m’est venu la question. Parfois aussi pas du tout. Mais, oui, sans doute, ils étaient tous républicains. Peut(on se réfugier dans « l’épaisseur du trait » (92% de « saved ») ? Dans le contexte historique ? Pour éviter de se poser des questions qui restent pertinentes aujourd’hui ??
Maintenant, si il y a des lecteurs, plus férus d’histoire que moi, qui ont des éléments probants pour me démontrer que Vichy serait un truc qui nous serait complètement étranger, ou limité à une toute petite quantité de vrais « méchants », et que de toute façon, c’est un passé qui ne concerne plus personne, je suis évidemment preneur.
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