Monnaie, crédit et épargne
Nous utilisons deux types de monnaie au quotidien, la monnaie fiduciaire et la monnaie scripturale, celle qui apparaît sur vos comptes bancaires. Un film d'animation de Paul Grignon a mis sous les projecteurs le fait que les banques commerciales créent de la monnaie à chaque crédit, fait qui n'est connu que de ceux qui ont fait un peu d'économie dans leur cursus scolaire. La thèse exposée est simple et nous voyons paraître sur internet que l'argent c'est de la dette créée par le crédit et qu'il y aurait un manque d'argent pour rembourser et le principal et les intérêts car il n'existerait que l'argent du principal et pas celui des intérêts. Pour simplifier les choses je ne vais considérer que la monnaie sous forme scripturale.
Cas de la circulation optimale de la monnaie
Dans cet exemple à t=0, la masse monétaire est nulle. Une personne ayant un projet obtient un crédit de sa banque, pour un montant de 100 unités de monnaie. La masse monétaire est donc passée à 100 unités. Cette quantité de monnaie sera détruite lors du remboursement du principal en plusieurs fois.
L'emprunteur dépense cet argent en totalité pour son projet, il circule dans l'économie 100 unités de monnaie. L'emprunteur gagne une partie de cet argent par son travail à chaque période. Les remboursements, les intérêts payés, la destruction de monnaie sont répertoriés dans le tableau suivant.
Nous voyons à t=1 que le remboursement est de 12,5 unités monétaires qui se décomposent en 6 unités qui sont des intérêts et 6,5 unités qui sont effacées des comptes. Les intérêts sont récupérés par la banque qui les distribue de différentes manières : paiements des salaires de ses employés, factures etc... Les intérêts sont donc remis en circulation ce qui fait qu'à t=2 la masse monétaire est de 93,5 unités, le principal à rembourser est d'autant.
Vous pouvez constater que les intérêts à payer diminuent de période en période jusqu'à devenir nuls et qu'inversement la quantité de monnaie à détruire augmente.
Arrive la période numéro 10. La masse monétaire n'est plus que de 8,5 unités, le principal de 8,5, la mensualité de 8,5 également, ainsi que la monnaie devant être détruite. N'oublions pas que nous nous sommes placés dans le cas d'une circulation optimale de la monnaie, l'emprunteur réussit à gagner par son travail ces 8,5 unités, il pourra payer sa dernière traite et éteindre son crédit. À t=11 le principal a été remboursé complètement et la masse monétaire est redevenue nulle, il n'y a plus d'argent en circulation.
Nous constatons, qu'avec une masse monétaire de 100 unités, l'emprunteur a payé au total 121 unités. Présenter le problème P<P+I (P pour principal, I pour intérêts) comme l'argument ultime montrant que l'on ne peut pas payer P+I avec seulement P, puisque les intérêts ne sont pas créés, tombe à l'eau. Les intérêts se trouvent dans la masse monétaire. Il ne faut pas confondre flux et stock. D'ailleurs, répondre à ce problème en disant qu'il faut supprimer les intérêts et les remplacer par des frais bancaires ne change pas du tout le problème, puisqu'à ce moment-là nous nous retrouvons avec l'équation P<P+F. Est-ce que ces frais bancaires seront suffisants pour maintenir un réseau bancaire dense sur tout le territoire ?
Cas plus réaliste, l'apparition des fuites et de l'épargne/thésaurisation
Regardons maintenant ce qu'il arrive lorsque des fuites de monnaie apparaissent ou lorsque quelqu'un thésaurise ou épargne. Dans ce cas la quantité de monnaie disponible au remboursement du crédit diminue comme nous pouvons le voir dans le tableau ci-dessous.
Deux nouvelles colonnes sont apparues épargne/fuite et disponible (la quantité de monnaie disponible pour le remboursement). Le reste est inchangé.
Observons la période t=10. La masse monétaire est de 8,5 unités, le principal d'autant, la monnaie à détruire de même montant. Cependant la monnaie disponible n'est que de 3,5 unités puisque 5 unités ont fuit le circuit économique : balance commerciale déficitaire, épargne non-placée.
L'emprunteur sera bien embêté pour payer la dernière mensualité.
Quelles solutions pour notre emprunteur ?
1°) négocier avec son banquier pour rééchelonner sa dette, payer 3,5 unités pour la période 10
2°) forcer l'épargnant à dépenser les 5 unités manquantes (peu probable)
3°) s'endetter de 5 unités auprès de l'épargnant qui réclamera des intérêts
4°) ou faire faillite
Voici le tableau actualisé :
À t=11 l'emprunteur s'endette de 5 unités envers l'épargnant, il rembourse le principal de 5, ces 5 unités sont détruites, le crédit est remboursé en totalité.
À t=12 il n’y a plus de monnaie mais une dette de 5 unités envers l'épargnant, et l'épargnant possède une créance de 5 unités sur l'emprunteur.
Conclusion
L'emprunteur ne peut rembourser l'épargnant que si lui, ou quelqu'un d'autre, contracte à nouveau un crédit.
L'emprunteur est à la merci de l'épargnant.
L'épargnant en stockant la monnaie a posé la première brique d'un gigantesque système pyramidal puisqu’il pourra continuer à aspirer la monnaie, sans la dépenser, si quelqu'un contracte un crédit ; il y aura de plus en plus de difficultés à rembourser un crédit et une dette envers les épargnants toujours plus grande.
C'est l'épargne (et les fuites) qui crée le besoin de croissance de l'économie et non pas les intérêts, puisqu’il faudra obtenir un nouveau crédit et produire plus pour rembourser.
Il faut empêcher l'épargne si nous ne pouvons/voulons plus croître, une monnaie fondante serait idéale pour atteindre ce but et se retrouver dans le cas de la circulation optimale de la monnaie. Et instaurer un revenu de base financé par la fonte de la monnaie serait un plus pour faciliter les remboursements de crédits et bien d'autres choses de la vie.
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