Le capitalisme est-il moral ? La réponse est simple : ce n’est pas son rôle. Le combat politique des classes salariées relayées par leurs représentants politiques ne cesse de désirer une convergence entre morale et rentabilité dans l’économie. Etat des potentialités.
Les bases d’un système capitaliste efficient
La définition originelle du capitalisme demeure la combinaison de critères primordiaux : la liberté d’entreprise, la propriété privée des outils de production, la rémunération du risque pris par l’entrepreneur. A cette base, le monde contemporain offre de nouveaux facteurs d’amélioration des bénéfices des firmes. Les éléments nouveaux de la restructuration du capitalisme moderne sont la mondialisation des échanges, l’imbrication des économies et le rôle grandissant des multinationales devenant des transnationales sans lien avec leur origine géographique.
Capitalisme mondialisé et délocalisations
Dans une économie fermée, l’entreprise escompte ses hausses de compétitivité par les gains de productivité qu’elle parvient à tirer de son capital travail. Ainsi, l’entreprise se doit de rémunérer de moins en moins ses employés en proportion de l’effort produit afin d’augmenter dans le temps son taux de marge.
La tension croissante vers une productivité accrue trouve un appel d’air dans la mondialisation. Depuis une vingtaine d’années, la mondialisation libérale semble détruire les compromis sociaux dans les pays développés. En effet le capitaliste moderne des multinationales tire ses profits des inégalités mondiales. Cette pratique prend forme sur ce que nous appellerons le “capitalisme sur les inégalités”, source de délocalisations.
Le capitalisme moderne possède donc un moteur incomparable de gains de productivité et de croissance de ses bénéfices : “la nouvelle destruction créatrice”. Bien sûr il ne s’agit pas de la « destruction créatrice » de Schumpeter, qui détruit par grappes d’innovations les méthodes révolues. Ce moteur-là s’appuie aujourd’hui sur les délocalisations, fusions-acquisitions, rachats d’actions, plans sociaux, et tire profit des inégalités salariales mondiales et du rattrapage infrastructurel et éducationnel endogènes des pays émergents... Tout cela, en faveur des propriétaires des capacités de production qui sont également les preneurs de risque : les actionnaires de toutes sortes (fonds d’investissements, institutions financières, particuliers). Les perdants sont sans nul doute les employés dans le monde dont la combinaison création de valeur/rémunération est la moins performante, c’est-à-dire les salariés et ouvriers des pays développés (Europe de l’ouest, Etats-Unis).
Capitalisme et moralité : l’inadéquation
L’entreprise moderne n’a jamais été autant « shareholders focused », ou orientée au profit de son actionnariat. Le capitalisme mondialisé tire son efficience de sa fluidité, de sa mobilité et de sa réactivité. Dans le contexte extraordinaire où le capitalisme n’a jamais été aussi florissant et créateur de richesses. Nous devons nous résoudre et prendre pour un mal nécessaire qu’il n’a jamais été autant financier, actionnarial, rentier, prédateur et amoral. C’est la base du succès de nos grandes entreprises.
Cependant, on comprend aisément les difficultés du modèle social français face à ce phénomène. Les dirigeants politiques de gauche comme de droite posent la question de la moralité du capitalisme dans nos frontières. L’ambivalence de cette réflexion tient du fait que les citoyens d’un pays développé sont à la fois employés ou entrepreneurs mais également actionnaires.
L’unique marge politique consisterait donc à promouvoir la création de richesse par le travail fourni (diminution des charges et prélèvements sociaux et augmentation de la taxation du capital). Cette position idéologique entraînera une chute des investissements dans le pays concerné, réduira le dynamisme entrepreneurial et provoquera une vague déferlante de délocalisations.
Une position politique inverse se verrait opposée par la culture sociétale des pays comme la France, elle serait désignée comme « ultralibérale et néoconservatrice ». Elle aurait cependant pour effet direct d’accroître les investissements primaires dans notre économie, source première de croissance économique et augmenterait notre dynamisme économique, en maintenant nos emplois les plus créateurs de richesses.
L’épuration capitalistique mondiale n’en est qu’à ses balbutiements, au grand bénéfice des investisseurs en capital.
Cet article a été écrit par Manuel Gangloff et est tiré de délocalisation, blog spécialisé traitant d’économie mondialisée et de délocalisation.