Du rêve à la réalité : le despotisme ruineux de la grande vitesse ferroviaire !
L’expérience contractuelle entre la SNCF et les Régions Centre et Limousin, du TGV Brive Limoges commencée le 9 décembre 2007 pour une durée de trois ans arrive à l’heure des comptes.
La SNCF serait prête à poursuivre l’expérience mais en actualisant les financements des Régions qui passeraient de 1 Million € à 3,5 Millions € par an chacune.
Prendre le temps de la réflexion pour sortir la politique des transports ferroviaires du despotisme ruineux de la grande vitesse n’est pas du temps perdu !
Depuis le 9 décembre 2007 un TGV circule tous les jours sur la ligne POLT pour relier Brive à Lille dans les deux sens. Le mercredi 28 novembre 2007, à bord du TGV inaugural, une convention était signée entre les régions Centre, Limousin et la SNCF pour établir les participations financières de chacun des partenaires (1 million d’euros par an pour chaque région concernée et 3 millions par an pour la SNCF). Cette expérience était prévue pour trois ans avec l’objectif de dépasser les 200 voyageurs par TGV pour que la relation puisse être maintenue, soit 146 000 voyageurs par an.
TGV aller : Brive 6h33, Limoges 7h38, La Souterraine 8h13. Juvisy 10h41, Marne-la-Vallée 11h17, Roissy Aéroport 11h31, Lille-Europe à 12h26. |
TGV retour (sauf dimanche et fêtes) : Lille-Europe 18h15, Roissy Aéroport 19h17, Marne-la-Vallée 19h33 Juvisy à 20h06, La Souterraine 22h39, Limoges 23h09 et Brive 0h12. |
TGV retour (dimanche et fêtes) : Lille-Europe 17h40, Roissy Aéroport 18h35, Marne-la-Vallée TGV18h53 et Juvisy 19h24, La Souterraine 22h01, à Limoges 22h34, Brive 23h33. |
Le TGV Brive–Lille ouvre le Centre de la France au réseau européen. Cette liaison TGV quotidienne met Brive-la-Gaillarde à 5h57 de Lille et Limoges, à moins de 4h de l’aéroport Charles-de-Gaulle et du hub TGV de Roissy. Testé sur trois ans depuis fin 2007, le TGV Brive-Lille est financé par la SNCF et les Régions Limousin et Centre.
Le Conseil Régional Limousin et la SNCF ont organisé le 30 janvier 2009, en gare de Limoges Bénédictins, une grande journée autour de ce TGV pour fêter les 150 000 premiers voyageurs de cette ligne.
130 000 voyageurs ont emprunté le TGV entre les mois de juillet 2008 et 2009.
Je ne dispose pas les chiffres de l’évolution en 2010.
Le taux de remplissage du TGV Brive Lille à la gare de La Souterraine est de 27% soit plus de 35 000 voyageurs.
Automne 2010, l’heure du bilan
L’intérêt du TGV Brive Lille était de montrer le caractère de liaison national et européen dans l’axe Nord Sud de la France de la ligne POLT, (Paris Orléans Limoges Toulouse) qui trouve toute sa pertinence aux côtés des deux axes Est et Ouest aujourd’hui saturés. Il démontre d’intérêt des grandes lignes d’irriguer tout le territoire avec un arrêt à la gare de La Souterraine pour drainer le département de la Creuse. Il permet d’éviter les ruptures de charge, c a d, les changements de trains afin pouvoir profiter des lignes dédiées grande vitesse à partir de nos territoires
La gestion du rail : du rêve à la réalité !
En France, la marge opérationnelle du TGV n’a été que de 6,7 % au premier semestre 2010, au lieu des 19 % attendus. "Il nous faudra poursuivre notre politique de maîtrise des coûts et des investissements pour rétablir un niveau de marge opérationnelle de 10 à 12 %", niveau en dessous duquel la Société nationale des chemins de fer ne sait pas financer ses activités et ses investissements, a indiqué le directeur financier de la SNCF, David Azéma, lors d’un séminaire de presse.
La direction de la SNCF a décidé de supprimer des lignes TGV faute de passagers. Le taux de remplissage ne correspondait pas aux objectifs de la compagnie.
"On s’était fixé un seuil d’environ 100 personnes par train, soit un taux de remplissage déjà faible d’environ 30%. Et on a actuellement 55 personnes sur Cherbourg-Dijon et 70 personnes sur Le Havre-Strasbourg", a précisé la SNCF.
« On bascule du rêvé au possible et c’est une période délicate » affirme Guillaume Pepy président de la SNCF en mai 2010 lors d’un passage en Franche Comté réf
Pour la SNCF, 1 TGV sur 5 perdrait aujourd’hui de l’argent.
Le TGV Brive Lille est d’une capacité de 345 places, composé de huit voitures (dont une voiture bar). Le taux de remplissage moyen de ce TGV est donc de 51% et semble donc largement au-dessus du seuil critique de gestion défini par la SNCF de 100 voyageurs par train.
Un simple calcul montre que les Régions finançaient déjà le billet à hauteur de 15 € par voyageur. Ce financement devrait passer à plus de 52 € / voyageur. Un péage hors de prix payé par les Collectivités Territoriales afin que nos territoires puissent profiter des infrastructures dédiées Grande Vitesse.
Cette situation conflictuelle entre les Régions, l’Etat et la SNCF soulève quelques questions :
- Pourquoi le financement d’une ligne ferroviaire à caractère national doit il être pris en charge par des Régions ?
- Pourquoi sur l’ensemble des Régions desservies par cette ligne, dont l’Ile de France, seules 2 Régions seulement devraient la financer ?
- Pourquoi un tel péage exorbitant pour que les voyageurs ou Collectivités Territoriales puissent rouler sur les LGV à partir de trains desservant leurs territoires ?
Le despotisme ruineux de la grande vitesse
On apprend dans une dépêche AFP du 27 09 2010 « Les pertes de ces "trains d’aménagement du territoire" (TAT), récemment rebaptisés "trains d’équilibre du territoire" (TET), sont évaluées à environ 200 millions d’euros par an. Parmi eux, seuls quatre sont rentables, selon la SNCF : Paris-Clermont, Paris-Limoges-Toulouse, Paris-Rouen-Le Havre et Paris-Caen-Cherbourg. »
La ligne POLT Paris Orléans Limoges Toulouse est considérée par les pouvoirs publics et la SNCF comme une ligne d’aménagement et d’équilibre du territoire rentable.
Or les TAT, Trains d’Aménagement du Territoire ne peuvent pas aujourd’hui circuler sur les LGV, lignes dédiées TGV. Le SNIT 2010 prévoit de construire 3800 km de LGV. Dans nos régions, Il faudra systématiquement changer de trains pour profiter des possibilités de rapidité des LGV.
Rapporter à l’automobile, ce serait comme être obligé de changer de voitures pour passer des routes départementales, nationales, aux autoroutes.
Afin de pouvoir faire rouler leurs habitants sur les infrastructures LGV, les Régions auront 3 possibilités :
- Subventionner les rames TGV circulant sur les lignes existantes (3, 5 millions €/an/ligne)
- Financer les projets LGV à hauteur de plusieurs milliards €. Rien ne garantit à l’avenir que les Régions n’aient pas à participer au financement des TGV roulant sur ces LGV.
- Soit prendre le risque d’une rupture de charge (changement de train) dans l’espoir d’une gestion optimale des correspondances.
Dans la situation d’endettement et de baisse des finances publiques de l’Etat et des Collectivités Territoriales, ce chantage politique n’est pas jouable !
Paradoxe supplémentaire, ce ne sont pas les usagers qui paient l’avantage d’un train libre de pouvoir circuler directement tout autant dans nos territoires que sur les LGV, jusqu’en certaines Régions, celles justement qui n’auraient pas de dessertes LGV.
Toutes les autres Régions de France n’auraient elles aucun avantage à pouvoir se rendre directement dans nos territoires du centre de la France ?
Pourquoi les contribuables des Régions Centre et Limousin auraient ils à payer 52 € par voyageurs de toute la France pour le seul bien de n’avoir pas à changer de train entre Brive et Lille ?
Le temps de la réflexion n’est pas une perte de temps :
Une réflexion qui avait été lancée par Guillaume Pepy SNCF, et Véronique Wallon RFF sur la pertinence d’une limitation de la vitesse maximale des trains à 220 km/h. réf
« si on réalise un maillage fin du territoire en lignes à grande vitesse, en favorisant les transversales et en assurant la qualité des correspondances et la régularité des horaires, une performance de 220 km/h semble suffisant. Et cela permettrait de mieux maîtriser les consommations d’énergie et les nuisances sonores. » Véronique Wallon directrice stratégie RFF ref
Cette limitation de vitesse à 220 km/h améliorerait la cohérence globale du transport ferroviaire, en particulier en permettant aux TAT (Train d’Aménagement du Territoire) de drainer directement les lignes consacrées aux déplacements entre les grandes métropoles européennes.
Il permettrait à des trains économiques de profiter de toutes les potentialités de la globalité du réseau ferré européen dont ils sont aujourd’hui de plus en plus exclus.
L’accessibilité ferroviaire de tous les territoires de la France est un bienfait pour tous les français. La charge financière de ce bienfait pour tous ne peut être supportée par les seuls territoires qui auraient à améliorer leur desserte.
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