Quelle crédibilité, pour notre plan de résorption de la dette et des déficits ?
Dans un message du 13 janvier, je vous avais exprimé mon incrédulité sur le plan de résorption de la dette présenté par le Premier ministre et le ministre des Finances à la suite du rapport Pebereau. J’avoue ne pas avoir réussi à comprendre comment, en continuant tous les ans à dégager des déficits, et donc à augmenter notre dette globale, on peut diminuer le pourcentage de cette dette par rapport au produit intérieur brut de la France ?
Voici les chiffres sur lesquels j’ai fait mes propres estimations. Nous partons d’une dette de 1100 milliards à fin 2005 pour un PIB de 1670 milliards, soit donc une dette de 65,8 pct du PIB en 2005.
A 2,5 pct par an de croissance du PIB, nous devrions avoir respectivement un PIB de 1711 milliards en 2006, 1754 en 2007 et 1798 en 2008. Les déficits, en suivant les pourcentages du ministère, devraient être de 48 milliards en 2006, 45 en 2007 et 34 en 2008, ce qui devrait nous amener à une dette de 1100 + 48 + 45 + 34 = 1227, soit 68% de dette par rapport au PIB en 2008. Comment nos ministres font-ils pour en arriver à 64,6 pct, je l’ignore, mais j’ai des doutes sur leur mathématique financière. Curieusement, tous les journalistes, y compris ceux des journaux financiers, croient les yeux fermés les chiffres du ministre. Je dois faire de la suspicion systématique.
Apparemment, le commissaire européen aux affaires économiques, Joaquim Almédia, ne croit pas beaucoup aux hypothèses de notre ministre des Finances, puisqu’il a exprimé officiellement son manque de conviction sur la crédibilité du budget de la France en 2006, qu’il juge réalisé avec quelques recettes exceptionnelles de circonstance (la captation de recettes des ventes de sociétés d’autoroutes, le paiement de la soulte retraite de la RATP, etc.) peu orthodoxes, et a donc demandé à notre ministre de prendre quelques mesures structurelles supplémentaires pour ramener ce déficit de manière certaine à 3%.
Une autre incrédulité face au plan gouvernemental de réduction des dépenses a été exprimée dans la presse par l’ancien PDG de Peugeot et ancien haut-fonctionnaire au budget, Jacques Calvet. Son argumentaire est basé sur la structure du budget 2006 (266 milliards d’euros de dépenses dont 48,7 de déficit) qui se décompose en 83 milliards de dépenses sociales, 80 de dépenses d’enseignement et de recherche, 42 pour les services régaliens de l’Etat (justice, police,défense, etc.) et 40 de "service" de la dette. Budget dans lequel 45% des dépenses sont des dépenses de personnels, dont la tendance est par essence haussière de manière permanente, entre le remplacement des départs en retraite à l’identique, les augmentations générales et celles, automatiques, liées à l’ancienneté ou à la reconnaissance de l’amélioration de la technicité .
Il est tout a fait incrédule sur les possibilités de diminution de ces différents postes de dépenses individuels, et parle de langue de bois de nos hommes politiques
quand il entend parler de la relative facilité de diminuer les dépenses de l’Etat. Curieusement, c’est Monsieur Pebereau lui-même qui a semblé dire qu’il serait assez facile de revenir sur 5 ans à un budget en équilibre dépenses/recettes, assertion à mon avis un peu osée, mais aussitôt reprise par le gouvernement. Pour être franc, moi aussi ! Comment peut-on en effet penser réduire son train de vie de 25% (!) sans de très gros et douloureux efforts ?
Il me paraîtrait donc important que le gouvernement nous explique de manière un peu plus approfondie comment il compte atteindre ses objectifs, s’il veut avoir une crédibilité que les Français ne lui reconnaissent pas spontanément (non plus qu’à n’importe quel gouvernement, d’ailleurs, depuis trente ans !)
Sans compter que nous ne parlons que de retour à zéro du déficit annuel du budget, et non pas de commencement de réduction de la dette, qui, elle, sera toujours en 2008 aux alentours de 1230 milliards d’euros. Or, pour réduire cette dette, il faut déjà dégager des excédents budgétaires,
donc accentuer l’effort de rigueur budgétaire au-delà de 2008 pour dégager, allez, 20 milliards par an d’excédent. A ce rythme-là, très irréaliste, il nous faudrait quand même 25 ans de rigueur pour rembourser la fameuse dette.
On nous raconte donc bien des histoires, et le problème de la dette de la France n’en est même pas à un début de commencement de règlement...
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