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Les relations entre PME et grands groupes : gare aux pièges !

Développer son entreprise à l’aide d’un grand groupe ? Les chefs d’entreprises sont de plus en plus nombreux à se tourner vers des géants, soit par le biais d’un rapprochement capitalistique, soit par l’intermédiaire de contrats de sous-traitance très contraignants. Mais les risques que cette démarche fait peser sur la gouvernance de l’entreprise sont loin d’être anodins.

L’union fait la force. C’est en vertu de cet adage que de nombreuses petites entreprises choisissent de se tourner vers des homologues de plus grande taille pour faire face aux difficultés. Dans un contexte de raréfaction du crédit notamment, de plus en plus de PME sollicitent l’aide de grands groupes moyennant une entrée au capital de la société. C’est très souvent le cas lorsque les PME sont liées aux grands groupes par une relation de sous-traitance, ou lorsque certains actifs immatériels de la PME permettent à l’acquéreur de bénéficier de transferts de technologie substantiels. Certes, les chefs d’entreprise trouvent ainsi le moyen de palier leurs problèmes de trésorerie, mais cela n’est pas toujours sans conséquence sur leur autonomie décisionnelle, ni sur les perspectives de développement de l’entreprise. La question qui prévaut est donc la suivante : à qui cela profite-t-il le plus ?

La relation de sous-traitance : un ilot de sérénité ?

Pour les PME, s’engager dans une relation de sous-traitance peut être un moyen classique de bénéficier du crédit d’une grosse entreprise auprès des investisseurs tout en escomptant un taux de remplissage optimal du carnet de commandes. Une telle relation renforce le capital de confiance de la PME, mais à quel prix ? Interviewé en février 2011, Jean-Claude Volot, alors médiateur national des relations interentreprises, dénonçait le climat de peur que les grandes entreprises faisaient régner auprès de leurs sous-traitants. « [L’]omerta paralyse le partage normal de la marge brute entre fournisseurs et grands donneurs d’ordres » résume ainsi le quotidien Les Échos. « En détournant à leur profit cette marge, ces derniers organisent “un véritable ponctionnement” de la filière et privent des milliers de petites entreprises françaises des moyens nécessaires pour se développer et exporter ».

D’autres petites entreprises ouvrent volontiers leur capital aux investissements des donneurs d’ordres. Ce faisant, on favorise les effets de filière et la création d’un écosystème d’entreprises spécialisées. Mais une fois de plus, l’opération n’est pas sans risque, car accepter un nouvel investisseur n’a rien d’un geste anodin. Les Etats-Généraux de l’industrie ont, depuis 2009, eu maintes fois l’occasion de souligner la nécessité pour les donneurs d’ordres de s’engager auprès des PME pour s’assurer que leur participation servirait un intérêt juste réciproque. Parmi les raisons déterminantes des « relations donneurs d’ordres/sous-traitants perdant/perdant », les Etats-Généraux pointent en effet du doigt « un management des donneurs d’ordres souvent sans scrupules et suicidaire à terme pour l’industrie française, guidés par les objectifs de court terme ». En ouvrant leurs finances aux grandes entreprises, pour les PME l’enjeu est donc de savoir faire la part des choses entre l’opportunité de recapitaliser et le risque de devenir une simple source de bénéfice aux mains d’investisseurs extérieurs à l’entreprise.

Avec l’amenuisement des sources de crédit, il devient tentant, voire tout bonnement nécessaire pour les PME, de se rapprocher de leurs gros clients pour négocier avec eux des facilités qui leur permettront de financer leur production. Il semble que cela soit aujourd’hui un recours incontournable pour nombre de petites PME qui voient dans ce type de rapprochement l’accès à un ilot de sérénité dans un environnement marqué par une forte incertitude. Pour autant, cette stratégie soulève quelques questions. À en juger par certaines expériences, il semblerait que cela fragilise globalement plus les PME que cela ne les renforce à long terme. Mais ont-elles vraiment le choix ?

Le client unique, vecteur de fragilisation

Pour une société au carnet de commandes déjà fourni et diversifié, le rapprochement réussi avec une grande entreprise ne signifie rien d’autre qu’un contrat de plus et un tremplin de sa croissance. Pour des sociétés dont la diversité du portefeuille de clients est moindre cependant, ce type de relation peut très vite devenir problématique pour le développement de l’entreprise. Dans les années 1990, « Saint Marcel Ferroviaire (entretien de wagons) n’a pas résisté à la chute des commandes de son unique client, la SNCF » explique Le Nouvel Economiste. « Le TGV remplaçant les trains Corail, la société, reprise par ses cadres en 1988, a vu son chiffre d’affaires tomber de plus de 50 %  ». Deux lignes suffisent à résumer le drame de la monoclientèle et, par extension, celui des PME liées par un contrat de sous-traitance qui leur impose de déployer beaucoup de ressources en direction d’un seul client. Ce faisant, les petites entreprises sacrifient bien souvent leur capacité à rebondir et à faire face à l’imprévu, soit tout l’inverse de l’effet recherché au moment du rapprochement avec la grande entreprise. Avec, parfois, des effets dévastateurs sur la marge de manœuvre qui reste au dirigeant, notamment en termes d’orientations stratégiques : « L’entreprise mono-client a montré ses limites. La diversification vers le camion était trop coûteuse. SMF devra rester dans le ferroviaire avec une diversification possible vers les rames de métro. »

Ouvrir son capital à un grand groupe : un choix parfois coûteux

Ce choix, Jean-Michel Germa, fondateur de la Compagnie du Vent, ne l’a pas vraiment eu. « On est devenu un des leaders français jusqu’au moment où, en 2005, il a fallu recapitaliser, car j’avais des projets qui nécessitaient énormément de capitaux », explique-t-il. Pour poursuivre le développement de son entreprise, le leader de l’éolien français s’est donc tourné vers GDF Suez, à qui il a offert d’entrer au capital à hauteur de 56%. Une décision que Jean-Michel Germa, dont la holding Soper est désormais minoritaire, regrette rapidement : « au lieu d’aider ma compagnie à se développer comme prévu par le pacte d’actionnaire, GDF Suez nous a empêchés de travailler ou enterré des pans entiers de notre savoir-faire », GDF Suez allant même jusqu’à interdire à la Compagnie du Vent de candidater à des appels d’offres cruciaux pour la filière éolienne pour des raisons de rentabilité, ou au profit d’autres filiales du groupe. Pour Le Figaro, qui relate la mésaventure de Jean-Michel Germa, « c'est l'essentiel des actifs, son « fonds de commerce » qui ont été « siphonnés » de sa société. Et ce, affirment ses avocats, en violation du pacte d'actionnaire conclu entre GDF Suez et sa filiale. » Quand il passe par le rachat, le partenariat avec une grande entreprise soumet donc la PME à un dessein parfois très éloigné de ses intérêts.

La coopération étroite avec une grande entreprise a tôt fait de se transformer en chemin de perdition pour les PME. Mais compte tenu de leurs difficultés dans le contexte récessif actuel, tenter leur chance aux côtés d’un acteur industriel de poids continue d’être une option que la plupart d’entre elles s’estiment capables de maîtriser. À tort parfois, on l’a vu ; avant de s’y aventurer, mieux vaut être certain d’avoir envisagé toutes les éventualités, en prenant soin de remiser l’angélisme au placard. Car en matière de business, rien ne supplante l’impératif de rentabilité, pas même une certaine idée de la responsabilité humaine.


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2 réactions à cet article    


  • gegemalaga 6 juin 2013 10:22

    mais enfin ???

    pourquoi ce negativisme ?
    c’est quoi , l’exemple de La Cie du Vent ? : 56% c’est une prise de majorité !

    si vous aviez un petit peu d’experience terrain , vous sauriez que les partenariats d’entreprises sont des vecteurs de developpements efficaces ;
    vous sauriez aussi que , rarement , les grands groupes ne veulent aller au delà de participations minoritaires , ni de part de productions trop grosses ;

    mais dejà , dès le début , vous posez la question : 

    « à qui celà profite t il le plus » ....celà situe votre article et votre mentalité !

    on s’en fout de à qui celà profite le plus : DU MOMENT QUE CELA PROFITE A LA PME !!


    • ecolittoral ecolittoral 6 juin 2013 15:26

      Cet article aurait pu être écrit dans les années 80 ! Eliminer ou absorber une PME a été le sport favori des grands groupes, pour lutter contre la concurrence ou récupérer les marchés. Je ne vois vraiment pas ce qu’il y a de nouveau !

      C’est aussi, l’intérêt d’une OPA, d’une prise d’actions pour devenir majoritaire, de l’externalisation des coûts...et les risques.
      De plus, les PME ont tendance à travailler dans leur coin et ne s’intéressent pas au voisin...qui quelques fois exerce une activité complémentaire !!!
      C’est le chacun pour soi à tous les niveaux.
      Le jour ou il y aura des relations PME/PME, la donne changera...mais ce n’est pas pour demain.

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